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Marie madeleine
Portrait
Une initiée ?
Une des idées les plus communes de la gnose consiste à dire que l’annonce des Évangiles telle qu’elle figure dans les écritures canoniques, n’est qu’une adaptation grossière de la vérité destinée au peuple. Par derrière se cache un enseignement secret, plus sophistiqué et plus véridique, réservé à l’usage des initiés, ceux-là seuls qui ont accès à la connaissance des mystères sacrés.
Un tel intérêt de la gnose pour Marie-Madeleine s’explique de la façon suivante : Le principe de la gnose est de doubler la doctrine officielle de l’Eglise par une doctrine ésotérique, cette dernière étant supposée provenir du Christ lui-même et avoir été transmise d’initié à initié. Qui donc est mieux placé que Marie-Madeleine, qui « s’étant assise au pied du Seigneur, écoutait sa parole » (Lc 10, 39), pour avoir bénéficié de révélations particulières pour être le vecteur privilégié de ces doctrines occultes ?
Le texte ci-dessous redéfinit la gnose, puis évoque la « Pistis Sophia », le Saint Graal, la sexualité dans la gnose… Si Marie-Madeleine fut une grande initiée, de par les contacts privilégiés qu’elle eut avec le Christ, rien ne permet de croire que ce fut à une autre doctrine que celle des apôtres et encore moins à un enseignement valorisant la transgression des normes communes. S’il y a un secret de Marie, il se trouve tout entier dans les Écritures !
Devant le tombeau vide de Jésus, Marie-Madeleine reçoit la première la plus haute connaissance jamais transmise. Jésus est vraiment ressuscité. Il a vaincu la haine et la mort. Il est vivant pour toujours. Mort pour les péchés, il est ressuscité pour donner la Vie éternelle en abondance. Voilà le secret que Marie-Madeleine annonce haut et fort.
a) Rappel de l’origine de la gnose :Selon la légende, ce serait Simon le magicien présenté dans les Actes des Apôtres (Ac 8, 9) qui serait à l’origine du mouvement gnostique. Mais plus probablement, il s’agirait de Basilide d’Alexandrie vers 130. L’apparition de la gnose donne naissance à la première grande crise doctrinale. Cette crise fut l’occasion de la première affirmation d’une orthodoxie désignée du terme « la Grande Eglise ». Le principal avocat de celle-ci fut saint Irénée de Lyon (vers 180), instruit par saint Polycarpe, lui-même disciple de l’apôtre Jean.
La gnose se préoccupe du salut de l’homme et du monde. Elle place la figure de Jésus-Christ en son centre. Mais elle s’en distingue d’abord par la place qu’elle fait à la connaissance (« gnosis » en grec). L’homme se sauve en étant instruit des secrets de l’univers et non par sa conduite ou par l’amour. Une des idées les plus communes de la gnose consiste à dire que l’annonce des Évangiles telle qu’elle figure dans les écritures canoniques, n’est qu’une adaptation grossière de la vérité destinée au peuple. Par derrière se cache un enseignement secret, plus sophistiqué et plus véridique, réservé à l’usage des initiés (qui se qualifient eux-mêmes de « vrais » chrétiens), ceux-là seuls qui ont accès à la connaissance des mystères sacrés. De la valorisation de la connaissance résulte également l’image d’un Christ qui est d’abord un enseignant, un révélateur des mystères sacrés, à la fois grand initié et initiateur.
L’autre grand trait de la gnose est le dualisme, repris au 3ème siècle par Mani, fondateur de la doctrine « manichéenne ». Valorisant la science et donc l’esprit, la gnose dévalorise la matière. Pour eux, il y aurait non pas un, mais deux dieux en lutte perpétuelle, le Dieu bon, créateur de l’esprit, et le Dieu mauvais, le démiurge, créateur de la matière. Les hommes seraient des purs esprits aujourd’hui prisonniers de la matière, mais dont la destinée, au terme de l’initiation, est d’être intégrés un jour dans le monde purement spirituel. La tentation gnostique constitue une constante de l’histoire du christianisme. Le mouvement cathare, aux 12 et 13ème siècles, est fondé sur l’opposition perpétuelle du Dieu bon, créateur de l’esprit et du principe masculin, du Dieu mauvais, créateur de la matière et du principe féminin. Il dévalorise le corps et l’amour conjugal. Une littérature gnostique à base de secrets initiatiques, d’orientalisme et d’occultisme continue de prospérer. Certaines loges maçonniques ou associations théosophiques s’en nourrissent.
b) La position de l’orthodoxie : S’opposant à la gnose qu’il tient pour une hérésie, l’enseignement de l’Eglise (catholique, orthodoxe ou protestante) refuse que le message chrétien soit réservé à des initiés. L’Eglise n’a pas de secret. La connaissance des mystères n’est pas une affaire d’intellect mais de cœur ; la véritable hiérarchie n’est pas celle de la connaissance mais celle de l’amour et de la sainteté. Cela ne valorise pas l’ignorance : bien au contraire, pour le christianisme, la pauvreté (simplicité) du cœur donne seule l’ouverture requise pour mieux pénétrer les mystères, et c’est l’orgueil qui rend aveugle.
c) Marie-Madeleine et les gnostiques : Elle fut une référence des gnostiques. Selon l’évangile de Marie, Marie-Madeleine aurait eu des révélations spéciales au cours de ses entretiens avec Jésus-Christ. « Pierre dit à Marie : ‘Sœur, nous avons que le maître t’a aimée différemment des autres femmes. Dis-nous les paroles qu’il t’a dites dont tu te souviens et dont nous n’avons pas la connaissance’… Marie leur dit : ‘Ce qui ne vous a pas été donné d’entendre, je vais vous l’annoncer…’ » Les révélations apportées ensuite sont plutôt obscures comme par exemple « L’attachement à la matière crée une passion dans tout le corps ; c’est pourquoi je vous le dis ‘soyez en harmonie’ »…
d) La « Psitis Sophia » : Ce célèbre ouvrage gnostique du 3ème siècle met Marie-Madeleine au plus haut, ainsi qu’en témoignent les paroles suivantes prêtées au Christ : « Courage, Marie, tu es heureuse entre toutes les femmes, puisque c’est toi qui seras le Plérome de tous les Pléromes et la perfection de toutes les perfections… C’est pourquoi, là où je serai y seront aussi mes douze Dianes, mais Marie la Madeleine et Jean le vierge sont supérieurs à tous les disciples… » On reconnaît là la rhétorique emphatique propre aux textes gnostiques. Le mot « plérôme » utilisé dans cette série d’écrits, signifie la plénitude qui adviendra à la fin des Temps quand les âmes qui s’étaient égarées dans la matière retrouveraient leur sphère céleste d’origine. Toutefois la gnose fait souvent de la femme une créature du diable ; Marie-Madeleine ne s’en sort qu’en devenant « un homme ». Ainsi dans l’Evangile selon Thomas, « Jésus dit : ‘voici, moi, je l’attirerai pour que je la rende mâle afin qu’elle aussi devienne un esprit vraiment pareil à vous, mâles ! Car toute femme qui sera faite mâle entrera dans le royaume des cieux’ ». Une telle misogynie est typiquement gnostique, est sans équivalent dans l’orthodoxie.
e) Le Saint Graal : Marie-Madeleine fut aussi associée à la légende du Saint Graal, légende chevaleresque apparue aux 11 et 12ème siècle. Le Saint Graal évoque des évènements supposés datés du 5ème siècle. Autour du roi Arthur, des hommes d’élite se sont réunis en quête du Saint Graal, vase mystérieux supposé contenir le sang du Christ. Ceux qui le retrouveront seront sauvés et sauveront le monde. Comme Marie-Madeleine se trouve présente au pied de la Croix, elle devient partie prenante au mystère. Quoique le cycle d’Arthur et la gnose soient deux choses différentes, on y trouve des éléments communs qui font les délices des occultistes : l’élitisme, l’idée du secret (ou d’un objet caché), transmis d’âge en âge…
Un tel intérêt de la gnose pour Marie-Madeleine s’explique de la façon suivante : Le principe de la gnose est de doubler la doctrine officielle de l’Eglise par une doctrine ésotérique, cette dernière étant supposée provenir du Christ lui-même et avoir été transmise d’initié à initié. Qui donc est mieux placé que Marie-Madeleine, qui « s’étant assise au pied du Seigneur, écoutait sa parole » (Lc 10, 39), pour avoir bénéficié de révélations particulières pour être le vecteur privilégié de ces doctrines occultes ?
f) Gnose et sexualité : L’ambiguïté de Marie-Madeleine en matière de sexualité est une raison de l’intérêt particulier qu’elle focalise. La gnose considère que la matière n’est qu’apparence, elle n’est que peu destinée pour la sexualité. Elle propose aux âmes d’élite une abstinence totale. Mais on peut comprendre autrement cette doctrine : la sexualité n’ayant aucune importance, qu’importe le dévergondage. Cette ambiguïté de la gnose permet de comprendre l’usage qu’elle a pu faire du personnage de Marie-Madeleine. Au contraire de la gnose, la tradition chrétienne authentique valorise tellement la chair qu’elle en réglemente soigneusement l’usage.
Ainsi, si Marie-Madeleine fut une grande initiée, de par les contacts privilégiés qu’elle eut avec le Christ, rien ne permet de croire que ce fut à une autre doctrine que celle des apôtres et encore moins à un enseignement valorisant la transgression des normes communes. S’il y a un secret de Marie, il se trouve tout entier dans les Écritures !
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Par René Guénon.
APERÇUS SUR L’ÉSOTÉRISME ISLAMIQUE (ET LE TAOÏSME)
Influence de la civilisation islamique en Occident
<< La plupart des Européens n’ont pas évalué l’importance de l’apport qu’ils ont reçu de la civilisation islamique, ni compris la nature de leurs emprunts à cette civilisation dans le passé. Certains vont jusqu’à méconnaître totalement tout ce qui s’y rapporte.
Cela vient de ce que l’histoire telle qu’elle leur est enseignée travestit les faits, et a été volontairement altérée sur beaucoup de points. Cet enseignement affiche avec outrance le peu de considération que lui inspire la civilisation islamique. Il en rabaisse le mérite chaque fois que l’occasion s’en présente.
L’enseignement historique dans les Universités d’Europe ne montre pas l’influence dont il s’agit. Au contraire, les vérités qui devraient être dites à ce sujet, qu’il s’agisse de professer ou d’écrire, sont systématiquement écartées, surtout pour les événements les plus importants.
Par exemple, s’il est connu que l’Espagne est restée sous la loi islamique pendant plusieurs siècles, on ne dit jamais qu’il en fut de même d’autres pays, tels que la Sicile et la partie méridionale de la France actuelle. Certains veulent attribuer ce silence des historiens à quelques préjugés religieux.
Mais que dire des historiens actuels dont la plupart sont sans religion, sinon adversaires de toute religion, quand ils viennent confirmer ce que leurs devanciers ont dit de contraire à la vérité ?
Il faut voir là une conséquence de l’orgueil des Occidentaux, un travers qui les empêchent de reconnaître la vérité et l’importance de leurs dettes envers l’Orient.
Le plus étrange en cette occurrence c’est de voir les Européens se considérer comme les héritiers directs de la civilisation hellénistique, alors que la vérité des faits infirme cette prétention. La réalité tirée de l’histoire même établit péremptoirement que la science et la philosophie grecques ont été transmises aux Européens par des intermédiaires musulmans.
En d’autres termes, le patrimoine intellectuel des Hellènes n’est parvenu à l’Occident qu’après avoir été sérieusement étudié par le Proche-Orient, et n’étaient les savants de l’Islam et ses philosophes, les Européens seraient restés dans l’ignorance totale de ces connaissances pendant fort longtemps, si tant est qu’ils soient jamais parvenus à les connaître.
Il convient de faire remarquer que nous parlons ici de l’influence de la civilisation islamique et non spécialement arabe. Car la plupart de ceux qui ont exercé cette influence en Occident n’étaient pas de race arabe et si leur langue était l’arabe, c’était seulement une conséquence de leur adoption de la religion islamique.
Nous pouvons voir une preuve certaine de l’extension de cette même influence en Occident dans l’existence de termes d’origine et de racine arabes beaucoup plus nombreux qu’on ne le croit généralement, incorporés dans presque toutes les langues européennes et dont l’emploi s’est continué jusqu’à nous, encore que beaucoup parmi les Européens qui s’en servent ignorent totalement leur véritable origine. Comme les mots ne sont autre chose que le véhicule des idées et le moyen d’extériorisation de la pensée, on conçoit qu’il soit extrêmement facile de déduire de ces faits la transmission des idées et des conceptions islamiques elles-mêmes.
En fait, l’influence de la civilisation islamique s’est étendue d’une manière sensible à tous les domaines, science, arts, philosophie, etc. L’Espagne était alors un milieu très important à cet égard et le principal centre de diffusion de cette civilisation. Notre intention n’est pas de traiter en détail chacun des aspects ni de définir l’aire d’extension de la civilisation islamique, mais seulement d’indiquer certains faits que nous considérons comme particulièrement importants, bien que peu nombreux soient à notre époque ceux qui reconnaissent cette importance.
En ce qui concerne les sciences, nous pouvons faire une distinction entre les sciences naturelles et les sciences mathématiques. Pour les premières, nous savons avec certitude que certaines d’entre elles ont été transmises par la civilisation islamique à l’Europe qui les lui emprunta d’une façon complète. La chimie, par exemple, a toujours gardé son nom arabe, nom dont l’origine remonte d’ailleurs à l’Égypte ancienne, et cela bien que le sens premier et profond de cette science soit devenu tout à fait inconnu des modernes et comme perdu pour eux.
Pour prendre un autre exemple, celui de l’astronomie, les mots techniques qui y sont employés dans toutes les langues européennes sont encore pour la plupart d’origine arabe, et les noms de beaucoup des corps célestes n’ont pas cessé d’être les noms arabes employés tels quels par les astronomes de tous les pays. Ceci est dû au fait que les travaux des astronomes grecs de l’antiquité, tels que Ptolémée d’Alexandrie, avaient été connus par des traductions arabes en même temps que ceux de leurs continuateurs musulmans. Il serait d’ailleurs facile de montrer en général que la plupart des connaissances géographiques concernant les contrées les plus éloignées d’Asie ou d’Afrique ont été acquises pendant longtemps par des explorateurs arabes qui ont visité de très nombreuses régions et on pourrait citer beaucoup d’autres faits de ce genre.
Pour ce qui a trait aux inventions qui ne sont que des applications des sciences naturelles, elles ont également suivi la même voie de transmission, c’est-à-dire l’entremise musulmane, et l’histoire de l’« horloge à eau » offerte par le Khalife Haroun-el-Rachid à l’empereur Charlemagne, n’a pas encore disparu des mémoires.
En ce qui concerne les sciences mathématiques, il convient de leur accorder une attention particulière sous ce rapport. Dans ce vaste domaine, ce n’est pas seulement la science grecque qui a été transmise à l’Occident par l’intermédiaire de la civilisation islamique, mais aussi la science hindoue. Les Grecs avaient aussi développé la géométrie, et même la science des nombres, pour eux, était toujours rattachée à la considération de figures géométriques correspondantes. Cette prédominance donnée à la géométrie apparaît clairement, par exemple dans Platon. Il existe cependant une autre partie des mathématiques appartenant à la science des nombres qui n’est pas connue, comme les autres sous une dénomination grecque dans les langues européennes, pour la raison que les anciens grecs l’ont ignorés. Cette science est l’algèbre, dont la source première a été l’Inde et dont l’appellation arabe montre assez comment elle a été transmise à l’Occident.
Un autre fait qu’il est bon de signaler ici malgré sa moindre importance, vient encore corroborer ce que nous avons dit, c’est que les chiffres employés par les Européens sont partout connus comme des chiffres arabes, quoique leur origine première soit en réalité hindoue, car les signes de numération employés originairement par les Arabes n’étaient autres que les lettres de l’alphabet elles-mêmes.
Si maintenant nous quittons l’examen des sciences pour celui des arts, nous remarquons que, en ce qui concerne la littérature et la poésie, bien des idées provenant des écrivains et des poètes musulmans, ont été utilisées dans la littérature européenne et que même certains écrivains occidentaux sont allés jusqu’à l’imitation pure et simple de leurs œuvres.
De même, on peut relever des traces de l’influence islamique en architecture, et cela d’une façon toute particulière au Moyen Âge ; ainsi, la croisée d’ogive dont le caractère s’est affirmé à ce point qu’elle a donné son nom à un style architectural, a incontestablement son origine dans l’architecture islamique, bien que de nombreuses théories fantaisistes aient été inventées pour dissimuler cette vérité.
Ces théories sont contredites par l’existence d’une tradition chez les constructeurs eux-mêmes affirmant constamment la transmission de leurs connaissances à partir du Proche-Orient.
Ces connaissances revêtaient un caractère secret, et donnaient à leur art un sens symbolique ; elles avaient des relations très étroites avec la science des nombres et leur origine première a toujours été rapportée à ceux qui bâtirent le Temple de Salomon.
Quoi qu’il en soit de l’origine lointaine de cette science, il n’est pas possible qu’elle ait été transmise à l’Europe du Moyen Âge par un intermédiaire autre que celui du monde musulman. Il convient de dire à cet égard que ces constructeurs constitués en corporations qui possédaient des rites spéciaux, se considéraient et se désignaient comme étrangers en Occident, fût-ce dans leur pays natal, et que cette dénomination a subsisté jusqu’à nos jours, bien que ces choses soient devenues obscures et ne soient plus connues que par un nombre infime de gens.
Dans ce rapide exposé, il faut mentionner spécialement un autre domaine, celui de la philosophie, où l’influence islamique atteignit au Moyen Âge une importance si considérable qu’aucun des plus acharnés adversaires de l’Orient ne saurait en méconnaître la force.
On peut dire véritablement que l’Europe, à ce moment, ne disposait d’aucun autre moyen pour arriver à la connaissance de la philosophie grecque. Les traductions latines de Platon et d’Aristote, qui étaient utilisées alors, n’avaient pas été faites directement sur les originaux grecs, mais bien sur des traductions arabes antérieures, auxquelles étaient joints des commentaires des philosophes musulmans contemporains, tels qu’Averroès, Avicenne, etc.
La philosophie d’alors, connue sous le nom de scolastique, est généralement distinguée en musulmane, juive et chrétienne. Mais c’est la musulmane qui est à la source des deux autres et plus particulièrement de la philosophie juive, qui a fleuri en Espagne et dont le véhicule était la langue arabe, comme on peut le constater par des œuvres aussi importante que celles de Moussa-ibn-Maimoun qui a inspiré la philosophie juive postérieure de plusieurs siècles jusqu’à celle de Spinoza, où certaines de ses idées sont encore très reconnaissables.
Mais il n’est pas nécessaire de continuer l’énumération de faits que tous ceux qui ont quelque notion de l’histoire de la pensée connaissent. Il est préférable d’étudier pour terminer d’autres faits d’un ordre tout différent, totalement ignorés de la plupart des modernes qui, particulièrement en Europe, n’en ont pas même la plus légère idée ; alors qu’à notre point de vue ces choses présentent un intérêt beaucoup plus considérable que toutes les connaissances extérieures de la science et de la philosophie.
Nous voulons parler de l’ésotérisme avec tout ce qui s’y rattache et en découle en fait de connaissance dérivée, constituant des sciences totalement différentes de celles qui sont connues des modernes.
En réalité, l’Europe n’a de nos jours rien qui puisse rappeler ces sciences, bien plus, l’Occident ignore tout des connaissances véritables telles que l’ésotérisme et ses analogues, alors qu’au Moyen Âge il en était tout autrement ; et, en ce domaine aussi, l’influence islamique à cette époque apparaît de la façon la plus lumineuse et la plus évidente. Il est d’ailleurs très facile d’en relever les traces dans des œuvres aux sens multiples et dont le but réel était tout autre que littéraire.
Certains Européens ont eux-mêmes commencé à découvrir quelque chose de ce genre notamment par l’étude qu’ils ont faites des poèmes de Dante, mais sans arriver toutefois à la compréhension parfaite de leur véritable nature.
Il y a quelques années, un orientaliste espagnol, Don Miguel Asin Palacios, a écrit un ouvrage sur les influences musulmanes dans l’œuvre de Dante et a démontré que bien des symboles et des expressions employées par le poète, l’avaient été avant lui par des ésotéristes musulmans et en particulier par Sidi Mohyiddin-ibn-Arabi. Malheureusement, les remarques de cet érudit n’ont pas montré l’importance des symboles mis en œuvre.
Un écrivain italien, mort récemment, Luigi Valli, a étudié un peu plus profondément l’œuvre de Dante et a conclu qu’il n’a pas été seul à employer les procédés symboliques utilisés dans la poésie ésotérique persane et arabe ; au pays de Dante et parmi ses contemporains, tous ces poètes étaient membres d’une organisation à caractère secret appelée « Fidèles d’Amour » dont Dante lui-même était l’un des chefs.
Mais lorsque Luigi Valli a essayé de pénétrer le sens de leur « langage secret », il lui a été impossible à lui aussi de reconnaître le véritable caractère de cette organisation ou des autres de même nature constituées en Europe au Moyen Âge (voir René Guénon. L’Ésotérisme de Dante).
La vérité est que certaines personnalités inconnues se trouvaient derrière ces associations et les inspiraient ; elles étaient connues sous différents noms, dont le plus important était celui de « Frères de la Rose-Croix ».
Ceux-ci ne possédaient point d’ailleurs de règles écrites et ne constituaient point une société, ils n’avaient point non plus de réunions déterminées, et tout ce qu’on peut en dire est qu’ils avaient atteint un certain état spirituel qui nous autorise à les appeler « soufis » européens, ou tout au moins muta-çawwufîn parvenus à un haut degré dans cette hiérarchie.
On dit aussi que ces « Frères de la Rose-Croix » qui se servaient comme « couverture » de ces corporations de constructeurs dont nous avons parlé, enseignaient l’alchimie et d’autres sciences identiques à celles qui étaient alors en pleine floraison dans le monde de l’Islam.
À la vérité, ils formaient un anneau de la chaîne qui reliait l’Orient à l’Occident et établissaient un contact permanent avec les soufis musulmans, contact symbolisé par les voyages attribués à leur fondateur légendaire.
Mais tous ces faits ne sont pas venus à la connaissance de l’histoire ordinaire qui ne pousse pas ses investigations plus loin que l’apparence des faits, alors que c’est là, peut-on dire, que se trouve la véritable clé qui permettrait la solution de tant d’énigmes qui autrement resteraient toujours obscures et indéchiffrables. >>
Nasreddine
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A Catherine, très affectueusement
Mon frère, mon ami, mon vieux maître s’est endormi, mardi 14 mars 2006, dans la Paix du Seigneur qu’il avait tant cherché et tant aimé toute sa vie terrestre durant, commencée voilà 82 ans. » L’homme peut soutenir l’homme ; mais il n’y a que Dieu qui le délivre » dit le Philosophe inconnu, que Robert Amadou, son vieil ami, a rejoint dans la lumière sans déclin. Le voici donc délivré et nous voici donc orphelins.
Ce serait trop peu, assurément, que de dire que l’occultisme, le martinisme, la gnose, la théosophie, en un mot la Tradition de l’Occident-Orient doivent beaucoup à Robert Amadou. Au vrai, » nous lui sommes tous redevables. Honte à qui s’en dédie ! « . Ainsi s’ouvrait, à l’endroit de Papus, la préface de Robert au livre que le Dr Philippe Encausse a consacré jadis à son père, Papus, le » Balzac de l’occultisme « . Cette sentence, je l’adopte à mon tour, s’agissant de Robert et de son œuvre immense, fruit de plus de soixante ans d’un travail sans relâche, dont le présent hommage, aussi modeste et imparfait soit-il, s’efforcera d’abord de donner quelques lignes majeures.
L’immense tache, le premier service de Robert Amadou – et de quelques très rares compagnons de route – aura été, au sortir de la guerre, de restituer l’occulte à la culture. Les résistances – rappelait-il en 1987 – furent très vives, à commencer par les instituteurs de l’immuable Sorbonne où il traita pourtant de la Contemplation selon Aristote. Dans cette académie rabâcheuse et hostile, deux exceptions, disait-il : Marcel Jousse, à l’Ecole pratique des hautes études, et Paul Valéry, au Collège de France. Paul Valéry… Un souvenir me vient : nous sommes, Robert, Catherine et quelques intimes, en septembre 1987, quelque part au bord de la Méditerranée, dont Robert disait qu’elle était la seule mer. Au loin des voilures albâtres se distinguent des flots. Robert, les yeux fixés sur l’horizon, cite des vers de Paul Valéry…
Ce fut grâce à Paul le Cour que Robert Amadou entra dans la carrière. L’homme d’Atlantis, en qui il voyait du prophète, lui fit connaître ce « grand méconnu, l’abbé Paul Lacuria, le ‘Pythagore français’ », qui fut sous ce titre le sujet de sa première conférence, le 7 mars 1943. Le conférencier en herbe n’avait que dix-neuf ans, mais Lacuria ne l’a jamais quitté, dont il a publié bien des années plus tard la » Défense des Harmonies de l’être « , qui compose, avec d’autres carnets inédits, Lacuria, sage de Dieu (Awac, 1981). La même année, Robert donnera à l’enseigne d’Atlantis (1981) un copieux dossier sur « L’abbé Lacuria et les harmonies de l’être ».
En 1950, Robert Amadou produit l’Occultisme, esquisse d’un monde vivant (Julliard, 1950 ; nouv. éd., Chanteloup, 1987), qui marque un coup d’essai qui n’en est pas moins un coup de maître. Salué par la critique, l’ouvrage deviendra classique, tandis que l’auteur publiait la même année, en collaboration avec Robert Kanters, une très précieuse Anthologie littéraire de l’occultisme (Julliard, 1950 ; nouv. éd., 1975). Le mouvement était lancé : les livres allaient s’enchaîner avec régularité, sur tous les fronts. Je cite pour mémoire : Eloge de la lâcheté (Julliard, 1951) ; Albert Schweitzer, éléments de biographie et de bibliographie (L’Arche, 1952) ; Recherches sur la doctrine des théosophes (Le Cercle du Livre, 1952) ; La poudre de sympathie (Gérard Nizet, 1953) ; La science et le paranormal (I.M.I, 1955) ; Les grands médiums (Denoël, 1957) ; La télépathie (Grasset, 1958)… Du lot, tirons au moins, en 1954, son essai historique et critique sur La Parapsychologie, devenu classique lui aussi, qui marquait alors le renouveau de la vieille métapsychique.
En 1955, Robert lance la revue La Tour Saint-Jacques, qui devient aussitôt incontournable. Elle a pour devise : » rien de ce qui est étrange ne nous est étranger « , et rassemble les meilleures plumes du moment : René Alleau, Robert Ambelain, André Barbault, Armand Beyer, Eugène Canseliet, Marie-Madeleine Davy, Mircea Eliade, Philippe Encausse, Robert Kanters, Serge Hutin, Alice Joly, Louis Massignon, Pierre Mariel, René Nelli, Jean Richer, François Secret, Pierre Victor (Pierre Barrucand)… J’en oublie beaucoup. Mais comment oublierais-je le cher Jacques Bergier, « amateur d’insolite et scribe de miracles » qui y rapportait les « nouvelles de nulle part et d’ailleurs », et dont Robert m’aidait jadis à perpétuer la mémoire ? La revue La Tour Saint-Jacques se double alors d’une collection d’ouvrages. On y aborde avec rigueur, méthode et amour, les grands anciens et les recherches contemporaines, et aussi l’illuminisme, et Saint-Martin, et Huysmans, et tant d’autres ! et les sciences traditionnelles et leur histoire : magie, astrologie…
Si Robert Amadou n’a jamais pratiqué l’alchimie, il a étudié Raymond Lulle et l’alchimie (Le Cercle du Livre, 1953), s’est intéressé à » l’Affaire Fulcanelli » et s’entretint notamment avec Eugène Canseliet dans Le Feu du Soleil (Pauvert, 1978).
En revanche, l’astrologie fut pour lui une compagne constante. Né à Bois-Colombes, le 16 février 1924, à 2 heures du matin, sous le signe du Verseau et l’ascendant Sagittaire, Robert avait découvert l’astrologie à 14 ans, avec le petit livre de René Trintzius, Je lis dans les astres ; il commença à la pratiquer avec les éphémérides de Choisnard, offertes par sa tante, et il n’a pas cessé, pendant près de 70 ans, à toutes fins utiles, y compris, disait-il, les plus quotidiennes et les plus hautes, parce que l’astrologie touche à tout, et que l’on touche à tout par l’astrologie. L’authentique astrologie révèle Sophia et s’offre comme un moyen de connaître Dieu ; elle est, par vocation, sagesse, et Robert était un ami de Dieu et de sa Sagesse. En théorie et en pratique, il a suivi au plus juste la tradition, en particulier Plotin, Ptolémée et Paracelse, sans négliger les modernes, de Robert Ambelain à Armand et André Barbault, tout en vilipendant la prétention à une astrologie scientifique. Nombreuses ont été ses publications en l’espèce, depuis le numéro spécial de La Tour Saint-Jacques, en 1956, jusqu’au magistral Question De sur les astrologies, en 1985. Il a également remis au jour Les Monomères. Symbolisme traditionnel des degrés du zodiaque (Cariscript, 1985), a étudié La précession des équinoxes. Schéma d’un thème astrosophique (Albatros, 1979) en rapport avec l’Ere du Verseau chère à Paul Le Cour. Chez les anciens, il s’est intéressé à L’astrologie de Nostradamus, qu’il a contribué à éclairer, par exemple lors d’un colloque, à Salon de Provence, en 1985, et à travers un dossier de près de 500 pages (diffusion ARCC, 1987/1992) – qui le connaît ? – ou encore aux côtés des Amis de Michel Nostradamus fondés par Michel Chomarat, en 1983.
En dehors de l’astrologie, mais au cœur de la Tradition occidentale, combien d’autres grands anciens a-t-il contribué à remettre et même à mettre en lumière ? Il a étudié Franz Anton Mesmer et son magnétisme animal (Payot, 1971). De Balsamo-Cagliostro, il a présenté au congrès international de San Leo, en juin 1991, Le rituel de la maçonnerie égyptienne (SEPP, 1996). J’entends du Joseph Balsamo du XVIIIe siècle, car il y en a un autre – à moins que … – qui manifeste les mêmes prétentions et se comporte de la même manière, dont Robert Amadou a retrouvé la trace, à Toulouse, en… 1644.
De Fabre d’Olivet, il a publié partiellement, après l’avoir retrouvé en 1978, le manuscrit inédit de La Théodoxie universelle qui prolonge La Langue hébraïque restituée du même auteur. Ce maître d’ésotérisme, que Robert vénérait à ce titre depuis l’adolescence, trouve l’aboutissement de son œuvre majeure dans les écrits de Saint-Yves d’Alveydre, dont il a exhumé à la bibliothèque de la Sorbonne le fonds que Philippe Encausse y avait déposé. La pensée de Saint-Yves trouve sa perfection dans l’œuvre du Dr Auguste-Edouard Chauvet, dont le service n’avait cessé de l’instruire parce qu’il avait été son maître et n’a jamais cessé de l’être. A Chauvet et à son Esotérisme de la Genèse, Robert Amadou a consacré des séminaires, notamment à Ergonia, en 1981, après une soirée d’études et d’hommage, au centre l’Homme et la connaissance, en 1978, où il tint à associer Chauvet à son fils spirituel, l’abbé Eugène Bertaud, dit Jean Saïridès, dont Robert fut l’ami. Sur Chauvet, sa vie, son œuvre, il avait résolu de composer un ouvrage conséquent qui n’a pas vu le jour. Mais il en tira la matière d’une plaquette De la langue hébraïque restituée à l’Esotérisme de la Genèse (Cariscript, 1987). Dans l’entourage de Chauvet s’était constituée aussi une société chrétienne d’initiation : l’Ordre du Saint Graal qu’avait formé un autre Chauvet, prénommé James, et le Dr Octave Béliard (1876-1951), et Robert a édité La Queste du Saint Graal (Cariscript, 1987).
Quant aux sociétés secrètes, qui ont fait l’objet de ses entretiens avec Pierre Barrucand (Pierre Horay, 1978), Robert en connaissait les bienfaits en même temps que les limites et les travers. Mais il aimait désigner les plus dignes du mot du bon pasteur Pierre de Joux – dont il a tiré de l’oubli Ce que c’est que la franche maçonnerie (Cariscript, 1988) – comme » sociétés succursales » de l’Eglise intérieure, à commencer par l’Ordre martiniste et la franc-maçonnerie.
A la franc-maçonnerie, Robert Amadou a consacré un doctorat en ethnologie, en 1984 : « Recherches sur l’histoire et réflexions sur la doctrine d’une société initiatique en Occident moderne ». Entre maintes autres études, relevons au moins sa Tradition maçonnique (Cariscript, 1986), sa collaboration au Dictionnaire [universel] de la franc-maçonnerie de Daniel Ligou (1974 ; nouv. éd. à paraître en 2006), et, plus récemment, sa contribution à l’Encyclopédie de la franc-maçonnerie d’Eric Saunier (Librairie générale française, 2000). Sans omettre sa participation à tant de revues d’érudition, à commencer par Le Symbolisme et à finir par notre chère Renaissance traditionnelle, de « René Désaguliers, Maçon de l’universalité », de Roger Dachez et de Pierre Mollier, amis fraternels, pour laquelle il préparait encore tant d’articles attendus et même un numéro spécial sur Saint-Martin.
Mais c’est au régime écossais rectifié, avant tout, qu’allaient les élans du cœur de Robert Amadou qui en a notamment réédité les Archives secrètes de Steel et Maret (Slatkine, 1985) et mis en lumière les arcanes du saint ordre. De Jean-Baptiste Willermoz, fondateur et patriarche de ce régime sans pareil, il a inventé le fonds L. A., publié maint texte d’instruction et dressé le plus attachant des portraits : « honnête homme, parfait maçon, excellent martiniste ».
J’ai cité pêle-mêle ou presque les grands anciens dont Robert Amadou vénérait la mémoire, et dont il a défendu la cause dans Illuminisme et contre-illuminisme au XVIIIe siècle (Cariscript, 1989). Deux noms au moins manquent à cette liste. Et quels noms ! Qui, ici, ne les connaît ? Louis-Claude de Saint-Martin, le Philosophe inconnu, a marqué à jamais la vie, l’œuvre, la pensée et le cœur de Robert Amadou, depuis le jour où il découvrit dans la librairie Chacornac, en 1941 ou 1942, le numéro d’Atlantis qui lui était consacré. Louis-Claude de Saint-Martin et le martinisme (Le Griffon d’Or, 1946) inaugura l’interminable liste des publications savantes et amoureuses – parce que la connaissance et l’amour sont les deux piliers de la gnose – qu’il a consacrées, pendant 60 ans, à son vieil ami le théosophe d’Amboise, dans l’amitié de Dieu.
A son livret de 1946 qu’il n’a jamais réédité, trois autres livrets se sont substitués, qui sont complémentaires : Calendrier de la vie et des écrits de Louis-Claude de Saint-Martin (Renaissance traditionnelle, 1978), « Martinisme » (1979, 1993) et « Sédir, levez-vous ». La théosophie de Louis-Claude de Saint-Martin (Cariscript, 1991). Il faut y ajouter « Louis-Claude de Saint-Martin, le théosophe méconnu », publié ici-même de 1975 à 1981.
« Servi par un instinct divinatoire exceptionnel et le génie de la découverte », comme l’a fort bien écrit Eugène Susini, Robert Amadou est parti très jeune en chasse des inédits du Philosophe inconnu. Et il en a trouvé beaucoup ! Aux Cinq textes inédits qui inaugurent, en 1959, sa carrière d’inventeur sans pareil, succèdent le Portrait historique et philosophique (Julliard, 1961), la Conférence avec M. le chev. de Boufflers (1961), les Pensées mythologiques (1961), le Cahier des langues (1961), les Fragments de Grenoble (1962), les Pensées sur l’Ecriture sainte (1963-1965), les Etincelles politiques (1965-1966), le Cahier de métaphysique (1966-1968), le Carnet d’un jeune élu cohen / Le livre rouge (1968/1984), les Lettres aux Du Bourg (1977), Les nombres (1983), Mon livre vert (1991), le Traité des Formes (2001-2002), les Pensées sur les sciences naturelles… En 1978, l’invention du fonds Z lui avait offert la perle tant recherchée : les papiers personnels de Saint-Martin parmi les plus précieux, passés après la mort du Philosophe inconnu entre les mains de Joseph Gilbert. Quoi d’étonnant au fond !
Parallèlement, Robert Amadou tirait un à un de l’oubli les imprimés de Saint-Martin : Le Crocodile (Triades, 1962 ; 2e éd., 1979), l’Homme de désir (U.G.E., Bibliothèque 10/18, 1973), les Dix prières (L’Initiation, 1968, puis Cariscript, 1987), et il rééditait les « œuvres majeures », sous la marque du prestigieux éditeur allemand Georg Olms, avec des introductions qui sont de purs chefs-d’œuvre. En 1986, lors d’un colloque qui marqua à Tours la Présence de Louis-Claude de Saint-Martin (Société ligérienne de philosophie, 1986) Robert Amadou défendit « Saint-Martin, fou à délier ». Louis-Claude de Saint-Martin et le martinisme ont fait l’objet de son doctorat d’Etat ès lettres et sciences humaines, soutenu à Paris X, en 1972, avec la mention « très honorable ». Soutenance que Combat qualifia à juste titre de « gnostique » !
Par charité, Robert Amadou avait également rassemblé à l’intention des hommes du torrent de très précieuses Maximes et pensées de Saint-Martin (André Silvaire, 1963 ; éd augm., 1978). Mais quels services ne sont-elles pas capable de rendre aussi aux hommes de désir ? Eugène Susini disait de Robert Amadou qu’il savait tout du Philosophe inconnu. Il avait raison.
Pour le bonheur de tous les martinistes, L’Initiation de Philippe Encausse eut la plus grande part de ses articles sur Saint-Martin. D’autres sont à redécouvrir dans les revues qu’il a fondées : La Tour Saint-Jacques, Les Cahiers de l’homme-esprit, le Bulletin martiniste. Ce dernier, Robert Amadou le porta aux côtés d’Antoine Abi Acar, directeur des chères Editions Cariscript, où il dirigeait tant de collections merveilleuses, à commencer par les » Documents martinistes » où il me fit entrer, en 1986. Dans la boutique et l’arrière-boutique de Cariscript, rue Sainte-Croix de la Bretonnerie, où me ramènent aujourd’hui tant de souvenirs, l’on discutait de théologie et d’ésotérisme, d’astrologie et de théurgie autour du café préparé par Antoine. Que de projets ont mûri là ! Au nombre de ceux-ci, le Bulletin martiniste devait se réincarner en Gnostica, qui n’a pas vu le jour. Mais en 1991, de l’enthousiasme de quelques apprentis gnostiques, naissait l’Esprit des choses, organe du Centre international d’études et de recherches martinistes (CIREM), dirigé par Rémi Boyer, sous la présidence de Robert – qui y donna de nombreux inédits de Saint-Martin – puis dans l’autonomie. Robert m’engageait aussi à écrire un cours de martinisme diffusé dans le cadre de l’Institut Eléazar, dont il avait accepté dès 1990 la présidence d’honneur, et où il n’a pas cessé de m’assister, dans une parfaite communion spirituelle.
Mais impossible de comprendre Saint-Martin sans avoir abordé l’œuvre de son premier maître, Martines de Pasqually, le théurge inconnu, dont Robert Amadou a détaillé ici-même, pour la première fois, la doctrine dans une « Introduction à Martines de Pasqually », texte sans précédent et sans second. Il en a aussi publié deux éditions différentes du Traité de (ou sur) la réintégration (Robert Dumas, 1974 ; Diffusion rosicrucienne, 1995) et publié et commentés maints documents, tant maçonniques que théurgiques, de l’Ordre des élus coëns. Dernier chef-d’œuvre en date, conçu en collaboration avec Catherine Amadou : Les Leçons de Lyon aux élus coëns (Dervy, 1999), réunissent les leçons de trois élèves du maître : Saint-Martin, Du Roy d’Hauterive, Willermoz.
Son dernier livre consacré à la correspondance de Saint-Martin avec Kirchberger, n’aura pas vu le jour de son vivant, mais Catherine conduira le chantier à son terme. Quant à nos entretiens annoncés chez Dervy, dont nous avions pourtant ébauché le plan, il n’a pas été possible de les réaliser. Combien d’autres ouvrages annoncés et attendus comme des trésors de science et d’érudition, sont eux-mêmes restés en plan ou en chantier ? Dieu aidant, Catherine, qui fut constante à l’œuvre à ses côtés, compétente, dévouée, efficace, poursuivra, n’en doutons pas, la tâche à laquelle Robert l’a préparée.
Robert Amadou n’a pas cessé de chercher la vérité, par exemple dans l’histoire et dans la Tradition. Lisez ou relisez son Occident, Orient. Parcours d’une tradition (Cariscript, 1987). Dès ses premières lettres, en 1982, il m’exhortait à me lever de bonne heure et me donnait la clef : érudition ! Robert avait tout lu, tout étudié de nos objets, et son œuvre témoigne d’une érudition inégalée dans la seconde moitié du XXe siècle dont il fut et restera le plus sûr et peut-être le plus grand historien de l’occultisme, ne serait-ce que par l’ampleur de son champ d’investigation.
Entre toutes, trois bibliothèques étaient particulièrement chères à son cœur : Sainte-Geneviève d’abord, où il s’était plongé dès l’adolescence dans l’astrologie et la kabbale – il m’y conduisit dès le lendemain de notre première rencontre – ; la vieille B.N. ensuite, où pendant vingt ans il avait occupé tous les jours (sauf quelques pèlerinages loin de Paris) la place 191 ; notre chère BML enfin, dont il inventoria les fonds Bricaud et Papus, qu’il exploita conjointement avec le fonds Willermoz, notamment.
Papus ! Le vulgarisateur de l’occultisme était cher au cœur du plus érudit des occultistes, et avec lui combien de ses compagnons de la hiérophanie, selon l’expression classique de Michelet, et combien de ses épigones ? De Papus comme de Jean Bricaud, il a classé les archives à notre chère Bibliothèque municipale de Lyon, dont il tira tant d’informations et de publications (que nous remémore « L’Occulte à la Bibliothèque municipale de Lyon » (éd. augm. in Lyon carrefour européen de la franc-maçonnerie, 2003). Dans le cœur de Robert Amadou, impossible de dissocier Papus de son fils, le Dr Philippe Encausse, dont il a réhabilité la mémoire quand des instituteurs patentés l’ont injuriée (A deux amis de Dieu : Papus & Philippe Encausse. Hommage de réparation, CIREM, 1995). Du legs Philippe Encausse à la BML, Robert m’offrit d’ailleurs, en 1986, de publier quelques pièces remarquables.
2.
Voici pour l’inventaire, ô combien sommaire je le sais bien, d’une œuvre immense. Pour mémoire, disais-je. Mais l’homme ne se confond pas avec son œuvre et j’entends Robert me remémorer aussi la mise en garde de Freud : celui qui devient biographe, ou historien, s’oblige au mensonge, aux secrets, à l’hypocrisie, car il est impossible d’avoir la vérité biographique ou historique. Or Robert détestait le mensonge autant que l’hypocrisie, il ne se laissa jamais séduire par le mythe moderne de la conscience objective, mais il chercha et aima plus que tout la vérité, parce que la Vérité est un être, qui est la Voie comme il est la Vie. Allons à présent à l’essentiel, à la racine des choses, à la racine de Robert Amadou qui se dégage à merveille de son œuvre comme de sa vie.
C’est à l’âge de treize ans que les bons pères jésuites chez lesquels il fit ses études secondaires, rue de Madrid, à Paris, avaient servi la Providence en le plaçant au service du patriarche de l’Eglise syrienne catholique, lors de sa venue à Paris, à l’occasion de l’exposition universelle de 1937. Quelques années plus tard, Robert entrait dans l’Eglise syrienne catholique, et il tint l’office de chammas à l’église parisienne Saint-Ephrem-des-Syriens. Il se liait avec Gabriel Khouri-Sarkis, qu’il aiderait ensuite à la fondation et à la direction de l’Orient syrien. Mais son cœur et son intelligence le portaient vers l’Eglise syrienne orthodoxe, héritière directe de la communauté judéo-chrétienne primitive. Le 25 janvier 1945, il fut ordonné dans la succession syrienne de saint Pierre, et sa thèse de doctorat en théologie a pour titre : « Recherches sur les Eglises de langue syriaque et les Eglises dérivées ».
Parenthèse : en 1944, Henri Meslin lui avait imposé les mains pour la consécration d’évêque gnostique, dans la lignée de Jules Doinel, » fol amant de Sophie « , dont il a publié la biographie et réédité et commenté Lucifer démasqué (Slatkine, 1983). Puis, en 1945, Victor Blanchard le consacra évêque gnostique, dans la succession apostolique que celui-ci avait reçue, le 5 mai 1918, du patriarche Jean II Bricaud, lequel la tenait de Mgr Louis-François Giraud, successeur de l’abbé Julio. Sans avoir jamais appartenu formellement à aucune église gnostique, c’est à ce titre que Robert accordait pourtant à Alain Pédron un » entretien avec T Jacques « , publié dans l’Initiation, en 1978, sous le titre » Qu’est-ce que l’Eglise gnostique ? » (compléments, CIREM, 1996).
Robert Amadou n’a pas pour autant négligé la kabbale et le soufisme. Il a été admis dans une confrérie soufie et disserta sur Le soufisme même (Caractères, 1991). Judaïsme, christianisme et islam sont les trois piliers de la sagesse abrahamique.
Prêtre de Notre Seigneur Jésus-Christ, Robert officiait, notamment pour des martinistes ; il donnait les sacrements, à commencer par le baptême (comment oublierais-je que Robert voulut que notre première rencontre se fit à l’occasion du baptême d’une petite fille dont Philippe Encausse était le parrain ?), il visitait les malades – tant à leur domicile que dans les hôpitaux – et les prisonniers ; il priait, célébrait et exorcisait. Ses études sur Satan et le mal sont du plus grand intérêt. Qui les connaît ? Tel fut aussi le sens de notre réflexion commune sur le Sida face à la Tradition, thème d’un petit colloque que nous organisions à Paris, en 1988. Las, un volume projeté – un de plus ! – n’a pas vu le jour.
Sans appartenir à beaucoup et tout en se méfiant des formes associatives, Robert n’a pas négligé les bienfaits des écoles succursales où il a accompli sa part de services. La lumière maçonnique lui avait été donnée, le 6 juin 1943, dans Paris occupée, au sein de la loge clandestine Alexandrie d’Egypte placée sous le vénéralat de Robert Ambelain, dans l’ombre duquel se tenait Georges Lagrèze. Sa préface à mon histoire de La franc-maçonnerie égyptienne de Memphis-Misraïm rappelle ces circonstances héroïques.
Puis le Grand Architecte de l’Univers le guida vers le régime écossais rectifié, dont la doctrine lui était déjà si familière. Maître écossais de Saint-André, le 23 mars 1966, au sein de la Grande Loge nationale française – Opéra, il fut armé chevalier bienfaisant de la Cité sainte, le 7 mai 1966, avec pour nom d’ordre Robertus ab AEgypto, et pour devise In domum Domini ibimus, « nous irons à la maison du Seigneur ». Sa maison, Robert l’a trouva ici-bas au Grand Prieuré d’Helvétie et dans l’obédience de la Grande Loge suisse Alpina où l’accueillit en 1978 la loge In Labore Virtus, à l’orient de Zurich. Le 18 mai 1969, un ultime collège, à Genève, l’avait admis au cœur du saint ordre, avant de lui confier le mandat de publier dans Le symbolisme une mise au point sans pareille, qui fit grand bruit « A propos de la grande profession », sous la signature pseudonyme de Maharba, anagramme d’Abraham. Puis, mission accomplie, Maharba entra dans le silence. Lors des obsèques, trois roses entrelacées, symbole de force, de sagesse et de beauté, ont marqué à jamais l’amitié des frères suisses pour Robert et Catherine.
A la franc-maçonnerie, comment ne pas associer ici le martinisme ? Après avoir découvert Saint-Martin, Robert avait reçu d’Aurifer, son premier maître, l’initiation martiniste, le 6 juin 1942, au grade d’associé, puis aux grades d’initié et de supérieur inconnu, avec les fonctions d’initiateur, le 1er septembre de la même année, dans la clandestinité initiatique. Par analogie avec son patronyme et avec la pente de son caractère, il avait alors choisi pour nomen Ignifer, le porteur de feu. Jamais symbole n’aura été plus pertinent, plus efficace ! De même, Robert trouva sur le champ le nomen de Catherine, Pacifera, en 1965. Comment oublierai-je que Robert me fit à mon tour bénéficier de ce dépôt insigne, en 1994 ?
Dans l’Ordre martiniste, Robert Amadou seconda son vieil ami Philippe Encausse qui l’avait réveillé en 1952, et dont le fils de Papus l’avait voulu grand orateur. Il allait aussi inlassablement porter la bonne parole dans les cercles formels ou informels où l’on cultivait notamment l’amitié fraternelle du Philosophe inconnu, voire celle de Martines de Pasqually et de Papus. Robert savait, à l’instar de Saint-Martin, y distribuer la béquée, quitte à être récupéré et à servir parfois de caution indue. Mais en l’espère sa charité était exemplaire, comme était exemplaire sa lucidité. Un souvenir l’illustrera : nous sortons d’une réunion où des hommes de désir, jeunes pour la plupart, ont beaucoup parlé de l’initiation, de sciences occultes. Robert a corrigé parfois, conseillé un peu, écouté beaucoup. Qu’en penses-tu ? lui dis-je d’un air désabusé, une fois seuls, dans la rue. Robert lève les yeux au ciel, secoue la tête et me répond, terrible : « Bergson disait : on ne peut pas penser le néant ! ».
En des temps plus graves, avec des martinistes clandestins rassemblés par Robert Ambelain dont il était le bras droit, Robert Amadou reconstituait dans le Paris de l’Occupation les opérations théurgiques de Martines de Pasqually et de ses émules. Le 24 septembre 1942, la Chose répondit pour quelques-uns, dont il était – quel signe ! – à l’appel de l’homme de désir. S’en suivit la résurgence de 1943, après que Robert Ambelain eut été ordonné réau-croix par Georges Lagrèze, le 3 septembre de cette année. A son tour Ambelain lui conféra les premiers grades coëns le même mois et, à l’équinoxe d’automne 1944, il l’ordonna réau-croix. Si Robert prit ses distances avec la théurgie coën, il n’a jamais cessé de l’étudier et d’attester qu’elle surpasse la magie naturelle et la magie céleste et peut ouvrir une voie spirituelle à quelques-uns, à condition – mais condition ô combien indispensable ! – de ne pas la détacher de la foi et des exercices religieux prescrits. Mais à l’instar du Philosophe inconnu, coën de cœur, et même d’action, Robert resta jusqu’au bout, pour le bénéfice de quelques-uns. Ses « carnets d’un élu coën » (2001-2002) en témoignent.
De même, Robert avait été admis par Robert Ambelain, en 1944, dans l’Ordre kabbalistique de la Rose-Croix.
Pour mémoire et presque en marge, la fondation, le 11 septembre 1945, avec Paul Laugénie et Edouard Gesta, des Amis de Saint-Martin, tombés en sommeil, puis réveillés en 1972, sous la présidence de Léon Cellier et la présidence d’honneur de Robert Amadou. Las, les Amis passèrent ensuite du côté des instituteurs dont Robert n’avait de cesse, à l’instar de Saint-Martin, de condamner l’approche mortifiante et mortifère.
3.
Restituer l’occulte à la culture fut le premier combat, le premier service de Robert Amadou. Avec quelques-uns de sa race, il a combattu avec succès contre les récupérations mercantiles et universitaires de l’occultisme. Puis il a restitué aux occultistes, à toutes les femmes, à tous les hommes de désir, beaucoup de leur patrimoine oublié.
Lors d’un de nos derniers entretiens, je convainquis Robert qu’un troisième combat nous était désormais imposé. Car voici que des voyous cherchent à leur tour à s’emparer de l’occultisme. Ceux-là ne l’auront pas épargné pendant les dernières années de sa vie terrestre ; ils n’épargneront pas plus sa mémoire, je le sais, dans les années qui viennent. Mais de nouveaux combattants se sont dressés sur le champ de bataille.
Contre tant d’occultistes du dimanche, Robert Amadou vivait l’occultisme – synonyme pour lui d’ésotérisme – au quotidien, parce que son quotidien était au service de Dieu et des choses de Dieu, le sacré, nos « objets » aimait-il à dire, en écho de Saint-Martin. Ainsi, Robert ne quittait jamais la soutane qui signifiait son engagement religieux et initiatique, quitte à scandaliser les bourgeois pour qui n’existe, en matière vestimentaire comme ailleurs, qu’un modèle, unique et profane.
Robert Amadou refusait de tricher, il détestait l’hypocrisie, ne cédait à aucun terrorisme, ne supportait pas l’injustice et ne fit jamais la moindre concession qui puisse, de quelque façon, aliéner sa liberté. En quête de la perfection, qui est, disait-il, la seule fin de l’homme qui doit devenir Dieu, il ne supportait guère davantage la médiocrité. Sa plume, à titre privée, mais aussi parfois publiquement, lorsqu’il s’agissait de réparer quelque outrage, prenait parfois la forme de l’épée. Il brandissait alors la parole de l’abbé de Rancé, dont il avait fait sa devise : « ceux qui vivent dans la confusion ne peuvent s’empêcher de faire des injustices », et ses mots tranchaient vif. Cela lui valut des amitiés pour l’éternité, quelques inimitiés passagères et bien des désagréments.
Pour Robert et Catherine, la Grèce fut pendant quelques années un paradis. Alors qu’elle menaçait de se transformer en enfer, ce fut le retour à Paris, qui fut un purgatoire. Les deux dernières années de sa vie terrestre ont été pour Robert, privé de ses livres et souffrant d’une fibrose pulmonaire d’origine inconnue, une épreuve permanente, tant morale que physique. Et pourtant, la fatigue de plus en plus pesante ne l’empêchait pas, au prix d’efforts quotidiens, de se mettre chaque jour à sa table de travail, sauf pendant l’hiver 2006, et même de se rendre encore en bibliothèque, notamment à la BNF où il se rendit encore deux jours seulement avant son arrêt cardiaque, accompagné, soutenu par Catherine, qui a été un modèle de courage et de dévouement.
En 2003, Robert avait concélébré une messe pour le bi-centenaire de la mort du Philosophe inconnu, en l’église Saint-Roch, à Paris, et cette « sale maladie », comme il disait lui-même, ne l’a pas empêché non plus de participer à la célébration d’une messe annuelle pour Saint-Martin, à Honfleur en 2004, puis à Saint-Roch en 2005. Depuis 1985, une autre liturgie annuelle célébrée par Robert en mémoire de Philippe Encausse, le 22 juillet, rassemblait les proches de Philippe que Jacqueline a rejoint à son tour, en février dernier.
Le 22 mars, à dix heures trente, à Montfermeil, en l’Eglise Sainte Marie Mère de Dieu, la liturgie des défunts selon le rite syrien orthodoxe a été concélébrée, en araméen et en français, par le père Yakup Aydin, de l’Eglise syrienne, assisté du père Antoine Abi Acar, de l’Eglise maronite, et du père Jean-François Var, de l’Eglise catholique orthodoxe de France. Ce dernier avait, le matin, célébré un petit office, à l’hôpital Cochin, en présence de Catherine et de quelques intimes, réunis autour du corps de Robert. D’autres amis, parfois venus de loin, se sont retrouvés ensuite au Père Lachaise, sous une pluie battante, pour un dernier adieu. Au bras de Catherine, Jacqueline Corcellet, l’amie de toujours, et une autre Jacqueline, venue de Grèce.
Celui qu’Albert-Marie Schmidt, en 1950, promouvait jeune maître, sans jamais se prendre ni se donner pour tel, mais revendiquant le statut d’un vieil étudiant, n’a pas cessé, pendant des décennies, de s’instruire et de nous instruire. Robert Amadou m’en voudra-t-il de reprendre à mon compte la formule immortelle par laquelle Joseph de Maistre qualifiait Saint-Martin et par laquelle je souhaite l’honorer à mon tour ? Robert était le plus instruit, le plus sage et le plus élégant des théosophes modernes.
« Quiconque a trouvé son flambeau n’a plus rien à chercher ; mais il lui reste toujours à le conserver, ce qui est incomparablement plus difficile » dit le Philosophe inconnu. Serviteur du Seigneur et de son Eglise, ami de Saint-Martin et avec lui de tous les Amis de Dieu, combattant du bon combat, Robert Amadou fut pour moi, comme pour d’autres, un flambeau de la lumière du Seigneur. Dieu voulant, Dieu aidant, nous tâcherons de conserver cette lumière. Quant à Robert, il bénéficie désormais, dans une plus grande lumière et dans l’attente de la pleine lumière, de la compagnie de Sophia, Sagesse divine et parèdre du Christ. A ses côtés, il poursuit, je le crois comme il le croyait lui-même, sa tâche dans le sein d’Abraham.
Adieu le théosophe, le rose-croix de l’ethnocide ! Adieu mon vieux maître, mon frère et mon ami !
Serge Caillet
Cet hommage a été publié dans la revue
l’Initiation, n° 2, avril-mai-juin 2006, pp. 88-100.
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