» Les quatre Eléments traditionnels : Terre, Eau, Air, Feu, dans l’Initiation maçonnique et l’Alchimie. » 8 juillet, 2023
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Aujourd’hui une chronique sur » Les quatre Eléments traditionnels : Terre, Eau, Air, Feu, dans l’Initiation maçonnique et l’Alchimie.«
Les quatre Eléments traditionnels : Terre, Eau, Air, Feu, dans l’Initiation maçonnique et l’Alchimie.
Les quatre Eléments, Terre, Eau, Air, Feu, sont les « milieux » naturels à travers lesquels passent les Maçons dès leur Initiation, des symboles qu’ils ne cessent de re-découvrir au fil des « âges » et des Degrés quand ils « travaillent » à se re-reconnaître eux-mêmes et à s’aimer. « L’homme est l’abrégé de toute la Nature, il doit apprendre à se connaître comme le précis et le raccourci d’icelle. Par sa partie spirituelle il participe à toutes les créatures immortelles, et par sa partie matérielle, à tout ce qui est caduque dans l’Univers. » (Dom Pernety, Les Fables Egyptiennes et Grecques, 1758) Les hommes et les femmes initiés aux « mystères » de la Franc-Maçonnerie révèlent en eux-mêmes cette Nature avec l’aide et l’affection de leurs Frères et Sœurs, et « initient » un lent cheminement les conduisant au centre de leur propre labyrinthe, en un point où doivent se conjuguer harmonieusement et se féconder leurs deux natures matérielle et spirituelle.
Sur ce chemin, les quatre Eléments sont les premiers symboles et archétypes vécus de l’intérieur par les Maçons, d’abord sous la forme des chocs émotionnels et affectifs déclenchés par l’Initiation, puis en s’« attachant » par des « planches » et des « colonnes » à « remettre vingt fois sur le métier » (Boileau) leur étude et leur connaissance, cette re-connaissance conduisant à la re-naissance du « connaissant » par des « intégrations » réitérées de connaissances « en » conscience. « Ceux qui ne se rendent pas compte de la tonalité affective particulière de l’archétype ne se retrouveront qu’avec un amas de concepts mythologiques, que l’on peut sans doute assembler de façon à montrer que tout a un sens, mais aussi que rien n’en a. Les cadavres sont tous chimiquement identiques, mais les individus vivants ne le sont pas. Les archétypes ne se mettent à vivre que lorsqu’on s’efforce patiemment de découvrir pourquoi et comment ils ont un sens pour tel individu vivant. » (C.G. Jung, L’homme et ses symboles) C’est là tout le sens de l’étude des symboles et rituels maçonniques depuis le premier degré du Rite.
L’Initiation est ainsi une science du vivant, l’art de réveiller des consciences amnésiques « occultant » leur raison d’être, et dans la langue maçonnique et alchimique l’art de rendre vivants les métaux morts, ces « métaux » que les Maçons laissent au moins en partie à la porte du Temple et qu’ils travaillent patiemment à transformer à mesure qu’ils se perfectionnent eux-mêmes. Ils reçoivent la « lumière » du sens des symboles-archétypes qui leur sont transmis lors des Initiations, et travaillent dès lors à laisser ces symboles « lumineux » atteindre et réveiller les archétypes correspondants endormis en eux.
Alors ces symboles s’expriment « en » force et « en » puissance et tendent à « dé-teindre » sur l’initié(e) qui les libère et se libère lui(elle)-même de ses « ombres », à « teindre » ses pensées jusqu’à « révolutionner » l’être pensant dans ses idées et convictions les plus profondes. Les alchimistes ont l’art d’illustrer ces opérations de « teinture » par des scènes de la vie ordinaire qui n’attirent que le regard des « cherchants » et des « initiés » à leur langage. « Dé-teindre » peut se traduire par « laver » les vêtements et les idées des initiés (les « laveures alchimiques ») pour en extraire les teintures essentielles et parvenir à leur blancheur à la fin du deuxième Œuvre. Et la symbolique des couleurs fondamentales de l’Œuvre renvoie aux Eléments : la Terre noire, le Feu rouge, l’Air bleu, l’Eau en sa nature de « feu aqueux » ou d’ « eau ignée » croisant les couleurs verte et rouge.
Mais surtout ces symboles-archétypes s’animent d’une vie propre et illustrent les pensées et les sentiments des initiés qui s’en « nourrissent » spirituellement pour en absorber les vertus, espérant un jour en goûter la quinte-essence, un cinquième élément, l’Ether, plus subtil que les quatre premiers. Les alchimistes se désignaient souvent eux-mêmes comme des « abstracteurs de quintessence ». Rabelais a ainsi publié Gargantua sous le même pseudonyme que Pantagruel : Alcofribas Nasier, anagramme de François Rabelais : « Abstracteur de Quintessence ». Il appartient à chaque Maçon et Maçonne de trouver les mots et les idées justes « inspirés » par ces symboles essences-ciels, de « nature » à en « révéler » et « fixer » le sens en eux-mêmes, chacun(e) trouvant comme le poète l’inspiration pour en exalter les sens « en » secret.
L’Orient et l’Occident lancent des ponts vers le ciel,
Au point où dans les nues convergent leurs rayons,
Roues cosmique et terrestre autour de l’essentiel :
L’amour de la Sagesse, mère des Traditions.
Fils tendus d’absolu des exigences ultimes
Au-delà d’horizons pétris d’humanité,
Nourriture d’êtres avides du sublime des cimes,
Leurs sens élèvent en cœur les Frères en vérité.
Zéphir souffle au zénith sur leurs esprits à vif
Le chaud et le froid sec, Air glacial et brûlant
Suscitant des courants ascendants et actifs
De pensées dans l’esprit des quatre Eléments.
Les mots et leurs racines goûtent jusqu’au Nadir
Une langue universelle nourrie de ses terreaux,
La Terre et ses silences où vibrent les désirs
Les plus profonds des hommes en quête de héros.
Ses paroles coulent à flots, mêlent à contre-courant
Des appels qui dérangent sans mettre le chaos
Aux tourbillons des ondes aspirant au néant ;
L’Eau porte dans ses gouttes l’unité du zéro.
Un Feu pousse à la roue l’axe des destinées,
Distille des idées qui travaillent et s’affinent,
Parlent juste et s’entendent pour être devinées
Dès que l’âme s’enivre, chante sa vie divine.
Un Cinquième Elément en est l’émanation,
La mémoire liminaire délivrant les errants
Du socle imaginaire, vide en recréation,
Quintessence de l’Ether, immobile mouvement.
Les rituels des Degrés du Rite Ecossais Ancien et Accepté foisonnent de ces symboles-archétypes alchimiques. Le livre « Francs-Maçons Alchimistes » de l’auteur de cette chronique, qui paraît dans quelques jours (Editeur LiberFaber http://liberfaber.com/fr/accueil.html) re-lie précisément la Franc-Maçonnerie et l’Alchimie par la « mise en regard » des rituels maçonniques du Rite Ecossais Ancien et Accepté, tels qu’ils furent rédigés à l’origine au XVIIIème siècle, et les traités anciens des alchimistes, afin de « projeter » (terme alchimique) les Maçons et Maçonnes dans chacune des phases de l’Œuvre grâce à l’étude des rituels, et inversement de faire redécouvrir le sens des rituels à travers ce prisme alchimique. Sa centaine de figures illustrant le texte et son lexique de mille mots animent de l’intérieur ces symboles, et tend à transformer leur « vision » statique en deux dimensions en « visualisation » dynamique en conscience, jusqu’à les « voir » en trois dimensions s’animer et « illustrer » le perfectionnement et l’accomplissement spirituel de chaque Maçon et Maçonne sur le chemin de l’Initiation.
Faites « signe » comme on « fait symbole » à mon Editeur LiberFaber à l’adresse http://liberfaber.com/fr/accueil.html pour dès maintenant effectuer vos réservations et commandes !
Patrick Carré
Patrick Carré, né le 14 janvier 1953, est poète, philosophe, et Franc-Maçon français. Son œuvre littéraire et artistique comprend un nombre considérable de poèmes et de textes philosophiques principalement sur l’Initiation Traditionnelle à la vie spirituelle.
Initié à 23 ans à la Grande Loge de France, il est membre de la Juridiction du Suprême Conseil de France, de Rite Ecossais Ancien et Accepté.
Diplômé de Philosophie (Faculté de Rennes), de Gestion (IGR et Enass), d’Arts Plastiques (Institut Van der Kelen-Logelain à Bruxelles et CAP de potier tourneur).
Son site internet « Patrick Carré Poésie » http://www.patrick-carre-poesie.net/ de 1000 pages, premier site de langue française d’études et de poèmes d’un Franc-Maçon avec plus de 800.000 visiteurs, concentre ses travaux et recherches sur l’Initiation Maçonnique, en particulier tous les degrés du Rite Ecossais Ancien et Accepté (REAA), symbolisant l’Œuvre alchimique de perfectionnement et de transformation intérieure des Maçons.
Livres et disque
- Livre « Francs-Maçons Alchimistes » (2015) (Editeur LiberFaberhttp://liberfaber.com/fr/accueil.html )
- CD « Le Flambeau » (incluant le recueil des 12 poèmes) (2013)
- Livre « Cathédrales » (2006)
- Livre « La Femme Chair, Cœur, Esprit » (2006)
Conférences
- Pensée symbolique et pensée sensible, illustrées par Dürer
- La pensée symbolique
- La Femme et la mixité en Franc-Maçonnerie
- La poésie en Franc-Maçonnerie
- L’univers du potier tourneur
- Le vitrail alchimique de la Cathédrale d’Orléans
Membre aux USA de la Masonry Poetry Society (http://www.mpoets.org/ProceedingsNo7.htm )
Lauréat France Musique Contes du jour et de la nuit (émission du 12/06/2014) (http://www.francemusique.fr/emission/contes-du-jour-et-de-la-nuit/2013-2014/selection-france-2-du-4e-appel-ecriture-patrick-carre-5-5-06-12-2014-00-00 )
» il pleut, il pleut bergère » et « Un, deux, trois, … » 15 juin, 2023
Posté par hiram3330 dans : Humour,Silhouette , ajouter un commentaireLe traditionnel » il pleut, il pleut bergère » commence à être connu un peu partout… Pourquoi ne pas le remplacer par un air célèbre fredonné bouche close ?
Et lorsque, à couvert, on mettrait les paroles ça donnerait ceci :
Il pleut, il pleut, mes Frères,
Baissons un peu le ton,
Gardons notre mystère,
Protégeons nos maillons !
Travaillons en silence
Pour que la vérité
l’Amour et la Vaillan-ance
Soient toujours célèbres.
***
Nous ne savons pas lire :
Seulement épeler…
C’est un péché de dire
Ce que l’on doit cacher.
Le temple nous protège.
N’allons pas le trahir,
Attention aux manè-èges
Qui nous feraient mourir…
***
Lorsque su la colonne
Où, la bouche fermée,
Nous attendions que sonne
Le deuxième degré,
Nous avons pu apprendre
La valeur du secret.
Ne laissons pas surpren-edre
Gestes et mots sacrés !
***
Et nous faisons la chaîne
Sans jamais la briser
Pour qu’elle nous apprenne
La solidarité
Nous travaillons sans trêve
De midi à minuit
Et nous laissons le rê-êve
Chanter dans nos esprits !
***
FINAL
Il pleut, il pleut, mes Frères
Baissons un peu le ton
Gardons notre mystère,
Protégeons nos maillons !
**
Allumons nos lumières,
Attachons nos tabliers
Et taillons notre pie-rre
Dans la FRATERNITÉ !
SOURCE : http://www.mvmm.org/c/docs/div21/pleut.html
*****
UN, DEUX, TROIS …Chanson Maçonnique ?
Il m’est arrivé d’entendre à plusieurs reprises dans ma loge, comme dans d’autres, la chanson intitulée à tort « Vas Petit frère » de Paul Louka, alors que celle-ci s’intitule « Un, deux, trois, …« …Il s’agirait d’une chanson aux paroles maçonniques.
Vital-Paul Delporte alias Paul Louka est un célèbre auteur, compositeur, interprète, comédien, écrivain, peintre, et saltimbanque belge, né à Marcinelle en 1936.
Est ce réellement une chanson maçonnique ? Paul Louka est il franc-maçon ? Ce que je sais c’est qu’il s’agit d’une chanson fortement symbolique…
En voici le texte …
Paul Louka Un, deux, trois…
Va petit frère !
La terre est grande
C’est un joli jardin
Mais donne-moi la main !
Va petit frère !
La terre est grande
C’est un joli jardin
Quand il est midi plein.
Tu fais un pas, c’est la liberté
Tu fais deux pas, c’est l’égalité
Tu fais trois pas et le monde a changé
C’est un joli jardin
Mais donne-moi la main !
Tu fais un pas, c’est la liberté
Tu fais deux pas, c’est l’égalité
Tu fais trois pas et le monde a changé
C’est un joli jardin
Quand il est midi plein
La la la
Qu’est-ce que c’est ?
C’est la folie d’aimer
Qui se met à chanter !
Va petit frère !
Ton cœur résonne
C’est un joli tambour
Le général est sourd !
Va petit frère !
Ton cœur résonne
C’est un joli tambour
Quand nous parlons d’amour
Va petit frère !
Bonjour « Cerises »
Jean-Baptiste Clément
N’a pas perdu son « Temps »
Va petit frère !
Bonjour « Cerises »
Jean-Baptiste Clément
Chante encore au printemps.
Un, deux, trois…, Paul Louka
SOURCE : https://www.gadlu.info/un-deux-trois-chanson-maconnique/
Virtual Exhibition Tour | Tutankhamun London 11 juin, 2023
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La danse des Loups Musique Chamanique Amérindienne avec Tambour et Chants de Lumières 25 mai, 2023
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Nicolas Flamel alchimie magie divine et rêves d’Or – Documentaire 30 avril, 2023
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« Pierre Dac. Le Parti d’en rire », un Franc-Maçon exposé au mahJ 25 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Silhouette , ajouter un commentaire« Pierre Dac. Le Parti d’en rire », un Franc-Maçon exposé au mahJ
Le Musée d’Art et d’Histoire du judaïsme (mahJ) présente, du 20 avril au 27 août 2023, la première exposition consacrée à Pierre Dac (1893-1975). Plus de 250 documents issus des archives familiales, extraits de films, émissions télévisées et radiophoniques éclairent le parcours personnel et l’œuvre de ce maître de l’absurde, qui présida à la naissance de l’humour contemporain.
Qui sait que, dans les années 1950, Pierre Dac fut l’inventeur du schmilblick, cet objet au nom yiddish « qui ne sert absolument à rien et peut donc servir à tout » ? Qui se souvient du biglotron ? Qui a en mémoire la désopilante série radiophonique Bons baisers de partout, diffusée sur France Inter de 1966 à 1974 ? Des années 1930 au milieu des années 1970, l’imagination et l’inventivité de Pierre Dac ont nourri la culture française d’un extraordinaire arsenal humoristique que l’exposition fera redécouvrir.
Né André Isaac à Châlons-sur-Marne, Pierre Dac est issu d’une famille juive alsacienne qui choisit la France après Sedan. Il s’engage durant la Première Guerre mondiale, animé du désir de rendre l’Alsace-Lorraine à la France. Après l’armistice, il se tourne vers le métier de chansonnier ; ses sketchs, chansons, et surtout ses « pensées », lui valent un succès immédiat. Dans les années 1930, il produit les premières émissions d’humour à la radio (La société des loufoques, La course au trésor…), puis fonde l’hebdomadaire L’Os à moelle.
Résistant de la première heure, il rejoint la France libre en 1943. Dans les Français parlent aux Français, au micro de Radio Londres, il mène une guerre des mots contre Radio Paris. Au lendemain de la guerre, Pierre Dac rencontre Francis Blanche, avec lequel il crée « Sans issue ! » aux Trois Baudets, puis le célèbre « Sâr Rabindranath Duval » et le feuilleton Signé Furax, la série la plus écoutée de l’histoire de la radio, tout en militant à la Lica, ancêtre de la Licra.
L’exposition éclaire la créativité musicale et littéraire de Pierre Dac, ses modes d’expression très divers – et notamment l’utilisation de tous les nouveaux médias (cinéma, radio et télévision), tout en restant attaché au cabaret et au théâtre. Elle évoque ses compagnons de route : Francis Blanche, Jean Yanne et René Goscinny. Enfin, elle replace l’oeuvre de Pierre Dac parmi celles des maîtres de l’absurde (Beckett, Ionesco, Dubillard…), redevable tant à l’argot des bouchers qu’au Witz freudien, et aborde les résonances de sa judaïté dans son parcours personnel et ses choix artistiques. Initialement proposée d’octobre 2020 à février 2021, cette exposition avait dû fermer ses portes quinze jours après son inauguration en raison de la pandémie de Covid-19.
Commissaires : Anne Hélène Hoog et Jacques Pessis
« Pierre Dac. Le parti d’en rire » est une exposition éco-responsable : les mobiliers et éléments graphiques conçus il y a 3 ans ont pu être stockés. Ainsi, 40 % des cloisons, 85 % du mobilier de scénographie et 70 % des cartels sont réemployés. Par ailleurs, les bancs et 90% des capots de vitrine proviennent de nos expositions antérieures.
Depuis plusieurs années, le mahJ est activement engagé dans une démarche de développement durable et d’éco-responsabilité, afin de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre, de préserver les ressources naturelles et de réduire sa production de déchets.
Source : Musée d’Art et d’Histoire du judaïsme
Pierre DAC, le Maçon
Pierre Dac (1895-1975) a été membre de la Grande Loge de France, initié au sein de la Loge « Les Inséparables d’Osiris ». Humoriste bien connu, il a rédigé ce rituel de la Grande Loge des Voyous :
A.°. L.°. G.°. D.°. G.°. A.°. D.°. L’U.°.
GRANDE LOGE DES VOYOUS
RITUEL du PREMIER DEGRÉ SYMBOLIQUE
Ouverture et fermeture des travaux
Le Taulier | Frangin deuxième Maton, quel est le premier turbin d’un maton en carrée? |
2ème Maton | Taulier, c’est de bigler si la carrée n’a pas de courants d’air et si la lourde est bien bouclée. |
le Taulier | Veux-tu bien gaffer frangibus ? |
2ème Maton | Frangin Bignoleur, veux-tu bigler si la carrée est aux pommes et décambuter en loucedé pour arnaquer les loquedus ? |
le Bignoleur (de retour) |
Y’a que dalle, Chef ! |
2ème Maton | Frangin Taulier, la cabane est réglo. |
le Taulier | Quel est le boulot du premier Maton ? |
1er Maton | Frangin Taulier, c’est de se rencarder si tous les gonzes d’ici sont bien des potes et non des demi-sels. |
le Taulier | Premier et deuxième Matons, vos zigues, faites votre turbin. Biglez s’il n’y a pas de loquedus, les argougnez et me les bonnir aussi sec. Debout tas de fainéants face au bourguignon ! |
[Au passage des Matons, les frangins leur font un superbe bras d’honneur !] | |
1er Maton | Boss, tous les fiasses qui sont sur leurs guibolles sont bien des affranchis. |
le Taulier | Il en est de même au bourguignon. Tous ceux qui sont à coté de mézigues sont aussi de la cabane. Au nom du Mec des Mecs, la cabane est affranchie. Pour sa pomme, on va lui filer une sacrée batterie. |
[Tous tapent dans leurs pognes] | |
le Taulier | Posez vos derches les mecs. Frangin Greffier, veux tu nous filer le rapport du dernier turbin? |
le Greffier (après avoir vainement essayé de lire ses papiers) |
J’ai dit Frangin Taulier ! |
le Taulier | Vous mes pommes et vous les Matons, esgourdez s’il y a des niards qui réclament après le baratin du Greffier. |
1er Maton | Boss, les affranchis n’ont pas jaspiné. |
le Taulier | Mes potes, avant de chiquer contre, on va demander au Baratineur ce qu’il en pense. |
le Baratineur | Tous les mecs ont bien entravé, c’est banco ! |
le Taulier | Le dernier turbin est donc affranchi. Et pour pas vous voir roupiller en écoutant le Baratineur déboiser des conneries qui en foutent plein les esgourdes, je m’en vais lourder la taule. |
Frangins Matons, demandez aux potes de vos milieux s’il n’ont rien à baratiner. Je fais circuler l’sac aux baratins et celui de l’artiche pour aider les frangins qui sont tombés. Les boulots sont-ils contents ? | |
1er Maton | Ils le sont frangin Taulier. |
le Taulier | Second Maton, quel est ton âge ? |
2ème Maton | Trois berges vieux. |
le Taulier | Quel est le temps du boulot ? |
2ème Maton | Du bourguignon au plumard, patron. |
le Taulier | 1er Maton, quelle heure est-il ? |
1er Maton | C’est l’heure du plumard, Boss. J’entends sonner douze plombes et on en a ras le bol ! |
le Taulier | Debout, mes niards ! Au nom du Mec des Mecs, et pour sa bonne pomme, on va lui en filer une toute neuve, puisque la taule est débouclée. Allez les gars, tapez dans vos pognes. Ne bonnissez rien au dehors sur le turbin de ce soir et allons filer au paddok avec nos nanas. Mais avant, allons en écluser un ! |
Lire ou relire notre article « (Éphéméride) 9 février 1975 : Notre Frère Pierre Dac passe à l’Orient Éternel »
Avec la GLDF, découvrez la vie et l’histoire des Francs-maçons célèbres !
Le célèbre Dictionnaire de la franc-maçonnerie, sous la direction de Daniel Ligou (PUF nouvelle éd. augm., Quadrige Dicos poche, 2012) précise : « mentionné comme Maçon de la Grande Loge par Le carré long (bulletin de la Ligue universelle des Francs-Maçons, janvier 1982). Nous savons effectivement qu’il se fait initier sous l’influence de son ami Campion, mais fut déçu. »
Infos pratiques :
Musée d’Art et d’Histoire du judaïsme
Hôtel de Saint-Aignan, 71 rue du Temple – 75003 Paris
Mardi, mercredi, jeudi, vendredi : 11h-18h/Nocturne le mercredi jusqu’à 21h/Samedi et dimanche : 10h-19h
Le musée est fermé le lundi sauf pour les groupes scolaires
Consulter les informations pratiques pour connaître les nocturnes
Clôture des caisses 45 minutes avant la fermeture du musée.
SOURCE : https://450.fm/2023/04/20/pierre-dac-le-parti-den-rire-lexpo-au-mahj/
UNE FRANC-MAÇONNERIE RAVAGÉE PAR LA DÉMAGOGIE PROFANE 13 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions,Silhouette , ajouter un commentaireUNE FRANC-MAÇONNERIE RAVAGÉE PAR LA DÉMAGOGIE PROFANE
Voici un article de Bruno Etienne paru dans le Monde daté du samedi 9 septembre 2000 intitulé « Une franc-maçonnerie ravagée par la démagogie profane » qui nous laissera sans aucun doute songeur…
Bruno Étienne est un sociologue et politologue français né le 6 novembre 1937 à La Tronche (Isère) et mort à Aix-en-Provence le 4 mars 2009. Il était spécialiste de l’Algérie, de l’islam et de l’anthropologie du fait religieux. Il était membre du Grand Orient de France.
La franc-maçonnerie est une bien curieuse institution. Elle présente en effet un certain nombre de caractéristiques qui expliquent, en partie, les fantasmes et les interrogations qu’elle suscite depuis sa création en Angleterre entre 1717 et 1723, par des huguenots français émigrés, admirateurs de Newton et manipulés par la Royal Society. Elle se présente comme une société de pensée caractéristique du XVIIIe siècle ébloui par la « scienza nuova ».
Mais elle est plus une communauté pneumatique qu’un club parce qu’elle prétend également assumer la transmission d’une double tradition : celle des maçons « francs » et donc du « mestier », tradition fondée sur l’interprétation du mythe d’Hiram, le constructeur du Temple de Salomon, couplée à l’autre versant du mythe fondateur, la chevalerie templière. L’histoire et l’évolution de cette double fonction permettent de comprendre la crise qu’elle traverse actuellement, surtout en France et plus particulièrement dans le cas du Grand Orient de France (GODF).
Comment a-t-elle pu surmonter toutes les excommunications, condamnations et accusations justifiées ou pas ? Comment a-t-elle pu survivre par-delà ses errements et ses erreurs, ses nombreux avatars et multiples sectes, à tous les régimes politiques, y compris ceux qui l’ont martyrisée ? Certainement pas par ses prises de positions contingentes mais parce qu’elle a d’archétypal et de paradigmatique, c’est-à-dire en l’occurrence ses rites, ses mythes et surtout son système initiatique.
Elle est en effet une des rares sociétés initiatiques qui proposent, en Occident, une voie pour vaincre la mort. Cette méthode particulière est fondée sur le symbolisme et le raisonnement par analogie. Ce sont là ses vraies valeurs universelles qui la rattachent à ce que Jacquart appelle « l’humanitude ».
En France, elle a produit deux maçonneries qui cohabitent, volens nolens, depuis trois siècles mais qui semblent sur le point d’éclater aujourd’hui. La première a pour slogan « liberté, égalité fraternité » et entend participer activement à la construction de la société idéale. La seconde a pour devise « force, sagesse, beauté » et préfère travailler à la construction du Temple de l’Humanité à partir de la construction du temple intérieur par la maîtrise de l’ego.
L’une est extravertie, progressiste, mondaine ; l’autre est tournée vers l’intérieur, progressive, mystique. Certains ont cru pouvoir, sans schizophrénie excessive, appartenir aux deux tendances. Aujourd’hui, cela ne me paraît plus possible au Grand Orient de France.
En effet, celui-ci, en s’appropriant le monopole de l’interprétation républicaine, en s’identifiant à la seule République moniste, en se déclarant le dernier rempart contre la barbarie pluraliste, est devenu un profane qui ne fait que parodier les clivages de la société française. Comme celle-ci, il se raidit dans son incapacité à gérer le nouveau pluralisme culturel et religieux.
On trouve donc au sein du GODF des enragés de la République, des intégristes de la laïcité, des « athées stupides », selon la formule d’Anderson, le rédacteur de la première Charte maçonnique, des souverainistes et des fédéralistes minoritaires et même des spiritualistes plus discrets que les haut-parleurs médiatiques.
En ce sens, le GODF est un bon baromètre de l’état dans lequel se trouve la société française. Il est donc lui aussi à la croisée d’un cheminement et doit prendre des résolutions drastiques. Soit devenir un club politique comme les autres avec peu de chance de concurrencer ceux qui sont déjà en place si j’en juge par la médiocrité insigne de ses productions publiques. Soit proposer au contraire une réforme radicale qui permette à la franc-maçonnerie de répondre à un certain nombre d’angoisses de nos contemporains sur le plan de la spiritualité par la voie initiatique. L’importance des travaux de recherche des loges, surtout provinciales, qui ne viennent jamais à la surface, me convainc de cette possibilité. Dans ce dessein, il faut renoncer à un certain nombre de pratiques qui ont conduit les obédiences maçonniques à devenir des machineries administratives gérées par des professionnels dont la maîtrise est inversement proportionnelle à leur ego. Le GODF a étalé sur la place publique ses dissensions autour de six « Grands Maîtres » en moins de dix ans. Cela fait un peu désordre pour une « société secrète ».
Mais comment gérer neuf cents loges autrement ? Ce ne sont pas des conventions annuelles, manipulées par des professionnels, qui peuvent prendre des décisions aussi difficiles. Il nous faut donc nous retirer du système.
Tout simplement revenir aux Constitutions d’Anderson, à la loge libre (le GODF est une fédération de loges et des rites, pas une institution magistérielle centralisée), en reprenant nos travaux discrets, en étant dans la société civile et non dans l’Audimat, en acceptant la progressivité du parcours pour ensuite, forts des vérités acquises à l’intérieur, les proposer au monde, qui d’ailleurs n’en demande pas tant.
Les temps sont sans doute venus de repenser les structures qui ne produisent que de l’entropie et de la gratification de l’ego pour ceux qui veulent être califes à la place du calife. Ce sont d’ailleurs les apparatchiks élus selon un système complexe à plusieurs niveaux qui parlent le plus de « transparence démocratique ». Les temps sont venus parce que, dans le cadre européen, nous ne pourrons plus garder des obédiences nationales. Il faut donc imaginer et constituer d’autres ensembles, par le bas, par affinité, par localisation, par choix réfléchi.
Il faut commencer par dissocier la gestion du Grand Orient de France comme association de la loi de 1901 et celle de la progression initiatique. En ces temps de Jubilé où l’on met tout à plat, le GODF pourrait distribuer un patrimoine immobilier excessif aux démunis et permettre ainsi aux frères de revenir à plus de discrétion : nous n’avons pas à nous étaler sur la voie publique, ni à avoir pignon sur rue.
Mais les temps sont venus, surtout, de relire notre rituel sur la mort du maître Hiram. Le GODF a atteint ce degré de putréfaction où « la chair quitte les os » et donc pour que « l’acacia refleurisse » et que l’Ordre maçonnique survive, il nous faut renoncer aux structures des obédiences centralisées. Il nous faut renoncer à agir à tout prix pourvu qu’on agisse. Il nous faut renoncer aux déclarations publiques, intempestives, sans effet réel. Il nous faut renoncer à suivre la démagogie profane et audimatiste. Il nous faut reprendre le chemin de notre propre initiation, car seul le progrès individuel de chacun d’entre nous peut contribuer à l’amélioration de la société qui nous héberge.
Autrement dit, il nous faut remettre la charrue derrière les bœufs et nous remettre au travail par ascèse et herméneutique. Vivat ! Vivat ! Semper vivat.
© Le Monde daté du samedi 9 septembre 2000
Bruno Etienne, franc-maçon, est professeur de sciences politiques à l’Institut universitaire de France.
SOURCE : https://www.gadlu.info/une-franc-maconnerie-ravagee-par-la-demagogie-profane/
What A Wonderful World – Louis ARMSTRONG 2 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Silhouette , ajouter un commentaire
24/03/2018 : Notre Frère Arnaud Beltrame, héros national, passe à l’Orient Éternel 25 mars, 2023
Posté par hiram3330 dans : Contribution,Silhouette , ajouter un commentaire24/03/2018 : Notre Frère Arnaud Beltrame, héros national, passe à l’Orient Éternel
5 ans déjà ! Ne pas oublier.
Né le 18 avril 1973 à Étampes, dans l’Essonne, et mort en service le 24 mars 2018 à Carcassonne (Aude), Arnaud Beltrame est un officier supérieur de Gendarmerie.
Il est connu pour s’être volontairement substitué à un otage au cours de l’attaque terroriste menée par l’assassin islamiste Radouane Lakdim* du vendredi 23 mars 2018 à Trèbes, dans l’Aude, et avoir succombé aux blessures reçues durant ce lâche attentat.
Son sacrifice a eu un grand retentissement en France et à l’étranger, et lui a valu un hommage national.
- Colonel Arnaud Beltrame, Franc-Maçon de la Grande Loge de France
La Grande Loge de France a organisé une cérémonie en hommage au Frère Arnaud Beltrame le jeudi 19 avril 2018 au Grand Temple Pierre Brossolette, en l’Hôtel de la Grande Loge de France. Lors de la Tenue funèbre, le Vénérable Maître de la Loge « Jérôme Bonaparte » déclare :
« Tu t’es dressé à la hauteur de Jean Moulin et de Pierre Brossolette. Tu as porté haut les mots honneur, patrie et fidélité. Tu nous as rappelé qu’il vaut mieux mourir fidèle à ses idéaux que de vivre sans âme. »
Avant de conclure par une phrase du Talmud : « Qui sauve une vie sauve l’Humanité entière. »
Quant au Grand Orateur d’alors, il a prononcé les mots suivants : « C’était un homme mosaïque, officier, chrétien et franc-maçon. Nous luttons trop contre toute forme de prosélytisme pour nous approprier son acte. Sa mort n’est pas une défaite, car il nous guide des Ténèbres vers la Lumière. »
Un Temple porte désormais son nom rue Puteaux.
- Rappelons-nous l’hommage national à l’Hôtel des Invalides
Le 28 mars 2018, le cercueil est convoyé devant le Panthéon, d’où part un cortège funèbre jusqu’aux Invalides en passant par les quais de Seine. Le corbillard est précédé de motocyclistes de la Gendarmerie et entouré de la cavalerie de la Garde Républicaine. C’est la première fois, à la connaissance de l’historien Christian Amalvi, qu’un hommage national est précédé d’un tel cortège.
La cérémonie de l’hommage national est présidée par le président de la République Emmanuel Macron dans la cour de l’Hôtel des Invalides, en présence de trois anciens présidents de la République (Valéry Giscard d’Estaing, Nicolas Sarkozy et François Hollande) et de nombreuses personnalités politiques.
Les drapeaux sont mis en berne sur l’ensemble du territoire. La cérémonie est ouverte exceptionnellement au public. Dans son éloge funèbre, le président de la République indique que « le nom d’Arnaud Beltrame devenait celui de l’héroïsme français, porteur de cet esprit de résistance qu’est l’affirmation suprême de ce que nous sommes ». Il est fait, à titre posthume, commandeur de la Légion d’honneur.
- Arnaud Beltrame : un nom passé à la postérité
De nombreuses promotions de grandes écoles portant son nom et de nombreux lieux sont nommés en sa mémoire. Au printemps 2019, c’est plus de 150 communes qui ont déjà ou prévoient de baptiser à son nom une voie, une place ou un établissement communal.
Il s’agit d’une approximation car il n’existe pas de liste officielle et exhaustive de cet engouement qualifié de « France Arnaud Beltrame ». En 2020, un jardin Arnaud-Beltrame est inauguré dans le 3e arrondissement de Paris.
Nous n’oublierons jamais son courage, sa bravoure et son sacrifice. RESPECT !
« LE TRAVAIL POUR LOI, L’HONNEUR COMME GUIDE »
Telle est la devise de l’École Militaire Interarmes (EMIA), d’où le Colonel Arnaud Beltrame, Commandeur de la Légion d’honneur, était sorti major, promotion « Campagne d’Italie » (1999-2001).
LE TRAVAIL POUR LOI
Fort de sa foi et de son courage, l’officier issu du rang n’a d’autre alternative pour s’imposer. « Le travail est beau et noble » disait Alfred de Vigny, « Il donne une fierté et une confiance en soi que ne peut donner la richesse héréditaire ».
Conjugué à l’expérience, il donne aussi la compétence, source de confiance pour les subordonnés, et qui, le jour du combat, permettra de limiter la marge d’incertitudes.
Mais il implique d’autres qualités :
• La force de caractère, qui est le produit du courage et de la volonté. Forgée souvent dans la difficulté et dans l’adversité, elle permet d’oser, d’exiger toujours plus tant de soi-même que des autres, d’entreprendre davantage.
• L’honnêteté, qui incite à ne pas cacher ses faiblesses, mais plutôt à chercher à les corriger.
•La rigueur, c’est-à-dire la volonté d’appliquer strictement les règlements, d’aller jusqu’au bout de ses décisions, de ne pas se contenter de “L’à peu près”.
• La disponibilité, qui amène l’officier à donner la priorité au Devoir.
L’HONNEUR COMME GUIDE
L’officier de l’Ecole Militaire Interarmes qui a fait sienne cette devise défend entre autres les valeurs suivantes :
•La loyauté, c’est-à-dire la fidélité à tenir ses engagements, à respecter les lois et les conventions librement acceptées. La loyauté accroît la confiance et l’estime réciproque, l’esprit d’équipe.
•Le courage physique et moral, qui permet de continuer son action avec calme et fermeté en dépit du danger, de reconnaître ses erreurs, mais aussi de faire exécuter ses décisions lorsqu’elles sont justifiées.
•Le goût de l’effort, parade à l’approximatif, à la routine, à l’égoïsme et au scepticisme.
•L’esprit de discipline, pris dans un sens actif et participatif faisant appel à l’intelligence, à l’esprit d’initiative, au sens de la responsabilité.
•Le sens de l’humain, car le commandement n’est autre qu’une relation entre des hommes et que l’efficacité de l’un dépend en grande partie de la qualité de l’autre. Commander exige de comprendre les hommes, de les respecter.
•La solidarité enfin, la conscience de la communauté d’intérêt des officiers, de l’Armée et de la Nation en général, entraînant l’obligation morale de ne pas desservir les autres et de leur porter assistance.
En hommage. À mon camarade parachutiste et gendarme.
*Franco marocain de 25 ans inscrit au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, fiché S, Redouane Lakdim, petit délinquant devenu « soldat » de Daesh, né le 11 avril 1992 au Maroc et domicilié dans la petite cité Ozanam de Carcassonne, a abattu, ce vendredi 23 mars, quatre personnes dans les attaques sanglantes de Carcassonne et Trèbes, dans l’Aude.
Sources : Wikipédia, Wikimedia Commons, Direction générale Gendarmerie nationale (DGGN), www.ladepeche.fr, www.francetvinfo.fr
Réponse au discours de réception de Mme Simone Veil 21 mars, 2023
Posté par hiram3330 dans : Silhouette , ajouter un commentaireRéponse au discours de réception de Mme Simone Veil
Le 18 mars 2010
Réception de Mme Simone Veil
C’est une joie, Madame, et un honneur de vous accueillir dans cette vieille maison où vous allez occuper le treizième fauteuil qui fut celui de Racine.
De Racine, Madame ! De Racine !
Ce qui flotte ce soir autour de nous, ce sont les plaintes de Bérénice :
Je n’écoute plus rien ; et, pour jamais, adieu…
Pour jamais ! Ah ! Seigneur, songez-vous en vous-même
Combien ce mot cruel est affreux quand on aime ?
Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous,
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ?
Que le jour recommence et que le jour finisse
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice…
ou l’immortel dialogue entre Phèdre et sa nourrice Œnone :
Œnone
Quel fruit recevront-ils de leurs vaines amours ?
Ils ne se verront plus.
Phèdre
Ils s’aimeront toujours.
Avec La Fontaine, qui fut son contemporain, avec Ronsard, avec Hugo, avec Nerval, avec Baudelaire et Verlaine, avec Péguy, avec Apollinaire et Aragon, Racine est l’un de nos plus grands poètes. Et peut-être le plus grand de tous dès qu’il s’agit de la passion – et surtout de la passion malheureuse. Je suis chargé ici de vous expliquer en trois-quarts d’heure, Madame, pourquoi nous sommes heureux et fiers de vous voir lui succéder.
Je ne voudrais pas que le vertige vous prît ni que la tâche vous parût trop lourde. Vous succédez à Racine, c’est une affaire entendue. Vous succédez aussi à Méziriac, à Valincour, à La Faye, à l’abbé de Voisenon, à Dureau de La Malle, à Picard, à Arnault, tous titulaires passagers de votre treizième fauteuil et qui n’ont pas laissé un nom éclatant dans l’histoire de la pensée et des lettres françaises. Ils constituent ce que Jules Renard, dans son irrésistible Journal, appelle « le commun des immortels ».
Depuis le cardinal de Richelieu, notre fondateur, l’Académie est faite de ces contrastes. Ce sont eux qui permettent à un autre de nos confrères, Paul Valéry, de nous décocher une de ses flèches les plus acérées : « L’Académie est composée des plus habiles des hommes sans talent et des plus naïfs des hommes de talent. »
Rassurez-vous, Madame. Ou, pour parler comme Racine :
Cessez de vous troubler, vous n’êtes point trahie.
Ce n’est ni pour votre naïveté ni pour votre habileté que nous vous avons élue. C’est pour bien d’autres raisons. Ne croyez pas trop vite que vous êtes tombée dans un piège.
Il est vrai que vous aviez le droit de le craindre. L’exercice rhétorique et traditionnel auquel nous nous livrons aujourd’hui vous et moi peut être redoutable. Quand Molé reçoit Alfred de Vigny, qu’il ne porte pas dans son cœur, il le traite avec tant de rudesse que l’auteur de La Mort du loup en demeura longtemps meurtri. Plus près de nous, Albert de Mun, catholique rigoureux, reçoit Henri de Régnier dont les romans, à l’époque – les temps ont bien changé –, passaient pour sulfureux. Dans sa réponse au remerciement d’Henri de Régnier, Albert de Mun lui lance, ici même : « Je vous ai lu, Monsieur, je vous ai même lu jusqu’au bout. Car je suis capitaine de cuirassiers. » Henri de Régnier encaissa le coup comme Vigny, mais des témoins assurent qu’à la sortie, là-haut, derrière nous, il aurait lâché entre ses dents : « Je le rattraperai au Père Lachaise. »
Vous n’avez pas à redouter aujourd’hui, Madame, des avanies à la Molé ou à l’Albert de Mun. De toutes les figures de notre époque, vous êtes l’une de celles que préfèrent les Français. Les seuls sentiments que vous pouvez inspirer et à eux et à nous sont l’admiration et l’affection. Je voudrais essayer de montrer pourquoi et comment vous incarnez avec plus d’éclat que personne les temps où nous avons vécu, où le Mal s’est déchaîné comme peut-être jamais tout au long de l’histoire et où quelques-uns, comme vous, ont lutté contre lui avec détermination et courage et illustré les principes, qui ne nous sont pas tout à fait étrangers, de liberté, d’égalité et de fraternité.
L’histoire commence comme un conte de fées. Il était une fois, sous le soleil du Midi, à Nice, une famille sereine et unie à qui l’avenir promettait le bonheur et la paix. Le père est architecte, avec des ancêtres en Lorraine. La mère a quelque chose de Greta Garbo. Vous avez deux sœurs, Milou et Denise, et un frère, Jean. Vous êtes la petite dernière de cette famille Jacob qui est juive et très française, patriote et laïque. L’affaire Dreyfus avait à peine ébranlé son insouciance. On racontait chez vous que lorsque l’innocence du capitaine Dreyfus avait été reconnue, votre grand-père avait débouché une bouteille de champagne et déclaré tranquillement : « Les descendants de 89 ne pouvaient pas se tromper. »
Alors que votre mère était plutôt de gauche, votre père était plutôt à droite. Il lisait un quotidien de droite, L’Éclaireur, et elle, L’Œuvre, Marianne ou Le Petit Niçois, de tendance socialiste.
Le plus frappant dans cette famille si républicaine et si française, c’est son caractère foncièrement laïc. Une de vos cousines italiennes, de passage chez vous, avait pris l’initiative de vous entraîner dans une synagogue. Votre père l’avait appris. Il prévint votre cousine qu’en cas de récidive, elle ne serait plus reçue dans votre maison. L’épisode m’a rappelé une formule de mon ami le plus intime. Il se promenait un dimanche dans Paris avec son fils qui est devenu de nos jours un de nos acteurs et de nos créateurs les plus célèbres. Passant devant une église, le petit Édouard manifesta le désir d’y entrer. « Allons ! viens ! lui dit son père qui pensait à autre chose et qui était pressé, c’est fermé le dimanche. » Il y a des catholiques sincères qui sont franchement laïques. Vous étiez juifs et laïques. Vous mangiez une choucroute le jour de Kippour.
Votre père avait quitté Paris pour Nice parce qu’il pensait que la Côte d’Azur allait connaître un développement spectaculaire. Dès le début des années trente, la crise, venue d’Amérique, frappait votre famille comme elle frappait tous les Français et même l’Europe entière. Vous étiez obligés de vous restreindre, mais la vie continuait, toujours aussi gaie et charmante, entre Nice et La Ciotat où votre père avait construit une maison de vacances. Votre mère jouait au tennis avec un jeune homme brillant qui revenait d’un séjour à Berlin : c’était Raymond Aron.
Le 3 septembre 1939, la guerre éclatait. Le 10 mai 40, l’offensive allemande se déclenchait. Le 13 mai, Winston Churchill prononçait à la Chambre des Communes un des discours les plus célèbres de l’histoire. « Je n’ai rien d’autre à offrir que du sang, de la sueur et des larmes. » Le paradis terrestre où vous aviez vécu s’engloutissait dans le passé.
Le 3 octobre 40, le premier statut des Juifs était édicté par Vichy. Votre père, très « ancien combattant », avait peine à admettre que le maréchal Pétain pût être responsable de ces honteuses dispositions. Il se vit pourtant retirer le droit d’exercer son métier. L’existence devenait difficile. Deux ans plus tard, les Alliés débarquaient en Afrique du Nord et l’armée allemande envahissait la zone libre. Nice et le Sud-Est de la France furent occupés par les Italiens qui adoptaient une attitude de tolérance à l’égard des Juifs français. Au point que le Midi constitua pour un bref laps de temps un refuge pour les Juifs. Nice vit ainsi sa population s’accroître, en quelques mois, de près de 30 000 habitants. Mais, une autre année plus tard, les Italiens évacuaient la région. En septembre 1943, avant même les troupes allemandes qui prenaient le relais des troupes italiennes, la Gestapo débarquait à Nice avec Aloïs Brunner, déjà célèbre à Vienne, qui dirigera plus tard le camp de Drancy. Le crime se mettait en place.
Le 29 mars 1944, vous passez à Nice les épreuves du baccalauréat, avancées de trois mois par crainte d’un débarquement allié dans le Sud de la France. Le lendemain, 30 mars, en deux endroits différents, par un effroyable concours de circonstances, votre mère, votre sœur Milou, votre frère Jean et vous-même êtes arrêtés par les Allemands.
Huit jours plus tard, vous arrivez à Drancy où les conditions matérielles et morales sont déjà très dures. Vous ne savez plus rien de votre père ni de votre sœur Denise. Vous êtes très vite séparées de votre frère. Une semaine encore – le calendrier se déroule impitoyablement – et le 13 avril, à cinq heures du matin, en gare de Bobigny, vous montez avec votre mère et votre sœur dans un convoi de wagons à bestiaux en direction de l’Est. Le voyage dure trois jours – du 13 avril à l’aube au 15 avril au soir. Le 15 avril 1944, en pleine nuit, sous les cris des SS, les aboiements des chiens, les projecteurs aveuglants, vous débarquez sur la rampe d’accès du camp d’Auschwitz-Birkenau. Vous entrez en enfer. Vous avez seize ans, de longs cheveux noirs, des yeux verts et vous êtes belle.
Des déportés vous attendent sur la rampe de débarquement. Ils vous crient en français : « Laissez vos bagages dans les wagons, mettez-vous en file, avancez. » Tout à coup, une voix inconnue vous murmure à l’oreille :
- Quel âge as-tu ?
Vous répondez :
- Seize ans.
Un silence. Puis, tout bas et très vite :
- Dis que tu en as dix-huit.
La voix inconnue vous a sauvé la vie. Des enfants et des femmes âgées ou malades sont empilés dans des camions que vous n’avez jamais revus. Votre mère, Milou et vous, vous vous retrouvez toutes les trois dans la bonne file – la « bonne » file ! –, entourées de kapos qui vous prennent vos sacs, vos montres, vos bijoux, vos alliances. Une amie de Nice, arrêtée avec vous, conservait sur elle un petit flacon de Lanvin. Sous les cheminées des crématoires d’où sort une fumée pestilentielle qui obscurcit le ciel, vous vous aspergez, à trois ou quatre, de ce dernier lambeau de civilisation avant la barbarie.
La nuit même de votre arrivée au camp, les kapos vous font mettre en rang et un numéro indélébile vous est tatoué sur le bras. Il remplace l’identité que vous avez perdue, chaque femme étant enregistrée sous son seul numéro avec, pour tout le monde, le prénom de Sarah. Vous êtes le n° 78651. Vous appartenez désormais, avec des millions d’autres, au monde anonyme des déportés. Et, à l’âge où les filles commencent à se détourner de leurs jeux d’enfant pour rêver de robes et de romances au clair de lune, vous êtes l’image même de l’innocence : votre crime est d’être née dans la famille honorable et très digne qui était la vôtre.
Dans l’abîme où vous êtes tombée, dans ce cauchemar devenu réalité, il faut s’obstiner à survivre. Survivre, à Auschwitz, comme à Mauthausen, à Treblinka, à Bergen-Belsen, est une tâche presque impossible. Le monstrueux prend des formes quotidiennes. À l’intérieur de l’industrie du massacre, des barèmes s’établissent : pour obtenir une cuiller, il faut l’organiser, selon le terme consacré, c’est-à-dire l’échanger contre un morceau de pain. Dans ce monde de la terreur et de l’humiliation, fait pour détruire tout sentiment humain et dont le spectre ne cesse de hanter notre temps, la charité vit encore. Vous portez des haillons. Une Polonaise, rescapée du ghetto de Varsovie, vous donne deux robes. Quel bonheur ! Vous en donnez une à une amie qui était architecte et qui parlait français − et aussi misérable que vous.
Car vous vous faites des amies : Ginette, qui a votre âge, Marceline Loridan, plus jeune de dix-huit mois, qui a quatorze ou quinze ans. Vous devez vous défendre de tout : de la faim, de la brutalité, de la violence, des coups – mais aussi de la compassion trompeuse et trop entreprenante.
Une des chefs du camp, une Lagerälteste, était une ancienne prostituée du nom de Stenia, particulièrement dure avec les déportés. Mystère des êtres. Sans rien exiger en échange, Stenia vous sauve deux fois de la mort, votre mère, Milou et vous : une première fois à Birkenau en vous envoyant dans un petit commando, une seconde fois à Bergen-Belsen en vous affectant à la cuisine. À la libération des camps, elle sera pendue par les Anglais.
Nous sommes en janvier 45. L’avance des troupes soviétiques fait que votre groupe est envoyé à Dora, commando de Buchenwald. Le voyage est effroyable : le froid et le manque de nourriture tuent beaucoup d’entre vous. Vous ne restez que deux jours à Dora. On vous expédie à Bergen-Belsen. Votre mère, épuisée, y meurt du typhus le 13 mars. Un mois plus tard, les troupes anglaises entrent à Bergen-Belsen et vous libèrent. Mais cette libération est loin d’être la fin de vos malheurs sans nom.
Les Anglais sont épouvantés du spectacle qu’ils découvrent dans les camps : des monceaux de cadavres empilés les uns sur les autres et que des squelettes vivants précipitent dans des fosses. Vous êtes accablée par la mort de votre mère et par la santé de votre sœur, qui n’a plus que la peau sur les os, qui est rongée de furoncles et qui, à son tour, a attrapé le typhus. Le retour à Paris, en camion d’abord, puis en train, demande longtemps, très longtemps, et il est amer. Plus d’un mois après la libération de Bergen-Belsen, vous arrivez enfin à l’hôtel Lutetia. Vous apprenez alors seulement le sort de votre sœur Denise, dont vous n’aviez aucune nouvelle depuis Drancy. Déportée à Ravensbrück, puis à Mauthausen, elle vient de rentrer en France. Le sort de votre père et de votre frère, vous ne le saurez que bien plus tard : déportés dans les pays Baltes, ils ont disparu à jamais entre Kaunas et Tallin.
Votre famille est détruite. Vous entendez des gens s’étonner : « Tiens ! elles sont revenues ? C’est bien la preuve que ce n’était pas si terrible… » Le désespoir vous prend.
En m’adressant à vous, Madame, en cette circonstance un peu solennelle, je pense avec émotion à tous ceux et à toutes celles qui ont connu l’horreur des camps de concentration et d’extermination. Leur souvenir à tous entre ici avec vous. Beaucoup ont péri comme votre père et votre mère. Ceux qui ont survécu ont éprouvé des souffrances que je me sens à peine le droit d’évoquer. La déportation n’est pas seulement une épreuve physique ; c’est la plus cruelle des épreuves morales. Revivre après être passé par le royaume de l’abjection est presque au-dessus des forces humaines. Vous qui aimiez tant une vie qui aurait dû tout vous donner, vous n’osez plus être heureuse. Pendant plusieurs semaines, vous êtes incapable de coucher dans un lit. Vous dormez par terre. Les relations avec les autres vous sont difficiles. Être touchée et même regardée vous est insupportable. Dès qu’il y a plus de deux ou trois personnes, vous vous cachez derrière les rideaux, dans les embrasures des fenêtres. Au cours d’un dîner, un homme plutôt distingué vous demande si c’est votre numéro de vestiaire que vous avez tatoué sur votre bras.
À plusieurs reprises, dans des bouches modestes ou dans des bouches augustes, j’ai entendu parler de votre caractère. C’était toujours dit avec respect, avec affection, mais avec une certaine conviction : il paraît, Madame, que vous avez un caractère difficile. Difficile ! Je pense bien. On ne sort pas de la Shoah avec le sourire aux lèvres. Avec votre teint de lys, vos longs cheveux, vos yeux verts qui viraient déjà parfois au noir, vous étiez une jeune fille, non seulement très belle, mais très douce et peut-être plutôt rêveuse. Une armée de bourreaux, les crimes du national-socialisme et deux mille cinq cents survivants sur soixante-seize-mille Juifs français déportés vous ont contrainte à vous durcir pour essayer de sauver votre mère et votre sœur, pour ne pas périr vous-même. Permettez-moi de vous le dire avec simplicité : pour quelqu’un qui a traversé vivante le feu de l’enfer et qui a été bien obligée de perdre beaucoup de ses illusions, vous me paraissez très peu cynique, très tendre et même enjouée et très gaie.
Ce qui vous a sauvé du désespoir, c’est le courage, l’intelligence, la force de caractère et d’âme. Et c’est l’amour : il succède à la haine.
Les Veil avaient le même profil que les Jacob. Par bien des côtés, ils évoquaient la famille que vous aviez perdue : des Juifs non religieux, profondément cultivés, ardemment attachés à la France, redevables envers elle de leur intégration. Ils aimaient les arts comme vos parents – et surtout la musique. À l’automne 46, vous épousez Antoine Veil. Il vous donnera trois fils : Jean, Nicolas, le médecin – malheureusement disparu il y a quelques années –, Pierre-François. Vous êtes maintenant mariés depuis près de soixante-cinq ans, vous avez une douzaine de petits-enfants et plusieurs arrière-petits-enfants, et Antoine est toujours attentif auprès de vous. Puisque nous parlons très librement et pour ainsi dire entre nous, laissez-moi vous assurer, Madame, au cas où vous en auriez besoin, que quelqu’un qui, comme Antoine, aime autant la musique et Chateaubriand ne peut pas être tout à fait mauvais.
L’histoire des hommes est tragique et risible : en rentrant des épreuves atroces de la déportation, vous apprenez que vous avez été reçue aux épreuves dérisoires de ce bac passé à seize ans, la veille même de votre arrestation, le 29 mars 1944. Vous avez toujours eu envie de devenir avocate. Après être passée par Sciences-Po, vous annoncez à votre mari, qui va être reçu, de son côté, à l’École nationale d’administration avant de se retrouver inspecteur des Finances, votre intention de vous inscrire au barreau. À votre stupeur, Antoine, qui a des idées bien arrêtées et qui ne nourrit pas une haute estime à l’endroit des avocats, vous répond : « Il n’en est pas question ! » C’est ainsi qu’abandonnant votre vocation d’avocat, vous décidez de passer le concours de la magistrature. Ajoutons aussitôt que votre fils aîné Jean et votre cadet, Pierre-François, sont devenus tous les deux des avocats célèbres. Ils participent l’un et l’autre à la plupart des grandes affaires judiciaires et des grandes causes de notre époque.
Votre parcours dans la magistrature n’est pas de tout repos. Vous êtes une femme, vous êtes juive, vous êtes mariée, vous avez trois enfants. Quelle idée ! Beaucoup tentent par tous les moyens de vous dissuader. « Imaginez, vous dit-on, qu’un jour vous soyez contrainte de conduire un condamné à mort à l’échafaud ! » J’aime votre réponse : « J’assumerais. »
Nommée à la direction de l’administration pénitentiaire, vous avez parfois le sentiment de plonger dans le Moyen Âge : les conditions de détention vous paraissent inacceptables. Vous découvrez la grande misère des prisons de France. Au lieu de permettre une réinsertion des délinquants condamnés, elle les enfonce plutôt dans leur malédiction. Vous comprenez assez vite que le problème des prisons se heurte à deux obstacles : les contraintes budgétaires et, plus sérieux encore, l’état de l’opinion. Les contribuables français ne sont pas prêts à payer des impôts pour améliorer le niveau de vie dans les prisons.
De la situation des Algériens emprisonnés à la lutte contre la délinquance sexuelle et la pédophilie, le plus souvent qualifiée à l’époque d’attouchement et trop rarement poursuivie, les dossiers difficiles ne vous manquent pas. De 1957 à 1964, ce sont sept années harassantes – et qui vous passionnent.
Dans cette période où j’admirais éperdument le général de Gaulle, vous n’êtes pas gaulliste. Vous vous situez plus à gauche. Votre grand homme est Mendès France et vous votez souvent socialiste. Vous vous prononcez surtout avec ardeur en faveur de la construction européenne, et le rejet par les gaullistes, par les communistes, par Mendès France lui-même du projet de Communauté européenne de Défense, la fameuse C.E.D., vous attriste, Antoine et vous. Vous observez avec intérêt le bouillonnement d’idées symbolisé par la création de l’Express, vous vous sentez proche de Raymond Aron, vous nourrissez l’espérance de voir émerger une troisième force entre gaullisme et communisme. Après mai 68 – auquel votre deuxième fils participe assez activement – et le départ du Général en 1969, Georges Pompidou vous nomme au poste prestigieux, mais franchement plus calme après les tumultes de l’administration pénitentiaire, de secrétaire du Conseil supérieur de la magistrature.
Le 2 avril 1974, la mort de Georges Pompidou est un choc pour vous comme pour tous les Français. Des trois concurrents en lice pour lui succéder – Jacques Chaban-Delmas, Valéry Giscard d’Estaing, François Mitterrand –, le père de la « nouvelle société » vous apparaît comme le plus authentique réformateur. Vous vous apprêtez à voter pour lui lorsque soudain sa campagne s’enlise. Une émission de télévision où Chaban apparaît flanqué d’un Malraux éprouvé et à peine compréhensible donne le coup de grâce à ses ambitions. Au second tour, vous êtes tentée de vous abstenir. Contrairement à ce qui a été souvent colporté, après avoir hésité, vous votez pour Giscard.
C’est ici qu’apparaît un nouveau personnage, convivial et chaleureux : Jacques Chirac. Il venait de se rallier à Giscard et de lui apporter le soutien des fameux Quarante-trois venus du mouvement gaulliste. Vous étiez liée avec sa principale conseillère, magistrat comme vous, Marie-France Garaud. Un magazine féminin publie un article sur un éventuel et imaginaire gouvernement de femmes. Sur ce podium virtuel, à la surprise, il faut le dire, de beaucoup, et d’abord de vous-même, vous étiez propulsée au poste de Premier ministre.
Un soir, à un dîner chez des amis, où se fait sentir une certaine ironie à l’égard de l’improbable journalisme féminin et de ses vaticinations, le téléphone sonne. La maîtresse de maison vous fait un signe : c’est pour vous. Au bout du fil, Jacques Chirac qui vient d’être désigné comme Premier ministre par Giscard. Il vous offre d’entrer dans son gouvernement que le président Giscard d’Estaing, en novateur, souhaite aussi large que possible. Vous n’hésitez pas longtemps. Vous devenez ministre de la Santé. Vous êtes la seule femme ministre : Françoise Giroud, avec qui vous entretiendrez des relations qui ne seront pas toujours chaleureuses, est secrétaire d’État à la Condition féminine.
Il y a un homme, dont les idées politiques ne se confondent pas toujours avec les vôtres, avec qui vous allez vous entendre aussitôt : c’est le confident fidèle de Giscard, c’est le ministre de l’Intérieur, c’est le véritable Premier ministre bis de votre gouvernement : Michel Poniatowski. Il a été ministre de la Santé dans le dernier gouvernement Pompidou – qui était dirigé par Pierre Messmer dont vous venez de retracer l’héroïsme, la grandeur, les tourments et l’attachement à cette Légion étrangère qui, le matin de ses obsèques, défilera en silence, dans la cour des Invalides : il avait demandé – quelle leçon ! – qu’aucun discours ne fût prononcé.
C’est Michel Poniatowski qui vous parle le premier d’un problème urgent et grave : l’avortement clandestin. On pouvait imaginer que cette question relevât du ministère de la Justice. Mais le nouveau garde des Sceaux, Jean Lecanuet, pour désireux qu’il fût de traiter cette affaire, n’était pas convaincu de l’urgence du débat. C’est vous que le président de la République et le Premier ministre vont charger de ce dossier écrasant.
Depuis plusieurs années, la situation de l’avortement clandestin en France devenait intenable. L’avortement est toujours un drame. Avec la vieille loi de 1920 qui était encore en vigueur, il devenait une tragédie. Un film de Claude Chabrol s’était inspiré de l’exécution « pour l’exemple », sous le régime de Vichy, de Marie-Louise Giraud, blanchisseuse à Cherbourg. En 1972, une mineure violée avait été poursuivie pour avortement devant le tribunal de Bobigny. À la suite d’une audience célèbre, Gisèle Halimi avait obtenu son acquittement. En même temps, pendant que se déroulaient des histoires plus sordides et plus sinistres les unes que les autres, des trains et des cars entiers partaient régulièrement pour l’Angleterre ou pour les Pays-Bas afin de permettre à des femmes des classes aisées de se faire avorter.
À beaucoup d’hommes et de femmes, de médecins, de responsables politiques, effarés de voir les dégâts entraînés par les avortements sauvages dans les couches populaires, et à vous, cette situation paraissait intolérable. Mais les esprits étaient partagés, souvent avec violence. Chez les hommes, évidemment, plus que chez les femmes. Vous finissez par vous demander si les hommes ne sont pas, en fin de compte, plus hostiles à la contraception qu’à l’avortement. La contraception consacre la liberté des femmes et la maîtrise qu’elles ont de leur corps. Elle dépossède les hommes. L’avortement, en revanche, qui meurtrit les femmes, ne les soustrait pas à l’autorité des hommes. Une des clés de votre action, c’est que vous êtes du côté des femmes. Avec calme, mais avec résolution, vous vous affirmez féministe.
Les difficultés, souvent cruelles, auxquelles vous vous heurtez en 1974 ne se sont pas dissipées trente-cinq ans plus tard. Il y a à peine un an, une affaire dramatique secouait Recife, l’État de Pernambouc, le Brésil et le monde entier. Une fillette de neuf ans, qui mesurait un mètre trente-six et pesait trente-trois kilos, avait été violée par son beau-père depuis l’âge de six ans et attendait des jumeaux. L’avortement, au Brésil, comme dans la plupart des pays d’Amérique latine, est considéré comme un crime. La loi n’autorise que deux exceptions : viol ou danger pour la vie de la mère. Les deux cas s’appliquant, l’avortement avait été pratiqué. Aussitôt l’archevêque de Recife et Olinda, Dom José Cardoso Sobrinho, qui avait succédé à ce poste à Dom Helder Camara, porte-parole de la théologie de la libération, avait frappé d’excommunication les médecins responsables de l’avortement ainsi que la mère de la fillette. Le scandale est venu surtout de la décision de l’archevêque de ne pas étendre l’excommunication au beau-père de l’enfant sous prétexte que le viol est un crime moins grave que l’avortement.
Ce sont des réactions de cet ordre que vous affrontez en 1974. Elles ne viennent pas principalement des autorités religieuses. Les catholiques, les protestants, les juifs étaient très divisés. Les catholiques intégristes vous étaient – et vous restent – farouchement opposés. Certains luthériens étaient hostiles à votre projet alors que la majorité de l’Église réformée y était favorable. Parmi les juifs religieux, quelques-uns vous ont gardé rancune : il y a cinq ans, des rabbins intégristes de New York ont écrit au président de la République polonaise pour contester le choix de l’auteur de la loi française sur l’interruption volontaire de grossesse comme représentant des déportés au 60e anniversaire de la libération d’Auschwitz.
Une minorité de l’opinion s’est déchaînée – et se déchaîne encore – contre vous. L’extrême droite antisémite restait violente et active. Mais d’autres accusations vous touchaient peut-être plus cruellement. « Comment vous, vous disait-on, avec votre passé, avec ce que vous avez connu, pouvez-vous assumer ce rôle ? » Le mot de génocide était parfois prononcé.
L’agitation des esprits était à son comble. À l’époque, la télévision ne retransmettait pas les débats parlementaires. Au moment où s’ouvre, sous la présidence d’Edgar Faure, la discussion du projet à l’Assemblée nationale, une grève éclate à l’O.R.T.F. En dépit à la fois de la coutume et de la grève, des techniciens grévistes s’installent dans les tribunes et diffusent le débat en direct. Ce sont pour vous de grands moments d’émotion et d’épuisement. Beaucoup d’entre nous, aujourd’hui et ici, se souviennent encore de ce spectacle où la grandeur se mêlait à la sauvagerie. Je vous revois, Madame, faisant front contre l’adversité avec ce courage et cette résolution qui sont votre marque propre. Les attaques sont violentes. À certains moments, le découragement s’empare de vous. Mais vous vous reprenez toujours. Vous êtes une espèce d’Antigone qui aurait triomphé de Créon. Votre projet finit par être adopté à l’Assemblée nationale par une majorité plus large que prévu : deux cent quatre-vingt-quatre voix contre cent quatre-vingt-neuf. La totalité des voix de gauche et – c’était une chance pour le gouvernement – une courte majorité des voix de droite.
Restait l’obstacle tant redouté du Sénat, réputé plus conservateur, surtout sur ce genre de questions. Le gouvernement craignait l’obligation d’une seconde lecture à l’Assemblée nationale pour enregistrement définitif. La surprise fut l’adoption du texte par le Sénat avec une relative facilité. C’était une victoire historique. Elle inscrit à jamais votre nom au tableau d’honneur de la lutte, si ardente dans le monde contemporain, pour la dignité de la femme.
Le temps, pour vous, passe à toute allure. Pour moi aussi. Il faut aller vite. Après avoir été du côté de la liberté des hommes et de l’égalité des femmes, vous consacrez votre énergie, votre courage, votre volonté inébranlables à une cause nouvelle : la fraternité entre les peuples. Y compris la réconciliation, après l’horreur, avec l’Allemagne d’hier et de demain, celle de Bach, de Kant, de Goethe, de Hölderlin, de Schumann, d’Henri Heine, de Husserl, de Thomas Mann et celle de l’Union européenne.
Aux élections européennes de juin 1979, la liste que vous entraînez, sur proposition du président Giscard d’Estaing, en compagnie de Jean François Deniau, dont vous me permettrez de prononcer le nom avec affection, remporte une victoire éclatante : elle arrive première, assez loin devant celle du parti socialiste, plus de dix points au-dessus de la liste gaulliste. Vous voilà député à Strasbourg. Et, dès la première séance, à la mi-juillet, avec trois voix de plus que la majorité absolue, vous êtes élue, pour trente mois, à la présidence du Parlement européen.
Citoyenne de l’Europe au niveau le plus élevé, vous nouez des liens avec Helmut Schmidt, avec Margaret Thatcher, avec le roi d’Espagne, avec Ronald Reagan, avec le couple Clinton, avec le roi de Jordanie, avec Abdou Diouf, avec tant d’autres – avec deux hommes d’exception surtout, pour qui vous éprouvez une admiration particulière : Nelson Mandela et Anouar al-Sadate. Après son voyage historique à Jérusalem, vous invitez le dirigeant égyptien à prendre la parole devant le Parlement européen. C’était l’époque où l’hypothèse d’un État palestinien était pratiquement acquise. Elle n’a cessé, hélas, de s’estomper depuis lors.
Vous avez toujours été libre, véhémente et sereine. Vous le restez, tout au long de vos hautes fonctions, et au-delà. Sur plusieurs points, vous marquez votre indépendance : vous éprouvez des réserves à l’égard de l’idéologie des droits de l’homme, vous vous interrogez sur l’absence de prescription des crimes contre l’humanité. L’arrivée au pouvoir de François Mitterrand provoque chez vous des sentiments contrastés : admiration pour le discours présidentiel prononcé en 1984 devant le Bundestag, avec la fameuse formule sur les pacifistes à l’Ouest et les missiles à l’Est ; méfiance à l’égard du projet Mitterrand d’Europe confédérale qui, en 1991, à l’effroi des pays de l’Est, privilégiait outrageusement la Russie aux détriments des États-Unis. Vous ne tardez surtout pas beaucoup à mettre le doigt sur des problèmes qui, aujourd’hui encore, trente ans plus tard, pèsent sur les institutions européennes : les clivages politiques nationaux qui parasitent les débats communautaires ; l’éparpillement des instances européennes entre Bruxelles, Strasbourg et Luxembourg ; la contradiction permanente surtout entre l’aspiration à la communauté et la fidélité aux racines ancestrales – au point que votre conception de l’Europe a fini par évoluer. Vous croyez moins désormais à un édifice européen monolithique qu’à un agrégat de nations.
Le 30 mars 1993, après avoir quitté la scène européenne, vous êtes sur le point de vous envoler pour la Namibie où vous appelle la lutte contre le sida quand un coup de téléphone vous surprend une fois de plus : Édouard Balladur, le tout nouveau Premier ministre de la deuxième cohabitation vous propose de revenir au ministère de la Santé, élargi ce coup-ci aux Affaires Sociales et à la Ville, avec rang de ministre d’État.
Avec la cohabitation, le paysage a changé. Les problèmes que vous allez rencontrer dans ces fonctions nouvelles ou renouvelées sont d’une actualité brûlante : déficit de la Sécurité sociale, quartiers réputés « difficiles », montée de communautés – notamment de la communauté musulmane – trop souvent repliées sur elles-mêmes. Vous faites face jusqu’à l’élection à la présidence de la République de Jacques Chirac, suivie, deux ans plus tard, du retour de la gauche au pouvoir avec la troisième cohabitation. Vous décidez alors de vous inscrire à l’U.D.F. Mais vos relations se révèlent vite difficiles – et c’est plutôt une litote – avec son secrétaire général, François Bayrou. Vous avez une passion pour la politique, mais dès qu’elle devient politicienne, elle cesse de vous intéresser. Vous n’hésitez pas longtemps : vous renoncez à la politique.
La vie, qui a été si dure avec vous, ne cesse, cependant, comme pour s’excuser, de vous offrir des chances qui sont autant d’hommages à votre personne, à votre intégrité et à votre talent. Créé par la Constitution de 1958 pour veiller à son respect, composé de membres de droit qui sont les anciens présidents de la République et de neuf membres nommés – trois par le président de la République, trois autres par le président du Sénat, trois autres encore par le président de l’Assemblée nationale –, le Conseil constitutionnel veille à la légitimité des lois et à la régularité des élections. Vous venez à peine de quitter l’U.D.F. que René Monory, président du Sénat, vous nomme, pour neuf ans, au Conseil constitutionnel.
Vous accomplirez au sein de la haute magistrature des tâches essentielles que le temps m’empêche d’énumérer dans le détail. Disons rapidement que vous y confirmez la loi sur la bio-éthique et que vous y tranchez le débat récurrent de la primauté du droit communautaire sur la législation nationale. À aucun moment, dans ces fonctions éminentes que vous exercez avec une loyauté parfaite, vous n’abandonnez vos convictions. Le rejet par les Français, en 2005, du projet de Constitution européenne vous consterne ; vous n’êtes guère favorable au quinquennat ; l’élection du président de la République au suffrage universel direct ne répond même pas à vos vœux profonds – ce qui ne vous empêche pas, il y a près de trois ans et en dépit de vos réserves sur la dérive présidentialiste de nos institutions, de vous déclarer pour Nicolas Sarkozy ; vous êtes ardemment en faveur de la parité et de la discrimination positive. Dans une longue interview accordée à Pierre Nora pour sa revue Le Débat, vous n’hésitez pas à déplorer l’absence en France d’un véritable dialogue démocratique. Lorsqu’il y a deux ans à peine vous quittez le Conseil constitutionnel, vous avez le sentiment d’avoir été fidèle à la fois à vous-même et aux devoirs de votre charge.
Au terme de ces instants trop brefs et déjà trop longs que j’ai eu la chance et le bonheur de passer avec vous, je m’interroge sur les sentiments que vous portent les Français. Vous avez été abreuvée d’insultes par une minorité, et une large majorité voue une sorte de culte à l’icône que vous êtes devenue.
La première réponse à la question posée par une popularité si constante et si exceptionnelle est liée à votre attitude face au malheur. Vous avez dominé ce malheur avec une fermeté d’âme exemplaire. Ce que vous êtes d’abord, c’est courageuse – et les Français aiment le courage.
Vous avez des convictions, mais elles ne sont jamais partisanes. Vous les défendez avec force. Mais vous êtes loyale envers vos adversaires comme vous êtes loyale envers vos amis. Vous êtes un modèle d’indépendance. Plus d’une fois, vous trouvez le courage de vous opposer à ceux qui vous sont proches et de prendre, parce que vous pensez qu’ils n’ont pas toujours tort, le parti de ceux qui sont plus éloignés de vous. C’est aussi pour cette raison que les Français vous aiment.
Avec une rigueur à toute épreuve, vous êtes, en vérité, une éternelle rebelle. Vous êtes féministe, vous défendez la cause des femmes avec une fermeté implacable, mais vous n’adhérez pas aux thèses de celles qui, à l’image de Simone de Beauvoir, nient les différences entre les sexes. Vous êtes du côté des plus faibles, mais vous refusez toute victimisation. Quand on vous propose la Légion d’honneur au titre d’ancienne déportée, vous déclarez avec calme et avec beaucoup d’audace qu’il ne suffit pas d’avoir été malheureuse dans un camp pour mériter d’être décorée.
La clé de votre popularité, il faut peut-être la chercher, en fin de compte, dans votre capacité à emporter l’adhésion des Français. Cette adhésion ne repose pas pour vous sur je ne sais quel consensus médiocre et boiteux entre les innombrables opinions qui ne cessent de diviser notre vieux pays. Elle repose sur des principes que vous affirmez, envers et contre tous, sans jamais hausser le ton, et qui finissent par convaincre. Disons-le sans affectation : au cœur de la vie politique, vous offrez une image républicaine et morale.
Il y a en vous comme un secret : vous êtes la tradition même et la modernité incarnée. Je vous regarde, Madame : vous me faites penser à ces grandes dames d’autrefois dont la dignité et l’allure imposaient le respect. Et puis, je considère votre parcours et je vous vois comme une de ces figures de proue en avance sur l’histoire.
Oui, il y a de l’énigme en vous : une énigme claire et lumineuse jusqu’à la transparence. Elle inspire à ceux qui ont confiance en vous des sentiments qui les étonnent eux-mêmes. Vous le savez bien : ici, sous cette Coupole, nous avons un faible pour les coups d’encensoir dont se méfiait Pierre Messmer. L’admiration est très répandue parmi ceux qui se traitent eux-mêmes d’immortels. Nous nous détestons parfois, mais nous nous admirons presque toujours. Nous passons notre temps à nous asperger d’éloges plus ou moins mérités : nous sommes une société d’admiration mutuelle, que Voltaire déjà dénonçait en son temps. Cette admiration, vous la suscitez, bien sûr, vous-même. Mais, dans votre cas, quelque chose d’autre s’y mêle : du respect, de l’affection, une sorte de fascination. Beaucoup, en France et au-delà, voudraient vous avoir, selon leur âge, pour confidente, pour amie, pour mère, peut-être pour femme de leur vie. Ces rêves d’enfant, les membres de notre Compagnie les partagent à leur tour. Aussi ont-ils choisi de vous prendre à jamais comme consœur. Je baisse la voix, on pourrait nous entendre : comme l’immense majorité des Français, nous vous aimons, Madame. Soyez la bienvenue au fauteuil de Racine qui parlait si bien de l’amour.