ETRE FRANC MACON OU NE PLUS L’ETRE…. 15 décembre, 2022
Posté par hiram3330 dans : Bleu,Contribution,Recherches & Reflexions , trackback
J’ai longtemps hésité à écrire cet article fleuve !
Je m’y résous dans le mesure où toute expérience est bonne à partager, pour autant qu’elle soit le reflet d’un vécu, exposé de manière sincère, réfléchie et non malveillante vis à vis de personnes qui pensent différemment.
Oui, j’ai été Franc Maçon.
De la manière la plus simple qu’il soit, je vous raconte comment c’est arrivé.
Un jour, une connaissance avec lequel j’avais lié d’amitié m’interpelle, se révélant comme étant lui-même Franc Maçon.
Appelons le « Jean » : il me dit en résumé : « J’apprécie beaucoup ton regard sur le monde qui t’entoure : je pense que tu es un Franc Maçon qui s’ignore »
J’écoutai ce qu’il avait à me dire…ou me proposer.
De mon côté, il est vrai, j’avais (et ai toujours) une soif de dialogue ouvert sur toutes les questions qui concernent notre existence et nos relations aux autres.
J’écoutai ce qu’il avait à me dire, sans aucun à priori, ni pour, ni contre.
Je me contentai ensuite de lui témoigner mon intérêt, sous réserve que
- Je veux demeurer Libre, de Pensée et d’Appartenance
- Je suis Athée ou à tout le moins Agnostique.
- Originaire du Nord, j’éprouvais déjà certaines difficultés de dialogue et rencontres avec les « gens du sud » qui ont leurs propres modes de fonctionnement et de communication…
J’écoutai Jean pendant un très long moment, qui se termina par sa proposition d’être mon « parrain » si je décidais de franchir le pas de ma candidature à envoyer, par son intermédiaire, au « Président » de sa Loge, faisant elle-même partie du GODF
(Grand orient de France)
Je pris longuement le temps de la réflexion, avant de lui répondre de manière positive.
Je revis Jean pour lui remettre ma lettre de candidature.
Il précisa que je serais contacté par différents « enquêteurs » pour trois rendez vous distincts en mon domicile…( pourquoi pas ?)
Quelque deux mois plus tard, je reçu la visite de 3 personnes, qui ne déclinèrent pas leur identité (par discrétion, disaient t’ils…) et qui m’interrogèrent, de manière fort courtoise sur :
- Ma situation de famille, ma profession, mes études,
- Ma philosophie de vie
- Mes opinions politiques et religieuses
- Mes motivations à entrer en Franc Maçonnerie
Au bout de quelques mois encore, Jean m’informa que j’étais attendu tel jour, telle heure, à tel endroit…
Que de mystères !
Arrivé sur place, en bordure de ville, bâtisse aussi sombre que son quartier, je fus introduit dans une grande salle où l’on me pria d’attendre…
J’eus tout le temps de découvrir les lieux : grandes tables, chaises, bar/cuisine, tableaux, écriteaux divers…
Des bruits me parvenaient, laissant supposer qu’une réunion se passait aux étages supérieurs, auxquels on accédait par un grand escalier en marbre.
Après un certain temps, une personne, fort courtoise, m’invita à le suivre.
En haut des escaliers, il me mis un bandeau sur les yeux, et me pria à nouveau d’attendre : les brouhahas entendu précédemment avaient plus ou moins cessé.
N’y voyant rien, je fus introduit et guidé dans une salle, au centre de laquelle m’attendait un siège sans accoudoirs.
Différentes questions me furent posées, par différents intervenants, questions auxquelles je répondis franchement, et sans complaisance.
A la fin de cette curieuse audition, je fus congédié, et la même personne qui m’avait accueilli me ramena au rez de chaussée, dans cette salle qui, je l’apprendrai bien plus tard, s’appelle : « La Salle Humide ».
Durant mon trajet de retour, je me sentais perplexe, pris en tenaille entre ma curiosité d’en savoir plus, et tout ce mystérieux cérémonial qui n’était pas, je l’avoue, ma tasse de thé…
Quelques semaines plus tard, Jean me re-contacta, m’annonçant que ma candidature avait été retenue et que je serais « initié » à telle date.
Le terme « initiation » me rebutait à ce point que j’ai failli tout arrêter.
Initié à quoi ? pour apprendre quoi en dehors du monde dit « profane » ?
Mais bon, comme on dit en Languedoc-Roussillon, le vin était tiré, et il n’y avait plus …qu’à le boire …
Le jour J, retour à la même adresse, accueil par la même personne, qui me conduisit dans un « cabinet de réflexion » d’à peine plus de 1m x 1m, peint tout en noir, avec une bougie, un crâne humain, du sel, et que sais je encore.
Qu’étais je venu faire en cette galère !?
Au bout d’une demi heure, la même personne revint m’apporter un formulaire, destiné à écrire mon « testament de vie » : patienter à nouveau !
Enfin, eu lieu mon Initiation (toujours les yeux bandés) selon tout un cérémonial centré sur différents « voyages » symbolisant le Feu, l’Eau, La Terre et l’Air ( références bien connues dans les différents signes du Zodiaque…)
Le but de l’Initiation était de me faire passer du statut de Profane au stade de Franc Maçon, par le cérémonial qui m’apporterait « La Lumière ».
Je vous passe les détails du cérémonial, qui, en fin de course, aboutit à ce que l’on enlève le bandeau, vous permettant de découvrir…vos Frères.
Vous dire que je n’y ai ressenti aucune émotion, serait un gros mensonge….
Mais devenir Franc Maçon commence par être Apprenti.
En fin d’initiation, je reçus un petit tablier blanc, une paire de gants, blancs, et une rose, destinée à ma compagne de cœur.
Je découvris que le « Temple » était organisé selon les quatre points cardinaux Orient (Est) , Occident (Ouest) , Nord et Sud.
L’accès au Temple se fait par l’Occident (La porte, symbolisée par des colonnes)
A l’Orient officient le Vénérable Maître (le chef élu) le Secrétaire et l’Orateur, sur une estrade.
Au Nord siègent les Apprentis et le Second Surveillant (chargé de leur formation)
Au Sud siègent les Compagnons et le Premier Surveillant (chargé de leur formation)
Les Maîtres, eux, s’installent au Nord ou Sud, comme ils le souhaitent et selon les places disponibles.
En son milieu, côté Oriental, un ensemble de carrelages noir et blanc rappelant le jeu de dames, et constituant le « Pavé Mosaïque »
Lorsqu’il y a une Tenue (réunion) , les Frères sont introduits dans le temple, par le Maître de Cérémonie, et selon l’ordre croissant de leur grade :
D’abord les Apprentis, puis les Compagnons, puis les Maîtres, puis le Collège des Officiers, suivi par le Vénérable Maître et d’éventuels invités de Haut Rang Maçonnique.
Quel qu’ils soient, les Frères circulent dans le sens des aiguilles d’une montre, en ayant soin de ne jamais fouler le « Pavé Mosaïque »
Être apprenti suppose que
- Vous n’avez pas le droit de parole, lors des Tenues
- Vous êtes là pour écouter vos aînés, et apprendre…
- Après les Tenues, vous préparez les Agapes (repas) pour tous les Frères…qui bien sûr participent au « Triangle » , c’est-à-dire les frais.
Ces Agapes ont lieu après chaque Tenue, dans la Salle Humide, qui porte d’autant mieux son nom que le vin y est copieusement servi…
Durant les quelque 16 mois de mon statut d’apprenti réduit au silence, j’observai avec grande acuité, les modes de fonctionnement de notre Atelier (Loge).
A l’ouverture des Travaux, l’Orateur rappelle les principes constitutifs de notre Ordre, repris dans l’article 1 de la Constitution du GODF, rappelant que, je cite :
« La Franc Maçonnerie, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité, elle travaille à l’amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité. Elle a pour principes la tolérance mutuelle, le respect des autres et de soi-même, la liberté absolue de conscience.
Considérant les conceptions métaphysiques comme étant du domaine exclusif de l’appréciation individuelle de ses membres, elle se refuse à toute affirmation dogmatique. Elle a pour devise Liberté-Egalité-Fraternité »
A force de l’entendre tous les 15 jours, je connaissais cet article par cœur, et il n’éveillait en soi, rien de négatif à mes yeux, étant donné qu’il s’agissait que de grands principes auxquels j’adhérais dans leur ensemble.
Par la suite, j’eus droit à des « augmentations de salaire », comprenez par là l’élévation au grade de Compagnon d’abord, et de Maître, ensuite.
Tout ou presque, en Franc Maçonnerie est symboles et rituels :
Les trois grades de base font référence aux bâtisseurs du moyen âge, appelée « La Maçonnerie Opérative » alors que la Franc Maçonnerie est dite « Spéculative ».
L’Apprenti apprend à tailler la pierre brute à l’aide du ciseau et du maillet.
Il est pour cela revêtu d’un tablier dont la bavette est relevée, de sorte de le protéger contre les éclats supposés de la pierre, et de gants blancs.
Le Compagnon a pour tâche de polir la pierre brute et de veiller à sa rectitude : il utilise pour cela, essentiellement la règle et l’équerre.
Comme il ne risque plus la projection d’éclats, la bavette de son tablier est rabattue,
mais dispose toujours de gants.
Le Maître veille à ce que les pierres ainsi créées s’inscrivent parfaitement dans la Construction, utilisant pour cela divers instruments tels le niveau et le compas.
Ses « décors » sont constitués d’un tablier plus sophistiqué et d’un cordon transversal rappelant celui des Maires.
Chemin faisant, je m’aperçus que les Tenues auxquelles je participais s’appelait
« La loge Bleue » à laquelle se superposait d’autres Loges appelées « Ateliers Supérieurs ou de Perfectionnement » dont faisaient partie la plupart des membres du
« Collège des Officiers »
Le temps de m’y retrouver dans ce lexique opaque, je m’aperçus au fil du temps que ces mêmes Ateliers Supérieurs, constituaient un véritable organe de pouvoir au sein de la Loge, uns sorte d’État dans l’État des Loges Maçonnique.
Une sorte de microcosme qui oriente ou prend ses décisions, sans jamais en rendre compte de manière limpide à la modeste « Loge Bleue ».
Chaque année, en Juin, ont lieu les élections du nouveau Collège des Officiers, pour l’année Maçonnique suivante, sachant que les « usages » veulent qu’aucun Officier ne peut rester à son poste plus de trois ans, mais doit être réélu chaque année intermédiaire…
Le Collège des Officiers est constitué de :
- Le Vénérable Maître (le « chef » de l’Atelier)
- L’Orateur (chargé de veiller au respect de la constitution et du règlement)
- Le Secrétaire (prend note et fait son rapport de la tenue précédente)
- Le Maître des Cérémonies (introduit et les Frères dans le Temple )
- Le Trésorier (veille à ce que chacun soit en règle de cotisation…)
- Le Grand Expert (introduit les nouveaux candidats ou initiés)
- Le Second Surveillant (veille à la formation des Apprentis)
- Le Premier Surveillant (veille à la formation des Compagnons)
- Le Couvreur (toujours ancien vénérable, il veille à l’accès du Temple)
- Le Maître de la Table d’Harmonie (s’occupe des musiques d’ambiance)
- Le Maître des Banquets (supervise les Agapes)
Ces élections, sensées être démocratiques, ne le sont pas tant que cela, car déjà toute préparées par le Collège des Officiers sortant (où les principaux d’entre eux dans l’ordre hiérarchique)
J’eus sans doute l’impertinence de relever certains dysfonctionnements, manipulations ou mensonges, preuves à l’appui… : cela fit un grand « plouf » dans la Loge Bleue au sein de laquelle je l’exprimai.
En « Salle Humide » après la tenue, l’un ou l’autre Frère me disait : « j’ai apprécié ton intervention » : c’est gentil mais cela ne change rien au fait que de manière habituelle, une majorité de Frères font figures de …figurants, ou en tout cas ne se « mouillent pas » dès qu’il s’agit de relever de quelconques contradictions entre les grands principes et leur application sur le terrain.
Je n’ai jamais recherché aucune forme de pouvoir : quel pouvoir ? par rapport à qui ? pour quelle motivation ?
Par contre, j’ai toujours été rebelle à toutes formes de manipulations des pouvoirs en place, quels qu’ils soient.
Cela on le connaît déjà par trop, dans « la vie Profane ».
Si l’on retrouve la même chose en Franc Maçonnerie…
Si l’on y retrouve les mêmes nébuleuses hiérarchiques souterraines,
Si l’on y cultive les mêmes principes du non dit, du silence et des clans intérieurs,
A quoi bon ?
Il faut également savoir que la notion d’argent n’est pas étrangère au fonctionnement des Obédiences, en effet.
La « Capitation » autrement dit la cotisation annuelle obligatoire pour tous les Frères était en 2010 de 235€ dont 80% retourne à l’Obédience (Paris) et le solde étant consacré à de divers frais de fonctionnement de la Loge locale.
Le GODF gère via de quelconques sociétés connexes, un parc immobilier de bâtiments la plupart du temps conçus à usage de « Temple » et mis à disposition moyennant redevance, à diverses loges appartenant au Grand Orient de France, ou autres Obédiences sœurs voir concurrentes.
Mais bon, rien d’exceptionnel en cela.
Il n’empêche que toutes les Loges, quelles qu’elles soient ont intérêts à garder un nombre suffisant d’adhérents pour faire face à leurs charges.
C’est ainsi par exemple que tout Frère désirant « prendre du recul » quelles qu’en soient les raisons, peut demander d’être mis « en sommeil » , c’est-à-dire qu’il ne participe provisoirement plus aux Tenues, mais continue à payer ses Capitations.
Tel ne fut pas mon choix.
J’ai donc décidé de tirer ma révérence, pour l’unique raison que je ne retrouvais plus les raisons philosophiques et morales essentielles pour lesquelles j’y étais entré.
Mes réflexions, mes doutes, mes questions…
- Un de mes « Frères » et amis me posa la question : Si tu ressens un malaise dans notre Atelier, pourquoi ne t’inscris tu pas dans une autre Loge, qui peut être te conviendrait mieux ?
Je lui ai répondu : lorsque l’on sort d’une séparation douloureuse, on n’est pas forcément prêt à tenter une autre expérience… - Je me suis demandé aussi si je ne m’étais pas montré trop exigeant, ou bien si je n’ai pas fait preuve d’intolérance… : je n’ai pas encore la réponse, mais quoi qu’il en soit et jusqu’à plus ample réflexion, j’attendais de ma Loge, une Liberté, une Alité, et une Fraternité que je n’ai pas suffisamment rencontré.
Ce n’est pas parce que, lorsqu’ils se retrouvent, tous les Frères se saluent en s’embrassant trois fois ( en moyenne 50 frères x 50 = 250 accolades..) que ces « attouchements » seraient chargés d’une quelconque dimension affective réelle, qui dépasserait la seule tradition maçonnique de reconnaissance mutuelle… (humour : cela aurait même pu se révéler dangereux,lors de la supposée pandémie de grippe H1N1… )
Les conclusions de cet article :
- Dans tous les cas, je n’ai voulu salir l’image de la Franc Maçonnerie en général.
Que je n’y aie pas trouvé les raisons d’y demeurer reste affaire personnelle.
Contrairement à ce que l’on entend parfois, la Franc Maçonnerie n’est pas vraiment une secte, car il demeure plus facile d’en sortir que d’y entrer.
Toutefois, j’ai constaté chez la plupart des Frères, un certain « formatage pavlovien de la pensée » que l’on pourrait qualifier de « sectaire ».
Dès que l’on ne rentre pas vraiment »dans le moule Franc Maçon », on ne vous exclut pas : vous vous excluez vous même, petit à petit, ne trouvant plus d’interlocuteurs, même si vos « Frères » demeurent très courtois à votre égard.
Que la Franc Maçonnerie soit une organisation « secrète » est une évidence, même si certains la considèrent comme uniquement « discrète ».
C’est jouer sur les mots, au vu de son opacité, qui demeure même lorsque l’on en fait partie.
- Que certains y recherchent une quelconque forme de pouvoir ou de notoriété est évident, même si l’influence de la Franc Maçonnerie n’est plus du tout ce qu’elle fut lors de la 3ème République, et même si dans l’inconscient de certains demeure le sentiment que d’être Franc Maçon « pose son Homme » et peut aboutir à certains privilèges ; réels ou imaginaires…
- Quoi qu’il en soit, J’ai quitté la Franc Maçonnerie, et de manière définitive, tant les grands principes qui y sont énoncés, ne trouvent pas leur mise en oeuvre dans le vécu, en tout cas pas davantage que dans la vie dite « profane » …, alors, à quoi bon !?
Liens
Si vous le souhaitez, vous trouverez sur Internet, des centaines de liens allant de l’éloge, passant par la critique jusqu’à l’abject….
Je vous en propose un seul ayant trait au vocabulaire Maçonnique : pour l’approcher, voir même pour comprendre certains passage de mon article, cliquez ici
Il y a sur Internet de nombreux sites ou blogs traitant de ce sujet à des titres divers.
Il est très rare que vous puissiez laisser librement un commentaire…
Ce n’est pas le cas ici : dites ce que vous pensez ou posez vos questions.
La démocratie, c’est aussi et surtout pouvoir s’exprimer librement…
de sorte que… « la parole circule »….
4 décembre 2010
SOURCE : http://veillecitoyennelibre.over-blog.com/article-etre-franc-macon-ou-ne-plus-l-etre-62323975.html
VEILLE CITOYENNE LIBRE – BLOG D’EDDY DELHAYE
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