Divagations autour de Pythagore 30 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireDivagations autour de Pythagore
« Et puisqu’un dieu me fait parler, j’obéirai religieusement à ce dieu qui dicte mes paroles ; j’étalerai au grand jour les secrets de ce Delphes qui est en moi, ceux du ciel même, et je dévoilerai les oracles de l’ultime sagesse. Je proclamerai les grands mystères que le génie de nul homme avant nous ne put pénétrer, et qui restèrent longtemps cachés. » (Les Métamorphoses, Livre XV, Vers 131-167)
Vers le 6ème siècle avant J.-C., en Égypte ancienne, les nombres ne codaient encore que les impôts, le commerce, les salaires. L’évaluation, par les harpédonaptes (fonctionnaires royaux, arpenteurs géomètres), de la surface des champs cultivables dont la crue du Nil a effacé les bornes limitatives, ne géométrise pas, mais ne cherche qu’à clore les contentieux entre voisins par la force de l’État. Avec le droit de propriété, voici du droit civil et privé. Mais aussi, en délimitant les bornes, le cadastre royal fixe l’assiette de l’impôt. Voilà du droit public et fiscal. Les nombres ne disent, ainsi, que les relations humaines.
Et puis un jour… De la gigantesque masse de pierres, du mausolée du pharaon Kéops va naître la géométrie sur le sable ensoleillé maquillé par son ombre. En rapportant l’ombre du tombeau à celle d’un poteau de référence, ou à la mesure de son corps, selon la légende, Thalès énonce l’invariance d’une forme malgré la variation de sa taille. En effet, son théorème montre la progression ou la régression infinie de la dimension, dans la conservation d’un même rapport, du colossal, la pyramide, au plus médiocre bâton planté dans le sol. Quel effacement de toute hiérarchie dans le semblable, puisque chaque stade, du plus grand au plus petit, conserve le même rapport.
Thalès nous fait découvrir [1] ainsi un monde hors des sociétés où les choses sont en rapport avec elles-mêmes. «La proportion parle, sans bouche humaine, montre un ordre qui ne connaît pas la loi sociale, qui échappe à la toute-puissance. Une liberté, une égalité sans pareilles ! Pharaon meurt une seconde fois quand Thalès, en mesurant la pyramide, la réduit à un simple polyèdre dans l’homothétie de son ombre de géomètre [2].
La proportion analogique, voici la grande conceptualisation grecque, pas celle du rapport simple a/b, mais celle qui intéresse en tant que médiété [3], celle qui va d’un rapport à un autre, tel a/b = c/d et par substitution peut passer de celui-ci à un troisième rapport et ainsi de suite. Il ne s’agit point de couper quelque chose en part, donc de partager ou de prélever, ce que chacun, généreux ou léonin, sait faire depuis les commencements, mais de construire, pas à pas, une chaîne, donc de trouver ce qui, sous-jacent, stable et glissant, transite le long de son enchaînement. Les Grecs appelleront ce rapport d’analogie «logos». Comme Platon et Aristote, les Stoïciens penseront que le logos pur est parole, intelligence, un accès direct et véritable aux choses, ce que les nombres et leurs rapports peuvent enfin faire.
En ce temps-là, vers le 6ème siècle avant J.-C. vivaient aussi Zarathoustra, Lao-Tseu, Bouddha, Confucius, dans les ailleurs de la Perse, de la Chine, de l’Inde.
Ici, en Grèce, vers 530 av. J.-C., à Crotone, justement revenu d’Égypte mais aussi de Perse, d’Inde, de Chaldée, de Thrace, un homme né 40 ans plus tôt à Samos, ramène avec lui des savoirs ancestraux, une sagesse du monde que ses voyages, ses probables rencontres avec ces personnages suscités, ses initiations reçues ont sans aucun doute forgés. Il est probable qu’il fut initié aux mystères, ceux de Thèbes, ceux des Mages chaldéens, aux pratiques orphiques ; il aurait reçu le baptême dans l’Euphrate, aurait été enseigné par le fameux Thalès et purifié par Zoroaste et Bouddha eux-mêmes. De cette appréhension particulière et métissée du monde d’Asie et d’Asie mineure, Pythagore, car c’est de lui qu’il s’agit, le «premier maître universel» comme l’appelait Hegel, en fera une philosophie.. Comme le rapporte Cicéron, c’est Pythagore qui aurait forgé le mot philosophe pour se définir ainsi devant le tyran Léon de Phlionte qui lui demandait qui il était, et comme il l’expliqua, le philosophe est celui qui cherche à découvrir les secrets de la nature de façon désintéressée. Il aurait participé alors à faire basculer la Grèce d’un mode de pensée religieux à un mode de pensée rationnel.
Comme on le comprend, aux conditionnels employés pour évoquer le parcours de Pythagore, il est difficile de démêler, dans la personnalité du philosophe, ce qui relève de la légende merveilleuse de ce que fut sa vie, car nous n’avons de lui aucun ouvrage, mais seulement quelques fragments d’un de ses disciples appelé Philolaos. Même les fameux vers dorés, qui lui sont attribués, sont douteux quant à leur origine. Il nous est même impossible de distinguer l’enseignement du Maître des théories des disciples. Nous ne pouvons parler que du pythagorisme, sans prétendre savoir ce qu’a pensé Pythagore. De plus, la plupart des renseignements qui nous ont été conservés, épars dans un grand nombre d’ouvrages, ne méritent que peu de confiance. Le mot Pythagore ne désignerait même pas un homme, mais une science.
Nous lisons dans le dictionnaire Welsh, d’Owen Pughes :
Pythagoras : explication de l’Univers, Cosmogonie.
Pythagori : expliquer le système de l’Univers (mot composé de pyt, période de temps ; agori, découvrir).
Python : système de l’Univers.
Pythone : une cosmogoniste, une pythonisse.
Pythoni : traité de cosmogonie.
Pythonydd : celui qui systématise le monde.
Pythagore (VIe siècle av .J.C.) dont le nom est la réduction de l’expression «Pitouï Chel Guer» (גר של פיטוי), «la séduction du converti», se serait converti au judaïsme, son nom serait issu de l’araméen.
Pour Céline Renooz, la célèbre misandre belge, les fables inventées sur la prétendue vie d’un homme appelé Pythagore n’ont aucune réalité. Son opinion sera corroborée par Ernest Havet qui disait : «rien de plus connu que ce nom, rien de moins connu que l’homme lui-même» et de rajouter plus loin : «Je ne considère Thalès, Pythagore, que comme des noms représentatifs d’un système scientifique». Ce qui n’empêchera pas des auteurs classiques de faire de Pythagore un personnage historique et ils lui inventeront une biographie. «Est-il rien de plus vrai que la vérité» demande Nikos Kazantzakis et de répondre : «la légende. C’est elle qui donne une immortalité à l’éphémère vérité.»
Pythagore est donc devenu de bonne heure un personnage légendaire. Laissons donc son histoire aux textes de ses disciples, à toute la littérature très abondante que cet extraordinaire personnage ne manqua pas d’inspirer, aux doxographies, ces compilations des textes grecs du début de l’ère chrétienne. Sur ce sujet, on peut citer les vies de Pythagore écrites, une par Diogène Laerce, une autre par Porphyre, la plus connue par Jamblique, vers le IIe siècle. Citons Diogène Laërce à propos de Pythagore : Comme il était jeune et studieux, il quitta sa patrie et fut initié à tous les mystères grecs et barbares. Il gagna donc l’Égypte, quand Polycrate l’eut recommandé par lettre à Amasis, et il apprit la langue du pays. Il alla aussi chez les Chaldéens et les mages. Étant en Crète, il descendit avec Épiménide dans l’antre de l’Ida. Tout comme en Égypte il était allé dans les sanctuaires, il y apprit les secrets concernant les dieux.
Ce qui paraît intéressant de rapporter ici, c’est ce en quoi son savoir, ses connaissances, ses enseignements, qui lui sont attribués, auraient pu influencer la Franc-maçonnerie.
Il y a deux choses à distinguer dans le pythagorisme : une philosophie, c’est-à-dire une explication de l’univers, et une doctrine morale. On retiendra ces deux aspects avec la philosophie des nombres d’une part , l’éthique pythagoricienne d’autre part.
1- La philosophie des nombres
C’est autour de la souveraineté des nombres que l’on peut penser l’apport de Pythagore à la connaissance universelle et le considérer comme une des sources importantes de la Franc-maçonnerie.
Tout d’abord, ce rapprochement paraît licite car, dans l’ancien Manuscrit Cooke conservé à la Bibliothèque Britannique, on peut lire aux paragraphes 281-326 que toute la sagesse antédiluvienne était écrite sur deux grandes colonnes. Après le déluge de Noé, l’une d’elles fut découverte par Pythagore et l’autre par Hermès le Philosophe, qui se consacrèrent à enseigner les textes qui y étaient gravés. Sur le frontispice des Constitutions d’Anderson on retrouve le «théorème de Pythagore» concernant les triangles rectangles, le reconnaissant sans doute comme le père de la géométrie.
Les bâtisseurs médiévaux, quant à eux, transmettront une géométrie sacrée qui remonterait à Pythagore, qui resta vivace jusqu’au XVIe siècle et dont on connaît l’influence dans la Tradition maçonnique.
Qu’en est-il de cette élaboration philosophique d’objets mathématiques et géométriques permettant la contemplation des formes intelligibles, de ces réalités invisibles qui modèlent l’Univers ?
Pour les pythagoriciens, les choses sont nombres, les nombres se trouvent dans les choses, les nombres sont la cause et les principes des choses ou encore les choses sont constituées par les nombres, comme l’exprime Aristote. Les pythagoriciens furent sans doute les premiers à penser que le nombre est la structure d’accueil pour recevoir, analyser et chercher à comprendre l’incompréhensible et que le nombre, à travers l’intelligence, parle, en symbole, pour découvrir la réalité ontologique. C’est donc la dimension symbolique, analogique, nous dirions métaphorique des nombres, qui nous interpelle. Pythagore aurait été, ainsi, à l’origine, entre autres, de :
La symbolique des pairs et impairs
– l’impair, limité, Un, droite, mâle, en repos, rectiligne, lumière, bien, carré, domine, équilibrant, avec une partie médiane, l’unité, deux parties symétriques. Dans le monde, l’impair sera donc le principe de la totalité puisqu’il comporte un commencement, un milieu et une fin.
– Le pair apparaît, par opposition dans le principe de la dualité de l’existant, illimité, multiple, gauche, femelle, en mouvement, courbe, obscurité, mauvais, oblong.
On peut dire que notre premier grade s’appuie aussi sur ce symbolisme de la dualité pythagoricienne.
La fameuse Tétraktys
Bien sûr sa forme triangulaire montre à l’évidence le 3, la réconciliation de la dualité dans son principe qui est l’unité, l’harmonie universelle. La triade est le nombre du tout, comme le reconnaît Aristote, «c’est le nombre 3 qui définit tout et toutes choses puisque ce sont les constituants du commencement, milieu et fin». C’est pour cela que 3 fut choisi comme base numéraire. Est-ce Zoroastre qui inspira Pythagore dont la doctrine était exposée dans ses Oracles, «le ternaire partout brille dans l’Univers et la Monade est son principe» et, selon Servius, les pythagoriciens assignèrent au Dieu suprême le trois qui est parfait, car il a un commencement, un milieu et une fin. Les pythagoriciens choisirent, naturellement, le triangle pour représenter le nombre 3.
Voici bien un des premiers symboles maçonniques.
Cette forme, mise en exergue dans le temple par sa position géographique, comme point focal, dans l’est des commencements de la lumière, delta lumineux, daleth hébraïque est donc la porte d’un ailleurs. Elle est une épure de toutes les tétrades pythagoriciennes, un plérome, une forme imaginale de la progression dynamique des illimités et des limitants. Selon Philolaos, qui à l’époque de Socrate transcrivait la mémoire du maître, «les illimités et les limitant, en s’harmonisant, constituent, au sein du monde, la nature, ainsi que la totalité du monde et ce qu’il contient». En somme, la triangulation, c’est l’enveloppe qui montre les mystères de la nature.
Les pythagoriciens distinguaient, en fait, 11 tétrades exprimant la pensée analogique et gnostique que Pythagore synthétisa, sans doute, à partir de ce qu’il avait appris ou conçu et qu’il enseigna. Chaque tétrade est, non une collection, un inventaire, mais une progression arithmétique, harmonique, géométrique, physique ou biologique qui conduit du point au volume, de l’homme à la cité, de la naissance au déclin. Chaque élément engendre et limite le suivant comme le point est l’origine et la limite de la ligne, la ligne celle de la surface, la surface celle du solide. La tétrade est un métalangage, une forme pour dire comment le monde de la réalité est issu de l’unité primordiale à travers les principes exprimés par les nombres. Aristote reconnaissait aux pythagoriciens le mérite d’avoir été les premiers à poser la question de l’essence et à avoir tenté de la définir.
1 – La première tétrade est le triangle enchâssant le nombre parfait 10, représenté par 10 points répartis en triangle sur 4 lignes. Il s’agit de la tétrade originelle qui est l’addition des 4 premiers nombres et conduisant progressivement au principe du nombre 10, en même temps qu’elle engendre les 4 consonances de la gamme (première, quarte, quinte, octave). Selon la tradition, Pythagore, par l’observation et l’expérience, avait découvert que les rapports entre la longueur des 4 cordes du tétracorde par rapport à la première étaient exprimés par les rapports numériques 4/3, 3/2, 2/1. La tétraktys donnait la clef des mystères de l’acoustique et les pythagoriciens étendirent à tous les domaines de la physique les conclusions de cette découverte. La formule du serment pythagoricien, transmises par différents auteurs et que l’on trouve dans les vers dorés sacralise la tétraktys : «Je le jure par celui qui a transmis à notre âme la tétraktys en qui se trouvent la source et la racine de l’éternelle Nature».
Certains font l’hypothèse que Pythagore rapporta, de son séjour de près de 20 ans en Égypte, la compréhension du mystère des pyramides : la pyramide de Khéops, qui semble n’avoir jamais recelé aucune momie de pharaon, ne serait-elle pas une forme sanctifiée du divin ? Ses dimensions représentant la compréhension du divin se déployant, et cette incarnation de l’intelligence divine aurait été reformulée par la tétraktys ? Qu’est-ce que Dieu, demandait saint Bernard ; il est longueur, largeur, hauteur, profondeur. La pyramide serait le symbole de toute la création, une représentation mathématique du fonctionnement de l’Univers. Dans ses dimensions se trouveraient encodées les vérités fondamentales de notre monde. Dans ce conservatoire des nombres est exprimée l’actualisation de la possibilité, c’est-à-dire l’Être, l’assurance que tout est vivant, que le Présent est éternel, la simultanéité du Temps, la notion de Tri-unité du Seul et Unique. Cela est une Connaissance que les francs-maçons atteignent par l’expérience que procure un apprentissage graduel et hiérarchisé.
Un nombre n’est pas une valeur abstraite, c’est une «vertu intrinsèque et active de l’Un suprême, de Dieu, source de l’harmonie universelle» nous rappelle Édouard Schuré, dans Les grands initiés.
2 – 3 la deuxième et troisième tétrade embrassent, dans une double progression géométrique de raison 2 et 3, la nature de toutes les grandeurs : le point, la ligne droite, la ligne circulaire, la surface plane, la surface courbe, le solide à surfaces courbes, le solide à surfaces planes.
4 – La quatrième tétrade est physique avec 1 = le feu, 2 = l’air, 3 = l’eau, 4 = la terre qui sont nos purifications lors des voyages de l’initiation.
5 – La cinquième, celles des figures géométriques associant les 4 premiers polyèdres aux 4 éléments.
6 – La sixième, celle des choses engendrées à laquelle Aristote accorde la génération du vivant à partir de la semence et son augmentation dans les trois directions, largeur, longueur, hauteur.
7 – La septième concerne le développement de la société : homme, famille, bourg, cité.
8 – La huitième présente les facultés cognitives qui assurent la connaissance des tétrades précédentes : pensée, science, opinion, sensation.
9 – La neuvième distingue les quatre dimensions de l’être animé : âme raisonnable, âme irascible, âme concupiscible, corps.
10 – La dixième celle du temps avec ses 4 saisons : printemps, été, automne, hiver.
11 – La dernière celle des âges de la vie : enfance, adolescence, maturité, vieillesse.
Ainsi les tétrades dévoilent l’Unité génétique de toutes choses en train d’accomplir leur achèvement comme les séphiroth dans l’arbre de vie.
Le delta lumineux serait donc, aussi, une tétrade, un plérome, une représentation systématique nous répondant à la question d’où vient le monde et comment il se déploie.
L’importance de la Tétraktys pythagoricienne dans n’importe quel type de connaissance métaphysique et cosmogonique est évidente. Le rapport des harmonies musicales avec les nombres est également un thème pythagoricien que la Maçonnerie et le Corpus Hermeticum reprennent sous forme de degrés et touches de reconnaissance liés aux sphères planétaires et aux Régents qui les gouvernent.
Il faudrait y ajouter les différents théorèmes pythagoriciens, sachant l’importance que l’art et la science de construire ont pour la Maçonnerie. Parmi eux, il suffirait de signaler celui du triangle rectangle, qui formé avec les nombres de la triade «3, 4, 5» est dit égyptien avec son hypoténuse (corde tendue entre les opposés) ressemblant si grandement à la corde des harpédonaptes marquée par des nœuds en 3, 4, 5. Et si chacun sait que la somme des carrés des côtés est égale au carré de l’hypoténuse, il est amusant de souligner les propriétés suivantes : dans un triangle rectangle de nombres entiers premiers entre eux on a toujours : -un côté pair et deux côtés impairs -l’hypoténuse est toujours la somme d’un carré pair et d’un carré impair -l’hypoténuse n’est jamais un multiple de 3 -le côté pair est toujours un multiple de 4 -Un des côtés est toujours un multiple de 5 -le périmètre est pair et la surface multiple de 6
Le nombre d’or.
Cette proportion d’harmonie, dite aussi dorée, est dérivée du rapport d’analogie a/b = c/d quand on réduit les quatre termes à deux en conservant le même rapport, soit a/b = a+b/a. Nous devrions dire les nombres d’or, que Pythagore et sa femme bien-aimée Théano déclinèrent dans tous les sens possibles, sous toutes leurs formes possibles de rectangle, de pentacle, d’étoile ou de pentagone, les traquant et mettant ainsi en valeur les théorèmes de Thalès. Dans cette irrationalité mathématique, de Pi et de Phi, qui ne se mesure pas mais se montre dans les lois de la diagonale et du cercle, dans l’infini de leur décimales, ils virent sans doute cette part inachevée du monde en train de s’actualiser dans le temps et la forme ; cela paraît être la beauté divine des nombres eux-mêmes.
La physionomie des nombres
Les nombres ont une physionomie et, selon celle-ci, ils sont nommés parfaits (somme des diviseurs du nombre redonne le nombre (par exemple les 3 seuls nombres parfaits compris entre 1 et 1000 soit 6, 28, 486), amicaux (la somme de diviseurs de l’un donne l’autre, 220 et 284), impairs ou pairs, triangulaires (3, 6, 10, 15), carrés (1, 4, 9,16), cubiques (1, 8, 27), rationnels, irrationnels, incommensurables. Quel vertige, quelle source pour la guématrie des cabalistes et, par là même, pour nous francs-maçons.
L’alphabet secret
Selon Oswald Wirth, inspiré des pythagoriciens, tel que l’a formulé Théon de Smyrne (IIe siècle av. J.-C.), l’alphabet secret élaboré par Pythagore serait la source de notre table à tracer appelée aussi table tripartite avec 2 parallèles verticales et 2 parallèles horizontales délimitant 9 cases dont les limites symbolisent les lettres qui leur sont affectées[4]. Elle indique aux francs-maçons que leurs constructions doivent se baser sur les propriétés des nombres ou de la géométrie et, symboliquement, que les travaux maçonniques doivent être exécutés en tenant compte des propriétés des nombres sacrés.
Ne sera pas évoqué ici ce en quoi le regard et l’écoute du ciel par Pythagore, à travers l’harmonique des rapports mathématiques, nous permet d’entendre les planètes bruire les notes de la gamme en tournant sur elles-mêmes autour du soleil.
L’art géométrique de la Franc-maçonnerie découle de la géométrie et de l’arithmétique pythagoriciennes parce que d’après les attestations de Proclus «à part quelques propriétés géométriques attribuées, sans doute à tort, à Thalès, les pythagoriciens ont été les premiers à étudier la géométrie et les nombres». La compréhension des nombres pythagoriciens facilite la compréhension des nombres sacrés maçonniques.
En conclusion sur cette première partie : même si Pythagore n’a rien «inventé», il a reconnu, dans la série décimale qui retourne à son Origine (10 = 1 + 0 = 1), une échelle naturelle, une lumière sur les mystères qui permettrait à l’être humain de compléter l’œuvre et d’opérer ainsi la transmutation en Homme Véritable, paradigme de tout initié, situé entre l’équerre et le compas.
2 – L’enseignement éthique
Mais, c’est sur cette autre part de son enseignement, l’éthique, que Pythagore va aussi inspirer les sources maçonniques.
Selon Céline Renooz, dans son livre Ère de vérité, histoire de la pensée humaine et de l’évolution morale de l’humanité à travers les âges et chez tous les peuples, «au milieu des luttes religieuses, le VIe siècle vit se produire une réaction contre le nouvel Hellénisme, c’est-à-dire contre le désordre moral des nouveaux cultes ; il y eut un retour momentané aux grandes idées du passé. Une école se fonda dans laquelle on enseignait les lois de la Nature telles qu’elles avaient été formulées dans la brillante époque de la primitive religion pélasgique [les ancêtres étrusques]. C’est l’école pythagoricienne, dans laquelle on donnait l’enseignement de la science aux prêtresses grecques, les Pythies» (p.437).
Selon la légende, c’est à Crotone, en Italie du Sud (qui faisait à l’époque partie de la Grèce), que Pythagore, trouvant refuge, reçut le soutien de l’homme le plus riche de la ville, Milon, dont il épousa la fille Théano (à laquelle Renooz attribue la réalité de la création de l’école en tant que prêtresse de la Pythie[5]). Toujours est-il que, dans cette volonté de masculinisation, l’Histoire retiendra que c’est Pythagore, avec sa femme toutefois, qui fonda l’école mixte pythagoricienne, connue aussi sous le nom de Fraternité pythagoricienne. Les femmes purent partager l’enseignement, elles furent environ 15% des initiés. Cela est un des signes de la très grande tolérance exigée dans le comportement des initiés de l’école pythagoricienne.
On y enseignait de nombreuses disciplines, comme les mathématiques ou la philosophie. On pourrait dire que c’était une sorte d’institut, un genre de monastère qui n’est pas sans rappeler la Castalie du Jeu des perles de verre d’Hermann Hesse, une association scientifique, philosophique, politique et religieuse avec règles de vie et d’éthique.
L’École pythagoricienne était une véritable école initiatique et le savoir mathématique soumis au secret. Le recrutement des membres de l’ordre était fait avec un soin scrupuleux. Pythagore, dit-on, étudiait sévèrement la vocation des jeunes gens qui se présentaient à lui, avant de les admettre aux premières initiations de cette vie nouvelle ; il cherchait à lire sur leur visage, à deviner dans leur démarche, dans leurs attitudes, dans toutes les habitudes de leur personne, les penchants de leur âme, le fond vrai de leur caractère, les aptitudes propres de leur esprit. Voici le principe des enquêtes maçonniques, n’est-ce pas ?
Les membres de l’École étaient séparés en deux groupes. Un rideau était tiré au milieu de la salle où Pythagore professait. Les élèves devaient écouter. Ils n’avaient pas le droit de parler durant les cours. Le silence de l’apprenti est comme celui de l’élève. Les exotériques se tenaient de l’autre côté du rideau et pouvaient seulement l’entendre. Les ésotériques se trouvaient du même côté que Pythagore. Cela avait une extrême importance dans la vie de l’École. Pythagore voulait savoir si les membres étaient capables de se taire et de garder secret ce qu’ils avaient entendu. Après cinq ans, un exotérique était autorisé à traverser le rideau. Cela marquait une étape importante dans la vie de l’École. Appellerions-nous cela une augmentation de salaire ?
Les textes des pythagoriciens étaient eux aussi soumis au secret. Rédigés dans un langage à double sens, ils jouaient sur deux niveaux d’interprétation ; l’un compris par tout le monde, l’autre réservé aux seuls initiés. Les pythagoriciens parlaient de sumbola et d’ainigmata.
Pour eux aussi, tout était symbole.
La plupart des connaissances se transmettaient de bouche à oreille. Cela donna lieu à une seconde séparation. Il y avait les acousmatiques (les auditeurs) à qui l’on transmettait les résultats mais pas les démonstrations pour y parvenir, et les mathématiciens (les apprenants) qui avaient le droit à ces dernières. Tout cela n’est pas sans rappeler notre organisation où, à chaque degré, des mystères sont dévoilés avec progression, ce qui fait de la Franc-maçonnerie une société initiatique et progressive.
Tous les membres de l’École devaient exercer leur mémoire. Chaque matin, ils devaient se remémorer ce qu’ils avaient fait, ce qu’ils avaient vu, ce qu’ils avaient entendu, ce qu’ils avaient dit la veille. En se présentant à l’École, chaque prétendant devait remettre tous ses biens à la communauté. Le dépouillement des métaux ne serait-il pas une reprise symbolique de cette règle ? Celui qui était renvoyé, cependant, recevait à son départ le double des biens qu’il avait déposés. On lui donnait en argent ce qu’il n’avait pas su prendre en savoir. L’expression «recevoir son salaire» correspond aussi en Franc-maçonnerie à une valeur-savoir. Mais, dès que son exclusion était prononcée, on lui creusait un tombeau. Il s’agissait d’une mort symbolique.
Pythagore disait sa théorie et laissait ses élèves le contredire. Cela lui permettait de savoir si ses élèves étaient capables de réfléchir par eux-mêmes et les conviait à quitter l’école s’ils n’étaient pas satisfaisants, refusant un savoir de perroquet. La Maçonnerie n’est pas une science mais un art, celui d’éveiller les consciences, cet effort est au départ individuel. C’était surtout, offrir une grande liberté individuelle de penser et même de conscience. «Il faut avoir une religion, garde ta foi jurée». Il y a ici, dans ce vers doré, une relation entre l’universel et le particulier, une exigence de tolérance. Toutes nos constitutions évoquent, comme un impératif primordial la liberté de conscience de chacun. Les vers dorés sont une des premières tentatives de corpus moral théorique et pratique, philosophique, spirituel et œcuménique.
Vouloir rendre compte de Pythagore revient en fait à essayer de reprendre les fouilles des traces textuelles laissées par ses disciples ou par les historiens de cette époque, à narrer chacun des instants de sa vie exemplaire parce que sa parole était fraternelle et son vécu conforme à son enseignement. Les biographies de Pythagore, rédigées par Porphyre et Jamblique, fixèrent définitivement les traits caractéristiques du sage idéal, modèle de vertu, de piété et de sagesse, que tout adepte d’un platonisme mâtiné de pythagorisme devait imiter pour se revendiquer de cette famille spirituelle qui inspira, probablement, les premiers textes maçonniques. La Maçonnerie est aussi la médiation entre la théorie et la pratique par le biais de l’instruction, non d’un savoir désincarné, mais de l’exemple. Le franc-maçon pratique l’éthique qui est bien ce qui se produit librement, sans contrainte externe, par un sentiment d’obligation morale interne.
Ce qui est incontestable, c’est que Pythagore s’était proposé un but moral et religieux. Il avait voulu, dit l’historien Zeller, fonder une école de piété, de bonnes mœurs, de tempérance, de courage, d’ordre, d’obéissance à la loi, de fidélité dans l’amitié. Il y a trop de similitudes avec l’esprit des premiers textes maçonniques pour que ce ne soit qu’un hasard, l’influence semble indéniable. Le lien entre la Franc-maçonnerie et l’Ordre pythagoricien, sans qu’il s’agisse d’une dérivation historique ininterrompue, seulement d’une filiation spirituelle, est certain et manifeste.
Pour plagier Saint Thomas qui disait que «le mot est comme un miroir dans lequel on voit la chose», ne pourrions-nous dire que le franc-maçon est comme un miroir dans lequel on voit Pythagore ?
[1] Pour garder un esprit critique sur l’attribution à Thalès de son fameux théorème, se reporter à l’article d’Alain Herreman , Aux sources du « théorème de Thalès », Sur la condescendance et la recherche de l’origine.
[2] À lire l’article de Michel Serres, Gnomon: les débuts de la géométrie en Grèce, condensé du chapitre De la pyramide au tétraèdre, dans son éblouissant ouvrage Les origines de la géométrie (p.195 à 270).
[3] Sur ce sujet, consulter l’article de Paul-Henri Michel, Les médiétés.
[4] Pour Arturo Reghini, dans son opus Les nombres sacrés dans la Tradition Pythagoricienne maçonnique, il semble hors de doute que l’origine de la table à tracer remonte à la table de Théon.
[5] Théano était une Prêtresse qui avait gardé le dépôt sacré de la tradition scientifique et qui voulut en faire un enseignement régulier. Les historiens masculins diront, dans leur langage symbolique, qu’elle livra le Palladium aux Grecs, c’est-à-dire qu’elle enseigna la science cachée, quoique son École constituât une société fermée comme les ordres secrets, un Collège d’initiés, une sorte de congrégation sacrée (p.439 de l’ouvrage cité).
Le fameux triangle de Pythagore
Ce théorème stipule que, sous son aspect mathématique et dans un univers euclidien, le carré de la longueur de l’hypoténuse est égal à la somme des carrés des longueurs des deux autres côtés.
Le théorème de Pythagore a eu différents noms : théorème de la mariée chez les Grecs, chaise de la mariée chez les Hindous, figure de l’épousée chez les Perses pour la réciproque, maître de la mathématique au Moyen âge, pont aux ânes pour les collégiens du XIXe siècle.
Giamblicus, le biographe de Pythagore, nous conte l’anecdote suivante : quand le Maître s’est rendu compte du sens caché du théorème , il fut tellement frappé par la profondeur du mystère entrevu qu’il crut avoir eu une révélation divine. La légende, qui dit que Pythagore aurait sacrifié 100 bœufs lorsqu’il eut trouvé le théorème de l’hypoténuse, est un non-sens car les seules offrandes acceptées dans le pythagorisme étaient des offrandes végétales préparées.

Pythagore n’en a pas fait de démonstration, aussi, à son époque on devait parler de la règle de Pythagore et non de théorème. En effet, les démonstrations les plus anciennes qui nous soient parvenues lui sont postérieures, celles d’Euclide en particulier[2] avec le théorème 33 dans la 47ème proposition du Livre I et le théorème 21 de sa 31ème proposition du Livre VI qui généralise les rapports des surfaces des figures. Ces propositions ont un aspect géométrique exprimant une égalité de surfaces et non de calcul : «Dans les triangles rectangles, la figure construite sur le côté qui sous-tend l’angle droit, est égale aux figures semblables et semblablement décrites sur les côtés qui comprennent l’angle droit.» Euclide affirme donc la primauté de la matérialité sur l’abstraction numérique. Cependant le résultat semblait déjà connu, en Mésopotamie, plus de mille ans avant Pythagore[1].
Les valeurs des carrés ne sont pas un ensemble de nombres, mais une nouvelle entité élevée sur elle-même, qui contient en synthèse les propriétés et les qualités des nombres qui l’ont produite. Le carré du nombre de l’homme caractérise le passage d’un état naturel à un état spirituel, soit l’exhaussement de l’esprit en l’homme, à l’exemple du sommet de la pierre cubique à pointe.

Le théorème chinois de Guogu[3], reconstitué d’après les commentaires du mathématicien chinois Liu Hui utilise le principe du puzzle : deux surfaces égales après découpage et recomposition ont même aire.

Dans un article analysant la signification ésotérique du triangle de Pythagore, Antonietta Francini cite Plutarque, qui décrit et explique la signification égyptienne antique de ce triangle, où le côté droit est assimilé au mâle (Osiris), la base à la femelle (Isis), et l’hypoténuse au résultat de leur union (Horus). Plutarque écrit: «Trois est le premier nombre impair parfait; quatre est un carré dont le côté est le nombre pair deux; mais cinq est en quelque sorte semblable à son père, et en quelque sorte semblable à sa mère, étant composé de trois et deux.

Ce théorème de Pythagore est inscrit, sous forme géométrique, entre les deux personnages principaux du frontispice de la première édition des Constitutions d’Anderson de 1723. On peut lire le mot écrit en grec ευρηχα (Eurèka) sous la figure. Selon Vitruve, c’est Archimède qui aurait prononcé cette expression, en attestant, par ses expériences, la composition en or de la couronne du roi Hiéron par la mesure de la masse volumique d’eau déplacé par celle-ci. C’est une expression jubilatoire d’avoir découvert une solution scientifique aux mystères du monde.

On en retrouve sa symbolique dans l’équerre du bijou porté par le passé Vénérable maître, faisant souvent apparaître la démonstration d’Euclide, témoignant pour la géométrie de son importance centrale dans la pensée maçonnique.
Le triangle de Képler associe le théorème de Pythagore et le nombre d’or par la figure construite à partir du rectangle d’or (parfois appelé le visage de Dieu), où les dimensions respectives des côtés du triangle sont : Φ, racine de Φ et 1.

Pour marier les côtés : Dans un triangle rectangle de nombres entiers premiers entre eux, on a toujours un côté pair et deux côtés impairs, l’hypoténuse est toujours la somme d’un carré de pair et d’un carré d’impair, le périmètre est pair, la surface est paire car multiple de 6.
Vous retrouverez d’autres usages du théorème dans mon ouvrage «Tracés maçonniques», éditions Numérilivre, prévu pour septembre 2022
[1] On établit que Pythagore serait né vers la fin du VIe av J.-C.
[2] IVe siècle av. J.-C.
[3] IIIe siècle
SOURCE : https://450.fm/2022/10/04/divagations-autour-de-pythagore/
FUSION ET GRAVITATION 16 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Contribution , ajouter un commentaireFUSION ET GRAVITATION
NDLR : Nous sommes très honorés par la confiance que nous témoignes le BAF Luca en nous autorisant à reproduire la planche que vous lirez ci-dessous qui traite de façon particulièrement innovante de ce symbole traditionnel.

L’étoile créatrice
Toute la matière qui nous entoure est composée d’atomes. Les atomes sont les briques de toutes choses. Ils sont plutôt ronds et composés d’un noyau dense en forme de boule entouré de minuscules électrons.

Il est possible de les classer par taille. Le plus petit est l’hydrogène, vient ensuite l’hélium.
Ensemble ces deux atomes représentent 98% de la matière connue de l’univers.
A l’origine de notre univers, il y a 14 milliards d’années ces deux atomes constituaient probablement toute la matière connue.
L’azote, le carbone, l’oxygène, l’argent, par exemple, n’existaient pas à l’époque.
A l’intérieur d’une étoile comme le soleil, la température atteint presque 20 millions de degrés. Les atomes d’hydrogène sont dépouillés de leurs électrons et ne sont plus que des noyaux nus qui forment une sorte de plasma soumis à l’écrasante énergie liée à la pression gravitationnelle qui règne au cœur de l’étoile : ils n’ont d’autre choix que de se coller les uns aux autres et de fusionner.

C’est la fusion thermonucléaire. La création de gros noyaux par agglutination de noyaux plus petits. Ces noyaux nouveaux, devenus lourds, en s’éloignant du cœur, retrouvent des électrons et deviennent de nouveaux atomes. Ainsi naissent l’azote, l’oxygène, le carbone ou encore l’argent, etc.
Le cœur d’une étoile est une énorme centrale à fusion thermonucléaire contrainte par la nature à forger de la matière.
Tous les atomes lourds présents sur Terre, tous les atomes essentiels à la vie, y compris ceux qui composent notre corps, ont été, un jour, engendrés au centre d’une étoile. Nous sommes des poussières d’étoile. Nous respirons, nous buvons, nous mangeons, nous touchons, nous aimons des poussières d’étoile.
Sans étoiles la vie n’existerait pas. Mais pour permettre la vie il faut que l’étoile meure. Car si ces atomes sont en nous, autour de nous, c’est qu’ils viennent d’étoiles disparues.

Lorsque deux atomes fusionnent au cœur de l’étoile pour former un noyau plus gros, une partie de leur masse disparait. La masse du nouveau noyau est inférieure à la sommes des masses des noyaux qui lui ont donné naissance. La masse manquante est transformée en énergie en vertu de la célèbre formule : E=mc². Evidemment la masse manquante lors de chaque fusion est très faible mais il y a tellement de noyaux qui fusionnent au cœur de l’étoile à chaque seconde que l’énergie totale libérée est colossale. Cette énergie produite rayonne dans l’espace. Elle nous réchauffe et fait murir les nombreux épis de blé et les fruits de grenade comme elle fait pousser les roses et le mimosa.
Tant que la fusion a de quoi s’alimenter, tant qu’il y a suffisamment de petits noyaux à fusionner, l’étoile vit. Puis lorsque le combustible nucléaire vient à manquer l’étoile se contracte, sa production d’énergie n’étant plus suffisante pour s’opposer à la gravitation, la matière se concentre de plus en plus, une nouvelle et ultime réaction de fusion s’enclenche alors qui domine et surpasse la gravitation. Alors l’étoile grossit, grossit. La gravitation est vaincue. L’étoile explose.
Cette explosion mortelle de l’étoile dissémine dans l’espace tous les atomes forgés au cours de son existence, plus quelques autres formés lors de l’explosion finale, tel l’or, formant d’immenses nuages de poussières interstellaires qui pourront donner naissance à de nouvelles étoiles ou de nouveaux mondes. Et permettre la vie.

C’est ainsi, en suivant un long processus qui a commencé il y a des milliards d’années, qu’un nuage de poussières d’étoiles a donné naissance à la Terre. Et à chacun d’entre nous.
L’étoile est donc la forge première, là où nait toute matière, là où naissent les métaux enfouis ou plutôt constitutifs de notre planète et de ses profondeurs desquelles il faudra les extraire pour les ramener à leur pureté originelle par le feu, l’air et l’eau, œuvre des forgerons tubal-caïnites. Je n’aborderai pas ici la figure de Tubalcaïn qui pourra inspirer un travail au premier degré. Mais c’est bien ainsi à nouveau par le feu que renaitront des anneaux dans leur pureté de métal stellaire.
La symbolique maçonnique distingue donc le pur métal des métaux qu’il convient d’abandonner car symboles des vanités terrestres dont le plus évident est l’argent dans sa polysémie décrivant à la fois un métal mais aussi un moyen fiduciaire. Le second impur par nature dans notre culture alors qu’il n’est au fond que destiné à garantir l’équité des échanges donc la confiance comme l’indique son étymologie.
C’est donc moins la nature du métal qui est en cause que les dérives de son usage qui en pervertit la pureté. Mais aussi la dualité de toute chose. Le fer pouvant servir à forger le soc de la charrue comme l’épée, l’instrument de vie comme l’instrument de mort. Et l’argent du denier autant à corrompre qu’à donner un juste salaire. On pourra ajouter que l’or de la pièce est rarement pur car trop mou mais plutôt sous forme d’un alliage.
Au fond, le métal ne cesse pas d’être pur dans sa nature et abandonner ses métaux est plus une invitation à renoncer à leur représentation profane, voire à leur profanation, à se détacher de l’apparence pour rechercher et retrouver la vérité dans une métaphore alchimique de transformation de l’être.
La matière dont nous sommes faits est ainsi née quelque part dans l’immensité de l’univers, au cœur d’étoiles aujourd’hui disparues. Nous portons en nous le fruit de ces mondes disparus. Nous sommes leur souvenir, leur héritage. Notre mère primordiale est une étoile. Ainsi le macrocosme engendre le microcosme qui par la conscience qu’il en a lui donne à son tour vie. L’étoile en nous, nous relie à l’univers.

A l’image de l’homme de Vitruve, le pentagramme étoilé, par sa représentation anthropomorphique, peut dire que notre étoile polaire, le guide de notre quête maçonnique, sa finalité aussi, est l’amour de l’humanité. Mais, au-delà de l’allégorie philosophique, la symbolique de l’étoile, par les atomes dont nous sommes faits issus de ses entrailles fusionnantes, unit notre microcosme éphémère au macrocosme éternel. Comme une invitation à penser notre existence à travers notre relation au cosmos et donc à la nature dans une communauté de destin d’une brulante actualité.
Et non pas seulement dans la possession/domination de la nature mais dans sa connaissance, dans la compréhension de notre rôle et de notre place dans l’ordre cosmique. Car si nous sommes mortels, nos atomes ne le sont pas. Demain, libérés de notre être ou libérés par notre être, ils retourneront à la nature s’unir avec d’autres atomes pour renaître sous une autre forme ou dans une autre vie. L’étoile, par ses atomes créés, est en nous éternelle. Elle nous confie pour un temps un peu d’éternité, cette chaine infinie qui vient du passé et va vers l’avenir. Dont il nous appartient d’être pour un temps un solide maillon de pur métal dont nous devrons assurer la transmission. La matière étant éternelle il revient à notre finitude de transmettre la connaissance/conscience du monde qui nous entoure.
Par l’étoile, notre finitude est ainsi faite de grains d’éternité, la création est en nous comme nous sommes en elle.
Ce qui renvoie à une méditation sur les concepts philosophiques, puisque nous sommes amis de la sagesse, de nature naturante, le principe créateur, et de nature naturée, ce qui est créé. En Occident d’Aristote à Spinoza en passant par St Thomas d’Aquin, celui qui croit verra dans le principe créateur le principe divin, celui qui ne croit pas y verra les lois qui régissent la nature. Les deux ont en commun d’être au-delà de l’homme. Donc transcendants.

Mais la distinction est peut-être formelle puisque l’étoile est à la fois créée et créatrice. Sans elle pas d’éléments nécessaires à la vie, sans vie pas de conscience du cosmos et sans cosmos pas d’étoile. Dans notre langage symbolique, l’analogie anthropomorphique du pentagramme étoilé est une invitation pour le FM à prendre conscience de ce qui le créée autant qu’à être lui-même créateur donc à prendre sa place dans l’ordre du monde et à y contribuer.
Si, par analogie anthropomorphique, nous sommes l’étoile, c’est aussi une invitation à être cette force fusionnante qui rassemble ce qui est épars et, par l’énergie créatrice et le travail, fait naître une humanité meilleure et plus éclairée. C’est peut-être aussi une invitation à forger en nous, par la fusion du vrai, du juste et du beau, les vérités et les changements que nous voulons voir dans le monde. Bref, c’est nouveaux atomes ressemblent aux vérités acquises, fruits du processus initiatique de chaque Sœur ou Frère/étoile.
Comme l’écrivait Christian Bobin, « L’intelligence est la force, solitaire, d’extraire du chaos de sa propre vie la poignée de lumière suffisante pour éclairer un peu plus loin que soi, vers l’autre là-bas, comme nous, égaré dans le noir ».
Gravitation
Le mémento du Compagnon enseigne « que la gravitation est la force primordiale qui régit l’équilibre de la matière mais aussi une force qui rapproche les cœurs… ».

Or, disons-le d’emblée, cette conception est un héritage de Newton mais depuis Einstein et sa théorie de la relativité la Gravitation n’est plus une force mais une déformation, une succession de courbures de l’espace-temps. En effet, en mécanique classique, newtonienne, la gravité ou gravitation est une force attractive proportionnelle au produit des masses des deux corps en interaction divisé par le carré de la distance séparant leurs centres d’inertie. En relativité générale, la gravité n’est pas une force mais une illusion due à la déformation de l’espace-temps. Cela explique pourquoi la trajectoire de la lumière portée par les photons, corpuscules jusqu’à preuve du contraire sans masse, est déviée comme s’il y avait attraction : c’est l’effet de lentille gravitationnelle qui ne peut pas être expliqué en physique classique newtonienne.
Imaginons l’espace-temps comme une grande toile tendue. Si l’on place des corps dessus, par exemple des balles de ping-pong, elles se répartiront sur la toile sans trop la déformer. Plaçons une boule de pétanque, elle va créer une dépression, une courbure de la toile qui va attirer aussi les balles de ping-pong proches : c’est l’effet gravitationnel.

Ainsi l’espace-temps est une succession de pentes, de courbes gravitationnelles engendrées par les astres, les galaxies, les étoiles, les planètes. Et comme tout bouge dans l’univers, ces pentes, ces courbes se mêlent, s’additionnent, se défont.
Lorsque nous chutons par terre, en réalité nous glissons le long d’une pente crée par la Terre, c’est cela que nous appelons gravité ou gravitation. Et plus l’objet sera massif plus la pente créée sera importante et plus il est difficile de la remonter. La gravité est plus forte sur la Terre que sur la Lune.
Dans l’espace la lumière tout comme la matière ne se propage donc pas en ligne droite. Tout objet crée une pente invisible que nous appelons gravitation, chacun d’entre nous crée l’une de ces pentes mais comme sa masse est négligeable par rapport à celle de la Terre son effet gravitationnel est quasi nul.
La gravité que nous ressentons est la somme des gravités qui nous entourent, c’est-à-dire des pentes engendrées par les objets qui nous entourent mais aussi par nos voisins sur les colonnes.
Ce qui se trouvent en dessous de nous est bien plus massif que ce qui est au-dessus. La Terre sous nos pieds contient bien plus de matière et d’énergie que le ciel au-dessus de nos têtes. Ce qui est en dessous crée donc une pente gravitationnelle bien plus raide : c’est la gravité de la Terre.

La Lune courbe donc aussi cet espace-temps faisant que l’eau à la surface de la Terre a un peu tendance à tomber vers elle, ce sont les marées. Cet effet s’exerce aussi sur la croute terrestre rocheuse mais comme c’est une solide dont la densité est bien plus grande l’effet est bien moindre.
Le Soleil avec sa masse très importante courbe encore plus l’espace-temps autour de lui, créant une pente le long de laquelle tournent les planètes du système solaire.
Toutes les courbures engendrées par les étoiles de la Voie-Lactée s’additionnent pour créer la courbure de notre galaxie qui rivalise avec celles des galaxies voisines, etc.
Mais alors pourquoi, si le soleil exerce une force gravitationnelle si puissante sur la Terre, celle-ci ne tombe-t-elle pas à sa surface ni la Lune sur la Terre ? Car cela serait le cas si rien ne venait compenser de telles influences.

La Terre est animée d’un mouvement de rotation autour du Soleil qui la propulse à 107 000 kms à l’heure et cette trajectoire tend à la propulser vers l’extérieur équilibrant ainsi le pouvoir de l’attraction.
Force centripète contre force centrifuge. C’est l’effet de fronde. Pour vulgariser le phénomène les savants comparent le soleil à un lanceur de marteau et la Terre à la sphère métallique que l’athlète fait tourner autour de lui au bout d’un fil d’acier pour lui communiquer l’élan nécessaire. Plus l’athlète accélère sa rotation, plus le marteau aura tendance à s’évader vers l’extérieur alors que le fil d’acier l’attire vers sa source. Lorsque l’athlète s’arrête, le poids tombe, de même dans la gravitation : la Terre tomberait vers le Soleil.
Les astronomes savent que si la terre devait accélérer sa vitesse de rotation, elle tendrait à s’éloigner du soleil. Cependant, si elle devait s’arrêter ou fortement ralentir son mouvement, elle serait immanquablement attirée vers le soleil.
Dans l’ensemble de l’univers, les galaxies, les étoiles, tous les corps célestes sont régis par les lois qui règlent les orbites et sans lesquelles un effondrement des astres précipiterait l’univers vers le chaos.
Ainsi, grâce à la gravitation, l’univers repose sur un état d’équilibre permanent. Chaque astre exerçant son action sur les autres, étant influencé en retour pareillement. L’interaction entre toutes ces forces assure la stabilité de l’univers en relation avec d’autres mouvements, de rotation notamment.
Qu’en déduire sur un plan symbolique

D’abord que sur le plan de la science physique contemporaine la gravitation n’est pas une force primordiale à proprement parler. Mais qu’elle résulte de la formule E = mc².
La gravitation est donc une relation entre l’énergie, la masse et la lumière. Or développer l’énergie en lui est le devoir du Compagnon et la masse, la densité pourrait être assimilée au travail que le grade de compagnon glorifie. Par le travail et l’énergie créatrice le Compagnon engendrera donc autour de lui la force gravitationnelle qui rapprochera les cœurs et, en les unissant, assurera la solidarité et la solidité de l’édifice maçonnique. Quant à la lumière nous l’avons reçue lors de notre initiation mais c’est aussi une référence à l’étoile.
Einstein a montré qu’à travers la courbure de l’espace-temps, la gravitation n’était pas une force mais de la géométrie crée par la matière et l’énergie. Il renforce donc le second sens de la lettre G.
Si bien que la première phrase du livret de Comp :. définissant la gravitation est certes scientifiquement discutable mais reste valable sur un plan métaphorique.
Au contraire, si la gravitation était une force primordiale, même symboliquement, nous ne saurions exercer une quelconque influence sur elle, ni nous libérer de son déterminisme. Le fait qu’elle ne soit pas une force en soi permet symboliquement d’en faire la résultante de notre volonté par l’énergie et la masse-travail, qu’il s’agisse de la gravitation que nous engendrons ainsi ou des gravitations que nous subissons dont il devient possible de s’émanciper dès lors que leurs effets seraient négatifs. C’est ainsi que la capacité retrouvée du Compagnon à engendrer son propre effet gravitationnel lui permet de se libérer des passions tristes et d’attirer vers lui la lumière.
Cela n’est pas sans rappeler le devoir du Comp:. FM:. de maintenir en lui l’équilibre physique, l’équilibre intellectuel et l’équilibre moral et par l’union des trois développer l’énergie créatrice. De même que les grandes lois physiques cosmiques maintiennent l’équilibre de la création. Unifiant ainsi microcosme et macrocosme.

Si, métaphoriquement, la gravitation est la force qui rapproche les êtres, une lecture un peu critique pourrait faire observer qu’au niveau astronomique c’est l’équilibration de cette force par des forces opposées qui assure l’ordre cosmique et non l’action seule de la gravitation, laquelle mènerait au chaos. Alors pourquoi la mettre particulièrement en avant. A cela on pourrait répondre que la figure d’Isaac Newton était admirée de Desaguliers, propagateur de ses travaux, et d’Anderson, tous unis par la FM:. , Newton figurant, avec Mozart, La Fayette ou encore Washington, au panthéon maçonnique.
Donc il n’est pas surprenant de retrouver, même indirectement, dans l’un de nos rituels, cette référence quasi obligée à celui qui est considéré comme l’un des fondateurs de la FM:. anglaise. En conséquence, l’une des significations de la lettre G ne pouvait donc sans doute pas ne pas être : gravity, gravitation. La gravitation réalisant par ailleurs une progression voire une élévation sur géométrie et génération en posant un principe fondamental de l’ordre universel de la création et non plus seulement terrestre avant la transition vers le Génie et la Gnose qui permettent d’accéder à la connaissance et à la conscience du tout, tous les cinq manifestations du Gadlu, qu’il soit Dieu ou Equation.
Le phénomène physique gravitationnel pourra nous inspirer deux réflexions principales.
La première serait de dire que si la gravitation n’est pas suffisante, elle est nécessaire et fondamentale. Sa portée serait, en physique, infinie, faisant sentir ses effets à l’échelle de l’univers entier. Sans elle point d’harmonie du cosmos, de jours qui succèdent aux nuits, de lever de soleil et de clairs de lune, de ciel étoilé, bref une force au service de la beauté de la création, de l’énergie créatrice. Mais, on l’a vu, une force qui doit trouver son équilibre dans la dualité avec d’autres forces dans l’harmonie de la création. Et c’est sans doute aussi cette notion d’équilibre et d’harmonie qui doit guider le travail et le chemin du Compagnon dans sa quête de la Beauté. Car c’est cet équilibre avec la gravitation qui maintient stable l’étoile flamboyante que l’on contemple au firmament, symbole de la permanence de notre idéal.

Et lorsque le compagnon passe de la verticale à l’horizontale pour aller vers l’autre, s’il met alors en jeu la gravitation qui rapproche les êtres, c’est sa quête associée d’équilibre et d’harmonie, à l’instar de l’ordre comique, qui fera que ce rapprochement sera amour fraternel et non confrontation.
La gravitation nous révèle donc le nécessaire équilibre des contraires, que l’on retrouve suggérer par le pavé mosaïque mais aussi dans la fresque de JGJ, pour maintenir l’harmonie. En nous et autour de nous. Pas de musique sans silences, pas de lumière sans obscurité. L’équilibre est à rechercher dans l’union des différences. Principe féminin et masculin, comme l’exprime la fresque de Jean-Gabriel. Immanence et transcendance. Connaissance et conscience. Rationnel et spirituel. Mais aussi, plus prosaïquement entre individu et société, ancien et nouveau, Loge et Obédience. En toute chose, en lui et autour de lui, le/la FM :. est en quête d’équilibre. Aspirer à être le centre de l’union ce n’est pas chercher l’harmonie dans l’uniformité mais dans le maintien de l’équilibre des différences.
La seconde réflexion vient que la gravitation n’est donc pas seulement la capacité à créer un phénomène d’attraction sur un objet précis, être ou idée, mais à agir sur notre espace-temps. Et d’abord à prendre conscience de notre espace-temps. Nos ancêtres chasseurs-cueilleurs disposaient d’un espace infini mais le temps leur était compté. Ils vénéraient leur espace-nature. Devenus sédentaires au néolithique, leur espace se contracta sans que leur temps n’augmente guère. Ils découvrirent l’infini et l’éternel de l’au-delà. Aujourd’hui le bout du monde est à guère plus d’une journée de voyage et seul le présent, l’instant semble exister.
Nous n’avons guère d’espérance. Nous avons perdu tout rapport au temps long, le présent a perdu toute profondeur. En somme, le futur a quitté le présent. Et pourtant, comme l’écrivait Bergson, « l’idée de l’avenir est plus féconde que l’avenir lui-même ».
Il est amusant de noter que « idée de progrès » a pour anagramme « degré d’espoir ». Si bien qu’il parait important de nous réapproprier la conscience de notre espace-temps donc de notre place dans le cosmos. Ainsi si la Gravitation fait appel, on l’a vu, à la Géométrie, la pensée de l’espace-temps mobilise la Génération, le Génie et la Gnose.
Ensuite nous avons vu que c’est la densité qui engendre l’effet gravitationnel.
Par analogie, c’est par la densité ou l’intensité que nous agissons sur notre espace-temps, c’est-à-dire sur notre vie.
Au fond, la quête initiatique de la sagesse c’est l’acquisition de la densité de l’être qui influence son espace-temps c’est-à-dire son existence. Mais aussi les existences qui l’entourent. Et plus qu’un porteur de lumière, la ou le FM :. est un attracteur de lumière. Lorsque nous aspirons à œuvrer au perfectionnement moral et intellectuel de l’humanité ou à travailler à l’amélioration matérielle et sociale de la condition humaine, nous y parviendrons moins par des postures de communication que par la densité de notre pensée collective et de nos actes qui feront aimer notre ordre par l’exemple de nos qualités. De même un atelier attirera et retiendra des profanes par la densité de ses travaux et de sa fraternité plus que par une vaine agitation prosélyte ou communicationnelle. La densité, en FM :., passe par le travail plus que par la parole. C’est pourquoi, sans cesse glorifions le travail !
Vous l’aurez compris ce travail vise moins à être un exposé de physique qu’à démontrer que le symbolisme est une langue vivante qui ne se confine pas dans le passé ni, en l’occurrence, dans la physique du 18eme siècle et doit s’inspirer des vérités acquises.
Le passé, en s’effaçant, doit ensemencer l’avenir, pas le confisquer dans une vaine répétition de ce qui a été et n’est plus. Si nous sommes guidés, comme nous l’affirmons, par la recherche de la vérité, alors notre langage doit intégrer les résultats de cette recherche qui, loin de le remettre en cause, l’enrichi et lui ouvre des voies nouvelles d’application. Le langage symbolique n’est pas un dogme mais un accoucheur de pensées, d’idées. Un langage qui permet de traiter dans l’égalité et la liberté de l’atelier de tous sujets comme l’indique notre RP, l’opposition sujets symboliques/sujets de société est donc totalement artificielle et n’a au fond aucun sens puisque c’est la pratique méthodologique des premiers qui permet de traiter les seconds sans avoir besoin de titres universitaires.
Le langage symbolique n’est pas non plus une langue morte, figée, réduite à quelques définitions récitées tel un catéchisme de cinq minutes. Au contraire c’est un langage qui doit rester vivant en explorant et revisitant ses sens et significations, tout en ayant, par discrétion, l’apparence anodine et néanmoins hermétique des expressions du compagnonnage opératif, afin de nous aider à faire naître nos idées, élaborer notre pensée, à être créateur de nous-même en mêlant équerre et compas pour devenir bâtisseurs du Temple. Il ne faut donc pas craindre de passer au filtre de l’esprit critique certaines affirmations de nos ouvrages ou définitions de référence, c’est à ce prix que le symbolisme s’inscrira dans la modernité et restera le langage des femmes et des hommes libres.
Car tel est l’art qu’on enseigne ici.
J’ai dit.
SOURCE : https://www.idealmaconnique.com/post/fusion-et-gravitation?utm_source=so&cid=d842a1f9-fbff-49ca-968a-08dcb8f030aa&utm_content=e95669f9-95ad-497e-93ca-020dc149fcfc&postId=1b4a10cc-566c-4afe-a4d7-0ea6cb7b9aa6&utm_campaign=7ea96613-0f26-482c-aa40-5a8c92f63f2a&utm_medium=mail
si l’apôtre Jean celui des « loges de saint Jean » devait écrire sa « Révélation » à destination du XXI° siècle, quel en serait le contenu ? Pierre QUADER 9 avril, 2023
Posté par hiram3330 dans : Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireBonjour,
Je me suis posé la question suivante : si l’apôtre Jean celui des « loges de saint Jean » devait écrire sa « Révélation » à destination du XXI° siècle, quel en serait le contenu ? Voilà le résultat. Bonne lecture et salutations fraternelles,
Pierre QUADER
Apocalypse XXI
L’apôtre Jean, auteur de l’Apocalypse, dernier livre du Nouveau Testament, est aussi la référence des loges maçonniques, dite « loges de saint Jean ». Quel serait le contenu de l’Apocalypse, au sens de révélation, en ce début du troisième millénaire ? C’est à cette question que veut répondre la présente planche.
Concordance
Cette monographie repose sur l’exercice relatif à la vision de l’avenir et le contact avec les archives akashiques.
En concordance avec cette monographie, il est proposé un extrait de l’ouvrage de Léonard de Vinci, « Prophétie » (Éditions Mille-et-une-nuit, 1997, Page 9) :
« Ô nature pourquoi es-tu si injuste ? mère affectionnée et attentionnée pour les uns, et pour les autres cruelle et impitoyable marâtre : je vois tes fils livrés à d’autres, sans jamais aucune sorte d’avantage, et au lieu de récompenses pour les services rendus, je les vois payés d’un épouvantable martyr, épuisant leur vie entière au bénéfice de leur tourmenteur ». [Ânes que l'on bastonne].
Et une extrait de l’ouvrage de Louis Claude de Saint-Martin, « Lettre à un ami ou considérations politiques, philosophiques et religieuses sur la révolution française » (Paris, L’an III, BNF-Gallica, début de la Lettre) :
« Rassure-toi, mon ami ; il est encore des Français qui, loin de penser que les vérités religieuses aient eu à souffrir du renversement de la ci-devant église, sont persuadés qu’elles ne peuvent qu’y gagner infiniment. Je suis du nombre de ces Français : tu verra même, dans cette Lettre, à quel degré je porte la confiance sur ce point ; et d’avance, je t’avoue que je crois voir la Providence se manifester à tous les pas que fait notre étonnante révolution ».
apocalypse vingt-et-un
I
au commencement de la soirée du quinze août deux mille seize vers dix-neuf heures
je me suis assoupi aux pieds d’un chêne et je fais un songe
je suis près d’une montagne
voila qu’apparaît un être de lumière d’une taille immense vêtu d’une robe blanche
il a une dimension qui englobe tout le cosmos et contient tout
il a deux visages l’un celui d’un vieillard auguste et l’autre celui d’un adorable adolescent
voila que le vieillard aux cheveux et à la barbe blancs
d’une voix tonitruante s’adresse à moi et me dit
« écrit sois mon scribe fidèle communique cela à tes frères et sœurs humains ceci est le message de ce qui est réservé aux hommes pour les années qui viennent
tout est consommé avant la fin du siècle
seules la repentance et l’action peuvent empêcher cela
cela concerne ton pays la France mais aussi le reste du monde
le peuple de France dont les ouvriers les paysans pauvres et le peuple travailleur ouvre la voie royale et montre l’exemple afin d’élever la spiritualité et de parvenir à des vibrations de hautes valeurs qui préservent l’être la vie et le mouvement
si ce n’est pas le cas si le peuple de France se dérobe alors il est mis fin à la présente dispensation de par la faute des hommes car chacun récolte ce qu’il sème
allez vers plus de justice et c’est la paix et le socialisme
si l’effort n’est pas fourni dans ce sens alors c’est la barbarie la guerre la maladie et la fin de la présente humanité
reçois note et transmets
la bourgeoisie doit libérer mon peuple mettre fin à son exil lui permettre de se régénérer et d’accéder à la nouvelle société plus libre plus égalitaire plus fraternelle démocratique enfin
pour cela le peuple dirigé par le prolétariat doit prendre en charge tous les pouvoirs et après cette révolution économique et sociale prendre toutes les dispositions pour créer un nouvel état socialiste »
puis l’auguste vieillard fait intervenir les quatre cavaliers qui sont ses quatre lieutenants les archanges raphaël gabriel michel et uriel
il me commande de les suivre ajoutant
« ensemble vous allez parcourir les épisodes du livre de la vie où tout est écrit afin d’examiner ce qui va se produire si l’orientation actuelle est poursuivie »
ce premier voyage se fait dans un fracas de tonnerres et d’éclairs de pleurs et de gémissements je ne peux retenir mes larmes tout au long de ce voyage en voyant toute cette misère ainsi que la fin inévitable et tragique
ceci étant dû à l’égoïsme général à l’individualisme et à la domination exacerbée d’une minorité la classe bourgeoise
je pénètre dans une caverne au pied de la montagne caverne qui s’enfonce sous terre
l’archange ouvre le livre celui où est écrit le passé le présent et l’avenir
l’antéchrist c’est l’ego le petit je créé dès le début du monde il doit disparaître se manifestant dans sa plus grande expression dans le modèle bourgeois et laisser la place au soi voilà qu’est venue la fin de l’ego afin que naisse l’homme nouveau et l’humanité fraternelle
le moment du passage est difficile car il faut rompre les amarres et ne garder que l’essentiel
l’ego fait tout pour tirer en arrière vers le passé et la bestialité
la France a une mission universelle ouvrir la voie à la « liberté égalité fraternité » en achevant le grand œuvre commencé par la révolution de mille sept cent quatre vingt neuf
une double voie est ouverte
soit c’est la voie du pire et les super riches les monopoles capitalistes et la grande bourgeoisie sont maintenus au sommet de la société alors c’est le début d’une guerre le règne de l’anarchie et de la désolation c’est la voie de la barbarie
soit les ouvriers et les classes populaires prennent violemment le pouvoir à la bourgeoisie mettant fin au vieux monde pour créer un monde nouveau c’est la voie du socialisme
il n’y a pas de place pour l’entre-deux les tièdes et les mous
soit moloch et l’argent soit le soi et l’amour
car l’antéchrist l’ego l’égotisme et l’égoïsme sont déjà vaincus
s’approche à grande vitesse la fin de l’humanité exploiteuse
la bourgeoisie est éliminée et rayée du livre de la vie la nouvelle aristocratie doit être retranchée de la surface de la terre
II
voici venue la fin du cycle commencé en mille sept cent quatre vingt neuf
la bourgeoisie a fait son œuvre et a rempli pleinement son rôle historique
elle a construit une société avec des monopoles gigantesques et monstrueux tout en accaparant égoïstement la plupart des richesses économiques
le temps est donc venu pour elle de disparaître afin de rendre à la société ces richesses et les socialiser
le dilemme est le suivant
soit la bourgeoisie maintient sa présence à la surface de la terre et ceci marque la fin de l’humanité
soit la majorité du peuple se soulève et reprend la réalité du pouvoir anéantissant la bourgeoisie et c’est là la seule condition de la survie
de l’humanité en cette fin d’ère
les hommes ont entamé une nouvelle chute en raison d’un développement et d’une excroissance sans retenue de l’ego du « moi je » au-delà de toute limite raisonnable
l’humanité s’enfonce dans la matérialité la plus noire
il en résulte la nécessité d’un nouvel exode
laissez aller mon peuple vers le socialisme vers les sommets là où l’air est vivifiant
si rien n’est fait rapidement en particulier par l’action de la classe prolétarienne et les éléments les plus clairvoyants et éclairés de la classe bourgeoise alors en application de la loi de compensation qui fait que chacun collectivement et individuellement récolte ce qu’il sème le sort de l’humanité est une fin brutale la fin de la présente dispensation et l’attente d’une nouvelle dispensation pour permettre à l’humanité ailleurs et plus tard de reprendre son cheminement et son évolution vers la perfection
les bourgeois se prennent illégitimement pour les nouveaux rois et les nouveaux nobles
présidents députés sénateurs maires ils occupent les palais d’autrefois rebaptisés les palais de la république
ils sont bientôt des fantômes
barbare bourgeoisie
le nazisme idéologie de la bourgeoisie extrémiste allemande tout comme le fascisme idéologie de la bourgeoisie extrémiste française et italienne se traduisent aujourd’hui en France par le front national
c’est pourquoi il ne faut pas oublier ce passé
ni les exactions des nazis en France ni les exactions des fascistes et collaborateurs qui ont été un peu vite épargnés et « passés à l’as » à la libération du territoire par de Gaulle et la classe bourgeoise qui veut contrebalancer le poids des communistes en s’alliant avec les représentants cachés des fascistes et en s’appuyant sur les alliés anglo-américains
le prolétariat français est éduqué à la fois par le passé long (esclavagisme féodalisme) mais aussi par le passé court et récent (commune de paris première guerre mondiale front populaire deuxième guerre mondiale soixante-dix années de bourgeoisie triomphante)
cela a donné lieu à l’extorsion des biens économiques des juifs exterminés
il s’en est suivi une forme de négationnisme officiel car les libérateurs n’ont pas pu aller jusqu’au bout dans le jugement et la condamnation des criminels français
il convient aujourd’hui de réécrire cette histoire en tenant compte véritablement de la vérité objective et de démasquer le rôle d’occultation qu’ont joué les historiens bourgeois
rien n’interdit aujourd’hui de condamner aux yeux de l’histoire les traîtres mêmes morts à la nation et à la classe ouvrière
sans craindre également de mettre en exergue les défauts propres au prolétariat lui-même forcément imprégné « imbibé » de la crasseuse idéologie dominante bourgeoise
ceci afin de l’émanciper
depuis la commune de paris la bourgeoisie a su éviter l’émergence d’un véritable mouvement communiste cohérent fort et massif afin de préserver ses intérêts particuliers et sauvegarder ainsi les bases de la société capitaliste
mais aujourd’hui le terme de cette possibilité est atteint
avec l’écocide les atteintes à la biosphère (terre eau air) la barbarie et le retour de la bestialité la terre va vers le bout du rouleau la fin de la gloire du monde bourgeois et la fin de tout ceci est inéluctable
si le prolétariat et le peuple n’interviennent pas avec force et vigueur et prennent rapidement les rênes du pouvoir dans le cadre de la dictature du prolétariat vers le socialisme et une nouvelle société basée sur des principes et des valeurs nouveaux
c’est d’ores et déjà ici et maintenant la question de la survie de l’espèce de la préservation de la vie en général sur la terre y compris des végétaux et des animaux
les élections bourgeoises sont insignifiantes et antidémocratiques car le peuple
dans son ensemble est tenu à l’écart et dans l’ignorance des décisions importantes et de la gestion publique des affaires
ceci contribue à démobiliser les électeurs
seuls les candidats politiques participent véritablement à la vie publique
le suffrage universel est donc détourné de ses intentions et ne sert qu’à maintenir la domination d’une extrême minorité sur la majorité de la société
seuls doivent bénéficier des voix populaires les hommes politiques qui rendent le pouvoir de participer aux affaires citoyennes au peuple permettant véritablement de donner son avis au peuple
les seuls hommes politiques reconnus sont ceux qui développent véritablement leur programme et qui une fois élus appliquent ce programme en rendant compte des résultats positifs et négatifs obtenus dans ce cadre
il est vrai que l’immense majorité des hommes politiques bourgeois de gauche comme de droite sont tous menteurs et « tous pourris »
leurs pensées et leurs paroles ne sont pas cohérentes avec leurs actions
le seul critère de vérité est la pratique
la dépolitisation des masses est refusée mais tout le pouvoir doit être délégué à
des représentants qui s’engagent à faire de chaque personne un citoyen actif
ayant la truelle dans une main et le fusil dans l’autre main
les révisionnistes traîtres au socialisme et au communisme se sont placés dans une orientation bourgeoise
ils visent les places et non la lutte des classes souhaitant occuper les fonctions lucratives bourgeoises et petites-bourgeoises être ministres d’un gouvernement
bourgeois de gauche être maires ou présidents de collectivités locales etc.
ils ne visent pas la prise de pouvoir prolétarien pour édifier une société nouvelle après avoir détruit la société ancienne
les représentants de la classe bourgeoise par diverses combinaisons indignes et des tricheries ont seuls accès aux postes sociaux de responsabilité en matière de gestion et d’administration
seuls leurs représentants font véritablement de la politique et accaparent les richesses enfonçant à leur suite toute l’humanité dans la plus noire matérialité
il en résulte un taux de vibrations de plus en plus bas qui conduit à abaisser l’humanité et la terre vers la pire bestialité et l’animalité la plus féroce celle de l’homme dégénéré
c’est pourquoi son règne est clos
les quatre cavaliers sont en marche et annihilent la fausse puissance barbare et cela se produit avant que le présent siècle soit fini
c’est la fin de la fausse puissance du monde
il n’est plus possible de tolérer un tel seuil d’hypocrisie et d’infatuation
les valeurs les plus belles sont foulées aux pieds
le travail est dévalorisé
le peuple doit s’éveiller sortir de sa torpeur somnambulique et triompher sous la
conduite du prolétariat
voilà que l’involution s’inverse et que l’évolution reprend sa marche inexorable en avant
III
dorénavant le peuple doit se réveiller et se libérer de la classe bourgeoise qui le garrotte
la révolution prolétarienne est violente et cruelle
voici la relation entre la classe bourgeoise d’une part et le peuple d’autre part
la bourgeoisie est une vieille femme ronchonneuse et versatile menteuse et pleine de morgue elle ignore le peuple par lequel pourtant elle veut se faire servir honteusement
le peuple quant à lui est un domestique affable naïf et obéissant devant la maîtresse il doit la servir sans rechigner
pour être présent à tout moment il porte une couche dans laquelle craintif il fait ses besoins il sert sans défaillir
la classe des « élus » censée représenter tout le peuple est en réalité au service des grands monopoles qui détiennent tous les leviers politiques et économiques
seule dirige la catégorie des hyper riches
le bourgeois et le prolétaire ne peuvent être libres simultanément
si le bourgeois est libre notamment pour exploiter autrui alors le prolétaire est esclave
inversement pour que le prolétaire et le peuple soient libres le bourgeois doit être bridé sa liberté doit être supprimée afin de l’empêcher d’exploiter autrui
le peuple seul détient les clés de la survie de l’humanité
la nature entière crie et appelle à l’aide
les plantes souffrent les animaux se plaignent de leur maltraitance
l’homme doit revenir à de meilleurs sentiments à l’égard de ses frères et sœurs inférieurs et prendre pleinement conscience de ses responsabilités
même les pierres réclament justice
la bourgeoisie a deux ailes
à droite les sadducéens les conservateurs durs en affaires hautains et prétentieux il faut les réduire à néant et rabattre leur morgue ce sont de beaux parleurs et des chaussures luisantes mais des patrons de petites vertus
à gauche la nouvelle bourgeoisie les socialistes au caviar les nouveaux riches les hypocrites les pharisiens ils portent les belles cravates qui doivent les pendre
enfin lorsque la liberté se manifeste voilà que la bourgeoisie fasciste se réveille sociale en paroles mais tyrannique dans les faits eux aussi sont terrassés
encore faut-il que la classe ouvrière s’éveille et choisisse d’affirmer son destin et de faire son devoir avec passion avec joie et avec enthousiasme
trop longtemps elle a été endormie par des illusions et des songes creux
le voile se lève et elle voit ce qui lui est demandé
à elle de choisir sa route
les temps sont courts
elle doit dès aujourd’hui commencer sa marche hors de l’Égypte vers la terre promise hors du capitalisme vers le socialisme
aller vers le socialisme français avant de bousculer toutes les vieilles habitudes pour aller vers le communisme mondial
tous les gouvernants bourgeois ceux des pays de l’aigle et de l’ours et aussi de l’Arabie sont démasqués et ont des cauchemars
leur or puéril et leur argent vain leur volonté de dominer le monde sont mis à bas
« tuez la bête dit le lumineux vieillard et évitez que les cornes ne repoussent »
pendant des années ces pseudo élites n’ont jamais su mettre leurs paroles en œuvres
c’est pourquoi le prolétariat doit prendre lui-même l’avenir en charge et se défaire de ces « mouches du coche »
si cela n’est pas fait maintenant l’humanité court à sa perte
alors ce sont des guerres des misères et des maladies sans fin
alors tout concoure à ce que l’environnement la terre l’eau et l’air se délabrent et finissent par se retourner contre l’homme
la raison et la sagesse prolétariennes et populaires deviennent dominantes afin de reprendre tous ces éléments en charge
il n’y a que cette alternative
barbarie accrue avec la domination bourgeoise
ou bien socialisme réel avec la domination prolétarienne
pour arriver à cet objectif est déclarée pendant de nombreuses années une guerre populaire pour défaire le camp impérialiste et faire triompher le camp socialiste
voilà que la nuit obscure a duré depuis la fin de la seconde guerre mondiale
la taupe se réveille et fait de nouveau trembler toute la terre
les initiés savent car ils ont consulté les archives de l’univers mais ils devront faire preuve de courage pour choisir le bon côté celui de la vie de la lumière et de l’amour
à quoi bon prêcher sans relâche en paroles des idéaux en sachant que rien n’est fait pour les mettre en œuvre
« je suis le Un l’unique sans second » dit le vieillard au sceptre royal « chacun de vous est un de mes atomes et vous devez en prendre conscience
les religions sont des créations humaines trop humaines
comprenez bien que chaque être vivant tend vers moi et vers moi seul
quiconque exploite le plus petit d’entre vous est mon ennemi à jamais
ne vous ai-je pas tous créés égaux et semblables à moi-même
allah yahvé jéhovah dieu etc. tout cela ce sont des noms des formes des idoles
moi seul suis en mouvement et en être éternellement
rejetez toutes les religions et en particulier lorsqu’elles mettent en œuvre des actions de haine de division et de mort
ma seule religion c’est l’amour l’unité la vie
c’est à ce signe et à ce seul signe que vous reconnaîtrez mes véritables adorateurs disciples et enfants
nous sommes arrivés à la fin de la préhistoire
une fois que vous en aurez fini avec la bourgeoisie avec sa culture et son idéologie commence le début du règne de l’humain de la lumière de la vie et de l’amour
encore vous faut-il très vite avant qu’il ne soit trop tard chasser les enfants des ténèbres
il n’y a pas d’autre issue et aucune autre solution n’est envisageable »
l’homme ne peut rester égoïste à la manière du bonhomme bourgeois et négliger la progression des diverses vagues de vie tant celles qui l’ont précédées que celles qui le suivent (animaux végétaux et minéraux)
IIII
voici les sept lettres adressées aux dominants afin qu’un petit reste soit sauvé en se plaçant sous les ailes du prolétariat
lettre au parti des sadducéens
« voilà plusieurs siècles que vous trompez le peuple
que vous avez contribué à mettre en place une société inique
maintenant la majorité des citoyens sous un joug ignoble et indigne
sans cesse vous faites
couler le sang de l’innocent
vous habitez de belles maisons et occupez les palais de la république bourgeoise
sournois vous abreuvez les enfants des prolétaires d’une éducation au rabais afin de les maintenir sous le joug affligeant
vous occupez tous les postes du pouvoir et vous vous appuyez sur l’argent pour que rien ne change
vos représentants les girondins Cavaignac Thiers de Gaulle ont sans cesse intrigué pour diviser le peuple maniant la carotte et le bâton
maintenant ainsi votre règne
voilà que votre heure est arrivée
vous connaîtrez le même sort que les « sangs bleus » et les « talons rouges » car le règne de l’argent et de moloch est arrivé à son terme
c’est en hurlant de détresse que vous quitterez
la scène de l’histoire pour entrer dans le néant »
lettre au parti des pharisiens
« vos ancêtres sont héroïques et bien intentionnés
les montagnards dont Robespierre et Saint-Just ont de bonnes intentions et veulent vraiment réformer la société en imposant véritablement les principes de « liberté égalité fraternité »
mais depuis vous avez goûté au lucre et vous n’avez cessé de trahir les plus beaux principes
lançant traîtreusement des couteaux dans le dos du prolétariat
vos paroles sont devenues mensongères et vous ne cessez d’être l’artisan dans les faits des volontés de vos maîtres la bourgeoisie
vos représentants n’ont plus aucun principe et sont toujours prêts à trahir une fois parvenus au pouvoir Gambetta Jaurès léon Blum françois Mitterrand
vous servez dans les faits les intérêts d’une fraction de l’impérialisme français avec sur la bouche des mots hypocrites de solidarité et de fraternité
vous aussi vous devez disparaître dans le néant
car il n’y a ni paix ni justice dans le monde tant que vos prévarications peuvent se manifester »
lettre au parti des fascistes
« vous croyez pouvoir relever le sceptre de la bourgeoisie et ainsi faire tourner la roue de l’histoire à l’envers
mais le sort réservé à vos ancêtres dont adolf Hitler et benito Mussolini vous attend aussi
encore une fois l’armée rouge va se mettre en mouvement et vous broyer dans un océan de sang et de feu
vous avez devant vous quelques années pour pérorer puis vous gagnez l’enfer pour de nombreux siècles afin de revenir ensuite travailler pour vous améliorer et devenir enfin sociables votre retour se fait sous de meilleurs augures
vos représentants ont fait long feu et illusion pour une courte durée les antidreyfusards antisémites l’action française de charles Maurras philippe Pétain et les collaborateurs
hélas après la seconde guerre mondiale les écuries d’Augias n’ont pas été nettoyées
vous avez subsisté et relevé la tête pour quelques temps n’ayant pas compris la leçon
mais n’attendez pas de seconde chance
pour avoir la paix et vous amener à de meilleurs sentiments le peuple va mettre un terme à vos vociférations et abréger la vie de vos féaux
ils se placent sous le patronage de Jeanne le cornu
ils savent bien ces sanguinaires sans principe adorateurs du veau d’or que Jeanne la pucelle est fille du peuple
il faut arracher leur masque»
lettre aux fanatiques
« le système capitaliste mondial tel qu’il est organisé a permis la subsistance
de diverses féodalités semi féodaux et semi coloniaux
il en est ainsi de l’église catholique en occident
avec la fin de l’ère se termine le règne de cette église
pierre le romain est le dernier pape de Rome
l’église catholique disparaît noyée sous les scandales de la pédophilie et de l’argent facile
cette église est devenue la succursale de Satan
l’église a failli et n’a pas su se mettre au service des pauvres des veuves et des orphelins
les évêques sont devenus des cadres bureaucratiques qui veulent mener une vie de nobliaux
il faut revenir vite au message fondamental de jésus le christ qui est pauvreté chasteté humilité et fraternité
l’église a terminé sa mission sur terre
les femmes deviennent prêtresses et sont enfin initiées
chacun de mes enfants a à mes yeux la même valeur
ils peuvent me contacter directement sans passer par une hiérarchie surannée
il en va de même de tous les faux musulmans qui interprètent le message de Mahomet à leur avantage
ils manœuvrent les esprits faibles pour accaparer les richesses
enfin que penser des soi-disant disciples de Mahomet qui tuent décapitent mettent en esclavage et diminuent l’être humain
ont-ils su créer une seule vie
comment osent-ils alors supprimer des vies amoindrir déclasser brûler et piller
éliminez les barbares
je suis le seul l’unique et le suprême
allah jéhovah dieu yahvé brahman tout cela ne sont que des noms et des formes je suis
je suis l’unique et mon message est « tous les hommes sont frères »
ceux qui prêchent la haine et la division sont mes ennemis et donc les ennemis du genre humain et doivent être traités comme tels
il faut les extirper de la société sans aucune
pitié
balayez cette pourriture»
V
lettre aux responsables des médias
« dans le système capitaliste pourri décadent et en décrépitude vous avez
abandonné toute déontologie en particulier la règle d’être au service de la seule vérité
vous vous êtes mis au service des maîtres actuels le un pour cent qui cumule avoir et pouvoir
de plus en plus vous apparaissez pour ce que vous êtes
des valets menteurs et corrompus prêts à vendre au plus offrant vos maigres talents
face à une industrie de la désinformation et du mensonge qui déforme à tout va la réalité afin de faire perdurer l’exploitation éhontée des hommes des femmes et des enfants par une minorité de possédants se multiplient les moyens écrits oraux et visuels de toutes sortes permettant à chacun de diffuser et de connaître la vérité»
lettre aux intellectuels et aux syndicats
« voilà trop longtemps que dure la trahison des clercs
vous avez tous les moyens pour vous mettre au service du peuple et des plus démunis et au lieu de cela vous avez aimé le lucre et vous vous êtes mis au service des puissants
vos œuvres médiocres vont brûler comme fétus de paille
avant qu’il ne soit trop tard réveillez-vous reprenez-vous et assagissez-vous
sinon votre sort est associé à celui de vos maîtres pharisiens sadducéens et fascistes
syndicalistes « jaunes » et corrompus retournez votre veste une dernière fois en la mettant du bon côté et en arborant le drapeau rouge du peuple en étant le fidèle serviteur de celui-ci
aidez-le à conquérir tout le pouvoir dans les entreprises
cessez d’être la cinquième colonne réformiste de la bourgeoisie et de l’impérialisme
il est plus que temps»
lettre aux pseudo humanistes
« vous avez la possibilité d’être initiés aux mystères
qu’avez-vous fait de ce droit
vous l’avez honteusement trahi pour être des prédicateurs en paroles mais des esclaves zélés des puissants de ce monde
les lèvres cousues vous êtes chassés du temple
d’autres prennent les outils et les symboles pour représenter et honorer les divins idéaux ceux qui sont nés du peuple et destinés au peuple
les pseudo humanistes qui se payent de mots comme fraternité amour etc. doivent percevoir la seule rémunération qu’ils méritent « du vent »
noires sont vos intentions mais impuissantes vos dernières actions
c’est pourquoi vous allez disparaître»
VI
voici le message adressé à la bourgeoisie
« laissez aller mon peuple vers un avenir plus radieux et plus resplendissant
libérez mon peuple de toute oppression et de l’esclavage salarié
laissez la nouvelle Jérusalem descendre sur terre et éliminez les obstacles que sont l’égoïsme le fanatisme et l’ignorance
laissez aller mon peuple vers le socialisme
laissez mon peuple sortir du capitalisme
laissez mon peuple mettre fin à la pauvreté et à la misère
si cela n’est pas fait voici les dix plaies qui s’annoncent avec fracas »
la première plaie
est le déchaînement du feu nucléaire
puisque vous avez mis en mouvement la scission nucléaire un incident gravissime dans une centrale nucléaire va atteindre de façon soudaine un dixième du territoire français vitrifiant toute vie pour des centaines d’années
une centrale nucléaire explose
ce premier signal étant imprévisible les femmes et les hommes politiques cherchent en vain à se dédouaner
une zone – le point zéro – est condamnée pour plusieurs centaines d’années
ce parc est un témoignage de la déraison des hommes emmenés par la classe bourgeoise ainsi que de la décrépitude et de la décadence auxquelles l’humanité est entraînée par une société capitaliste et impérialiste basée sur le profit immédiat accaparé par quelques-uns une minorité de super nantis
alors l’heure a sonné pour que la classe ouvrière organisée en parti communiste dirigeant l’armée rouge et le front populaire prenne la totalité du pouvoir et pour que la classe bourgeoise soit définitivement écartée
il est plus que temps pour que soient mis en œuvre de nouveaux principes de développement basés sur l’énergie du soleil et du vent principes qui respectent la biosphère
alors la dignité du réel est préservée
il est organisé une planification des moyens et des besoins dont tous les autres pays peuvent s’inspirer
mais si ce premier signe n’est pas pris en compte les autres signes suivent
si le prolétariat et le peuple ne prennent pas leurs responsabilités et si la bourgeoisie parvient à se maintenir au pouvoir par la force fasciste ou par la ruse c’est la deuxième plaie qui est mise en branle
horreur et désolation autour du point zéro
l’accent est mis sur la trahison des pseudo écologistes et le nécessaire respect de la nature
éveil et retour de l’ère du soleil avec son énergie bienfaisante
par la seconde plaie
l’eau va inonder dévaster et laver le sol rendant celui-ci improductif balayant toute impureté
l’eau s’élève au-dessus du niveau du continent et une partie des terres est inondée empêchant la vie et la culture sur une partie du territoire
cette eau de mauvaise qualité empoisonne l’herbe les arbres et les
animaux ainsi que les êtres humains
les hommes indignes se moquent et refusent de prendre en considération ce second avertissement
le peuple exige que des coupables soient désignés contraignant la force publique à ce que de nombreux femmes et hommes politiques soient décapités
ils sont tous cause d’opprobre et de honte et
ils se cachent devant les yeux du peuple de peur d’être mis en accusation et d’être mis à mort
de nombreux procès mettent en cause la façon dont la plupart se sont indûment enrichis sur le dos du peuple et la façon dont ils ont mené leurs mandats.
VII
pour la troisième plaie
les présidents perdent la tête puisqu’ils ont osé s’intercaler entre moi et le peuple
leur sort est celui de louis seize car les hommes politiques bourgeois interfèrent de façon tout à fait illégitime entre ma volonté et le peuple
ceux-ci seront honnis et poursuivis partout et ils n’ont aucun
lieu où se réfugier
le président a la bouche cousue ne pouvant plus parler ayant trop menti
souffrances atroces et regrets sempiternels
les animaux mal nourris avec un air et de l’eau pollués ont des maladies horribles et nouvelles qu’ils transmettent aux hommes
les hôpitaux sont largement sursaturés et ne peuvent pas faire face à ces épidémies
la quatrième plaie
rend les animaux impurs à la consommation
l’homme se détourne de la viande comme aliment de façon contrainte et forcée
voyant la France considérablement affaiblie l’ours l’ogre russe l’attaque avec
la plus grande férocité afin de la mettre sous son joug
la bourgeoisie profite de cette opportunité et de cette aubaine pour augmenter encore ses bénéfices et pressurer le peuple
la fraction la plus fasciste de la bourgeoisie s’allie avec l’occupant afin de tirer son épingle du jeu
pour le prolétariat guidant le front populaire l’unique solution est de mener à son terme la guerre populaire uni avec les autres peuples opprimés et noyant l’occupant et ses alliés dans un fleuve de haine et de sang
VIII
la cinquième plaie
est la guerre impérialiste
face à une France affaiblie celle-ci est la victime d’une guerre de rapines terrible opposant sur son territoire l’aigle impérial et l’ours impérial
une sorte de peste noire aide à l’extinction et à l’affaiblissement des barbares occupants mais n’épargnant personne sans que l’on puisse trouver de remède
pour la sixième plaie
une horrible maladie se diffuse parmi le genre humain n’épargnant ni les femmes ni les hommes ni les enfants
rien ne pourra s’opposer à sa propagation
VIIII
la septième plaie
voit la terre se soulever et trembler et le feu venant du sol vient lécher les grandes villes
c’est alors que la terre tremble depuis le japon jusqu’à l’Italie passant par la Turquie et bousculant tout le continent européen
les grandes villes vont se soulever et le tyran russe tente de noyer la dissension sous une fournaise nucléaire rasant paris et Lyon
pour la huitième plaie
Paris et Lyon sont le théâtre de luttes sanguinaires telles que la terre n’en a jamais connues auparavant et n’en connaît plus jamais de telles à l’avenir
la végétation déjà considérablement affaiblie et malmenée ne fournit plus assez d’alimentation créant le besoin et la famine
X
pour la neuvième plaie
la végétation va se rebiffer et refuser de produire de nouvelles semences créant une famine généralisée qui n’épargne ni les hommes ni les animaux
devant tant d’opprobre et d’injustice la terre va se retourner sur elle-même
c’est le boule-versement qui met fin une fois pour toutes à la dispensation actuelle
il faut attendre une nouvelle dispensation pour que l’humanité puisse poursuivre sa marche en avant
la dixième et dernière plaie
est le bouleversement de la terre c’est le versement de la boule
nord et sud devenant l’équateur le soleil se levant à l’ouest éclairant toujours plus du même côté c’est la fin de l’humanité actuelle jusqu’à la prochaine dispensation
XI
les initiés savent
seule la révolution dans les esprits et les cœurs peut empêcher ces dix plaies
l’homme de base doit enfin se prendre en charge et l’humanité doit s’amender
les mauvais enfants des ténèbres sont battus dans les cieux et jetés sur la terre pour mener le dernier combat ultime
l’archange Michel le combattant qui terrasse les dragons et les démons a en charge les armées célestes son arme est infaillible et sans faille il exécute
les décrets divins son armée revient triomphante du combat
il est suivi par l’archange Gabriel héraut et porte-parole de dieu sa voix tonne dans les airs faisant frémir les lâches et les hypocrites nul n’ose l’affronter
puis vient l’archange Raphaël qui sait instaurer la véritable justice et apporter la paix au monde
enfin voici l’archange Uriel qui écarte résolument tous les obstacles du chemin
l’alternative est soit la classe ouvrière s’empare de tout le pouvoir et le rend au peuple afin d’effectuer un saut qualitatif soit la bourgeoisie maintient son pouvoir exécrable et conduit prestement à la fin de la civilisation
laissez aller mon peuple vers le socialisme
que mon peuple soit libéré de l’esclavage salarié
mais les sadducéens bourgeois conservateurs et les pharisiens bourgeois réformistes sont sourds et aveugles
ils n’ont ni yeux ni oreilles
ils sont obtus et ne veulent pas comprendre
c’est pourquoi la contrainte est tellement nécessaire
tel un nouveau pharaon ils ne savent pas lire les signes
mais le présent siècle ne passe pas sans que tout cela s’accomplisse
laissez mon peuple aller vers la Jérusalem céleste
et pourtant ils ont été avertis songes et signes leur ont été fournis à profusion
la bourgeoisie se croit maligne et manipule les moyens d’information
XII
arrivé à la fin du premier voyage
de retour devant le bienveillant vieillard
celui-ci déclare «voici l’avenir scellé
qu’il en soit ainsi
si le prolétariat et le peuple ne font pas leur devoir et ne
prennent pas leurs responsabilités»
commence alors le second voyage présenté par la deuxième face du vaillant personnage le jeune homme au sommet de la montagne
«va maintenant pour le second voyage» me dit celui-ci
c’est un grand apaisement et j’entends une musique sainte et le chant d’un chœur divin
les quatre archanges apaisés m’emportent vers les cieux sur leurs ailes
l’être de lumière a ouvert une fenêtre
et j’ai vu que pendant un temps les barbares fanatiques et terroristes sont plongés dans le feu de l’enfer et dans leurs bouches grandes ouvertes les démons versent du soufre ils hurlent de douleur regrettant leurs actes passés
«soyez sans pitié avec ces lâches me dit l’être de lumière car leurs œuvres les ont condamnés»
puis il m’a montré une ribambelle de bourgeois de toutes sortes papes évêques imams banquiers professeurs d’université… aller vers les bas-fonds tristes et abattus
« il faut les remettre au travail dit l’être de lumière à la longue chevelure blanche afin qu’ils goûtent aux tâches les plus ingrates se rendent enfin utiles à la société et retournent sur le droit chemin regrettant toutes les mesures malsaines qu’ils ont infligés à autrui
fais leur subir autant que ce qu’ils ont fait subir à autrui ce n’est que justice et eux aussi ont le droit d’évoluer vers le bien »
XIII
seule la classe ouvrière dirigeant une France socialiste avec sagesse et justice guidée par le parti communiste peut empêcher le chaos
laissez aller mon peuple vers la Jérusalem céleste
rien ne peut empêcher l’instauration de cette Jérusalem céleste
la bourgeoisie a faibli et s’est inclinée devant le veau d’or
elle est prête à s’assujettir au fascisme si besoin pour maintenir son règne impie et inique mais elle a perdu son droit d’aînesse
les signes apparents ne trompent pas les sages et les veilleurs
mort aux sangsues
il n’est plus possible de tergiverser
il faut laisser aller mon peuple en avant-garde vers le paradis terrestre
il s’agit de l’ultime combat
tous les outils sont prêts et la route est tracée
la bourgeoisie doit accepter de disparaître volontairement et laisser aller mon peuple vers le socialisme
sinon c’est contrainte et forcée qu’elle devra parcourir la voie de la rémission
XIIII
prolétariat de France voici le signe sous lequel tu vaincs le drapeau rouge avec la faucille et le marteau
la France nation éclairée est le pilote et l’avant-garde des autres nations
elle montre l’exemple en s’engageant résolument sur la voie de la fraternité et de l’amour
c’est la première nation à se débarrasser de la sangsue exploiteuse
elle montre comment se débarrasser du joug de l’exploitation capitaliste et impérialiste conduite par le parti communiste nouveau moïse
elle s’en va vers la Jérusalem céleste
le bonheur de tous et l’intérêt général sont le moteur qui conduit tous les cœurs à l’unisson
laissez derrière vous le mensonge les médias vendus aux plus offrants et la
justice à deux vitesses
la France devient un facteur de paix d’entente et de coopération sur un pied égalitaire entre toutes les nations
elle ne veut plus des guerres injustes menées pour le seul profit des grands monopoles
laissez aller mon peuple
libérez le peuple de l’esclavage salarié
la bourgeoisie n’a aucune légitimité pour maintenir le peuple en esclavage
mon peuple doit s’émanciper et se libérer par tous les moyens dont la violence révolutionnaire car il a la maturité pour accéder à la démocratie réelle
tout le pouvoir pour le peuple aucun pouvoir pour la bourgeoisie
le travail de la lutte des classes est repris et l’idéal de la commune de paris est enfin réalisé
le parti du prolétariat doit manœuvrer de telle sorte que les trois fractions de la bourgeoisie soient battues aussi bien militairement que culturellement idéologiquement et socialement
ces dominateurs qui exploitent le peuple sans vergogne sont extraits de la société et placés sous le joug de la dictature du prolétariat
laissez aller mon peuple vers la société socialiste de fraternité et d’amour
deux conditions sont indispensables pour franchir l’étape actuelle c’est la création d’un parti communiste émanation des éléments les meilleurs de la classe ouvrière capables de constituer l’état-major qui guide l’ensemble du peuple vers l’avenir radieux et la création d’une armée rouge outil indispensable pour écraser une fois pour toutes la force de la réaction et maintenir une dictature implacable sur ceux qui refusent en pratique les valeurs de liberté d’égalité et de fraternité
lors de l’étape transitoire chaque élément du prolétariat fait preuve d’une morale d’acier qui sacrifie tous les intérêts personnels et égoïstes à la survie et à la gloire de la classe ouvrière dans son ensemble
seuls priment l’égrégore et la vie
le peuple français a traversé suffisamment d’épreuves et il connaît suffisamment son histoire pour y puiser une énergie et une force capable de renverser et de contenir les montagnes de la réaction
l’expérience vécue par le prolétariat français en particulier lors de la commune de paris du front populaire de la lutte contre le nazisme et les collaborateurs et lors des soixante-dix dernières années ainsi que les théories révolutionnaires développées par les penseurs du prolétariat surtout Marx Engels Lénine Staline Mao Tsé-Toung mais aussi l’expérience universelle de tous les opprimés de la terre notamment l’union soviétique de mille neuf cent dix sept à mille neuf cent cinquante trois et la chine populaire de mille neuf cent quarante neuf à mille neuf cent soixante seize dont la première grande révolution culturelle prolétarienne tous ces éléments de pratique et de théorie sont suffisants pour pouvoir s’appuyer dessus et créer la pensée guide propre à la France permettant à celle-ci d’accéder lors des prochaines années à un état socialiste digne de ce nom
XV
le prolétariat assume son rôle historique son devoir et sa responsabilité
la grande masse de la classe sort de la léthargie pour échapper à l’enfer capitaliste et conquérir l’idéal socialiste
sa main ne tremble pas et le courage est son guide
tout obstacle sur son chemin est lourdement frappé afin d’aplanir celui-ci
le vingt-et-unième siècle est le siècle d’une ère nouvelle du renouveau et de la vie renaissante ou alors c’est le siècle de la mort et de la nouvelle chute
si la barbarie l’emporte ainsi que l’apathie du prolétariat accompagnées du fascisme du fanatisme et de la finitude alors se mettent en route automatiquement en fonction de la loi de compensation les dix plaies
ce qui signifie la fin de l’actuelle dispensation
il faut dans ces conditions recommencer et attendre une nouvelle dispensation pour atteindre le but de « liberté égalité fraternité » entre tous les êtres vivants
plus la haute bourgeoisie va ressentir que le pouvoir lui échappe et qu’elle doit disparaître et plus elle va se tourner vers des solutions extrêmes afin d’assurer sa survie même temporaire
en réponse à cette barbarie les solutions révolutionnaires sont de plus en plus radicales
chacun doit compter sur lui-même et sur sa classe sociale
compter sur ses propres forces est la seule issue
car il n’existe aucun homme providentiel aucun sauveur
toute personne qui prétend à ce rôle est un usurpateur et il est foncièrement anti-social
il s’agit de faire une ligne de démarcation nette et définitive entre un représentant politique bourgeois et un représentant politique prolétarien
le représentant bourgeois représente les intérêts de la bourgeoisie tout en se donnant une image d’au-dessus des partis il est victime de l’appât du gain corrompu se servant de ses postes et mandats pour se protéger de toute répression y compris de la justice bourgeoise pourtant déjà bien clémente à son égard c’est un cumulard richissime qui place par népotisme ses familiers dans de bonnes places c’est un professionnel de la politique
par contre le représentant prolétarien accepte consciemment de représenter les intérêts de la classe ouvrière il a un revenu modeste correspondant à celui d’un salarié ouvrier humble il reflète dans son style de vie la morale prolétarienne il est au service du peuple et du bien commun en cas de faiblesse de trahison ou de manquement à ses devoirs il est automatiquement démis de ses fonctions et soumis aux sanctions les plus extrêmes de la justice prolétarienne il n’occupe qu’un seul mandat et rend compte autant que de besoin à ses mandants de la façon dont il s’adonne à ses activités et du bilan des résultats obtenus il est sans crainte et sans peur toujours prêt à donner sa vie pour la cause des plus pauvres et pour la justice prolétarienne
les sciences économiques et sociales ont suffisamment progressé et l’application de celles-ci permet d’instaurer une société plus juste
de grands penseurs ont posé les grandes lignes qui permettent à l’humanité de passer du stade préhistorique à l’étape historique celle du socialisme qui met fin à la bestialité
ces penseurs sont notamment Karl Marx Friedrich Engels Lénine Staline et Mao Tsé-Toung
des peuples comme les peuples soviétiques de mille neuf cent dix sept à mille neuf cent cinquante trois et les peuples chinois de mille neuf cent quarante neuf à mille neuf cent soixante seize ont ouvert la voie et montré l’exemple de l’édification d’une société plus juste et plus égalitaire
si ces derniers ont temporairement fait marche arrière eux aussi bientôt reprennent leur marche en avant
le contexte de la prise du pouvoir par le prolétariat ainsi que l’exercice de ce pouvoir dans le cadre de la dictature du prolétariat est variable
si ce contexte comporte toujours la lutte des classes âpre sanguinaire et pacifique violente et non-violente menée par l’état-major du prolétariat le parti communiste la classe ouvrière et le peuple contre la classe bourgeoise par contre le cadre peut être la paix relative et cela peut être aussi la guerre ouverte guerre civile à l’intérieur du pays et guerre inter impérialiste et contre les divers impérialismes à l’extérieur du pays
la bourgeoisie ne se prive pas pour défendre ses intérêts de mener diverses guerres à l’extérieur contre les peuples que ce soit au mali en libye en Irak en Syrie ou en Afghanistan
quel que soit le contexte guerre ou paix relative le prolétariat garde son autonomie par rapport à la bourgeoisie et lutte pour défendre ses intérêts propres
c’est là un des enseignements inexorables du vingtième siècle
par son habileté manœuvrière la bourgeoisie en s’appuyant sur l’opportunisme et l’arrivisme des pseudo représentants de la classe ouvrière comme maurice Torez, georges Marchais et consorts a su atteler le wagon du prolétariat à sa propre locomotive lui faisant servir les intérêts de la bourgeoisie en arguant de valeurs « nationales » de la république « neutre » etc. c’est aussi ce à quoi ont servi les délégués « jaunes » des divers syndicats maisons faire servir les intérêts bourgeois au prolétariat trahissant les intérêts réels et vitaux du prolétariat qui sont la prise du pouvoir politique ceci afin de préserver la société bourgeoise
s’il est possible tactiquement de passer des alliances avec certaines fractions de la bourgeoisie de créer un front populaire à géométrie variable contre une cible à un moment donné le prolétariat et son parti communiste doivent toujours conserver leur autonomie luttant pour leurs intérêts stratégiques la prise de tout le pouvoir la destruction de l’état bourgeois l’instauration de la dictature du prolétariat pour aller vers le communisme au niveau de l’humanité
XVI
avec l’état socialiste c’est la fin de l’exploitation de la majorité par la minorité
tout est fait pour servir le peuple et améliorer son sort
les biens sont partagés de manière équitable et chacun en dispose en fonction de ses besoins
toutes les propriétés dont notamment les moyens de production les grands monopoles les banques les assurances les chemins de fer etc. sont transférés immédiatement et sans aucune compensation à la société toute entière
ces biens communs appartiennent déjà de fait à la société ayant été produits par celle-ci dans son ensemble mais pour être indûment accaparés par la minorité bourgeoise pour servir de moyen d’oppression et d’exploitation de la grande majorité du peuple
pour parvenir au socialisme puis au communisme il faut supprimer toute forme d’héritage qui crée des inégalités
à l’exception des biens nécessaires à la vie quotidienne il est aberrant injuste et inutile qu’à l’un des bouts de la société les uns possèdent trop ce qui caractérise une très petite minorité de très riches et qu’à l’autre bout de la société une grande majorité de citoyens soient privés de tout
il est également injuste qu’avec le dispositif de l’héritage les uns commencent dans la vie avec beaucoup plus de biens que le strict nécessaire d’autant plus que les grandes fortunes sont accaparées par le vol et l’exploitation et ne reposent plus jamais sur le travail personnel et honnête
notamment la nouvelle société doit éviter comme c’est le cas actuellement que les riches deviennent de façon éhontée et frauduleuse de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus pauvres manquant du strict nécessaire
dans cette nouvelle société il ne peut y avoir ni de très riches ni de très pauvres ni châteaux ni chaumières et taudis
les sans domicile fixe sont prohibés et chaque ménage dispose d’un logement décent
les fuites fiscales sont impossibles et toute tricherie est sévèrement sanctionnée comme une atteinte intolérable à l’intérêt collectif
telle est la première béatitude
le travail tant manuel qu’intellectuel est sacralisé et obligatoire
il n’y a plus de différences exorbitantes entre les salaires créant des iniquités
tous les citoyens ayant l’âge requis doivent travailler en fonction de leur possibilité
personne n’est oisif et vit aux dépens des autres
le travail est à la fois un besoin et un plaisir partagé par tous
il n’y a plus de chômage et chacun est utilisé pendant une période raisonnable par la société afin de servir au mieux les intérêts de tous
telle est la seconde béatitude
XVII
l’éducation depuis les classes primaires jusqu’au niveau supérieur est gratuite et obligatoire
tous ont accès à une formation qui est scientifique et rigoureuse
c’est le droit à la formation tout au long de la vie
cette formation comprend les matières culturelles et sportives
l’éducation est accessible à tous
les sciences la technologie et la raison sont remises à l’honneur et leur développement est favorisé
les sciences ne sont plus au service du profit et les échanges entre savants sont fortement encouragés pour mieux connaître l’univers sous tous ses aspects
l’histoire doit être étudiée scientifiquement du point de vue des intérêts du prolétariat qui l’a servi qui l’a trahi
le sport n’est plus lié à l’argent
les compétitions tous azimut sont encouragées ainsi que l’émulation mais sans tricherie et sans dopage notamment dans les écoles les lycées et les universités
tous les types de sports sont pratiqués par toutes les classes d’âge
chacun doit pouvoir accéder gratuitement à tous les arts et aux divers musées sans être un consommateur béat et bovin
les divers palais de la république comme l’Élysée Matignon etc. deviennent des musées témoignage du passé capitaliste à l’image du musée du Louvre ou du palais de Versailles
le sacré-cœur de Paris devient le musée à la glorification de la commune de paris
il est mis fin au règne de l’argent et aux médias capitalistes qui formatent le cerveau du peuple
telle est la troisième béatitude
il n’y a plus deux systèmes de santé l’un réservé aux riches qui peuvent payer et l’autre plus précaire et au rabais destiné aux déshérités
la santé est un service unique gratuit et prioritaire de la naissance à la mort
les hôpitaux et les médecins sont répartis sur tout le territoire national dans le cadre d’un système unique social de santé
telle est la quatrième béatitude
XVIII
qu’enfin vienne le règne de la justice et que disparaisse la pseudo justice à deux vitesses qui n’est qu’injustice selon que l’on est riche ou misérable ce sont des principes différents qui s’appliquent les passe-droits pour ceux qui ont la répression et l’injustice pour les pauvres les humiliés et les sans dents
le monde doit être redressé remis sur ses pieds debout et à l’équerre
la justice est un système social exercé par des juges élus issus du peuple qui peuvent être démis en cas de manquement à leurs devoirs
ils exercent la justice au nom de la société dans le cadre d’un service gratuit
les prisons sont de véritables lieux de vie où l’homme peut se réhabiliter par l’étude et le travail afin de servir au mieux la société
la justice doit suivre son cours non seulement ici et maintenant mais aussi dans le passé
d’ores et déjà la véritable justice populaire peut être instaurée et exercée par des comités populaires qui prennent en charge les diverses causes si mal jugées par les tribunaux officiels de la bourgeoisie
par exemples chaque fois qu’un jeune des cités décède victime des menées fascistes chaque fois qu’un ouvrier meurt sur son lieu de travail un comité de vérité et de justice créé par les proches afin d’établir la réalité des faits prononce un jugement populaire équitable
c’est là l’embryon de la future justice populaire exercée par l’état socialiste par des juges élus et révocables issus du peuple en fonction des principes juridiques prolétariens
telle est la cinquième béatitude
les forces de l’ordre et de répression l’armée la police sont toutes issues du peuple gardant le contact avec celui-ci et placées sous son contrôle au service du peuple
ces forces assurent la sécurité et la paix de celui-ci
la défense des intérêts communs et collectifs prime la défense des intérêts individuels et personnels
la défense nationale est assurée par une armée rouge professionnelle issue du peuple encadrant le peuple en armes en cas de besoin
l’armée est placée sous la direction du parti politique du prolétariat
il faut que passent devant un tribunal de l’histoire les personnages mêmes morts car cela permet de tirer des leçons pour l’avenir
telle est la sixième béatitude
XVIIII
les représentants du peuple sont tous issus du peuple travailleurs ou anciens travailleurs
élus au suffrage universel ils ne sont pas des professionnels de la politique
une rotation est assurée permettant de favoriser l’accès du plus grand nombre aux responsabilités politiques tant au niveau national que dans les villes et les campagnes dans les divers lieux de vie de base de la société
bien évidemment le cumul des mandats est formellement interdit
chaque élu doit rendre compte aussi souvent que possible de la façon dont il exécute son mandat et des résultats obtenus
chaque élu défaillant peut être démis de sa fonction et éventuellement puni en cas de malversations
le politicien
prolétarien accepte d’être jugé en fonction de la même loi que celle qu’il prône pour condamner le politicien bourgeois
en cas de mise en cause d’un droit fondamental ou de la démocratie populaire il est reconnu au peuple le droit à l’insurrection
dès aujourd’hui tout homme politique qui n’agit pas pour abolir l’esclavage salarié ici et maintenant et qui ne lutte pas effectivement contre le chômage ici et maintenant est un menteur et un criminel et il doit être condamné comme tel sévèrement ici et maintenant
il ne doit sûrement pas recueillir les suffrages du peuple
telle est la septième béatitude
il est mis fin à l’antagonisme des campagnes et des villes
les paysans assurent l’alimentation de la société dans le plus grand respect de la dignité de la biosphère de la santé de la population et du respect dû aux animaux
que l’on mange de la viande soit
mais qu’il soit alors mis fin à la vie des animaux de façon digne et avec amour
tout est mis en œuvre pour que le niveau de vie des campagnes soit le même que celui des villes
la terre est mise intégralement à la disposition de ceux qui la cultivent étant considérée comme un bien commun appartenant à toute la société et aussi aux futures générations
elle est destinée à produire pour tous une nourriture saine et équilibrée à un prix raisonnable
la biosphère dont la terre l’eau l’air et tous les milieux vivants est respectée et préservée
tout être vivant est respecté dans sa dignité et il est mis fin à la cruauté à l’égard des animaux ceux-ci étant traités comme des personnes en devenir des frères et sœurs en voie d’évolution
telle est la huitième béatitude
XX
il règne la plus stricte égalité entre les hommes et les femmes ainsi qu’entre toutes les ethnies
toute ségrégation quelle qu’elle soit est formellement interdite et sévèrement punie
la liberté de croyance et de conscience est totale
toute différence non justifiée entre les personnes (valides handicapées malades…) est interdite
telle est la neuvième béatitude
la société socialiste doit se défendre tant à l’égard de l’ennemi intérieur (la bourgeoisie et les vieilleries restant du système capitaliste) qu’à l’égard de l’ennemi extérieur (l’impérialisme tant qu’il subsiste)
est prôné l’internationalisme prolétarien dans la lutte contre les terroristes notamment religieux de l’intérieur et de l’extérieur de la société
c’est le prolétariat et le peuple en armes qui constituent la meilleure sauvegarde de la sécurité des citoyens
cependant l’accent est toujours mis au niveau international sur la nécessité d’instaurer un climat de paix d’entente de respect mutuel et de bonne coopération entre tous les peuples
dans le cadre de la dignité et de l’égalité entre toutes les nations le socialisme est édifié avec une idéologie et une pratique internationalistes prolétariennes dans un cadre national jusqu’à la généralisation du socialisme dans toutes les nations ou au moins la grande majorité des nations
alors est instaurée le gouvernement mondial socialiste
telle est la dixième béatitude
XXI
de ces dix béatitudes résultent la fraternité et l’amour universels
l’humanité est une allant le plus rapidement possible vers un gouvernement commun et unique
comme Robespierre en son temps il convient d’être opposé en principe à la peine de mort car la société n’a aucun droit sur la vie de ses membres
cependant pendant un certain temps la peine de mort garde une réalité politique et s’applique notamment pour les hommes politiques réactionnaires et antisociaux tous ceux qui ont choisi sciemment de servir leurs intérêts égoïstes et personnels et de faire ainsi régresser l’humanité dans son entier
de tels individus ne sont pas amendables et de toute façon ils pourront revenir et se réincarner à nouveau ailleurs et plus tard après avoir tiré les conclusions de leurs comportements rétrogrades et avoir pris de meilleures dispositions afin de faire évoluer et progresser la fraternité et l’amour universels
c’est une aide à leur apporter et aussi agir de manière préventive pour préserver les intérêts communs de l’humanité
il y a deux façons antagoniques de définir la valeur suprême
soit la valeur suprême est l’ego ce qui est le cas pour les membres de la classe bourgeoise qui ne voit que magot et qui sacrifie tout ce qu’il y a de plus sacré amour paix patrie etc. à leurs intérêts privés
soit la valeur suprême est la vie et l’espèce l’universalité ce qui est le cas pour les membres de la classe prolétarienne
ces deux conceptions sont inconciliables
puis l’être de lumière m’a transporté dans les airs et m’a présenté un nouveau ciel et une nouvelle terre montrant ce qu’est l’avenir radieux avec un prolétariat vigoureux qui se met en mouvement jusqu’au bout jusqu’à la phase finale
qu’il a donc du courage et de la détermination
il a mis fin une fois pour toutes à la suprématie de la bourgeoisie et donc de l’hypocrisie et du mensonge et a supprimé tous les obstacles suivi par tous les peuples de la terre ancienne
l’être de lumière ouvrit une fenêtre et je vis un océan d’êtres humains hommes femmes et enfants bienheureux se réjouir de la vie nouvelle qui leur est donnée montant à l’échelle du progrès vers les plus hautes cimes vers l’infini et l’Un sans second
le peuple de France se retrouve au sommet de la montagne là où tout est Un bientôt rejoint par tous les peuples de la terre pour marcher d’un même pas vers le communisme radieux
XXII
la différence entre les deux premiers voyages l’un vers le bas l’autre vers le haut repose sur le libre-arbitre non seulement du prolétariat et du peuple mais aussi du petit reste de la partie la plus éclairée de la classe bourgeoise qui trahit les intérêts de sa classe renonçant consciemment à ses privilèges pour épouser résolument les intérêts du prolétariat et de l’avenir les valeurs de la lumière de la vie et de l’amour
l’un des archanges me dit alors « tout être humain qui le souhaite peut parvenir aux mêmes visions il suffit de prier et de se mettre en conditions j’ai dit »
c’est alors que commence le troisième voyage, qui est celui de la réalité choisie par mes sœurs et mes frères
une troisième figure invisible me parle elle se trouve entre le visage du vieillard et le visage du jeune homme entre le père et le fils le passé et l’avenir
l’esprit me dit « le chapitre vingt-deux est inscrit dans la réalité par les hommes et en particulier par les prolétaires et le peuple de France qu’il en soit ainsi
l’humanité est une une seule et même race
la dignité de chacun doit être respectée y compris celle de l’immigré qui est aussi un travailleur
chaque personne n’est-elle pas un passager sur cette terre
préparez les meilleures conditions pour rencontrer les sœurs et les frères d’autres mondes ailleurs et autrement
quelle honte si la rencontre se déroule aujourd’hui alors que la question des classes sociales n’est pas réglée et qu’une partie de l’humanité la grande majorité est l’esclave salarié d’une petite minorité
quelle indignité si la rencontre s’effectue alors que l’homme n’est pas entré dans l’histoire et demeure encore dans la préhistoire celle de la lutte des classes du racisme du fanatisme et de l’exploitation
ne vous ai-je pas créés égaux et à mon image
avez-vous le droit de faire des différences de races de sexes de classes etc. là où moi je n’en fais pas et vous traite tous avec équité
ceux qui ont passé le seuil du siècle vingt-deux savent quelle est le troisième voyage car ayant crié le nouveau monde ils ont atteint l’Un que je suis »
c’est alors que je me suis réveillé et sonnent les vingt-et-un coups de vingt-et-une heures dans le lointain à un clocher s’élançant vers les cieux
et le dernier coup clame « dans la lumière, la vie et l’amour vivez »
La Poésie en Franc-Maçonnerie 16 mars, 2023
Posté par hiram3330 dans : Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireLa Poésie en Franc-Maçonnerie
La rencontre d’un mot ou d’une idée est toujours essentielle dans un poème ou une planche. Ils sortent soudain de l’anonymat du langage « courant » pour embraser le vocabulaire et donnent à vivre au poète ou au Maçon l’expérience saisissante de « marcher à son pas » dans le temps subtil de l’inspiration, loin du temps linéaire des discours sans relief du quotidien.
On entre ainsi en Poésie comme en Maçonnerie par des mots d’esprit qui jaillissent en nous de sources profondes, gonflent le flot d’autres mots et idées jusqu’aux grands Deltas des Loges. Je vis personnellement comme des rencontres ces inspirations, jusqu’à me souvenir souvent des moments où elles surgissent dans mon imaginaire, tel « Etre Ici et Maintenant » traduisant l’état d’esprit de ceux et celles qui travaillent sur eux-mêmes pour sortir de la douce errance de la pensée et s’ancrer dans le présent, les sens et le mental grands ouverts à ce qu’ils perçoivent dans l’immédiat.
Avec ce poème, je découvrais la légèreté des vers octosyllabiques et les compositions par multiples de quatre vers, particulièrement adaptés aux poèmes-chansons et à l’écriture symbolique. Le nombre « quatre » symbolisant la stabilité matérielle, et le « huit » la totalité et la cohérence de la création en mouvement, les compositions artistiques qui portent leur marque gagnent en équilibre et en régularité, et peuvent illustrer pour des êtres en quête de sens un projet de vie intérieure, concentrant en quelques verbes :
être, rechercher, voir, savoir, une spiritualité en devenir et en action. « Se voir voyant sans être sage » s’inspire aussi des célèbres mots d’Anderson « Ni athée stupide, ni libertin irreligieux », extraits de la Constitution de 1723, charte de la Franc-Maçonnerie moderne, pratiquant la « double dénégation », ou l’art de conjuguer des formules contradictoires.
Or des travaux en sciences cognitives tendent à démontrer qu’ils formulent un modèle de pensée et de la cognition centré sur la fuite du déplaisir, renouvelant les racines émotionnelles premières de l’acte de connaissance, au fondement de l’initiation maçonnique.
La poésie en Maçonnerie embrasse un champ très large d’expressions, exaltant souvent la chaleur des échanges fraternels et de la vie en Loge, et donnant surtout à penser « en liberté », et comme le soleil et la lune à l’Orient des Loges, à rayonner et « réfléchir » les mots et les idées éclairant les consciences et les cœurs.
Chacun peut se projeter sur les quelques mots mis en forme dans un poème, s’y « réfléchir » sans effort et dans ce cadre où tout est mesure se remettre soi-même « en forme ». Dans une société où l’apparence et le paraître sont reine et roi, un poème partagé en fraternité touche autant l’être que le paraître, autant l’esprit que le corps, et les sourires qui fleurissent ici ou là dans l’assemblée disent en silence combien les cœurs s’en réjouissent.
Le poète Maçon est aux premières « loges » de la pratique du symbolisme et de l’analogie entre une idée abstraite et l’image chargée de l’exprimer, et s’inspire de la démarche des poètes symbolistes pour qui le monde ne saurait se limiter à une apparence concrète réductible à la connaissance rationnelle. Il est un mystère à déchiffrer dans les correspondances qui frappent d’inanité le cloisonnement des sens, car les sons, les couleurs, les visions participent d’une même intuition qui fait du poète une sorte de mage.
Le poète symboliste oscille ainsi entre des formes capables à la fois d’évoquer une réalité supérieure et d’inviter son lecteur à un véritable déchiffrement, mettant en œuvre par l’écriture la transcription du sens et la transmission, au fondement de l’initiation maçonnique.
L’écriture elle-même est initiatique, le poète semblant répondre « régulièrement » à la question d’un Frère : « Allez-vous plus loin ? » pour construire son poème, tout en apprenant de lui-même à savoir par lui-même « jusqu’où ne pas aller trop loin ».
La Maçonnerie traduit pareillement ces deux voies complémentaires d’accès à la connaissance et à la conscience par la structure en degrés des Rites, en particulier du Rite Ecossais Ancien et Accepté, où les trois premiers degrés sont dédiés aux Loges dites « symboliques », et les degrés ultérieurs à des Loges dites de Perfection, où montent en charge les Frères et les Sœurs prêts à élargir par eux-mêmes, dans un esprit de responsabilité, le cercle intérieur de leur accomplissement spirituel. Baudelaire, initiateur de l’école symboliste, a illustré magistralement ces deux cheminements par deux sonnets : « Correspondances » et « La Vie Antérieure ».
En méditant sur la Nature dans « Correspondances », écrit en 1857, Baudelaire ouvre une nouvelle voie de connaissance combinant la théorie et la pratique tout en utilisant habilement la structure du sonnet, poème composé de deux quatrains et de deux tercets, le temps de la méditation théorique des quatrains précédant le temps pratique de l’expérimentation des tercets.
Le premier quatrain est bâti sur la métaphore du temple et de la forêt, où alternent l’ombre et la lumière comme dans les temples maçonniques où la sensibilité aux mystères des Apprentis s’éveille peu à peu sous le regard bienveillant de Frères et Sœurs plus « éveillés ».
Dans le second quatrain, le poète établit des correspondances entre la vue, l’odorat et l’ouïe, comme pourrait le faire le Compagnon, pour non seulement écouter mais entendre les « confuses paroles » évoquées dans la première strophe, dont le mystère se laisse seulement approcher et non contempler.
Dans les deux tercets s’établissent des analogies de sens et des équivalences entre la mesure sensible et l’ordre psychologique ou moral, le Maître en fixant les limites tout en risquant la démesure.
Dans « La Vie Antérieure », écrit en 1857 et extrait aussi du recueil « Les Fleurs du Mal », un exotisme exacerbé amplifie le sentiment de perfection liée à l’agencement symétrique des éléments du décor.
Mais pour tendre vers l’ordre et l’harmonie, le poète et le Maçon doivent passer par l’état d’âme chaotique du « spleen », mot d’origine anglaise désignant un état mélancolique sans cause définie. Le secret préservé de la vie des Loges au travail se convertit dans les degrés dits de Perfection en un secret qui « fait languir ».
On entre dans le « vif du sujet », dans l’espace et le temps de l’Artiste et du Maçon à l’œuvre, et le poète dit « je », « j’ai longtemps habité », « j’ai vécu », s’impliquant entièrement dans l’aventure intérieure de sa propre re-connaissance.
La concorde parfaite des éléments de leur re-création n’est possible que s’ils respectent un bon équilibre entre la clarté et l’obscurité, les phases de lumière et d’ombre, de félicité et de doute qui, bien que foncièrement différentes, se complètent.
La parité « régulière » en noir et blanc fait place à des contrastes saisissants de couleurs et le travail prend une autre dimension dans l’accomplissement d’une œuvre.
Le plus ancien manuscrit maçonnique connu, le poème Régius daté de 1390, compte 794 vers octosyllabes et découle sans doute de la transmission orale d’une réglementation coutumière de Métier, assurant ainsi à la fois la transcription et la transmission des « Old Charges », les Anciens Devoirs. Ces « Old Charges », opératives et anglaises, servaient une fois par an lors de l’assemblée annuelle pour recevoir les nouveaux Apprentis et Compagnons.
Destiné aux bâtisseurs opératifs du Moyen-âge, le Régius présente une histoire, ou plutôt une légende de l’art de la construction émanant du Métier lui-même. Sans être réellement de la poésie au sens romantique du terme, le texte du Régius est assez cadencé pour être retenu en mémoire, et être ensuite récité facilement, la cadence, l’assonance et l’allitération, c’est à dire le rythme dans la répétition des sons de voyelles et de consonnes, facilitant cet apprentissage.
Comme les textes destinés à être retenus et transmis, il utilise des phrases sans verbe et de nombreuses répétitions, une construction dite « archaïque » renvoyant à un passé indéterminé et confirmant l’autorité et la sagesse des temps anciens par un « éloge des sept arts « libéraux ».
Les sept arts libéraux désignent les disciplines intellectuelles fondamentales dont la connaissance depuis l’Antiquité hellénistique et romaine était réputée indispensable à l’acquisition de la haute culture. Ils se divisent en deux degrés : le Trivium qui concerne le « pouvoir de la langue » et se divise en Grammaire, Dialectique et Rhétorique, et le Quadrivium qui se rapporte au « pouvoir des nombres » et se compose de l’Arithmétique, de la Musique, de la Géométrie et de l’Astronomie. Loin d’être obsolètes, les arts libéraux restent actuels et indispensables à la progression initiatique et ne peuvent être remplacés par aucune modernité ni virtualité numérique. Ils font partie du corpus que doit connaître le Compagnon, dont le cinquième art, la Géométrie, est aussi le premier dans le Métier.
La Géométrie crée le lien entre opératif et spéculatif, entre la matière et l’esprit. Première porte d’accès à la métaphysique pour un bâtisseur du moyen-âge, la Géométrie exhale et libère le cœur de la matière.
La Rhétorique contribue à préparer cette libération qui s’accomplit dans les proportions harmonieuses du Temple. L’harmonie des formes fait écho aux harmonies musicales et à la sonorité du lieu sacré.
« Le poème, cette hésitation prolongée entre le son et le sens » (Paul Valery, 1871-1945) darde « à fleuret moucheté » toutes les attentions, tous ces reflets du cœur et de l’âme qui se couvrent de mots pour mieux refléter l’Autre. Dédiés d’abord à nos muses, ils ne s’offrent qu’une fois et ne vivent que « ce que vivent les roses, l’espace d’un matin » (François de Malherbe, XVIème siècle), lorsqu’ils se découvrent et « se » disent.
L’écriture perpétue leur mémoire avec plus ou moins de bonheur, dévoilant aux yeux de tous ce qui ne se destinait qu’à une seule, mais délivrant de la cage dorée du poème des mots volant déjà de leurs propres ailes dans l’esprit libre du poète et de ses semblables. Ainsi l’acrostiche du prénom d’une Maçonne, Françoise, peut-il refléter ses Sœurs tout en restant fidèle au secret qui les relie toutes.
Le poète peut aussi aspirer à dire l’indicible, l’inspiration première soufflant à son oreille l’idée et ses mots clés, ses « mots de passe » et ses « mots sacrés », car « Les œuvres de l’esprit, poèmes ou autres, ne se rapportent qu’à « ce qui fait naître ce qui les fit naître elles-mêmes », et absolument à rien d’autre.
Sans doute, des divergences peuvent se manifester entre les interprétations poétiques d’un poème, entre les impressions et les significations ou plutôt entre les résonances que provoquent, chez l’un ou chez l’autre, l’action de l’ouvrage. » (Paul Valery) Mais ces résonances qui se démultiplient dans le flot des idées masquent leur source empreinte de mystère et de silence. Aussi le poète croise-t-il « régulièrement » ceux qui n’ayant fait qu’une partie du chemin, restent enfermés dans le silence de l’autisme, jusqu’à s’engager auprès de ceux qui accompagnent les autistes, symboles vivants d’une société en souffrance.
L’écriture d’un poème est une expérience enivrante éveillant « continuellement en nous une soif et une source. En récompense de ce que nous lui cédons de notre liberté, elle nous donne l’amour de la captivité qu’elle nous impose et le sentiment d’une sorte délicieuse de connaissance immédiate, (de sorte) que la sensation de l’effort se fait elle-même enivrante, et que nous nous sentons possesseurs pour être magnifiquement possédés. Alors plus nous donnons, plus voulons-nous donner, tout en croyant de recevoir.
L’illusion d’agir, d’exprimer, de découvrir, de comprendre, de résoudre, de vaincre, nous anime. » (Paul Valery) Le cœur du poète est le captif consentant des règles de ses mots d’esprit, et comme le Maçon au Travail, semble d’autant plus inspiré qu’il accepte et intègre les règles du poème, rimes et autres, conférant une « tenue » à son œuvre.
Dans le poème, la musique du vers qui dépend de l’harmonie entre les sonorités et le sens, est soulignée par la rime, l’identité entre deux ou plusieurs mots, situés en principe en fin de vers, de leur voyelle finale accentuée.
La rime a un rôle de structuration aussi bien du vers que du poème entier. Elle souligne la structure sémantique du poème par des répétitions fondées sur des signifiants, les mots, rapprochant des signifiés, les idées, qui autrement seraient restés étrangers l’un à l’autre. Ce rôle de la rime rappelle celui des règles fondatrices de la Franc-Maçonnerie défini par Anderson dans la Constitution de 1722 : « … Ces règles traditionnelles sont notre ciment et notre lien…
Elles permettent à la Franc-Maçonnerie de constituer ce vrai centre d’union où se rencontrent fraternellement des hommes qui, sans elles, seraient demeurés perpétuellement étrangers les uns aux autres. » Les idées des poètes circulent et se fixent dans les mots et les silences des poèmes comme la parole circule en Loge entre les colonnes, ordonnancée par le rituel et le respect du règlement des travaux.
Mais la rime ne saurait se contenter de sonorités banales passant inaperçues, sans trahir sa mission qui est de se faire entendre, de ponctuer le vers soit en frappant, soit en charmant l’oreille. Lors de la composition de son poème, la rime a l’immense mérite de contraindre le poète à penser par séries associatives sonores. Chercher une rime, c’est faire passer dans son esprit tout un cortège de sonorités sœurs, de sorte qu’il s’établit dans la pensée des familles de mots unies par une magie musicale. Très tôt s’est posée la question des rimes dites féminines et masculines, l’« e » atone final, fréquent dans les mots féminins, ne constituant pas un appel phonique suffisant, et l’alternance des rimes masculine et féminine s’est imposé dans les poésies lyriques provençales et françaises.
Mais il s’agit d’un mélange dont le dosage est laissé au goût du poète. Et pour grossir ce trait d’esprit jusqu’à la caricature, je prends un malin plaisir à glisser des acrostiches de prénoms féminins alternant les rimes masculines et féminines, tel « Françoise », dans des planches destinées à des auditoires mixtes.
Cet acrostiche comme tout poème active aussi de manière plaisante les ressorts de la langue, les phonèmes imprimant leurs sons et couleurs et se reliant dans les mots aux autres syllabes pour composer des bouquets harmonieux de vers. Car le poète joue d’abord avec les sons pour accompagner et soutenir le sens de son propos. Quand on parle de sens en poésie, il s’agit plutôt de sentiments, d’impressions, d’expérience à partager. Les sons aident souvent à créer ce climat particulier à chaque poète, à évoquer l’implicite ou l’indicible, cette « sorcellerie évocatoire » appelée de tous ses vœux par Baudelaire, « cette musique avant toute chose » réclamée par Verlaine.
L’harmonie résulte donc du choix et de la combinaison des syllabes pour obtenir les sonorités désirées.
Aussi le choix des mots est-il le premier souci du poète. Selon les traditions poétiques françaises, certains sons correspondent à des effets précis.
L’impression laissée par une syllabe dépend de sa longueur et de sa sonorité. Les syllabes brèves conviennent pour exprimer l’extériorité et la rapidité, les syllabes longues évoquant plutôt l’intériorité et la profondeur. Dans l’acrostiche « Françoise », seuls deux sons, « anche » et « eur », se reproduisent alternativement du premier au dernier vers. « anche » composé de la voyelle nasale « an », à l’effet voilé, atténué et lent, de la consonne « ch », dite « sourde » et « continue », au son prolongé, atténuant encore l’effet de la voyelle précédente, et d’un « e » muet final apportant une longueur et une touche supplémentaire de douceur, se renouvelle dans l’autre rime en « eur », composée de la voyelle nasale « eu » et de la consonne coulante et « ronronnante » « r ».
La rime doit tout à la fois satisfaire l’œil, l’oreille et l’esprit. Scandant la fin des vers, elle crée une accoutumance et une attente chez le lecteur/auditeur, jouant le rôle d’une balise dans les énoncés de mots successifs. Elle constitue donc un endroit privilégié pour le sens car le mot placé à la fin du vers est le mieux mémorisé. Et le sens des rimes ne dépend pas seulement de la forme, mais du sens des mots. Dans le cas présent, « blanche, s’épanche, branches, avalanches, hanches », élargit par le mouvement et l’élan du cœur le champ lexical affectif des mots « intérieur, valeurs, chaleur, Sœurs ».
Avant même l’écriture de la première lettre du poème, l’inspiration du poète passe par le prisme des règles poétiques qu’il s’assigne, les matrices convenant le mieux à l’expression de ses idées et de ses sentiments, et plus globalement à sa personnalité et à ses modèles d’écriture en cours. S’il a potentiellement le choix entre un grand nombre de modèles pour organiser horizontalement ses vers par une structure interne : mètre, césure, coupes, récurrences phoniques, et dérouler son poème selon un rythme vertical par une structure externe : rimes, strophes …, ou s’affranchir des règles précédentes dans le vers libre, le poète sait qu’il n’échappe pas à ses propres règles, et qu’il choisit celles auxquelles il s’attache, auxquelles il s’est déjà lié.
C’est dans le même état d’esprit que les Maçons s’attachent au rite et aux règles de leur Loge et Obédience pour tendre vers l’expression régulée de leurs idées, chacun trouvant son identité dans le modèle commun en apprenant à la fois à écouter et parler aux Frères et Sœurs de la Loge, tendre à « se dire » et « s’écouter » soi-même pour à la fois « s’entendre » avec les autres et « s’entendre » soi-même intérieurement.
C’est dès l’instant de sa conception que le poème « se dit » et « s’écoute », l’auteur et l’auditeur se découvrant autour du poème pour « s’entendre », et réaliser en quelques mots l’expérience de plus en plus intime de l’écoute de l’autre. Roland Barthes distingue ainsi trois niveaux d’audition : une « première écoute alerte » tendue vers la « capture d’un indice » qui, chez l’homme et l’animal, a une fonction « défensive et prédatrice », une « seconde écoute », exclusivement humaine, qui est un « déchiffrement » voué à la lecture des « signes », tendu non plus vers « la proie », mais comme en Franc-Maçonnerie vers « le secret », le « dessous du sens », et « le sacré », l’« écoute religieuse » à vocation de liaison entre le sujet écouteur et le « monde caché des dieux », et une « troisième écoute », redevable à l’écoute psychanalytique s’exerçant « d’inconscient à inconscient », tendant vers « les origines », à qui on demande non d’être « appliquée » mais de « laisser surgir », dans la lignée de « l’écoute panique » des Grecs. Accéder à une « meilleure » écoute, pour le lecteur de poésie, c’est alors intérioriser chacune des strates de l’audition jusqu’à parvenir au point ultime où « l’écoute parle ».
Enfin, pour Roland Barthes, être « meilleur auditeur » de poésie, c’est surtout substituer à une écoute passive et ensorcelée, fondée sur l’identification, une participation active à l’expérience unique de la genèse de l’œuvre.
Ces trois « niveaux » d’écoute rappellent les degrés d’Apprenti, Compagnon et Maître, ternaire structurant l’initiation maçonnique et la quête de sens qui la sous-tend. Comme tous les symboles, ces degrés qui se succèdent dans une suite progressive et linéaire peuvent aussi constituer un triangle, chacun de ses points étant relié aux deux autres. Et si chaque point est essentiel pour équilibrer le triangle commun, lui-même est un symbole rattaché au symbolisme du nombre« 3 ». Les points se relient ainsi par groupes de deux, trois, quatre, cinq, six, sept points et plus, traçant autant de figures symboliques que de grilles de lectures, vecteurs de sens. Si l’inspiration du poète et du Maçon ne diffèrent en rien à la source, ces grilles peuvent « orienter » la pensée par des séries régulées d’analogies et d’associations d’idées.
Par sa symbolique du mouvement, l’étoile à cinq branches reliant la matérialité du carré à la spiritualité du triangle, illustre la circulation des idées au sein de la Loge au travail entre les cinq Officiers qui l’éclairent, sans respecter leur ordre hiérarchique (Vénérable Maître, Premier puis Second Surveillant, Orateur, Secrétaire), mais en suivant le tracé de l’Etoile Flamboyante qui les relie (Vénérable Maître, Second Surveillant, Secrétaire, Orateur, Premier Surveillant, et à nouveau Vénérable Maître, …).
L’ordonnancement de la Loge incite les Maçons à cheminer en pensée en prenant des « chemins de traverse », à transformer intérieurement leur réflexion tout en respectant dans la Loge la fonction symbolique des Officiers qui l’encadrent. Ils peuvent « à loisir » pratiquer l’hermétisme, c’est-à-dire dé-couvrir un uni-vers sous-jacent aux apparences, et s’inspirer de la poésie symboliste de Stéphane Mallarmé et Paul Valéry, qui ne se veut pas descriptive, mais plutôt suggestive et musicale pour atteindre, au-delà des apparences, le mystère des choses.
Les poètes Maçons convertissent pareillement leurs symboles, et notamment l’étoile flamboyante, en clés d’accès à ces mystères.
La tension établie « dans les règles » entre les pointes de cette étoile à cinq branches, comme entre les strophes, les vers et les mots d’un poème, ouvre au centre de l’étoile un espace dégagé au sein duquel rien n’obstrue le cheminement des Maçons en quête de centre, inversant par la même les phases de tracé du cercle dans cette géométrie de l’esprit, la périphérie précédant le centre.
En outre, les branches de l’étoile se croisent en constituant deux segments dont le rapport des longueurs donne le nombre d’or « 1,618 », nombre de l’harmonie vénéré par Pythagore. Ce nombre omniprésent dans la Nature, l’Art et l’architecture sacrée, devient aussi le nombre de l’homme quand il ouvre les bras et s’inscrit lui-même comme ses créations dans cette étoile flamboyante. Léonard de Vinci le représente bras et jambes écartés, générant en lui-même et par lui-même cette harmonie éclairant le cheminement intérieur des êtres en quête de Sagesse, de Force et de Beauté.
Les « Vers dorés de Pythagore », texte grec de soixante et onze vers attribués par les anciens à Pythagore, publiés en 1813, traduits et commentés par Antoine Fabre d’Olivet, philologue et occultiste français, rappellent les principes guidant les Maçons dès leurs premiers pas d’initiés.
« Les anciens avaient l’habitude de comparer à l’or tout ce qu’ils trouvaient sans défaut et beau par excellence : ainsi, par l’« Age d’or » ils entendaient l’âge des vertus et du bonheur ; et par les « Vers dorés », les vers où la doctrine la plus pure étaient renfermée.
Après la mort de Pythagore, et la terrible persécution qui coûta la vie à un si grand nombre de Pythagoriciens, écrasés sous les débris de leur école incendiée, ou contraints de mourir de faim dans le temple des Muses, Lysis, le disciple transcripteur de ces vers, voulant répandre la secte de Pythagore dont on s’attachait à calomnier les principes, crut nécessaire de dresser une sorte de formulaire qui contînt les bases de la morale et les principales règles de conduite données par cet homme célèbre. »
« Ce vers renfermait adroitement un double sens. Par le premier, il recommandait la tolérance et la réserve aux Pythagoriciens, et à l’exemple des prêtres d’Egypte, établissait deux doctrines, l’une ostensible et vulgaire, conforme à la loi (du pays où ils vivaient) ; l’autre mystérieuse et secrète, analogue à la foi. Il rassurait ainsi les peuples ombrageux de la Grèce, qui, d’après les calomnies qui courraient, auraient pu craindre que les Pythagoriciens n’eussent voulu porter atteinte à la sainteté de leurs Dieux.
Les Pythagoriciens voyaient ainsi (sans en parler) dans les Dieux des nations les attributs de l’Etre ineffable qu’il ne leur était pas permis de nommer, leur rendant le culte consacré par la loi, et les ramenaient tous en secret à l’Unité qui était l’objet de leur foi. »
« Pythagore considérait l’Univers comme un Tout animé dont les Intelligences divines, rangées chacune selon ses perfections dans sa sphère propre, étaient les membres. Ce fut lui qui désigna le premier ce Tout par le mot grec « Kosmos », pour exprimer la beauté, l’ordre et la régularité qui y règnent. C’est de l’Unité considérée comme principe du monde que dérive le nom d’Univers que nous lui donnons.
Pythagore posait l’Unité comme principe de toutes choses, et disait que de cette Unité était sortie une « Duité » infinie. L’essence de cette Unité et la manière dont cette Duité qui en émanait y était enfin ramenée, étaient les mystères les plus profonds de sa doctrine, les objets sacrés de la foi de ses disciples, les points fondamentaux qu’il leur était défendu de révéler. Jamais on n’en confiait l’explication à l’écriture : on se contentait de les enseigner oralement à ceux qui paraissaient dignes de les apprendre. Lorsqu’on était forcé par l’enchaînement des idées d’en faire mention dans les livres, on se servait de symboles et de chiffres, on employait la langue des Nombres ; et ces livres, tout obscurs qu’ils étaient, on les cachait encore avec le plus grand soin ; on évitait par toutes sortes de moyens qu’ils ne tombassent dans les mains de profanes. »
« Le premier précepte que Pythagore donnait à ses disciples entrant dans la route de la perfection, tendait à les replier en eux-mêmes, à les porter à s’interroger sur leurs actions, sur leurs pensées, sur leurs discours, à s’en demander les motifs, enfin à réfléchir sur leurs mouvements extérieurs et intérieurs, et à chercher ainsi à se connaître. La connaissance de soi-même était la première de toutes les connaissances, celle qui devait les conduire à toutes les autres. La morale de Socrate et la philosophie de Platon n’en étaient que le développement, et une inscription dans le premier temple de la Grèce, dans celui de Delphes, la recommandait après celle du juste milieu, comme l’enseignement même du Dieu qu’on y venait adorer : « Rien de trop » et « Connais-toi toi-même » renfermaient en quelques mots la doctrine des sages, et présentaient à leur méditation les principes sur lesquels reposent la vertu, et la sagesse qui en est la suite. »
« L’homme est un composé d’esprit, d’âme et de corps, (dont les modifications) se manifestent par la sensation, le sentiment et l’assentiment, développant les facultés principales de l’instinct, de l’entendement et de l’intelligence. L’instinct est le siège du sens commun ; l’entendement, celui de la raison ; et l’intelligence, celui de la sagacité, ou de la sagesse. L’homme ne peut jamais acquérir aucune science, aucune connaissance véritables, si, à la faveur de l’intelligence qui élit le principe et le pose avec sagacité, l’assentiment ne se détermine ; car on ne sait, on ne connaît jamais véritablement que ce que l’intelligence a consenti. »
« Les préceptes de Pythagore étaient symboliques, c’est-à-dire renfermaient, au figuré, un sens très différent de celui qu’ils paraissaient offrir au sens propre. C’était l’usage des prêtres égyptiens, chez lesquels il les avait puisés, de cacher leur doctrine sous l’écorce des paraboles et des allégories. Le Monde était à leurs yeux une grande énigme, dont les mystères, revêtus d’un style également énigmatique, ne devaient jamais être ouvertement divulgués.
Ces prêtres avaient trois sortes de caractères, et trois manières d’exprimer et de peindre leurs pensées.
La première manière d’écrire et de parler, était claire et simple ; la seconde, figurée ; et la troisième, symbolique.
Ils se servaient, dans la première, de caractères usités par tout le monde, et prenaient les mots dans leur sens propre ; dans la seconde, ils employaient des caractères hiéroglyphiques, et prenaient les mots dans un sens détourné et métaphorique ; enfin ils faisaient usage, dans la dernière, de phrases à double sens, de fables historiques, astronomiques, ou de simples allégories.
Le chef d’œuvre de l’art sacerdotal était de réunir ces trois manières, et de renfermer, sous l’apparence d’un style simple et clair, le sens vulgaire, le figuré et le symbolique. »
Les idées des préceptes comprises rationnellement par les initiés, constituant autant de points de connaissances, doivent encore être reliées entre elles et constituer des réseaux où elles peuvent entrer en rapports harmonieux les unes avec les autres, leurs champs d’influence rappelant les deux segments des branches de l’étoile à cinq branches, dont le rapport des longueurs donne le « nombre d’or » irrationnel, 1,618. Les nombres irrationnels, dont le symbolisme complète celui des nombres entiers dans l’initiation maçonnique, possèdent un nombre infini de chiffres décimaux, et dans cette suite infinie, aucune périodicité ne peut être trouvée permettant d’imaginer les chiffres qui viendront à partir de l’analyse des chiffres qui sont déjà venus.
Mais les nombres irrationnels étant « incommensurables », leur découverte implique celle d’une dimension supra humaine ouvrant l’esprit au sacré, ce que soulignent encore les proportions dites « d’extrême et de moyenne raison » des branches de l’étoile, c’est-à-dire l’identité de proportion entre, d’une part, ses deux parties, et, d’autre part, sa grande partie et le tout. Autrement dit dès que l’harmonie règne entre les parties du microcosme de l’homme, elle couronne pareillement ses relations avec le macrocosme.
Remontons plus avant, aux premiers âges de la Grèce, quand « la Poésie, consacrée au service des autels, ne sortait de l’enceinte des temples que pour l’instruction des peuples : elle était comme une langue sacrée dans laquelle les prêtres, chargés de présider aux mystères de la religion, traduisaient les volontés des Dieux. Les oracles, les dogmes, les préceptes moraux, les lois religieuses et civiles, les enseignements de toutes sortes sur les travaux du corps, sur les opérations de l’esprit, tout enfin ce qu’on regardait comme une émanation, un ordre ou un bienfait de la Divinité, tout était écrit en vers. On donnait à cette langue sacrée le nom de « Poésie », c’est-à-dire « Langue des Dieux » ; nom symbolique qui lui convenait parfaitement, puisqu’il exprimait à la fois son origine et son usage. On disait qu’elle était venue de « Thrace », et on appelait « Olen » celui qui, l’ayant inventée, en avait fait entendre les premiers accents.
Or ce sont encore deux noms symboliques, parfaitement adaptés à l’idée qu’on avait de cette science divine : elle était descendue de Thrace, c’est-à-dire de l’Espace éthéré ; c’est Olen qui l’avait inventée, c’est-à-dire l’Etre universel…
« Un homme né au sein de la Thrace, mais porté dès son enfance en Egypte par le désir de s’instruire, repassa dans sa patrie avec l’une des colonies égyptiennes, pour y propager de nouvelles lumières. Il était initié dans tous les mystères de la religion et de la science : il surpassait tous ceux qui l’avaient précédé, par la beauté de ses vers, la sublimité de ses chants, la profondeur de ses connaissances dans l’art de guérir les maladies et d’apaiser les Dieux.
C’était Orphée : il prit ce nom de celui de sa doctrine qui tendait à guérir, à sauver par les lumières. La tradition mythologique a consacré dans une brillante allégorie, les efforts qu’il fit pour rendre aux hommes la vérité qu’ils avaient perdue. Son amour pour Eurydice, tant chanté par les poètes, n’est que le symbole de l’amour dont il brûlait pour la science divine. Le nom de cette épouse mystérieuse, qu’il voulut en vain rendre à la lumière, ne signifie que la doctrine de la vraie science, l’enseignement de ce qui est beau et véritable, dont il essaya d’enrichir la terre. Mais l’homme ne peut point envisager la vérité, avant d’être parvenu à la lumière intellectuelle, sans la perdre ; s’il ose la contempler dans les ténèbres de sa raison, elle s’évanouit.
Voilà ce que signifie la fable que chacun connaît, d’Eurydice retrouvée et perdue…
« Orphée qui sentit, par sa propre expérience peut-être, le grand inconvénient qu’il y avait de présenter la vérité aux hommes avant qu’ils fussent en état de la recevoir, institua les mystères divins ; école admirable où l’initié, conduit de degré en degré, lentement étudié et éprouvé, recevait la dose de lumière proportionnelle à la force de son intelligence, et doucement éclairé sans risquer d’être ébloui, parvenait à la vertu, à la sagesse, à la vérité…
Les degrés principaux de l’initiation étaient au nombre de trois, comme sont encore aujourd’hui les grades d’Apprenti, de Compagnon et de Maître dans la Franc-Maçonnerie. On ajoutait quelquefois trois degrés secondaires aux trois principaux, et on les terminait par une révélation extraordinaire, qui, en élevant l’initié au rang d’« Epopte », ou de voyant par excellence, lui donnait la véritable signification des degrés qu’il avait déjà parcourus, lui montrait la nature sans voile, et l’admettait à la contemplation des lumières divines.
C’était pour l’Epopte seul que tombait le dernier voile, et qu’on écartait le vêtement sacré qui couvrait la statue de la Déesse. Cette manifestation, appelée « Epiphanie », faisait succéder l’éclat le plus brillant aux ténèbres qui, jusqu’alors, avaient entouré l’Initié. Le grade d’Elu a remplacé, parmi les Francs-Maçons, celui d’Epopte. »
Les chants d’Orphée comme les vers de Pythagore, au fondement de l’initiation aux Mystères, vibrent encore à chaque étape de l’initiation maçonnique, tendent à rendre synchrones les règles morales et la conscience mentale de leurs adeptes, et constituent en eux-mêmes un couple équilibré de forces destiné à relier harmonieusement sur l’axe vertical de la Perpendiculaire de l’Apprenti, les « niveaux » de la connaissance temporelle et de la conscience spirituelle.
L’inspiration de l’idée ou du mot juste espéré par le poète s’appuie sur l’équilibre ou le déséquilibre de ces forces, et « il semble qu’il y ait dans cet ordre des choses mentales, quelques relations très mystérieuses entre le désir et l’événement. Je ne veux pas dire que le désir de l’esprit crée une sorte de champ, bien plus complexe qu’un champ magnétique, et qui eût le pouvoir d’appeler ce qui nous convient (le mot ou l’idée). Mais, quelles que soient la netteté, l’évidence, la force, la beauté de l’événement spirituel (les mots-idées des points de l’étoile) qui termine notre attente, qui achève notre pensée ou lève notre doute, rien n’est encore irrévocable.
Ici, l’instant suivant a pouvoir absolu sur le produit de l’instant précédent.
C’est que l’esprit réduit à sa seule substance ne dispose pas du fini, et qu’il ne peut absolument pas se lier lui-même. » (Paul Valery) Cet instant de l’inspiration qui semble « régulièrement » suspendu et résorbé lors de la clôture des travaux, semble se réactiver dans les mailles de l’étoile de la Loge au travail, où les Frères et les Sœurs participant à sa dynamique depuis les colonnes, tendent à se transformer eux aussi en poètes inspirés. Car le poète, la poétesse, géomètre de l’âme, demeure pour exercer son Art entre l’écriture et la géométrie, cette zone médiane où le Verbe s’agrège aux mots d’esprit pour ensemencer l’écriture de structures géométriques foisonnant d’idées et de traits d’esprit, exaltant autant les tracés, les plans de l’architecte que le Travail du Compagnon qui les met en œuvre.
« La Muse, dit Platon dans ses Dialogues, inspire immédiatement les poètes, et ceux-ci communiquant à d’autres leur enthousiasme, il s’en forme une chaîne d’hommes inspirés. C’est par le moyen de cette chaîne que la Divinité attire l’âme des hommes, et l’émeut à son gré, en faisant passer sa vertu de chaînon en chaînon, depuis le premier Poète inspiré jusqu’au dernier de ses lecteurs ou de ses rapsodes. »
Car une chaîne humaine vaut plus, ou mieux, que l’addition de ses maillons. Les Maçons peuvent ressentir le delta de cette différence dans la chaîne qui les relie tous, physiquement, mentalement et spirituellement, lors de la clôture des travaux de Loge, et sur les ailes de ce delta, se laisser porter vers un autre Delta à l’Orient, laissant « en plan » l’horizon immanent des contingences, et dans la chaleur fraternelle, aspirer à la dimension transcendante de l’Etre.
Cet esprit inspire les poètes Maçons européens de langue germanique depuis la naissance de la Franc-Maçonnerie moderne, tels Goethe et Schiller, au XVIIIème siècle. « Le franc-maçon est cet homme qui a le courage de croire en la lumière au plus profond de la nuit » dit Goethe (1749-1832). Son poème « Loge de Maçon » illustre les convulsions de l’âme du Maçon en devenir, et la vie qu’il se forge par ses choix. Le Maçon embrasse sa destinée quand il ose tendre vers sa « fin », et renaître à lui-même par les mots « Meurs et Deviens » de son poème « Nostalgie bienheureuse » Ses derniers mots furent « Plus de lumière ! ».
Schiller (1759-1805), le « poète de la liberté », ami de Goethe, incarne l’idéal humaniste de l’homme. Beethoven, leur contemporain, a composé sa neuvième symphonie inspiré par le poème de Schiller « Ode à la joie ». « Elevez-vous, dit-il, d’une aile hardie, au-dessus du cours de votre temps. Que déjà, dans votre miroir, commence à poindre le siècle futur. » Dans sa « Lettre sur l’éducation esthétique de l’homme », en son siècle plus préoccupé par les besoins pratiques et l’utilité que par l’art, Schiller choisit la beauté car il estime que c’est par l’esthétique que le problème politique sera résolu. C’est par la beauté que l’homme sera conduit à la liberté. Dans ce monde gouverné par les idées, l’homme ne serait plus un « loup pour l’homme », mais le maillon heureux d’une chaîne universelle, capable de contribuer à l’élévation et à l’ennoblissement de l’espèce humaine. Il clame « Honorez les femmes ! »
Dans les pays de langue anglaise les poètes Maçons sont prolifiques, leurs poèmes exaltant particulièrement la fraternité, l’entraide et l’émulation des chaînes d’union dans des pays où les Temples sont souvent imposants, à l’instar de leurs nombreuses actions caritatives.
Leurs nombreux poètes sont aujourd’hui référencés sur des sites internet de poésie maçonnique, tel « Masonic Poets Society » où figurent sous forme bilingue quelques uns de mes poèmes. « Si » écrit par Rudyard Kipling en 1910, est un des poèmes maçonniques les plus connus dans le monde. Sa traduction habituelle en français, où le fond sacrifie l’essentiel à une forme convenue, s’écartant sensiblement de la version anglaise, le revoici fidèle au texte d’origine, modèle d’une transmission d’homme à homme.
Les poètes Maçons pensent-ils en musique ? On serait tenté de le croire, tant depuis la lyre d’Orphée l’inspiration musicale accompagne l’écriture pour illustrer le cheminement initiatique. Comme le musicien, le poète compose et reçoit son inspiration en un lieu subtil en lui, à l’articulation entre le son et le sens, en ces moments où les sons des mots mettent en musique le silence de la pensée. L’inspiration silencieuse de l’idée s’exprime dans chacun des phonèmes du mot, jusqu’à s’agréger par ensembles limités de mots et de phrases.
A peine émise, l’idée limite son expression, cherche et trouve son « terme », son dernier son en fin de mot, son dernier mot en fin de phrase et dans le poème en fin de vers. Le poème est cette suite de limites régulièrement dépassées et renouvelées, cette succession d’aspirations aux idées et d’expirations de mots résonnant les uns par les autres, cette respiration inspirée de la parole composant des mélodies de sens.
Mais alors ce lieu subtil où se croisent et se fécondent le mot et le sens, rappelant l’Equerre et le Compas croisés sur l’Autel des Serments et régulés par la Règle ou le Livre de la Loi sacrée, n’est-il pas un passage, un pont jeté par le poète au faîte de son inspiration entre la matière et l’esprit ?
Il évoque ce « pontife » résidant sur une montagne sacrée, chargé dans la Grèce antique de l’entretien d’un pont reliant le monde des hommes au monde des dieux. Du haut de cette montagne se répandaient les oracles divins, les lois et les enseignements que les pontifes composaient en vers.
Et dès l’origine une sorte de schisme se produisit entre deux cultes, celui des Thraces consacré à Dionysos l’esprit divin et Déméter la terre-mère, et celui des Grecs proprement dits, consacré au soleil et à la lune, rendu sur le mont Parnasse et à Delphes à Apollon et à Diane. Les Rites maçonniques, et en particulier le Rite Ecossais Ancien et Accepté, garde et même entretient la marque de cette séparation par une différence de sens entre les degrés symboliques et les degrés dits de Perfection.
En Franc-Maçonnerie, dans les Loges et l’esprit des Maçons, les Thraces et les Grecs, Dionysos et Apollon, Déméter et Diane, ont vocation à se rencontrer. « C’est en liant Dionysos et Apollon que la religion grecque a atteint sa hauteur la plus sublime. Cela ne saurait être un simple hasard qu’ils soient venus l’un à l’autre. Ils se sont attirés et cherchés, parce que leurs règnes, malgré le contraste le plus brutal, sont malgré tout, sur le fond, rattachés par un lien éternel.
La lumière et l’esprit d’en haut doivent toujours avoir connu au-dessous de soi le nocturne et la profondeur maternelle, sur lesquels tout être est fondé. A la religion olympienne, qui ne devait pas être une religion de la soumission et du cœur indigent, mais celle de l’esprit clairvoyant, il fut réservé, là où d’autres séparent et maudissent, de reconnaître et d’honorer l’union des contraires, celle que montre l’arc et la lyre. » ( Walter F. Otto, L’esprit de la religion grecque ancienne : Theophania) Dans la Loge Victor Hugo deux fois née comme Dionysos, d’abord au Grand Orient de France, puis il y a onze ans à la Grande Loge de France, l’arc et la flèche du sens tendu entre les mots d’un poète a fécondé la lyre d’un musicien, Gérard Berliner, engendrant « Le Flambeau ».
L’amour fraternel qui sublime ce lien établi dans les Loges maçonniques entre le son et le sens, la lyre et la flèche, rappelle Cupidon, le dieu romain de l’Amour, portant avec son arc une torche allumée. Le feu de l’amour réchauffe le lien entre le son et le sens, et en retour ce lien éclaire l’amour, chaleur et lumière touchant au cœur les Sœurs et les Frères du foyer qu’est la Loge. Il se concentre symboliquement dans la flamme de l’étoile allumée sur le plateau du Vénérable, et se transmet aux deux colonnes lors de l’ouverture de ses travaux. « Que la lumière nous éclaire ! » dit le Vénérable. « Et que l’amour nous allume ! » rajouterait volontiers le poète.
Suspendu à l’inspiration, le poète Maçon se balance entre l’espérance collective de ses Frères et Sœurs et ses propres aspirations. Entre « Espérons ! » et « J’aspire ! » s’écrivent les vers de ses poèmes, s’entendent les sons et les sens, les mots et les idées, et les mélopées silencieuses de leurs chants secrets. Il ouvre la grande ronde des poètes à ceux et celles qui goûtent leur langue, savourent son esprit, ses accents, et quand d’autres disent « Je vous écoute », disent en souriant « Je t’entends », couvrent leurs Muses de présents, de paroles aimantant le temps, et pour étirer le présent, s’invitent au Banquet de Platon et partagent des agapes fraternelles.
Patrick Carré
Hyères, 12 octobre 2013
SOURCE : http://www.patrick-carre-poesie.net/spip.php?rubrique2
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie 12 mars, 2023
Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireRÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part I-
Je vous propose une réflexion, en plusieurs sur les rapports entre le Pérennialisme et la Franc-Maçonnerie de tradition. Deux voies spirituelles, des itinéraires qui ne sont pas si différents. Dans le but est de se rapprocher de l’Unité, par des exercices de l’esprit, jusqu’à pouvoir le contempler et se revenir dans le monde pour agir, seul et avec le concours des autres.
Un parcours qui met en exergue l’ésotérisme en général, ceux des religions en particulier, ésotérisme réservé aux initiés et qui dépasse les exotérismes des religions souvent réducteurs et dogmatiques. Pérennialisme et Franc-Maçonnerie, permettent aux mystes d’accéder aux mystères, de construire des ponts et abattre les murs de l’incompréhension qui naissent le plus souvent de l’ignorance. Cette réflexion s’inscrit, (sans que cela en soit l’exclusivité) dans la déclaration de principe des constitutions de la Grande Loge de France. Je cite Chapitre I- La Franc-Maçonnerie Universelle et ses Principes alinéa 6 : « Dans la recherche constante de la vérité et de la justice les Francs-Maçons n’acceptent aucune entrave et ne s’assignent aucune limite. » (1)
Alinéa renforcé par l’alinéa 8 je cite à nouveau : « Ils recherchent la conciliation des contraires et veulent unir les hommes dans la pratique d’une morale universelle et dans le respect de la personnalité de chacun. » (2)
Cette réflexion sera largement inspirée de la vie et des écrits de Frithjof Schuon, le choix aurait pu tout aussi bien être celui de René Guénon ; leurs démarches spirituelles sont identiques. D’ailleurs Schuon a été fortement inspiré par Guénon qu’il a fréquenté. J’ai choisi Schuon parce qu’il est moins connu que Guénon, mais bien sûr ce sont deux figures de la pensée et de la démarche traditionnelle, avec le métaphysicien Ananda Coosmaraswany, ils sont les principaux représentants de cette pensée pérennialiste qui critiqua vivement le modernisme et l’abandon du sacré. Ont-ils été à contre-courant de la philosophie des Lumières ? De cette « filosophie universelle » que décrivait le chevalier A. M Ramsay dans son célèbre discours de 1736 et considéré comme l’un des textes fondateurs emblématique de la Franc-Maçonnerie spéculative et des Hauts Grades Maçonniques et en partie leurs références à la Chevalerie de L’Esprit.
(1 et 2) Texte des Constitutions de la Grande Loge de France.
Ce discours fortement inspiré par la Sophia, la sagesse de la philosophie antique grecque, les religions juives et chrétiennes ainsi que les croisades et non par les seules Lumières de la modernité. Je tiens, pour ma part ce discours comme un foisonnement lumineux rassemblant toutes les branches éparses de la spiritualité dans un feu régénérateur intemporel et universel. Un feu constamment entretenu par les meilleures vertus de chaque tradition, qui élèvent l’homme vers les plus hautes sphères de la spiritualité. Un discours qui relie les hommes entre eux au-delà des querelles politiques ou religieuses, un discours adogmatique qui tient sa force de deux mots dans leurs significations étymologiques, ses deux mots sont « Religare » relier, lien et « Katholikás » universel, général. Deux mots qui vont bien avec leur sens premier aux Francs-Maçons de toutes les obédiences. Ces mots sont des bienfaits pour la Franc-Maçonnerie en général, les loges et les Sœurs et les Frères en particulier.
Ainsi, nous sommes dans le cœur du sujet de notre réflexion, le rapport entre Franc-Maçonnerie et la « Tradition Primordiale » selon Guénon ou le Pérennialisme de Schuon. Ces deux penseurs partagent le même désir spirituel la recherche de l’unité, de l’Un. Ils vont agir par leurs écrits, mais aussi par l’exemplarité de leur vie, pour essayer de tendre vers leur projet. Comme la Franc-Maçonnerie se propose de rassembler ce qui est épars, elle nous demande de ne pas exclure les hommes pourvu qu’ils soient libres…. Ainsi Schuon, nous mettras en garde sur le danger du volontarisme religieux, il écrit : « Le danger du volontarisme religieux, c’est qu’il est bien près d’exiger que la foi comporte un maximum de volonté et un minimum d’intelligence ; on reproche en effet à celle-ci, soit d’amoindrir par sa nature même le mérite, soit de s’arroger illusoirement la valeur du mérite en même temps qu’une connaissance en réalité inaccessible. Pour la gnose, l’intelligence n’est qu’une partie, c’est un centre et c’est le point de départ d’une conscience qui englobe tout notre être. » (1) Ce point de réflexion, je pense doit nous amener à comprendre que foi religieuse à caractère dogmatique et foi maçonnique ne sont ni semblables, ni incompatibles.
Par ailleurs vous l’avez compris Guénon et Schuon ne sont pas des ardents défenseurs du modernisme (Voir leurs publications dans Études Traditionnelles).
- F. Schuon Comprendre l’Islam Chapitre voie spirituelle Éditions Points Sagesse
Ils reconnaissent l’incontournable valeur et travail de l’intellect, mais aussi ses limites. Foi et Raison sont les deux leviers, les deux ailes qui participent à l’élévation spirituelle. Mais le réel, le beau, le vrai, le juste ne peut pas se voir sans l’œil du cœur. Le Franc-Maçon ardent défenseur de la justice, sait tempérer la Force du glaive avec la vertu d’amour. Schuon, n’est pas pour autant qu’un contemplatif, il écrit : « L’homme est fait d’intelligence et de volonté ; il est donc fait de compréhension, et de vertus, ou de choses qu’il sait et de choses qu’il accomplit, ou en d’autres termes : de ce qu’il sait et de ce qu’il est. » (1). En des termes plus maçonniques je dirais qu’il faut : Savoir (pour combattre l’ignorance), Comprendre (travailler, persévérer à son perfectionnement), Agir (pour transmettre l’essentiel l’amour fraternel qui est vérité). C’est du moins ce que j’entrevois en poussant les portes qui sont en dedans de moi, au fil de la connaissance des degrés qui me sont donnés. Comme des grains de blé mis en terre et qui poussent en épis que je me dois de récolter et de moudre sans cesse en y ajoutant le levain de mon intelligence et l’eau de la rosée d’amour de mélanger cette nourriture spirituelle dans le pétrin de mon âme, pour en faire le pain du compagnon, le pain du partage.
Je vous propose de poursuivre cette réflexion entre le Pérennialisme et la Franc-Maçonnerie parce que selon Schuon : « L’analogie et le symbolisme concerne toute manifestation de qualités ; la Conscience concerne l’homme en tant qu’il peut se dépasser lui-même intellectuellement son esprit débouchant sur l’absolu. » (1)
- F. Schuon Comprendre l’Islam chapitre voie spirituelle Page 183 Éditions Points Sagesse.
Jean-François Guerry.
À SUIVRE…
Pour aller plus loin, plus haut :
Lire : la Biographie de F Schuon dans Wikipédia.
F. Schuon Comprendre l’Islam- Éditions Points Sagesse
F. Schuon L’œil du cœur- Dervy Éditions.
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part II.
Comme nous l’avons vu dans l’article précédent Part I. La pensée et le mouvement Pérennialiste, est une voie spirituelle qui tend à la recherche de l’Un, de l’unité, de l’harmonie par un retour au statut originel. Pensée partagée par trois principaux métaphysiciens, ésotéristes que sont René Guénon, Frithjof Schuon et Ananda Coomaraswamy ; deux penseurs occidentaux et un oriental. Un chemin, qui va donc de l’Orient vers l’Occident et inversement. Nos métaphysiciens ont pratiqué des voies spirituelles différentes, pour concevoir leur rassemblement en une seule voie, une seule tradition. Tradition qualifiée de primordiale, première par René Guénon. Ananda Coomaraswamy (Ãnanda Kentish Kumãrasvãmī ) fût avant tout un historien de l’art srilankais, spécialiste du sanskrit la langue brahmanique, avant d’être un métaphysicien. Il a étudié le bouddhisme et l’hindouisme, puis a passé une bonne partie de sa vie en occident pour décéder aux États-Unis, un chemin Orient Occident, à l’inverse de nos deux autres penseurs.
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Guénon et Schuon ont étudiés les ésotérismes des religions monothéistes, dont le soufisme de l’islam avant d’aller à la rencontre de l’Orient. Guénon est devenu aussi un spécialiste du symbolisme en général et maçonnique en particulier. Notre triangle de penseurs par des voies spirituelles différentes ils ont convergés vers la connaissance et la contemplation de l’Un, ils ont été aussi inspirés par le néoplatonisme de Plotin et sans doute par la résurgence celui-ci à Florence avec Marsile Ficin, Giordano Bruno et Pic de la Mirandole. Une démarche ascensionnelle de l’esprit, qui caractérise les hypostases de Plotin. Il est probable aussi que Plotin (selon certains auteurs comme Émile Bréhier, il est probable que Plotin accompagna l’empereur Gordien III (en 242) dans une expédition en Inde qui fût brève et désastreuse.) fût influencé par les Upanishad ces textes philosophiques et religieux des Védas objets de méditation. Les analogies ne manquent pas entre l’antiquité grecque et romaine et la Franc-maçonnerie (Voir modestement mon livre Exercices Spirituels antiques et Franc-maçonnerie aux Éditions UBIK Académie Maçonnique de Provence).
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L’on peut donc sans prendre le risque d’un syncrétisme, affirmer que l’Inde et ses upanishad, le miracle Grec, l’ésotérisme des trois religions monothéistes ( Kabbale, Évangile de Saint-Jean et Soufisme) en y ajoutant l’alchimie ont servis de ferment pour la Franc-maçonnerie spéculative. Une voie spirituelle unique, spécifique, originale et originelle en définitive une spiritualité qui n’a pas besoin d’adjectif. (C’est-à-dire ni laïque, ni religieuse par exemple, simplement Une.)
Une des caractéristiques du Pérennialisme, pourrait être l’union, la réunion de chemins spirituels qui se retrouve pour l’ascension finale au sommet de la même montagne, là où l’homme pourrait contempler la plénitude de l’Un avant de redescendre vers le monde et ses Frères. Une lente ascension vers la recherche d’une Lumière unique, d’une parole commune, d’un souffle originel qui dépasse, surpasse, surplombe tous les dogmes et leurs particularismes. Cette pensée unifiée ne connaissant ni l’espace et le temps étant consubstantielle au désir de connaissance et de sacré de l’homme. Ce Pérennialisme de nos métaphysiciens est universel et fraternel, il s’accorde bien avec l’initiation maçonnique basée sur la fraternité humaine, qui génère une unité spirituelle entre ses membres inspirée par une trois grandes lumières de la Franc-maçonnerie, je veux parler de l’ouverture du compas de l’esprit. Cette pratique permet à la fin des travaux maçonniques de constater que la joie est dans les cœurs de toutes les Sœurs et de tous les Frères et non pas seulement dans le cœur de certains. Ce Pérennialisme exprime de surcroit pour la Franc-maçonnerie qu’elle est un centre d’union qui permet la rencontre de tous les hommes.
Pour conclure aujourd’hui je soumets à votre réflexion ces quelques lignes de F. Schuon qui permettent de mieux comprendre, je pense, pourquoi la Franc-maçonnerie n’assigne à ses membres aucune limite dans la recherche de la vérité et qu’elle pourrait énoncer : « Nous ne voulons pas attribuer à une foi à une foi religieuse comme telle des thèses sapientielles qu’implicitement. » On entend généralement par sapientielle, la sagesse de ceux qui possèdent le savoir, la science à un degré élevé et aussi les qualités de jugement, d’habileté, de raison, de prudence et j’ajouterais pour ma part l’empathie, l’altruisme. Ceux qui au terme ultime de leur initiation à la porte de l’éternel orient sont capables d’un amour fraternel inconditionnel de l’autre, des autres car sans cela leur initiation ne serait qu’une agitation inutile même si elle est, et surtout si elle n’est qu’intellectuelle, on ne voit bien le réel qu’avec les yeux du cœur. Ce Pérennialisme me fait penser à l’instant au poème du Frère Rudyard Kipling : « Ma Loge mère… »
Une dernière réflexion F. Schuon écrit aussi : Pour « la science des religions », l’ésotérisme vient après le dogme, il en est le développement artificiel, voire emprunté à des sources étrangères ; mais en réalité, l’élément sapientiel vient forcément avant la formulation exotérique, puisque que c’est lui qui, par le fait d’être une perspective métaphysique détermine la forme. Sans fondement métaphysique point de religion ; l’ésotérisme doctrinal n’est que le développement, à partir de la Révélation, de ce qui « était avant. »
C’est bien, à la recherche de ce qui était avant que nous consacrons nos nos efforts, à la recherche de la vérité originelle, du premier souffle, d’un Eden que nous ne pourrons ni retrouver, ni atteindre. C’est donc en pleine conscience que nous sommes quand même sur le chemin qui importe plus le but et que nous devons nous ériger en défenseurs de la justice et de la vérité. En étant des pèlerins de l’amour fraternel, voie unique qui apporte la joie et l’harmonie.
Jean-François Guerry.
À SUIVRE…
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part III-
Comme nous l’avons vu la recherche de la Vérité et de la Lumière, coïncide avec le désir de la recherche du réel, ce que nous ne percevons n’est pas le réel. L’idée même du réel se dissimule derrière les images et les symboles, derrière la matière et les substances. L’élévation de notre niveau de conscience nous prépare à la recherche des idées dissimulées derrière les symboles. Pour comprendre le monde et notre place dans celui-ci, nous cherchons la Substance derrière les substances, l’absolu derrière les symboles ce qui nous oblige à la levée des voiles au-delà des phénomènes. Chercher les mystères, l’invisible derrière le visible.
Frithjof Schuon écrit : « La distinction entre le réel et l’irréel coïncide en un sens avec celle entre la Substance et les accidents ; ce rapport Substance accidents rend facilement intelligible le caractère réel ou irréel du monde, et montre, à qui est capable de le saisir l’inanité de l’erreur attribuant l’absoluité aux phénomènes. »
L’absolu étant lié au principe d’unité. Le reste n’étant que des accidents découlant du principe, issu du principe, si l’on considère une unité entre absolu et principe. Parmi les accidents découlant de la Substance-Principe, le plus élevé de ceux-ci serait l’homme accident intermédiaire entre matière et Principe, un accident soumis à la dualité au regard du Principe, Substance pure et Une.
L’initiation, est mouvement du corps et de l’esprit, un processus de concentration (Voyage de la périphérie, de la circonférence vers le point central, vers le Principe dont tout émane.), de purification de l’accident substance intermédiaire, une recherche ascensionnelle, un retournement vers le Principe.
Est-il raisonnable d’envisager ce retour, ce processus initiatique, cette ascendance des substances intermédiaires, vers la substance pure ? Utopie, sauf si l’on considère que le chemin est le but. L’initié devient en quelque sorte un Chevalier de la Lumière, un Chevalier du Soleil, un combattant sorti des ténèbres de l’erreur et prêt au combat pour faire régner la justice et l’amour. Il fait le chemin ascendant, sa transformation alchimique (Référence au Stibium, l’antimoine mâle et femelle à la fois.) pour tenter d’atteindre une forme de pureté. Le chemin vers la Lumière, commence par la sortie de la matière vers l’éther, puis la substance animique, la substance supraformelle, macrocosmique. Cette voie traditionnelle initiatique est toute entière une tension constante à l’élévation spirituelle, jusqu’à la Substance universelle métacosmique, c’est-à-dire au-delà de tout l’Un partie ou totalité de l’être.
La Substance, le Principe ne devient plus dès lors irréel ou abstrait, mais réel puisque visible dans les substances. C’est à ce stade de la réflexion que l’on peut dire que le Grand Architecte de l’Univers est plus qu’un concept, qu’il est un Principe immuable, une Substance pure, présente aussi dans l’homme, ce que certains qualifie de petite flamme éternelle. Ce principe d’unité est capable de réunir ce qui est épars, tous les hommes étant liés et possesseurs de cette parcelle de la Substance pure, du Principe. Aucun obstacle ne s’oppose dès lors au concept de Tradition primordiale de reliance universelle et fraternelle.
Réflexion personnelle : je discerne le cheminement initiatique du Franc-Maçon après être né de la terre, sorti de l’humus de la materia prima avoir éclos comme la merveilleuse fleur de lotus merveille sur les eaux boueuses des ténèbres, sous la Lune fécondante, parcouru la surface des deux globes terrestre et céleste, parvenu à réaliser le chef d’œuvre de sa vie matérielle. L’initié quitte son horizontalité et redressé réapparait plus radieux que jamais, sorti de l’âge de raison au-delà de ses 7 ans il aspire à faire alliance avec ses Frères, et bientôt il fera alliance avec la Substance pure le Principe.
Pour conclure aujourd’hui cette troisième Partie, je cite F. Schuon :
« Seule la Substance des substances est absolument réelle, quelle est donc seule réelle, à rigoureusement parler, c’est voir la Substance dans tous les accidents (Nous en serions un)et travers eux ; grâce à cette connaissance initiale de la Réalité, le monde devient métaphysiquement « transparent ».
Quand il est dit que le Bodhisattva (1) ne regarde que l’espace, non les contenus, ou qu’il regarde ceux-ci comme étant l’espace, cela signifie qu’il voit la Substance qui par rapport au monde lui apparaît comme un « vide », ou au contraire, que le monde lui apparaît comme un vide en fonction de la plénitude principielle. (…) rapport entre l’eau et ses gouttes. »
Jean-François Guerry.
À SUIVRE …
(1) Réflexion sur le Bodhisattva :
De sattva être et Bodi éveil, initié ou être éveillé. Le Bouddhisme parle d’un être éveillé venant de l’Eden du paradis : « Un être pur », ayant atteint le Nec plus Ultra, un saint ? Mais surtout un être ayant contemplé le Principe et atteint la compassion, capable d’empathie et d’amour pour tous les hommes ses frères et même pour tous les êtres vivants.
L’on peut peut-être parler d’un être humain conscient de ses forces intérieures, qui a franchit les étapes successives et sa réalisation personnelle pour se mettre au service des autres. Pas pour moi mais pour vous dirait-il. Il a lutté contre ses mauvaises passions, c’est perfectionné pour pratiquer la vertu, à force d’efforts, de méditations, de patience, pour atteindre la sagesse.
En tradition bouddhique l’on parle d’états de l’esprit (ou de conscience) au terme de 7 étapes l’on devient plus habile (Hiram était considéré comme un homme habile dans l’art des métaux, connotation alchimique). La 8 et 9ème étape du Bouddhisme peut être mise en analogie avec les 4èmes et 5èmes degrés du R E A A de Maître S et Maître P, qu’il conviendrait à mon sens d’inverser comme il était d’usage dans les anciens rituels. Les deux initiés sont dans un niveau élevé de pratiques spirituelles. Le Bodhisattva parvenu à 10ème étape a atteint la sapience, il devient buddha. C’est le moment où il devra prononcer ses vœux, comme les F M prononcent leurs serments. Il sera honoré par une titulature spécifique à chacune de ses progressions initiatiques par exemple : doux et noble, entièrement excellent, celui qui regarde le bas avec compassion, celui qui a une grande force, celui qui est amour bienveillant.
Il s’agit vous l’aviez compris, (sauf ceux qui raillent ces titulatures sans en connaître le symbolisme, ce sont les mêmes qui lisent la Bible au premier degré sans y voir sa portée symbolique.) d’une hiérarchie spirituelle et non d’une hiérarchie d’honneur. Toute comparaison entre le bodhisattva et le Franc-Maçon n’est pas inopportune.
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part-VI-
Porte d’Orient et Porte d’Occident, deux portes ouvertes vers un même chemin celui de l’élévation de l’esprit. On oppose trop souvent l’Orient et l’Occident, penseurs et initiés du Pérennialisme ont démontré dans leurs recherches, mais aussi et surtout dans leurs parcours de vie que l’on pouvait franchir ces deux portes grâce à la mise en œuvre de leur loi commune celle de l’amour.
Notre esprit occidental, cartésien a tendance à classer, caractériser ; nous voyons dans l’Occident du moins dans l’Occident moderne l’expression du rationalisme, du matérialisme, du sentimentalisme. L’Occident serait dominé par le seul règne de la raison donnant accès à toute connaissance. Pour l’occidental moderne, le spirituel et l’intellectuel se réduiraient à une forme de psychisme ou de psychologisme. Les lumières ont consacré le règne de la raison « le penser par soi-même ». La sacralisation de la raison trouve ses racines dans le Miracle Grec incarné par les philosophes figures de la sagesse, comme Platon et Aristote. Le prolongement, voir le rapt de la philosophie grecque à été réalisé par le christianisme. Cependant, on observe la résurgence à la Renaissance du platonisme ou plus précisément du néoplatonisme dont la figure emblématique est Plotin qui avec Pythagore représente la pointe la plus élevée de la Pyramide de la raison associée à la spiritualité, le monde des idées et la cosmologie et la symbolique des nombres. C’est Marsile Ficin qui fût le principal néoplatonicien de l’École de Florence où l’on trouvait Giordano Bruno ou encore le Phénix de la Renaissance Pic de la Mirandole. Plotin, était un Pérennialiste avant l’heure, il a fréquenté la marmite d’Alexandrie, (comme Pythagore) initié aux mystères de l’Égypte Ancienne, il aurait fait aussi un séjour en Inde comme nous l’avons déjà vu. Marsile Ficin hermétiste, alchimiste, féru d’ésotérisme a été sans aucun doute avec Giordano Bruno un des précoces inspirateur de la Franc-Maçonnerie spéculative (cf la thèse de Charles-Bernard Jameux sur la naissance de la Franc-Maçonnerie spéculative.) La révélation de l’ésotérisme chrétien en particulier de l’Évangile apocryphe de Saint-Jean, la loi d’amour et la compassion bouddhique et son sommet la pure altérité bienveillante concrétisent le principe d’une Tradition Primordiale centre d’union de l’Occident et de l’Orient.
Nous pouvons aussi observer, que la Renaissance et engouement pour les sciences à mis à mal le caractère exclusivement exotérique mais surtout dogmatique de la religion. Il est intéressant de lire Fritjof Schuon : « Les traditionalistes oublient… que l’on ne peut empocher l’homme de faire des découvertes, et que, la découverte une fois faite, l’homme ne peut s’empêcher d’en tirer des conséquences raisonnables. » Plus loin F. Schuon poursuit : « La réalité physique garde forcément ses droits. Ce qui implique qu’elle est symbolique à son tour. Mais c’est le traditionalisme qui garde le dernier mot… Il ne suffit pas de percevoir la réalité objective, il faut aussi pouvoir l’assimiler ; ensuite il y a quelque chose qui manque gravement à la science dite exacte, et c’est la connaissance métaphysique. Certaines réalités non perçues…sont inassimilables, et deviennent pour l’homme des facteurs de déséquilibre et de déchéance, comme le prouve la situation écologique et culturelle du monde actuel. » Cette citation est relevée dans l’œil du cœur dont la première édition date de 1968 dans Éditions Traditionnelles on remarque le caractère prémonitoire de cette pensée quelques 55 ans avant 2023.
Une autre remarque de F.Schuon sur le concept médiéval me paraît aussi intéressante : « Il y avait de la sagesse dans le concept médiéval « de la double vérité », la théologique et la rationnelle. Car il y a le symbole et il y a le fait ; or le symbole compris vaut infiniment mieux que le fait incompris. Est « vrai » sous le regard divin, ce qui ouvre la porte vers la vérité à la fois transcendante et immanente. » Il prolonge sa réflexion entre Orient et Occident ainsi : « L’oscillation entre le symbolisme et la réalité objective fait penser à celle entre l’Orient et l’Occident, ou encore en un certain sens, à celle entre « foi et raison », ou entre tradition et le rationalisme matérialiste. »
Je ne puis m’empêcher après cette lecture de penser à l’encyclique de 1998 de Jean Paul II : Fides et Ratio (Foi et Raison), qui nous fait prendre conscience du chemin parcouru par l’église depuis l’inquisition, Galilée ou Giordano Bruno. En exprimant que la Foi et la Raison sont deux ailes qui permettent à l’esprit de s’élever vers la contemplation de la vérité ou encore sont les deux ailes qui portent l’espérance du retour de l’unité, de l’harmonie dans le cœur de l’homme.
Jean-François Guerry
À SUIVRE : les orientaux ou les occidentaux séduits par la modernité ?
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part -VII-
Et si la Renaissance avait été la période de la fécondation ou pour le moins celle de la germination du Pérennialisme, de la Tradition Primordiale en même temps que la naissance des idées qui allaient structurer la Franc-Maçonnerie spéculative. L’acte de naissance n’aurait pas alors été signé dans les brumes de l’Écosse, mais sur les rives fleuries de l’Arno à Florence en Toscane. Plus précisément par les penseurs de l’Académie Platonicienne Florentine, dont le directeur fût Marsile Ficin (Marsillo Ficino) et le fondateur Cosme de Médicis en 1459. Cette académie consacra la résurgence du platonisme et du néoplatonisme grecs. Alors que le christianisme s’est répandu partout en occident sans partage, à Florence Marsile Ficin entreprend la traduction en latin des œuvres de Platon, Plotin, Porphyre de Tyr, Jamblique, Proclus et Hermès Trismégiste, ce qui va faire la renommée de cette académie, on se rappelle qu’il eut aussi un célèbre élève l’encyclopédiste aussi jeune que talentueux Pic de la Mirandole. Les exégèses de Marsile Ficin sur Platon avaient pour vocation de tenter de réconcilier l’église et Platon, église qui avait reconnu l’évangile ésotérique de Saint-Jean comme texte apocryphe. Marsile Ficin ne fût pas en conflit avec l’église tant qu’il ne s’intéressa pas à l’astrologie, il eut alors des « relations conflictuelles » avec l’inquisition et n’eut la vie sauve que grâce à ses relations et protections, comme d’ailleurs Pic de la Mirandole, d’autres comme Giordano Bruno n’eurent pas cette chance. Parmi les nombreuses œuvres de Marsile Ficin, son exégèse sur le Banquet de Platon et amore, ainsi que son ouvrage de limine sont restés à la postérité, on notera enfin qu’il s’est beaucoup inspiré de Dante et sa Divine Comédie.
Pourquoi faire une relation entre Marsile Ficin, le Pérennialisme, la Tradition Primordiale et la Franc-Maçonnerie. Simplement à cause de son intérêt pour la philosophie grecque de Platon et Pythagore, le néoplatonisme de Plotin, l’hermétisme et l’alchimie. Il dirigea et inspira cette académie de Florence, à un moment où le christianisme était dominant et qu’il s’était accordé avec la philosophie d’Aristote le meilleur élève de l’Académie de Platon. Alors que Platon voyait une certaine unité entre l’esprit et la matière, comme voie d’accès à la Connaissance. Aristote se distingua par sa méthode séparant matière et esprit, pour Aristote l’ordre matériel du monde est mesuré et organisé par la raison. Alors que tout ce qui touche au spirituel est plus intime, plus individuel et donc non mesurable par l’extérieur, grossièrement une voie de la raison associée à la science et une voie de l’esprit associée à la sagesse.
Marsile Ficin était proche dans sa pensée de l’évangile de Saint-Jean, de Plotin, de l’hermétisme et de l’alchimie on pourrait oser de ce qui allait inspirer la Franc-Maçonnerie spéculative, mêlant esprit et matière, vertus, sciences humaines et transcendance spirituelle. Je dirais équerre et compas ou encore les outils symboliques des petits mystères, et les vertus associées aux grands mystères, une forme d’ascension spirituelle, comparable aux hypostases plotiniennes.
Alors que la méthode aristotélicienne faisait peu d’ombre à l’église, séparant mieux matière et esprit, ce n’était pas le cas du platonisme et encore moins du néoplatonisme. Les grands mystères ésotériques étaient réservés aux penseurs et érudits initiés qu’ils soient laïques ou religieux. Ils étaient aussi les ferments de cette Tradition Primordiale, pérenne susceptible de traverser le temps et l’espace. Marsile Ficin peut nous apparaître dès lors en phase avec cette pensée universelle. Ne mettant aucune limite à sa recherche de la Vérité et de la Connaissance, il étudie les textes de la philosophie grecque et les ésotérismes religieux, ainsi que la Bible. Dans cette recherche de la vérité, il n’en reste pas moins comme Pic de la Mirandole un fervent catholique, démontrant que la philosophie universelle, la Tradition Primordiale n’a rien d’incompatible avec la foi religieuse, il en est de même pour les Francs-Maçons qui savent faire la différence entre foi religieuse et foi maçonnique.
C’est l’art de l’architecture et de la construction, qui expriment le mieux l’alliance entre Raison et Spiritualité. Guy Piau, ancien Grand Maître de la Grande Loge de France et 33èmedegré du R E A A dans une conférence consacrée à Marsile Ficin en Février 1992 écrit :
« Depuis l’antiquité, l’architecture est considérée comme le sommet de l’art. C’est le noble art qui permet, celui qui permet d’exprimer et d’exalter la beauté et l’harmonie. »
Cet art de la construction, ce symbolisme de la construction, construction des temples intérieurs, de ce temple qu’est l’homme qui se perfectionne, pour être en capacité de recevoir la lumière de la Connaissance et de la Vérité, élever son temple vers la vertu pour pouvoir contempler un jour l’Un. Le symbolisme de la construction du temple de Salomon Roi de Sagesse et de Justice n’a donc pas été choisi par hasard par les rédacteurs des rituels maçonniques émaillés par les mythes et les légendes qui sont exemplaires pour donner un sens à la vie des hommes de bonne volonté. Construire des temples à l’Universel.
Guy Piau toujours dans la même conférence écrit à propos de Marsile Ficin : « Pour lui l’architecture et la philosophie sont pleinement liées à l’exaltation de l’archétype universel de l’artiste qui est en l’homme dans sa vérité entre « le ciel de l’esprit » et la « terre du manifesté ». La partie la plus haute de l’homme est-elle celle ou se cache sa flamme artistique là ou se développe son intuition et son imagination qui lui fait vivre et créer des choses plus hautes et belles que lui.
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Guy Piau nous propose aussi cette citation de Marsile Ficin extraite de son commentaire sur le Banquet de Platon : « Si quelqu’un veut savoir comment la forme corporelle peut ressembler au concept de l’âme et de l’esprit et à la notion de raison, qu’il considère la construction d’un architecte. Celui-ci commence par concevoir une notion de l’édifice, comme une idée dans son âme. Puis il fait bâtir autant que possible l’édifice qu’il a imaginé. Qui peut refuser à l’édifice une certaine existence corporelle et nier qu’il ressemble à l’idée incorporelle de l’architecture à l’initiation de laquelle il a été bâti. » Ce qui constitue et fait vivre l’unité spirituelle, la tradition unique primordiale ne peut être que le lien d’amour commun à toutes les traditions, « l’amour qui meut le soleil et les autres étoiles ». Le lien d’amour est ce qui relie l’homme à son créateur, l’homme à tous les hommes de toutes les traditions et toutes les traditions à la Tradition Primordiale cette terre et ce ciel commun où se dissolvent les différences pour ne faire qu’un centre d’union fraternel.
Disserter, vivre sans cesse l’Amour, c’est reconnaître cette Tradition Primordiale pérenne dans le temps et l’espace être un fidèle d’amour.
On ne parle à mon avis pas assez dans nos Loges de la filiation entre de tels hommes comme Marsile Ficin et la Franc-Maçonnerie.
Je termine cette réflexion d’aujourd’hui avec Guy Piau Frère et poète fin connaisseur du florentin. « Nous pouvons comprendre que Marsile Ficin place l’Amour à l’origine de l’Univers, bien avant la création du monde, car il est de soi parfait. L’Amour est la clé de l’univers. Il accompagne en tout le chaos mais s’enfuit aussi du chaos afin d’illuminer les ténèbres… »
Ainsi, vous ne vous demanderez plus qu’elle est le mystère, la clé de la Franc-Maçonnerie, ni pourquoi autant de femmes et d’hommes y sont fidèles et persévérants, et pourquoi cette belle dame de 300 ans et plus est toujours aussi belle, parce qu’elle est fondée sur l’Amour fraternel, qui l’Amour inconditionnel du monde et de l’autre.
Jean-François Guerry.
À SUIVRE …
Note : Les citations et les textes qui figurent dans cet article sont tirés du livre de Guy Piau Franc-Maçonnerie et Hauts Grades paru en Janvier 2023 aux Éditions Numérilivre…
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie- Part VIII- Conclusion temporaire.
Après cette courte réflexion, il y a lieu peut-être de renvoyer dos à dos les mystiques dogmatiques et les modernes existentialistes ? Les partisans de l’Orient qui serait un idéal spirituel et les partisans de l’Occident inconditionnels de la raison.
Souvent certains occidentaux, sont fascinés par l’Orient, sans doute une attirance sans mesure pour un exotisme spirituel idéal, parangon d’une pureté originelle. S’il existe quelques territoires peu peuplés comme le Tibet, le Bhoutan en Asie ou encore en Amazonie d’autres minorités qui même rassembler ne peuvent revendiquer une universalité et encore moins une supériorité spirituelle.
L’occidental qui au milieu de sa vie, au midi de sa vie commence un travail sur lui-même et regarde l’héritage légué par ses ancêtres peut revendiquer une spiritualité élevée. Il lui suffit parfois simplement d’ouvrir la fenêtre de sa maison, pour contempler la pâleur de la lune et les myriades d’étoiles propices à son élévation spirituelle, comme le soleil à son lever au point du jour, annonçant l’apparition de la grande lumière. Orient et Occident forment l’unité de l’univers, pourquoi n’y aurait-il pas une unité spirituelle, une unité primordiale, une religion universelle.
Suivons la pensée de Frithjof Schuon : « Pour en revenir au fond de la question : on peut dire que l’Occident moderne est « dévié » tandis que l’Orient traditionnel est « décadent ».
Il reste donc à l’homme occidental certaines qualités héritées de sa tradition et l’homme oriental résiste en tant que véhicule de sa tradition. L’homme occidental, raisonnable à une tendance à l’oubli de l’essentiel, de son essence, tandis que l’homme oriental vit partiellement sous l’hypnose de l’absolu. Et si le Franc-Maçon homme libre et ouvert à la recherche de la Vérité et la Lumière était une incarnation une conjugaison de ces deux hommes. Ou au moins à la recherche de la construction de cet homme fait de matière et d’esprit et espère se perfectionner.
Ainsi F. Schuon nous interroge : « Si l’homme oriental, du fait de son traditionalisme, était cet homme totalement supérieur que d’aucun ont imaginé, il ne se moderniserait pas avec un zèle si démesuré…inversement, si l’occidental, du fait de sa modernité, était un homme à rééduquer de fond en comble, il ne s’intéresserait pas à l’art et la spiritualité de l’Orient…Le problème, ou la solution, n’est pas une réforme de l’Occident par l’Orient, c’est une réforme du monde entier par la Vérité tout court et ceci n’est possible que part l’intermédiaire du Très haut, à laquelle nous devons participer sur notre plan. Car aide-toi et le ciel t’aidera. »
Cette recherche de la Vérité, de l’harmonie cette quête de la Connaissance est le chemin du Franc-Maçon, perfectionnement de l’homme, élévation de sa spiritualité pour une action « hic et nunc »,maintenant et sans délai, ici et maintenant. Le Franc-Maçon grâce son travail et sa persévérance dans sa construction s’élève. Il devient un humble chevalier d’Orient et d’Occident, un soldat de l’universel, conscient qu’il existe une Tradition primordiale, une forme de religion universelle centre d’union fraternelle sans limite. Dis autrement jadis il y a plusieurs pièces dans la maison de l’éternel. Chacun à sa pièce, il suffit d’avoir la clé pour ouvrir sa porte, le Chevalier du Soleil a la clé. F. Schuon évoque le fait que nous nous trouvons dans l’âge de fer ou sombre qui affecte toute l’humanité sans distinction ténèbres d’où sortira la Lumière par révélation et par apocalypse, il reste toujours après l’espoir l’espérance. Si nous constatons l’absence d’unité, la collision entre des mondes qui ne se comprennent pas, dans ce monde clivé, composé d’archipels qui consacre le règne de l’individualisme. L’Orient est-il sensé venir au secours de l’Occident, mais quel Orient ? Celui des dictateurs, des despotes, qui utilisent les religions de leur pays elles-mêmes complices, comme en Russie, en Inde, en Iran, en Turquie doit nous interroger.
Les extrémismes poussent à l’ombre des arbres des religions qui sont souvent incapables d’éliminer ces nématodes (petits animaux) qui pourrissent les racines et les branches, en détournant le meilleur de leurs vertus, dont celle de la tolérance et de la fraternité.
Inversement, quel Occident ! Cet Occident où l’intelligence est mue par la raison, par la critique poussée parfois jusqu’au déraisonnable. Un Occident qui engendre les confusions et les amalgames allant jusqu’à refuser l’éducation au fait religieux, susceptible d’ouvrir l’esprit aux hommes de bonne volonté et combattre l’ignorance, qui fait le lit aux extrémistes.
F. Schuon écrit : « Comme si la faculté rationnelle était toute l’intelligence, et la seule intelligence. » Faut-il dès lors espérer le retour d’une forme de Théosophie, Théosophie dont il est utile de rappeler la définition : doctrine ésotérique du divin, fondée sur la contemplation de l’univers et l’illumination intérieure. En résumé, une alliance du croire et du savoir, de la foi et de la raison, du combat contre l’ignorance, le fanatisme et l’ambition. C’est, le croire et savoir des grecs antiques comme : Pythagore et ses nombres sacrés, Platon son monde des idées, Aristote le maître du savoir, Plotin et son élévation spirituelle et aussi la loi d’Amour du christianisme. Cette Théosophie, est proche de la philosophie perennis. On retrouve la même démarche en Orient avec le Vedanta en Inde recherche de l’unité. On ne peut ignorer aussi, que l’ésotérisme d’Islam est aussi une voie de la Connaissance et de l’Amour.
Le Pérennialisme, la Tradition Primordiale, la philosophia perennis, la Franc-Maçonnerie présente donc des analogies avec ces pensées, on peut oser parler d’une voie spirituelle universelle permettant à l’homme de se construire, pour aller plus loin, plus haut sur le chemin de la spiritualité.
Jean-François Guerry.
F Schuon, R Guénon
ETRE FRANC MACON OU NE PLUS L’ETRE…. 15 décembre, 2022
Posté par hiram3330 dans : Bleu,Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire
J’ai longtemps hésité à écrire cet article fleuve !
Je m’y résous dans le mesure où toute expérience est bonne à partager, pour autant qu’elle soit le reflet d’un vécu, exposé de manière sincère, réfléchie et non malveillante vis à vis de personnes qui pensent différemment.
Oui, j’ai été Franc Maçon.
De la manière la plus simple qu’il soit, je vous raconte comment c’est arrivé.
Un jour, une connaissance avec lequel j’avais lié d’amitié m’interpelle, se révélant comme étant lui-même Franc Maçon.
Appelons le « Jean » : il me dit en résumé : « J’apprécie beaucoup ton regard sur le monde qui t’entoure : je pense que tu es un Franc Maçon qui s’ignore »
J’écoutai ce qu’il avait à me dire…ou me proposer.
De mon côté, il est vrai, j’avais (et ai toujours) une soif de dialogue ouvert sur toutes les questions qui concernent notre existence et nos relations aux autres.
J’écoutai ce qu’il avait à me dire, sans aucun à priori, ni pour, ni contre.
Je me contentai ensuite de lui témoigner mon intérêt, sous réserve que
- Je veux demeurer Libre, de Pensée et d’Appartenance
- Je suis Athée ou à tout le moins Agnostique.
- Originaire du Nord, j’éprouvais déjà certaines difficultés de dialogue et rencontres avec les « gens du sud » qui ont leurs propres modes de fonctionnement et de communication…
J’écoutai Jean pendant un très long moment, qui se termina par sa proposition d’être mon « parrain » si je décidais de franchir le pas de ma candidature à envoyer, par son intermédiaire, au « Président » de sa Loge, faisant elle-même partie du GODF
(Grand orient de France)
Je pris longuement le temps de la réflexion, avant de lui répondre de manière positive.
Je revis Jean pour lui remettre ma lettre de candidature.
Il précisa que je serais contacté par différents « enquêteurs » pour trois rendez vous distincts en mon domicile…( pourquoi pas ?)
Quelque deux mois plus tard, je reçu la visite de 3 personnes, qui ne déclinèrent pas leur identité (par discrétion, disaient t’ils…) et qui m’interrogèrent, de manière fort courtoise sur :
- Ma situation de famille, ma profession, mes études,
- Ma philosophie de vie
- Mes opinions politiques et religieuses
- Mes motivations à entrer en Franc Maçonnerie
Au bout de quelques mois encore, Jean m’informa que j’étais attendu tel jour, telle heure, à tel endroit…
Que de mystères !
Arrivé sur place, en bordure de ville, bâtisse aussi sombre que son quartier, je fus introduit dans une grande salle où l’on me pria d’attendre…
J’eus tout le temps de découvrir les lieux : grandes tables, chaises, bar/cuisine, tableaux, écriteaux divers…
Des bruits me parvenaient, laissant supposer qu’une réunion se passait aux étages supérieurs, auxquels on accédait par un grand escalier en marbre.
Après un certain temps, une personne, fort courtoise, m’invita à le suivre.
En haut des escaliers, il me mis un bandeau sur les yeux, et me pria à nouveau d’attendre : les brouhahas entendu précédemment avaient plus ou moins cessé.
N’y voyant rien, je fus introduit et guidé dans une salle, au centre de laquelle m’attendait un siège sans accoudoirs.
Différentes questions me furent posées, par différents intervenants, questions auxquelles je répondis franchement, et sans complaisance.
A la fin de cette curieuse audition, je fus congédié, et la même personne qui m’avait accueilli me ramena au rez de chaussée, dans cette salle qui, je l’apprendrai bien plus tard, s’appelle : « La Salle Humide ».
Durant mon trajet de retour, je me sentais perplexe, pris en tenaille entre ma curiosité d’en savoir plus, et tout ce mystérieux cérémonial qui n’était pas, je l’avoue, ma tasse de thé…
Quelques semaines plus tard, Jean me re-contacta, m’annonçant que ma candidature avait été retenue et que je serais « initié » à telle date.
Le terme « initiation » me rebutait à ce point que j’ai failli tout arrêter.
Initié à quoi ? pour apprendre quoi en dehors du monde dit « profane » ?
Mais bon, comme on dit en Languedoc-Roussillon, le vin était tiré, et il n’y avait plus …qu’à le boire …
Le jour J, retour à la même adresse, accueil par la même personne, qui me conduisit dans un « cabinet de réflexion » d’à peine plus de 1m x 1m, peint tout en noir, avec une bougie, un crâne humain, du sel, et que sais je encore.
Qu’étais je venu faire en cette galère !?
Au bout d’une demi heure, la même personne revint m’apporter un formulaire, destiné à écrire mon « testament de vie » : patienter à nouveau !
Enfin, eu lieu mon Initiation (toujours les yeux bandés) selon tout un cérémonial centré sur différents « voyages » symbolisant le Feu, l’Eau, La Terre et l’Air ( références bien connues dans les différents signes du Zodiaque…)
Le but de l’Initiation était de me faire passer du statut de Profane au stade de Franc Maçon, par le cérémonial qui m’apporterait « La Lumière ».
Je vous passe les détails du cérémonial, qui, en fin de course, aboutit à ce que l’on enlève le bandeau, vous permettant de découvrir…vos Frères.
Vous dire que je n’y ai ressenti aucune émotion, serait un gros mensonge….
Mais devenir Franc Maçon commence par être Apprenti.
En fin d’initiation, je reçus un petit tablier blanc, une paire de gants, blancs, et une rose, destinée à ma compagne de cœur.
Je découvris que le « Temple » était organisé selon les quatre points cardinaux Orient (Est) , Occident (Ouest) , Nord et Sud.
L’accès au Temple se fait par l’Occident (La porte, symbolisée par des colonnes)
A l’Orient officient le Vénérable Maître (le chef élu) le Secrétaire et l’Orateur, sur une estrade.
Au Nord siègent les Apprentis et le Second Surveillant (chargé de leur formation)
Au Sud siègent les Compagnons et le Premier Surveillant (chargé de leur formation)
Les Maîtres, eux, s’installent au Nord ou Sud, comme ils le souhaitent et selon les places disponibles.
En son milieu, côté Oriental, un ensemble de carrelages noir et blanc rappelant le jeu de dames, et constituant le « Pavé Mosaïque »
Lorsqu’il y a une Tenue (réunion) , les Frères sont introduits dans le temple, par le Maître de Cérémonie, et selon l’ordre croissant de leur grade :
D’abord les Apprentis, puis les Compagnons, puis les Maîtres, puis le Collège des Officiers, suivi par le Vénérable Maître et d’éventuels invités de Haut Rang Maçonnique.
Quel qu’ils soient, les Frères circulent dans le sens des aiguilles d’une montre, en ayant soin de ne jamais fouler le « Pavé Mosaïque »
Être apprenti suppose que
- Vous n’avez pas le droit de parole, lors des Tenues
- Vous êtes là pour écouter vos aînés, et apprendre…
- Après les Tenues, vous préparez les Agapes (repas) pour tous les Frères…qui bien sûr participent au « Triangle » , c’est-à-dire les frais.
Ces Agapes ont lieu après chaque Tenue, dans la Salle Humide, qui porte d’autant mieux son nom que le vin y est copieusement servi…
Durant les quelque 16 mois de mon statut d’apprenti réduit au silence, j’observai avec grande acuité, les modes de fonctionnement de notre Atelier (Loge).
A l’ouverture des Travaux, l’Orateur rappelle les principes constitutifs de notre Ordre, repris dans l’article 1 de la Constitution du GODF, rappelant que, je cite :
« La Franc Maçonnerie, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité, elle travaille à l’amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité. Elle a pour principes la tolérance mutuelle, le respect des autres et de soi-même, la liberté absolue de conscience.
Considérant les conceptions métaphysiques comme étant du domaine exclusif de l’appréciation individuelle de ses membres, elle se refuse à toute affirmation dogmatique. Elle a pour devise Liberté-Egalité-Fraternité »
A force de l’entendre tous les 15 jours, je connaissais cet article par cœur, et il n’éveillait en soi, rien de négatif à mes yeux, étant donné qu’il s’agissait que de grands principes auxquels j’adhérais dans leur ensemble.
Par la suite, j’eus droit à des « augmentations de salaire », comprenez par là l’élévation au grade de Compagnon d’abord, et de Maître, ensuite.
Tout ou presque, en Franc Maçonnerie est symboles et rituels :
Les trois grades de base font référence aux bâtisseurs du moyen âge, appelée « La Maçonnerie Opérative » alors que la Franc Maçonnerie est dite « Spéculative ».
L’Apprenti apprend à tailler la pierre brute à l’aide du ciseau et du maillet.
Il est pour cela revêtu d’un tablier dont la bavette est relevée, de sorte de le protéger contre les éclats supposés de la pierre, et de gants blancs.
Le Compagnon a pour tâche de polir la pierre brute et de veiller à sa rectitude : il utilise pour cela, essentiellement la règle et l’équerre.
Comme il ne risque plus la projection d’éclats, la bavette de son tablier est rabattue,
mais dispose toujours de gants.
Le Maître veille à ce que les pierres ainsi créées s’inscrivent parfaitement dans la Construction, utilisant pour cela divers instruments tels le niveau et le compas.
Ses « décors » sont constitués d’un tablier plus sophistiqué et d’un cordon transversal rappelant celui des Maires.
Chemin faisant, je m’aperçus que les Tenues auxquelles je participais s’appelait
« La loge Bleue » à laquelle se superposait d’autres Loges appelées « Ateliers Supérieurs ou de Perfectionnement » dont faisaient partie la plupart des membres du
« Collège des Officiers »
Le temps de m’y retrouver dans ce lexique opaque, je m’aperçus au fil du temps que ces mêmes Ateliers Supérieurs, constituaient un véritable organe de pouvoir au sein de la Loge, uns sorte d’État dans l’État des Loges Maçonnique.
Une sorte de microcosme qui oriente ou prend ses décisions, sans jamais en rendre compte de manière limpide à la modeste « Loge Bleue ».
Chaque année, en Juin, ont lieu les élections du nouveau Collège des Officiers, pour l’année Maçonnique suivante, sachant que les « usages » veulent qu’aucun Officier ne peut rester à son poste plus de trois ans, mais doit être réélu chaque année intermédiaire…
Le Collège des Officiers est constitué de :
- Le Vénérable Maître (le « chef » de l’Atelier)
- L’Orateur (chargé de veiller au respect de la constitution et du règlement)
- Le Secrétaire (prend note et fait son rapport de la tenue précédente)
- Le Maître des Cérémonies (introduit et les Frères dans le Temple )
- Le Trésorier (veille à ce que chacun soit en règle de cotisation…)
- Le Grand Expert (introduit les nouveaux candidats ou initiés)
- Le Second Surveillant (veille à la formation des Apprentis)
- Le Premier Surveillant (veille à la formation des Compagnons)
- Le Couvreur (toujours ancien vénérable, il veille à l’accès du Temple)
- Le Maître de la Table d’Harmonie (s’occupe des musiques d’ambiance)
- Le Maître des Banquets (supervise les Agapes)
Ces élections, sensées être démocratiques, ne le sont pas tant que cela, car déjà toute préparées par le Collège des Officiers sortant (où les principaux d’entre eux dans l’ordre hiérarchique)
J’eus sans doute l’impertinence de relever certains dysfonctionnements, manipulations ou mensonges, preuves à l’appui… : cela fit un grand « plouf » dans la Loge Bleue au sein de laquelle je l’exprimai.
En « Salle Humide » après la tenue, l’un ou l’autre Frère me disait : « j’ai apprécié ton intervention » : c’est gentil mais cela ne change rien au fait que de manière habituelle, une majorité de Frères font figures de …figurants, ou en tout cas ne se « mouillent pas » dès qu’il s’agit de relever de quelconques contradictions entre les grands principes et leur application sur le terrain.
Je n’ai jamais recherché aucune forme de pouvoir : quel pouvoir ? par rapport à qui ? pour quelle motivation ?
Par contre, j’ai toujours été rebelle à toutes formes de manipulations des pouvoirs en place, quels qu’ils soient.
Cela on le connaît déjà par trop, dans « la vie Profane ».
Si l’on retrouve la même chose en Franc Maçonnerie…
Si l’on y retrouve les mêmes nébuleuses hiérarchiques souterraines,
Si l’on y cultive les mêmes principes du non dit, du silence et des clans intérieurs,
A quoi bon ?
Il faut également savoir que la notion d’argent n’est pas étrangère au fonctionnement des Obédiences, en effet.
La « Capitation » autrement dit la cotisation annuelle obligatoire pour tous les Frères était en 2010 de 235€ dont 80% retourne à l’Obédience (Paris) et le solde étant consacré à de divers frais de fonctionnement de la Loge locale.
Le GODF gère via de quelconques sociétés connexes, un parc immobilier de bâtiments la plupart du temps conçus à usage de « Temple » et mis à disposition moyennant redevance, à diverses loges appartenant au Grand Orient de France, ou autres Obédiences sœurs voir concurrentes.
Mais bon, rien d’exceptionnel en cela.
Il n’empêche que toutes les Loges, quelles qu’elles soient ont intérêts à garder un nombre suffisant d’adhérents pour faire face à leurs charges.
C’est ainsi par exemple que tout Frère désirant « prendre du recul » quelles qu’en soient les raisons, peut demander d’être mis « en sommeil » , c’est-à-dire qu’il ne participe provisoirement plus aux Tenues, mais continue à payer ses Capitations.
Tel ne fut pas mon choix.
J’ai donc décidé de tirer ma révérence, pour l’unique raison que je ne retrouvais plus les raisons philosophiques et morales essentielles pour lesquelles j’y étais entré.
Mes réflexions, mes doutes, mes questions…
- Un de mes « Frères » et amis me posa la question : Si tu ressens un malaise dans notre Atelier, pourquoi ne t’inscris tu pas dans une autre Loge, qui peut être te conviendrait mieux ?
Je lui ai répondu : lorsque l’on sort d’une séparation douloureuse, on n’est pas forcément prêt à tenter une autre expérience… - Je me suis demandé aussi si je ne m’étais pas montré trop exigeant, ou bien si je n’ai pas fait preuve d’intolérance… : je n’ai pas encore la réponse, mais quoi qu’il en soit et jusqu’à plus ample réflexion, j’attendais de ma Loge, une Liberté, une Alité, et une Fraternité que je n’ai pas suffisamment rencontré.
Ce n’est pas parce que, lorsqu’ils se retrouvent, tous les Frères se saluent en s’embrassant trois fois ( en moyenne 50 frères x 50 = 250 accolades..) que ces « attouchements » seraient chargés d’une quelconque dimension affective réelle, qui dépasserait la seule tradition maçonnique de reconnaissance mutuelle… (humour : cela aurait même pu se révéler dangereux,lors de la supposée pandémie de grippe H1N1… )
Les conclusions de cet article :
- Dans tous les cas, je n’ai voulu salir l’image de la Franc Maçonnerie en général.
Que je n’y aie pas trouvé les raisons d’y demeurer reste affaire personnelle.
Contrairement à ce que l’on entend parfois, la Franc Maçonnerie n’est pas vraiment une secte, car il demeure plus facile d’en sortir que d’y entrer.
Toutefois, j’ai constaté chez la plupart des Frères, un certain « formatage pavlovien de la pensée » que l’on pourrait qualifier de « sectaire ».
Dès que l’on ne rentre pas vraiment »dans le moule Franc Maçon », on ne vous exclut pas : vous vous excluez vous même, petit à petit, ne trouvant plus d’interlocuteurs, même si vos « Frères » demeurent très courtois à votre égard.
Que la Franc Maçonnerie soit une organisation « secrète » est une évidence, même si certains la considèrent comme uniquement « discrète ».
C’est jouer sur les mots, au vu de son opacité, qui demeure même lorsque l’on en fait partie.
- Que certains y recherchent une quelconque forme de pouvoir ou de notoriété est évident, même si l’influence de la Franc Maçonnerie n’est plus du tout ce qu’elle fut lors de la 3ème République, et même si dans l’inconscient de certains demeure le sentiment que d’être Franc Maçon « pose son Homme » et peut aboutir à certains privilèges ; réels ou imaginaires…
- Quoi qu’il en soit, J’ai quitté la Franc Maçonnerie, et de manière définitive, tant les grands principes qui y sont énoncés, ne trouvent pas leur mise en oeuvre dans le vécu, en tout cas pas davantage que dans la vie dite « profane » …, alors, à quoi bon !?
Liens
Si vous le souhaitez, vous trouverez sur Internet, des centaines de liens allant de l’éloge, passant par la critique jusqu’à l’abject….
Je vous en propose un seul ayant trait au vocabulaire Maçonnique : pour l’approcher, voir même pour comprendre certains passage de mon article, cliquez ici
Il y a sur Internet de nombreux sites ou blogs traitant de ce sujet à des titres divers.
Il est très rare que vous puissiez laisser librement un commentaire…
Ce n’est pas le cas ici : dites ce que vous pensez ou posez vos questions.
La démocratie, c’est aussi et surtout pouvoir s’exprimer librement…
de sorte que… « la parole circule »….
4 décembre 2010
SOURCE : http://veillecitoyennelibre.over-blog.com/article-etre-franc-macon-ou-ne-plus-l-etre-62323975.html
VEILLE CITOYENNE LIBRE – BLOG D’EDDY DELHAYE
BONNE LECTURE ET SURTOUT BON DIMANCHE … 23 octobre, 2022
Posté par hiram3330 dans : Contribution , ajouter un commentaireBonjour dit l’apprenti, en accostant le Maître,
Pourrais-tu m’enseigner, le savoir, le connaître,
M’apprendre l’alchimie, la langue des oiseaux,
Les outils, les symboles, l’équerre et le niveau ?
Je veux être premier, le meilleur de la classe,
Que faut-il que je donne, que faut-il que je fasse ?
Si tu le veux vraiment, lui répondit le Maître,
Je pourrai t’expliquer, t’instruire et te transmettre !
Mais le meilleur élève n’est pas celui qui veut,
Il ne lui suffit pas, de bien ouvrir les yeux,
Ou d’apprendre par cœur le signe et puis les mots,
Faut-il qu’il comprenne ce qu’est l’homme nouveau !
Bonsoir dit le compagnon, en fixant bien le Maître,
J’ai beaucoup travaillé, il faut le reconnaître,
A présent je pourrai expliquer les symboles,
Montrer aux apprentis et leur faire l’école !
Mais j’ai encore besoin, de quelques instructions,
Pour être ce que je crois, un excellent maçon !
Qui t’a permis ainsi de porter jugement
Lui répliqua le Maître sans ménagement !
Le deuxième palier de l’échelle à monter,
N’est qu’une résultante de deux années passées.
Le travail du maçon est bien celui du cœur,
Quand tu l’auras compris reviens moi donc à l’heure !
Bonne nuit, dit le Maître novice, en toisant le vieux Maître.
Je suis devenu grand, de ça il faut l’admettre.
Aujourd’hui comme vous j’ai mes sept ans passés,
Suis arrivé au but, je suis à l’apogée.
Maintenant que je porte un nouveau tablier,
Donnez-moi un sautoir, un poste d’officier !
Le Maître doucement, qui était un vieillard,
Prononça quelques mots, sans lever un regard :
L’humilité s’acquiert en quittant son écorce
Qu’on appelle égo, mais en as-tu la force ?
Il faut que tu le saches, la route sera longue,
La sagesse n’est pas, pour toi dans ce bas monde
Pourtant tout était là, quand tu étais dans la tombe, à ton initiation, avant que tout ne gronde !
Quand tu nous quitteras, pour le dernier voyage,
Tu prendras ton habit, de ton tout premier âge,
Celui de l’apprenti sensé te préserver,
Des travers de la vie, de ses nombreux excès.
Et puisque tu as l’âge, que tu penses être grand,
Continue ton travail, n’enlève pas tes gants,
Regarde avec respect les petits apprentis,
Les jeunes compagnons, tu dois leur faire envie.
La plus belle des choses dans la maçonnerie,
C’est le regard des autres, j’espère que t’as compris ?
Le Maître tout nouveau ne dit plus rien du tout,
Quitta son tablier qui couvrait ses genoux,
Se rendit au cachot relire les inscriptions,
Regarda le vieux Maître ; il comprit la leçon !
LC
Cet article n’engage que son auteur.
Source : BULIM de la G.L.F.Misraim
Merci mon F:. Jean-Pierre pour ce partage
Francs-maçons : quelques anecdotes autour de Bruxelles 2 octobre, 2022
Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireFrancs-maçons : quelques anecdotes autour de Bruxelles
De notre confrère rtbf.be – Par Gérald Decoster
Dans « Retour aux sources », autour du documentaire « Franc-maçonnerie. L’obsession des Dictateurs », Élodie de Sélys vous propose une passionnante discussion sur la question avec l’historien Hervé Hasquin et le philosophe Arnaud de la Croix.
La franc-maçonnerie est un sujet qui captive encore et toujours un vaste public, entre mystères, ésotérisme, puissance et influence avérés… ou pas ? Pour ses adeptes, cette philosophie n’a rien de secrète, elle est discrète… Nombre de francs-maçons ne cachent pas leur appartenance à une Loge. C’est le cas d’Hervé Hasquin mais aussi de Jean van Win, auteur de l’ouvrage « Bruxelles maçonnique : faux mystères et vrais symboles »… Car la discrétion cultivée autour de la maçonnerie donne lieu à diverses interprétations de sites et monuments…
Au registre des pseudos – ou avérés – éléments maçonniques que recèle Bruxelles, la première place du podium revient à son parc. Conçu au cours du dernier tiers du XVIIIe siècle dans le grand plan de réhabilitation du site de l’ancien palais du Coudenberg détruit par l’incendie de 1731, nombre d’auteurs voient dans son plan la majeure partie des outils de la Loge : ciseau, compas, équerre, maillet, marteau, niveau, perpendiculaire, règle (ou levier) et truelle…
Jean van Win n’est pas seul à penser que l’arrière-plan maçonnique du parc de Bruxelles n’est que pure élucubration. L’auteur y voit l’usage probable de la Croix de Lorraine, ancienne version, avec ses deux traverses d’égale longueur. Selon lui, le tracé du parc serait purement urbanistique, ce qui est exact : l’espace vert a été pensé comme articulation principale du nouveau quartier, destiné à faciliter la circulation en dégageant des perspectives vers divers artères et bâtiments marquants existant ou à venir.


Il y a d’abord le futur palais des États de Brabant, l’actuel palais de la Nation, édifié en 1783. De l’autre côté, il y a la place Royale, qui finira par s’ouvrir sur la rue de la Régence en 1827 avant d’être prolongée en 1872 vers le palais de Justice de Poelaert. Autre axe en devenir, la rue Héraldique qui allait se dessiner entre les futurs hôtels Bender et Belgiojoso qui, plus tard, seront réunis pour constituer le palais royal de Guillaume Ier des Pays-Bas, notre futur palais royal… Enfin, le dernier axe s’ouvre sur le nouveau quartier à édifier en dehors des anciens remparts, via l’actuelle place du Trône…
Quant à l’actuel palais de la Nation, sièges de la Chambre et du Sénat, il recèle bel et bien quelques éléments de toute évidence maçonniques. Le fronton du palais a été sculpté par le franc-maçon Gilles-Lambert Godecharle. Voici sa clé de lecture : au centre, la Justice distribue les vertus avec l’aide de la Sagesse et avec celle de la Force, condamne les Vices, une image se retrouvant dans les anciens rituels maçonniques : « Que venez-vous faire en loge ? Je viens construire des temples à la vertu et creuser des cachots pour le vice ».

Corps central du Palais de la Nation, Bruxelles. monument.heritage.brussels-région de Bruxelles-Capitale/Inventaire du patrimoine architectural.
À gauche du corps central de l’édifice, le trophée sculpté à droite de l’entrée de la Présidence du Sénat est aussi parfaitement maçonnique. L’œil du Grand architecte de l’univers domine un compas, une équerre, la Bible et une colonne tronquée ; étrangement, on y découvre aussi le gourdin d’Hercule…
Via la place Royale, avant d’emprunter le Mont-des-Arts, le promeneur est dominé par la statue de Charles de Lorraine, gouverneur général des Pays-Bas autrichiens de 1741 à son décès en 1780. À côté se dresse ce qui demeure de son palais et sa chapelle où, la légende veut que des tenues maçonniques aient été organisées par le Gouverneur franc-maçon…
Jean van Win conteste formellement l’appartenance de Charles de Lorraine à la maçonnerie, pour la simple raison qu’il était Grand Maître de l’ordre Teutonique qui, dans ses statuts, interdisait à ses membres de faire partie d’aucun autre ordre !
Quant aux cérémonies maçonniques dans la chapelle du palais, ç’aurait été tout bonnement impossible car, le rite de l’époque impliquait dans ses trois premiers Grades, l’utilisation d’épées dégainées, inadmissible dans un lieu consacré. De plus, pourquoi utiliser la chapelle alors que le palais, ancien palais de Nassau, acquis en 1756, dont l’aile remplacée par un bâtiment au goût du jour comptait suffisamment de vastes salles aptes à accueillir des cérémonies importantes ?
La superbe Rotonde du premier étage du palais possède un riche pavement. Au centre, une rose compose un échantillonnage des marbres que proposait la Belgique du temps de Charles de Lorraine. Autour d’elle, un damier de marbre blanc et noir fait penser au Pavé mosaïque se trouvant dans toute loge maçonnique… Vrai ou faux ?

La superbe Rotonde du premier étage du palais possède un riche pavement. Au centre, une rose compose un échantillonnage des marbres que proposait la Belgique du temps de Charles de Lorraine. Autour d’elle, un damier de marbre blanc et noir fait penser au Pavé mosaïque se trouvant dans toute loge maçonnique… Vrai ou faux ?
Jean van Win rejette totalement cette idée. Le Pavé mosaïque d’une loge est toujours rectangulaire. Le pavement du palais de Lorraine est d’un type assez répandu au XVIIIe siècle et n’est, en aucun cas, à comparer avec un hypothétique Pavé de Loge. Pas plus d’ailleurs que celui identique du salon Italien ou Rotonde du château royal de Laeken, par ailleurs restauré de fond en comble à la suite de l’incendie du 1er janvier 1879…
Enfin, autre idée : le fronton du château de Laeken, sculpté par Godecharle, serait d’essence maçonnique. Pour Jean van Win, il s’agit d’une allégorie d’ordre mythologique exprimant le temps qui passe. Mais, pour certains, les trois Parques qui déroulent le fil de la vie illustreraient l’appartenance d’Albert de Saxe-Teschen, époux de la gouvernante générale des Pays-Bas autrichien, Marie-Christine d’Autriche, sœur de Joseph II à une Loge.

Corps central du château royal de Laeken, Bruxelles. monument.heritage.brussels-région de Bruxelles-Capitale/Inventaire du patrimoine architectural.
Certes, le duc de Saxe-Teschen faisait bien partie d’une loge de Dresde, « Zu den drei Schwerdtern », « Les Trois Épées ». Ceux qui expliquent le point de vue maçonnique du fronton confondent avec la loge « Zu den Drei Schwestern », « Les Trois Sœurs », en relation erronée avec les trois Parques… un simple D devenu S change d’évidence, bien des choses !
Il reste difficile de prouver bien des hypothèses faisant de tel monument ou de tel un lieu ou un symbole maçonnique. Ainsi, Joël Goffin, dans son ouvrage « Le Quartier Royal de Bruxelles, un chef-d’œuvre maçonnique » (Édition Samsa) propose une étude fouillée sur le parc de Bruxelles et le quartier qui l’environne… Bonne découverte !
Quelques propositions de lectures ?

» Hitler et la franc-maçonnerie « , par Arnaud de la croix, Tallandier, 2020.

« Un roi franc-maçon : Léopold Ier de Belgique », par Jean van Win, préface d’Arnaud de la Croix, Éditions Télélivre, 2015.
À visiter : le Musée Belge de la Franc-Maçonnerie, 73 rue de Laeken, 1000 Bruxelles.
SOURCE : https://450.fm/2022/09/10/francs-macons-quelques-anecdotes-autour-de-bruxelles/
La Franc-maçonnerie, entre cité céleste et cité terrestre : divisions et équilibrages internes au sujet du théisme, de la religion et des questions sociétales 21 mars, 2021
Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire- 3 Barat, Michel, La Conversion du regard, Paris, Albin Michel, 1992, p. 48.
Michel Barat3 (ancien Grand Maître de la grande Loge de France)
1Nulle organisation ne témoigne mieux que la Franc-maçonnerie, peut-être, des aspirations religieuses de l’homme moderne, mais également du paradoxal mouvement d’écartèlement et de recouvrement entre Dieu et le siècle qui marque aujourd’hui la société occidentale, comme nous allons le montrer dans cette étude.
2Nous mettrons ainsi en évidence la dimension religieuse de cette société initiatique, qui ne saurait pourtant être considérée elle-même comme une religion : d’abord parce que la quête spirituelle qu’elle propose et le sacré dont elle entoure ses rites ne renvoient pas à un culte, dans la mesure où elle se veut a-dogmatique ; ensuite parce que la question de la croyance en un Être Suprême et de l’évocation du Grand Architecte de l’Univers au sein des loges ne cesse de diviser les différentes obédiences.
3Puis nous soulignerons l’engagement sociopolitique de nombreux francs-maçons, désireux de faire évoluer les lois de la République et de défendre les principes de la laïcité, en accord avec la devise maçonnique qui exhorte les initiés à travailler « au progrès de l’humanité ». Or c’est bien dans cette tentative d’équilibrage entre la construction de la cité céleste et l’édification de la cité terrestre, constitutive d’une philosophie résolument médiatrice, que réside l’originalité – mais aussi la complexité – de la démarche maçonnique.
La dimension religieuse de la Franc-maçonnerie : fonction reliante et présence du sacré
4La Franc-maçonnerie, qui se présente comme une société « secrète » ou « discrète », une association « philosophique et philanthropique », ne peut être considérée comme une religion, dans la mesure où elle est ne professe pas de dogme et ne pratique pas de culte. Loin d’inculquer des vérités révélées, elle propose une mise sur la voie (« initium »), un enseignement (au sens originel de « montrer le signe ») via un système de symboles que chaque adepte doit s’efforcer d’interpréter personnellement par un incessant travail herméneutique, et plus profondément une démarche initiatique ancrée dans un rituel.
- 4 La Franc-maçonnerie est « une véritable ecclesia dans le sens d’union fraternelle, la seule religi (…)
- 5 Bolle de Bal, Marcel, La Franc-maçonnerie, porte du devenir. Un Laboratoire de reliances, Paris, D (…)
5Cependant, la Franc-maçonnerie a affirmé une véritable dimension religieuse dès sa création, en 1717, suite à la fusion de quatre loges londoniennes et à la formation de la Grande Loge Unie d’Angleterre : d’abord en faisant référence à Dieu, et plus tard au Grand Architecte de l’Univers (dont on retrouve le symbole dans les temples maçonniques, à travers le « Delta lumineux » doté de « l’œil qui voit tout »), ensuite en privilégiant la construction d’un lien social, à travers la fameuse « fraternité » maçonnique4. Elle est donc bien ce « laboratoire de reliances » que décrit le sociologue et franc-maçon belge Marcel Bolle de Bal5, s’efforçant de tisser une médiation tant verticale qu’horizontale, en accord avec l’étymologie du mot « religion », issu du latin « religare », signifiant « relier ».
- 6 Meslin, Michel, « Religion, sacré et mythe », Actes du colloque de Paris, Centre Ravel, 24-26 octr (…)
6Michel Meslin, en effet, relevant le changement de sens que le mot religion a connu au IVe siècle, sous Constantin et sous Lactance (et qui, après avoir longtemps désigné un ensemble de traditions et de croyances propres à une société humaine, finit par indiquer la vénération que les hommes portent à un Être suprême), souligne fort justement à ce propos : « on aurait tort, je pense, de voir dans ces deux sources étymologiques « une duplicité originaire de la religion » comme l’affirme Jacques Derrida. Je dirais volontiers qu’il s’agit d’un complément de sens : une religion fonde des liens entre des hommes et des femmes qui partagent une même croyance et, en même temps, elle est un lien vertical entre ces humains et le(s) dieu(x) qu’ils vénèrent ».6
- 7 Debray, Régis, Vie et mort de l’image. Une histoire du regard en Occident, Paris, Gallimard, 1989, (…)
- 8 Durand, Gilbert, L’Imagination symbolique, Paris, PUF, 1964, pp. 12-18.
7Plus largement, ce désir de reliance verticale / horizontale, qui se double d’une volonté de conciliation entre le transcendant et l’immanent, le céleste et le terrestre, s’exprime à travers le système symbolique qui soutient toute la démarche maçonnique. Or, la médiation horizontale à laquelle procède la pensée symbolique est évoquée par l’étymologie même du mot « symbole », qui provient du grec « sumbolon », lui-même lié au verbe « sumballein » signifiant « réunir, rassembler ». De fait, le symbole désignait initialement une pièce de terre cuite brisée en deux, et destinée à être réunie ultérieurement par des amis, des familles ou leurs descendants lors de retrouvailles. L’aspect social et communicationnel y est clairement manifeste, le symbole étant un signe de reconnaissance, une concrétisation matérielle des rapports de confiance établis, et visant à réparer une séparation. Aussi Régis Debray rapproche-t-il les notions de symbolisation et de fraternisation : « symbolique et fraternel sont synonymes : on ne fraternise pas sans quelque chose à partager, on ne symbolise pas sans unir ce qui était étranger. L’antonyme exact du symbole, en grec, c’est le diable : celui qui sépare. Dia-bolique est tout ce qui divise, sym-bolique est tout ce qui rapproche »7. Parallèlement, le symbole tisse une médiation verticale, réunissant l’idéel et le matériel, puisqu’il est « le message immanent d’une transcendance », ou encore une « reconduction du sensible, du figuré au signifié, mais en plus il est par la nature même du signifié inaccessible, épiphanie, c’est-à-dire apparition, par et dans le signifiant, de l’indicible », ainsi que le souligne Gilbert Durand8.
- 9 Ferré, Jean, La Franc-maçonnerie et le sacré, Paris, Dervy, 2004.
- 10 Etienne, Bruno, L’Initiation, Paris, Dervy, 2002.
8Enfin, la Franc-maçonnerie se rapproche de la religion par les rapports intrinsèques qu’elle entretient avec le sacré9. Les adeptes travaillent dans un espace-temps distinct de celui du monde profane, « de midi à minuit », dans une enceinte réservée à cet effet, appelée « temple ». Comme la plupart des institutions religieuses, d’ailleurs, l’institution maçonnique a élaboré son propre calendrier, qui fonctionne avec 4000 ans d’avance par rapport au calendrier chrétien : ainsi l’année civile 2011 correspond-elle, pour les francs maçons, à l’année maçonnique 6011. Elle possède ses propres mythes (le mythe d’Hiram, notamment), et fonctionne selon des rituels particuliers (Rite Écossais Ancien et Accepté, Rite Écossais Rectifié, Rite Émulation…). Enfin, il n’est pas inutile de rappeler que le processus initiatique dans lequel s’engage tout franc-maçon est censé aboutir à une « métanoia » ou conversion totale de l’être, comme le note Bruno Etienne10, démarche proche de ceux qui s’engagent en religion.
- 11 Agulhon, Maurice, Pénitents et francs-maçons dans l’ancienne Provence. Essai sur la sociabilité mé (…)
- 12 Cambacérès et Joseph de Maistre, par exemple, possédaient une double affiliation, étant tout à la (…)
9Les recherches menées par l’historien Maurice Agulhon11 peuvent nous éclairer sur la complexité des relations que les loges maçonniques entretiennent vis-à-vis de la sphère religieuse. La loge, en effet, possède un caractère mixte, dans la mesure où elle offre une sacralité qui ne se confond pas toutefois avec celle qu’offre la religion. Agulhon a montré les points communs qui existent, dans la région provençale du XVIIIe siècle, entre les confréries religieuses et les confréries associationnistes, au rang desquelles figure la Franc-maçonnerie : un même esprit d’entraide spirituelle et de fraternité anime ces deux types de structures, au point que nombre de membres de la première catégorie (les notables surtout12) vont déserter progressivement leur institution d’accueil pour intégrer les secondes vers la fin de l’Ancien Régime. Si ce passage des associations religieuses aux associations maçonniques a pu se faire aussi facilement, c’est précisément parce qu’il existe des éléments de continuité entre elles, autant que des éléments de divergence. Agulhon voit dans les loges maçonniques un mouvement de déchristianisation qui conserve néanmoins un sentiment religieux.
La question théiste au cœur des dissensions internes et les rapports conflictuels de la Franc-maçonnerie avec l’Eglise
10En plein siècle des Lumières donc, tandis que nombre de philosophes combattent une foi jugée obscurantiste afin de placer la raison prétendue toute-puissante et éclairante au centre d’un mouvement d’émancipation humaine, la Franc-maçonnerie met la religiosité au cœur de son fonctionnement. A l’issue de leur initiation, les néophytes prêtent serment de garder le silence sur les secrets de leur communauté d’accueil en jurant sur les trois Grandes lumières de la Franc-maçonnerie, qui ne sont autre que l’équerre, le compas et le Volume de la loi sacrée, c’est-à-dire la Bible. James Anderson et Jean Théophile Désaguliers introduisent d’ailleurs la notion de « religion naturelle » dans les célèbres Constitutions, parues en 1723 et qui constituent la charte fondatrice de la Franc-maçonnerie puisqu’elles en fixent l’histoire officielle, les principes et modes de fonctionnement.
- 13 Négrier, Patrick, L’éclectisme maçonnique, Bagnolet, éditions Ivoire-Clair, 2003.
- 14 Dachez, Roger, Histoire de la Franc-maçonnerie Française, PUF, collection « Que sais-je ? », 2003.
- 15 En France la Grande Loge Nationale Française est l’une des représentantes de la branche traditionn (…)
11Mais très vite, cette religiosité va être l’objet de vives dissensions au sein de la jeune institution. Dès le milieu du XVIIIe siècle, une querelle oppose les obédiences, notamment à propos de la place qu’il convient d’accorder à la croyance en Dieu et en l’immortalité de l’âme au sein des loges. Certaines d’entre elles sont résolument théistes, d’autres sont simplement déistes, ces deux types d’obédiences formant une branche que l’on pourrait qualifier de traditionnelle. D’autres encore, qui reçoivent la désapprobation de la branche traditionnelle, constituent un courant libéral en acceptant d’initier des agnostiques et des athées13. Cette querelle se transforme en un véritable schisme en 1877 (lorsque le Grand Orient de France, de mouvance libérale, supprime l’obligation pour ses membres de croire en Dieu, puis les références rituelles faites au Grand Architecte de l’Univers14, et se trouve alors ostracisée par la plupart des obédiences anglo-saxonnes d’inspiration traditionnelle), et se poursuit aujourd’hui.15
- 16 On trouvera une publication des différentes versions des Constitutions d’Anderson dans l’ouvrage d (…)
12Ainsi, si la Grande Loge Unie d’Angleterre affirme que les francs-maçons placés sous sa juridiction « doivent croire en un Être Suprême », dans le troisième de ses huit principes de base, remaniés en 1989, les obédiences qui se réfèrent aux Constitutions d’Anderson, adoptent une position plus tolérante, en accord avec le texte du pasteur presbytérien qui déclare : « Bien que dans les temps anciens les maçons étaient tenus dans chaque pays de pratiquer la religion de ce pays, quelle qu’elle fût, il est maintenant considéré plus expédient de seulement les astreindre à cette religion sur laquelle tous les hommes sont d’accord, c’est-à-dire à être hommes de bien et loyaux, ou homme d’honneur et de probité, quelles que soient les dénominations ou confessions qui aident à les distinguer »16. Enfin, une obédience comme le Grand Orient de France stipule dans l’article premier de sa Constitution de 1877 que la Franc-maçonnerie « a pour principes la liberté absolue de conscience et la solidarité humaine. Elle n’exclut personne pour ses croyances ».
- 17 Boutin, Pierre, La Franc-maçonnerie, l’Eglise et la modernité : les enjeux institutionnels du conf (…)
- 18 Cité par Beaurepaire, Pierre-Yves, « Le temple maçonnique », Socio-anthropologie, n° 17-18, 2006.
- 19 Porset, Charles, et Révauger, Cécile, Franc-maçonnerie et religions dans l’Europe des Lumières, Pa (…)
13Si les rapports de la Franc-maçonnerie avec la religion sont sources de dissensions internes, la problématique se révèle encore plus complexe si l’on considère les relations qu’entretiennent l’institution maçonnique et l’Église. A partir de 1738, et pendant près de deux siècles, en effet, l’Église condamna la Franc-maçonnerie, allant jusqu’à interdire à ses prêtres l’initiation maçonnique17. Ainsi l’évêque de Marseille, Mgr de Belzunce, grande figure de l’épiscopat français, condamna-t-il sans appel les conventicules maçonniques dans un mandement de 1742, où il fustigea ces « assemblées où sont indifféremment reçus gens de toute nation, de toute religion et de tout État »18. Selon Charles Porset et Cécile Révauger, cette attitude de l’Église catholique serait due à sa crainte d’être concurrencée par une association faisant référence à une religion naturelle, libérée des dogmes, et proche, dans son esprit, de l’idéologie protestante19.
- 20 Vindé, François, L’Affaire des fiches. 1900-1904 : chronique d’un scandale, Paris, éditions Univer (…)
- 21 Chevallier, Pierre, Histoire de la Franc-maçonnerie française, tome 3, « La Maçonnerie, Église de (…)
14La Franc-maçonnerie libérale, à son tour, combattit le cléricalisme dans des pays comme la France à partir des XIXe et XXe siècles, comme le prouve l’affaire des fiches qui éclata avec le général André et la complicité du Grand Orient de France, sous le gouvernement Combes, et visait à éradiquer les tendances conservatrices de l’armée20. Cet attachement au républicanisme fit dire à l’historien et maçonnologue Pierre Chevallier que la Franc-maçonnerie devint « l’Eglise invisible de la République »21. En 1905, enfin, de nombreuses obédiences participèrent à réaliser la séparation de l’Église et de l’État.
Un fort engagement social et politique : les francs-maçons dans la cité terrestre
- 22 Gayot, Gérard, La Franc-maçonnerie française. Textes et pratiques (XVIIIe-XIXe siècles), Paris, Ga (…)
15Si la question religieuse a préoccupé les francs-maçons dès les débuts de la Franc-maçonnerie, les questions sociales ont aussi été l’objet d’une attention majeure à partir du XVIIIe siècle. Bien avant la Révolution française, l’institution maçonnique affirma le principe d’égalité entre les hommes (représenté symboliquement par cet outil rituel qu’est le « niveau »), ce qui ne manqua d’ailleurs pas de faire scandale sous l’Ancien régime, foncièrement inégalitaire, ainsi que le fait remarquer l’historien Gérard Gayot en s’appuyant sur des témoignages d’époque22. Nombre d’aristocrates, en effet, voyaient d’un mauvais œil ces ateliers où de grands seigneurs abandonnaient le privilège de leur rang en fraternisant avec des roturiers. Cet intérêt pour les problématiques sociopolitiques s’est mué en un véritable engagement dans le siècle, même si cela est surtout vrai pour la Franc-maçonnerie libérale et irrégulière, la Franc-maçonnerie anglo-saxonne, traditionnelle et régulière, restant davantage tournée vers les thématiques spirituelles.
16En France, l’attachement des francs-maçons – majoritairement libéraux à l’exclusion de ceux qui œuvrent au sein de la GLNF – aux lois de la République est attesté depuis très longtemps, et nombre d’entre eux se sont illustrés dans ce sens : Lazare Carnot et Jules Ferry, fervents défenseurs de la laïcité et partisans d’une éducation égalitaire, accessible à tous, Victor Schoelcher, qui réalisa l’abolition de l’esclavage, ou encore Félix Faure, Camille Pelletan, Léon Gambetta, Alexandre Millerand, Guy Mollet, Gaston Doumergue, Paul Ramadier… Au Royaume-Uni et aux Etats-Unis, on compte également des noms aussi célèbres que Winston Churchill, George Washington, Franklin Roosevelt, Théodore Roosevelt et Harry Truman. Au XXe siècle, en France, les francs-maçons ont œuvré dans le sens de la laïcité, défendu le projet de loi sur la contraception, participé à faire voter la loi Veil autorisant l’avortement ou encore la loi abolissant la peine de mort, aux côtés de Robert Badinter. Plus récemment, ils ont contribué au retrait du très controversé fichier Edvige, et tentent de faire progresser la législation autour de l’euthanasie et de la bioéthique, notamment.
- 23 Nom donné à des associations inter-obédientielles, qui regroupent des francs-maçons exerçant une m (…)
- 24 Henri Caillavet a élaboré des projets de loi sur l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse), le (…)
- 25 Martin, Luis P., (dir.), Les Francs-maçons dans la cité. Les cultures politiques de la Franc-maçon (…)
- 26 Coignard, Sophie, Un Etat dans l’Etat. Le contre-pouvoir maçonnique, Paris, Albin Michel, 2009.
17L’exemple de la « fraternelle »23 parlementaire, créée en 1947 sous l’impulsion de l’ancien sénateur et député – initié au Grand Orient de France – Henri Caillavet, durant le mandat de Paul Ramadier, est à cet égard significatif24. Les élus du Sénat et de l’Assemblée Nationale, appartenant à diverses obédiences maçonniques, s’y retrouvent pour débattre des dossiers en cours et de diverses questions de société en s’efforçant de dépasser les clivages des partis. Tout cela atteste de la tradition d’engagement dans la cité qui est celle des francs-maçons depuis les origines25, tout du moins en France et en Belgique. Une tradition qui, associée à la fraternité et à l’esprit d’entraide maçonniques, peut d’ailleurs être source de dérives en tous genres26 (comme le prouvent les scandales politico-financiers qui secouèrent la région PACA vers la fin des années 1990, et que le Procureur de la République au Tribunal de Grande instance de Nice, Eric de Montgolfier, s’efforça de combattre), lesquelles font le bonheur des grands hebdomadaires et de leurs marronniers. D’où le préjugé, largement répandu, selon lequel la Franc-maçonnerie se réduirait à n’être qu’un réseau affairiste destiné à servir les intérêts personnels de quelques individus cupides.
Une tentative d’équilibrage : vers la réalisation utopienne des « noces chimiques du ciel et de la terre »…
- 27 Jean Verdun a mis en évidence cette bipolarité de la démarche maçonnique, allant jusqu’à intituler (…)
18Pour autant, cet engagement politique et social est censé être complémentaire avec le développement spirituel des initiés. La progression des adeptes dans leur quête intérieure, en effet, doit idéalement les amener à transformer leur comportement au sein de la société. Car si le travail de l’initié prend naissance dans l’enceinte sacrée, où s’élabore la réflexion et où se cherche la sagesse, il se prolonge et s’actualise naturellement dans le monde profane, comme en atteste ce passage du Rite Écossais Ancien et Accepté, invitant chaque franc-maçon à « poursuivre au-dehors l’œuvre commencée dans le Temple ». Inversement, l’amélioration de la vie matérielle doit favoriser l’épanouissement personnel des adeptes.27
- 28 Plantagenet, Edouard, Causeries initiatiques pour le travail en chambre de compagnons, Paris, Derv (…)
- 29 Mollier, Pierre, La Chevalerie maçonnique : Franc-maçonnerie, imaginaire chevaleresque et légende (…)
- 30 Vierne, Simone, Les Mythes de la Franc-maçonnerie, Paris, Véga, 2008, pp. 122-123.
19Considérations temporelles et spirituelles sont donc dialectiquement imbriquées, pour la plupart des obédiences francophones, et témoignent de l’influence profonde et durable que la tradition alchimique, qui s’efforçait de réconcilier l’esprit et la matière en opérant les « noces chimiques du ciel et de la terre » par un phénomène de transmutation, possède sur les francs-maçons. Le système ternaire des « frères trois points » (triangle, trois pas de l’Apprenti, trois colonnes baptisées « Sagesse », « Force » et « Beauté », trois Grande Lumières de la Franc-maçonnerie…), n’est d’ailleurs pas sans rappeler les principes de base des alchimistes, qui prétendaient réunir le Soufre igné et le Mercure aqueux via un troisième terme, le Sel. L’analyse que l’initié Edouard Plantagenet effectue au sujet de la conversion maçonnique est nettement imprégnée de cette pratique alchimique, puisqu’il précise que « cette tâche s’accomplit en « spiritualisant la matière » au premier degré de l’Initiation, en « matérialisant l’esprit » au second et, enfin, en unifiant la matière et l’esprit au troisième »28. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la symbolique maçonnique des hauts grades s’inspire également des traditions templière et chevaleresque29, les moines-soldats et membres de ces ordres étant animés par des motivations tant profanes que spirituelles30.
- 31 Mannheim, Karl, Idéologie et Utopie, Paris, Marcel Rivière, 1956.
- 32 Le désir d’ordre, en effet, est une constante des organisations utopiennes. En outre, on retrouve (…)
- 33 A ce sujet, voir Beaurepaire, Pierre-Yves, La République universelle des francs-maçons. De Newton (…)
20On peut même percevoir dans la voie maçonnique une ambition utopienne, visant à réaliser la cité céleste sur terre, dans la mesure où elle entreprend de parfaire la condition humaine. Le caractère « protestataire » que Karl Mannheim identifie comme étant au fondement de l’utopie31 (à l’inverse de l’idéologie qu’il décrit comme un outil de conservation du pouvoir aux mains des classes dominantes), en effet, est bien présent dans l’institution maçonnique, qui s’efforce de changer la nature des choses. Il s’exprime notamment à travers l’initiation, qui prétend faire du profane un « nouvel homme » qui renaît après avoir connu une mort symbolique, ou encore à travers la devise maçonnique Ordo ab chao, qui entreprend de faire advenir l’ordre à partir du désordre32. Enfin, on peut aussi en trouver la trace dans le désir de dépasser les clivages idéologiques, religieux et politiques, et d’unir les hommes autour de valeurs communes. La Franc-maçonnerie, en effet, éprise d’universalisme, entend bien offrir à ceux qui se considèrent « citoyens du monde » une institution cosmopolite33, un langage symbolique anté-babélien, capable de transcender les particularismes nationaux. Elle est ce « centre de l’Union » évoqué par les Constitutions d’Anderson, qui permet de réunir par une » véritable amitié, des personnes qui eussent dû rester perpétuellement séparées »…
21Une obédience comme l’Ordre Maçonnique Mixte International le Droit Humain, qui rassemble plus de 27 000 membres de par le monde, tente explicitement de concilier approches symboliques et spirituelles d’une part, approches sociales d’autre part, en faisant « plancher » annuellement ses adeptes sur des questions relevant de ces deux thématiques. Très attachée à la laïcité, elle est également tournée vers des considérations proches de celles que les religions développent, certains de ses adeptes s’engageant dans une démarche méliorative que l’on pourrait qualifier de sotériologique.
- 34 Tel est le cas, par exemple, à la loge Nostra Delta, sise à Salon de Provence.
- 35 Pozarnik, Alain, A la lumière de l’acacia. Du profane à la maîtrise, Paris, Dervy, 2000, p. 35.
22Cette tentative d’équilibrage entre deux postures que les philosophes des Lumières tendaient à considérer comme antinomiques (tradition et modernité, symbolisme et conceptualisme, foi et raison, ésotérisme et exotérisme…), traduit une volonté de ré-enchanter un monde désenchanté – selon l’analyse weberienne – par l’affaiblissement des idéologies transcendantes et des référents métaphysiques, sans toutefois sacrifier aux idées de progrès et de liberté que la société moderne a mises en exergue. Dans certains ateliers du Droit humain34, l’ouverture et la fermeture des travaux par le Vénérable Maître se fait d’ailleurs selon la mention significative suivante : « Au Progrès de l’Humanité et / ou à la Gloire du Grand Architecte de l’univers »… Si la franc-maçonnerie est un idéal, elle se veut donc un idéal incarné. Alain Pozarnik, ancien Grand Maître de la Grande Loge de France, affirme ainsi qu’ « il y a deux plans, deux niveaux de vie, l’homme peut choisir l’un ou l’autre, le matériel ou le spirituel, l’initié s’équilibre entre les deux, il vit à la fois le ciel et la terre »35.
Notes
1 Roy, Jean-Philippe, « Théisme, déisme, adogmatisme, la Franc-maçonnerie. Une troisième voie pour sortir du clivage autonomie/hétéronomie ? », in La Pensée et les Hommes, n° 66, 2007.
2 Maffesoli, Michel, Eloge de la raison sensible, Paris, Grasset, 1996.
3 Barat, Michel, La Conversion du regard, Paris, Albin Michel, 1992, p. 48.
4 La Franc-maçonnerie est « une véritable ecclesia dans le sens d’union fraternelle, la seule religion dans le monde, si nous considérons le terme comme dérivé de « religare », puisqu’elle unit tous les hommes qui lui appartiennent comme des « frères », sans égard à leur race ni à leur foi » (Plantagenet, Edouard, Causeries initiatiques pour le travail en chambre du milieu, Paris, Dervy, 2001, p. 72).
5 Bolle de Bal, Marcel, La Franc-maçonnerie, porte du devenir. Un Laboratoire de reliances, Paris, Detrad, aVs, 1998.
6 Meslin, Michel, « Religion, sacré et mythe », Actes du colloque de Paris, Centre Ravel, 24-26 octrobre 2005 : les conditions d’un enseignement du fait religieux dans l’école française, publiés par l’ARELC, Bulletin de liaison, n° 20, 2007.
7 Debray, Régis, Vie et mort de l’image. Une histoire du regard en Occident, Paris, Gallimard, 1989, p. 82.
8 Durand, Gilbert, L’Imagination symbolique, Paris, PUF, 1964, pp. 12-18.
9 Ferré, Jean, La Franc-maçonnerie et le sacré, Paris, Dervy, 2004.
10 Etienne, Bruno, L’Initiation, Paris, Dervy, 2002.
11 Agulhon, Maurice, Pénitents et francs-maçons dans l’ancienne Provence. Essai sur la sociabilité méridionale, Paris, Fayard, 1968.
12 Cambacérès et Joseph de Maistre, par exemple, possédaient une double affiliation, étant tout à la fois pénitents et francs-maçons.
13 Négrier, Patrick, L’éclectisme maçonnique, Bagnolet, éditions Ivoire-Clair, 2003.
14 Dachez, Roger, Histoire de la Franc-maçonnerie Française, PUF, collection « Que sais-je ? », 2003.
15 En France la Grande Loge Nationale Française est l’une des représentantes de la branche traditionnelle, tandis que le Grand Orient de France incarne la mouvance la plus libérale.
16 On trouvera une publication des différentes versions des Constitutions d’Anderson dans l’ouvrage de Ferré, Jean, Histoire de la Franc-maçonnerie par les textes (1248-1782), Paris, éditions du Rocher, 2001.
17 Boutin, Pierre, La Franc-maçonnerie, l’Eglise et la modernité : les enjeux institutionnels du conflit, Paris, Desclée de Brouwer, 1998.
18 Cité par Beaurepaire, Pierre-Yves, « Le temple maçonnique », Socio-anthropologie, n° 17-18, 2006.
19 Porset, Charles, et Révauger, Cécile, Franc-maçonnerie et religions dans l’Europe des Lumières, Paris, Honoré Champion, 2006.
20 Vindé, François, L’Affaire des fiches. 1900-1904 : chronique d’un scandale, Paris, éditions Universitaires, 1989.
21 Chevallier, Pierre, Histoire de la Franc-maçonnerie française, tome 3, « La Maçonnerie, Église de la République : 1877-1944 », Paris, Fayard, 1975.
22 Gayot, Gérard, La Franc-maçonnerie française. Textes et pratiques (XVIIIe-XIXe siècles), Paris, Gallimard, 1991 (p. 125, pp. 153-177).
23 Nom donné à des associations inter-obédientielles, qui regroupent des francs-maçons exerçant une même profession.
24 Henri Caillavet a élaboré des projets de loi sur l’IVG (Interruption Volontaire de Grossesse), le divorce par consentement mutuel, l’acharnement thérapeutique, les greffes d’organe ou encore la transsexualité, et participé à la création de la CNIL.
25 Martin, Luis P., (dir.), Les Francs-maçons dans la cité. Les cultures politiques de la Franc-maçonnerie en Europe, XIXe – XXe siècles, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2000.
26 Coignard, Sophie, Un Etat dans l’Etat. Le contre-pouvoir maçonnique, Paris, Albin Michel, 2009.
27 Jean Verdun a mis en évidence cette bipolarité de la démarche maçonnique, allant jusqu’à intituler un chapitre de son ouvrage La Réalité maçonnique « La Franc-maçonnerie, corps spirituel et corps social ».
28 Plantagenet, Edouard, Causeries initiatiques pour le travail en chambre de compagnons, Paris, Dervy, 1992.
29 Mollier, Pierre, La Chevalerie maçonnique : Franc-maçonnerie, imaginaire chevaleresque et légende templière au siècle des Lumières, Paris, Dervy, 2005.
30 Vierne, Simone, Les Mythes de la Franc-maçonnerie, Paris, Véga, 2008, pp. 122-123.
31 Mannheim, Karl, Idéologie et Utopie, Paris, Marcel Rivière, 1956.
32 Le désir d’ordre, en effet, est une constante des organisations utopiennes. En outre, on retrouve encore une fois l’influence de l’alchimie dans la devise maçonnique Ordo ab chao. Les alchimistes, en effet, possédaient une devise assez semblable (Solve et Coagula, qui signifiait que la materia prima dissoute se transformait ensuite en une substance ennoblie et solidifiée), et affirmaient donner naissance à l’Œuvre au Blanc à partir de l’Œuvre au Noir.
33 A ce sujet, voir Beaurepaire, Pierre-Yves, La République universelle des francs-maçons. De Newton à Metternich, Rennes, Ouest-France, 1999.
34 Tel est le cas, par exemple, à la loge Nostra Delta, sise à Salon de Provence.
35 Pozarnik, Alain, A la lumière de l’acacia. Du profane à la maîtrise, Paris, Dervy, 2000, p. 35.
References
Electronic reference
Céline Bryon-Portet, « La Franc-maçonnerie, entre cité céleste et cité terrestre : divisions et équilibrages internes au sujet du théisme, de la religion et des questions sociétales », Amnis [Online], 11 | 2012, Online since 10 September 2012, connection on 10 November 2019. URL : http://journals.openedition.org/amnis/1676 ; DOI : 10.4000/amnis.1676
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Triangulation de la prise de parole et de la gestuelle en loge 14 mars, 2021
Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaireUne étude attentive des rites maçonniques révèle l’omniprésence d’un principe de triangulation à différents niveaux, notamment ceux de la prise de parole, de la gestuelle, mais aussi de la gestion des distances spatiales et des données temporelles.
2Revêtant des fonctions psychologiques, sociales et symboliques, la triangulation maçonnique constitue un véritable modèle de communication. Un tel modèle, dans lequel prime le genre expressif, inscrit les membres de la communauté au-delà des schémas de type interpersonnel et vise un dépassement des contraires, censé opérer un processus de médiation-transformation au sein de l’individu même.
Triangulation de la prise de parole et de la gestuelle en loge
3La loge maçonnique est l’un des rares lieux sociaux où la prise de parole en public soit codifiée de manière aussi rigoureuse et dotée d’une charge symbolique aussi forte. L’une des particularités du rite maçonnique réside dans le fait que toute action des membres de la communauté, tout positionnement des objets dans le temple, est porteur d’information et de sens. Chaque chose est à sa place, chaque discours vient en son temps, et une telle distribution garantit la cohérence d’une totalité harmonieuse. L’ordre, recherché en permanence, ne naît pas du respect de consignes arbitraires. Il est produit par l’agencement savant des divers rouages d’un système global que l’adepte, en tant que pièce constitutive, s’efforce de comprendre et d’intégrer. Même les célébrations religieuses, qui exécutent un rituel strict où les propos, suivant un canevas précis et extrayant des passages du livre sacré, sont accompagnés d’une gestuelle spécifique (signes de croix, etc.), ne vont peut-être pas aussi loin dans la sémantisation et la participation agissante des membres du groupe, dans la mesure où les spectateurs-acteurs se contentent d’en suivre le cours sans pouvoir intervenir individuellement dans son déroulement.
- 1 Dans cette étude, nous nous attacherons principalement à l’analyse du Rite écossais ancien et acce (…)
4Les modes de communication mis en place par le rituel maçonnique1 sont d’une telle singularité qu’ils méritent que l’on s’attarde sur eux. En loge, la communication s’inscrit dans un schéma qui n’a rien de linéaire, comme peut l’être le modèle télégraphique de Claude Shannon, avec sa chaîne Émetteur-Message-Récepteur ; ni même simplement interactif ou circulaire, comme celui établi par les théoriciens de l’École de Palo Alto. Elle suit un schéma triangulaire, et cela à plusieurs niveaux. La première forme de triangulation est relative au discours : en loge, on ne prend pas la parole, on la demande. Et lorsqu’on la demande, on ne s’adresse pas directement au Vénérable Maître dirigeant la loge, qui peut seul l’accorder, mais à l’un des deux intermédiaires que l’on nomme Premier Surveillant et Second Surveillant. Enfin, le Vénérable Maître lui-même accorde la parole en passant également par l’un des deux intercesseurs sus-cités, lequel relaie l’information au requérant. Ce dernier s’exprime alors, et nul ne peut l’interrompre ni même s’adresser à lui, à moins que la teneur de ses propos ne nécessite une censure brutale de la part du Vénérable Maître (tel serait le cas pour des discours véhiculant des idéologies intolérantes, extrémistes ou racistes).
- 2 Pascal Lardellier (2003) distingue entre les « rites d’interaction », qui mobilisent un nombre réd (…)
5Certains pourraient ne voir dans ce procédé qu’un artifice pompeux, participant simplement de la théâtralité du cérémonial. Cependant, les raisons de cette triangulation de la parole sont plus profondes qu’il n’y paraît et dépassent largement le cadre de la dramaturgie. Procédé de médiation, elle a pour objectif d’évacuer toute communication interpersonnelle — forme la plus usuelle dans nos sociétés —, et de tisser un lien collectif en dépassant les échanges d’individu à individu (il n’est pas inutile de rappeler l’efficacité de ce que l’on appelle « l’effet de groupe » en psychosociologie, que les franc-maçons retrouvent à travers l’« Égrégore »). Les rites maçonniques ne relèvent donc pas de cette catégorie de rites que Erving Goffman a baptisés rites « d’interaction », mais bien de rites « sociaux » ou « communautaires », selon la typologie de Pascal Lardellier2. Et si l’on veut bien se souvenir du fait que le terme communication (de communicare), signifie étymologiquement « mettre en commun » et implique les notions de partage, alors le rituel maçonnique atteint probablement l’objectif de toute communication, dans ses formes les plus paroxystiques.
6Le rituel maçonnique apparaît doublement conjonctif. Il l’est d’abord en tant que rituel ainsi que le note Claude Lévi-Strauss :
[…] le rituel est conjonctif, car il institue une union (on peut dire une communion), ou, en tout cas, une relation organique, entre deux groupes (qui se confondent, à la limite, l’un avec le personnage de l’officiant, l’autre avec la collectivité des fidèles), et qui étaient dissociés au départ (1962 : 46-47).
- 3 « La truelle, outil liant par définition », souligne Gilbert Garibal (2004 : 130).
- 4 Sur cette distinction des différents niveaux de communication (contenu / relation), on consultera (…)
- 5 Pour cette analyse du schéma de Claude Shannon, on se reportera à l’ouvrage de Philippe Breton et (…)
7Il l’est ensuite en tant que rituel particulier mettant en place des moyens de liaison internes, redondants avec sa fonction première. L’esprit de convivialité est crucial dans les loges, comme le prouve ce moment privilégié que constituent les « Agapes », mais aussi les nombreux vocables, symboles et métaphores exprimant la fraternité : la « truelle »3, le « ciment », la « corde à nœuds », les « lacs d’amour », la « chaîne d’union », le « compagnon », les « frères » et « sœurs ». Le poète Alphonse de Lamartine, grand admirateur de la res maçonnica, pleinement conscient de son essence fédératrice, déclarait dans un discours prononcé en loge en 1848 : « Vous écartez tout ce qui divise les esprits, vous professez tout ce qui unit les cœurs, vous êtes les fabricateurs de la concorde » (cité par Garibal, 2004 : 23). La franc-maçonnerie remplit une fonction phatique prépondérante, pour reprendre la terminologie que Roman Jakobson applique à la linguistique. Car s’il est vrai qu’elle agit à ce niveau de communication que représente le contenu du message, par la transmission de valeurs, elle œuvre principalement au niveau de la relation4. Là encore, nous nous trouvons fort éloignés du schéma de Claude Shannon, qui tend à réduire le réel à son aspect informationnel, à la notion de réseau et à la quantité d’informations qui circule en son sein5.
- 6 Calendrier maçonnique du Grand Orient de France datant de 1873 partiellement reproduit par Gérard (…)
8La médiation que le rituel maçonnique établit dans le cadre de la prise de parole constitue une véritable discipline à laquelle il convient de se soumettre, et qui contrarie les inclinations naturelles des individus, habitués à parler librement ou à demander l’autorisation de s’exprimer directement à la personne qui dirige un débat. Or, toute discipline vise à transformer, par une action contraignante, une materia prima. Tel est bien le cas de la franc-maçonnerie, qui se définit elle-même comme une institution « philanthropique, philosophique et progressive »6, travaillant au perfectionnement moral et intellectuel de l’humanité et proposant à ses membres un changement de cadre mental, censé s’opérer durant le rituel.
9Ensuite cette médiation, précieux outil de régulation, favorise l’ordre et la pondération, car elle rend impossibles les interventions intempestives, les débats à plusieurs voix où nul ne s’entend, les conflits engendrés par des membres en désaccord ayant l’opportunité de s’adresser les uns aux autres. Le respect d’autrui et la courtoisie sont d’ailleurs inscrits comme autant de devoirs dans un texte fondateur de 1735, faisant office de Constitution pour la maçonnerie française. Ainsi est-il stipulé, au 6e devoir, qu’
[…] aucun Frère n’aura des entretiens secrets et particuliers avec un autre sans une permission expresse du Maître de la Loge, ni rien dire d’indécent ou d’injurieux sous quelque prétexte que ce soit, ni interrompre les Maîtres ou Surveillants, ni aucun Frère parlant au Maître, ni se comporter avec immodestie ou risée (partiellement reproduit par Gayot, 1991 : 62).
10Ce qui fait dire au franc-maçon Gilbert Garibal, docteur en philosophie et psycho-sociologue, que
[...] les frères, du néophite au « vétéran », fréquentent la loge pour communiquer, avec eux-mêmes et les autres. Cette communication fonctionne d’autant mieux que la loge est aussi « communicante ». Autrement dit, qu’elle prend bien soin d’éviter la formation de clans, castes et autres sous-groupes, nuisibles à son unité (2004 : 129).
11La parole maçonnique n’est donc pas, loin s’en faut, un instrument de pouvoir à des fins de manipulation, mais utilise une méthode originale d’accouchement des esprits, assez proche de la maïeutique et de la dialectique socratiques (à la différence près que celles-ci étaient interpersonnelles). En outre, en mettant les locuteurs dans une position d’attente de leur tour de parole, le rituel temporise — au sens étymologique du terme —, c’est-à-dire écarte toute spontanéité et oblige à une certaine maturation de la réflexion. Car comme le souligne Oswald Wirth « les idées se mûrissent par la méditation silencieuse, qui est une conversation avec soi-même. Les opinions raisonnées résultent de débats intimes, qui s’engagent dans le secret de la pensée. Le sage pense beaucoup et parle peu. » (2001 : 122)
12Accordant une importance aussi grande à la communication non-verbale (comme c’est le cas dans la plupart des traditions rituelles, qui font du corps un vecteur majeur de transmission de certaines valeurs), la maçonnerie applique un procédé de triangulation identique au plan de la gestuelle. À ce sujet, il est indispensable d’opérer « une partition entre ce qui relève de la gestuelle d’accompagnement et du message proprement dit », ainsi que le font remarquer Philippe Breton et Serge Proulx. « La gestuelle d’accompagnement est formée par tous ces gestes que nous faisons à l’appui d’une communication », elle est donc bien distincte « du langage des signes », où « c’est le geste qui constitue la communication » (2002 : 63 et 48). Dans ce cas, « la gestuelle se transforme en signes codés et signifiants ». Le rite maçonnique appartient à cette seconde catégorie. Il constitue l’un des rares langages des signes qui ne trouve pas son origine dans une incapacité à produire de l’oralité, comme c’est le cas avec le langage des sourds et des malentendants, par exemple.
- 7 « Le ternaire s’impose à nous dans des domaines très divers parce qu’il réalise l’équilibre entre (…)
13Tandis que l’être humain s’approprie inconsciemment, par un phénomène de mimétisme, l’ensemble des codes corporels qui prévalent au sein de sa culture — ainsi que l’ont révélé des chercheurs en kinésique tels que Ray Birdwhistell (Winkin, 1981 : 61-77) —, et qui trahissent parfois malgré lui son état et ses intentions, le franc-maçon apprend un système de signes qu’il reproduit sciemment et adapte à divers contextes. Lorsqu’il rentre dans le temple, l’apprenti fait trois pas. Les bras, les mains et les pieds du maçon sont disposés en équerre. Les gestes sont précis, calculés, parfaitement maîtrisés. Ils traduisent en outre la médiation, leur modélisation ternaire représentant la réconciliation dialectique du même et de l’autre, la dualité dépassée car augmentée de l’unité7. Seule l’institution militaire s’est peut-être approchée de ce dispositif corporel complexe dans son cérémonial : les positions du garde-à-vous, le salut militaire, les demi-tours, forment d’ailleurs des équerres, ce qui n’a rien de surprenant si l’on considère les relations étroites que l’armée et la franc-maçonnerie ont entretenues à partir du xixe siècle, ainsi que l’a démontré Jean-Luc Quoy-Bodin (1987).
- 8 Affirmation du philosophe allemand Friedrich Nietzsche.
14Là encore, il ne s’agit pas de faire exécuter au maçon une série de contorsions absurdes, mais plutôt de mettre ses membres en conformité avec son esprit. Inversement, on tente de produire un équarrissage de la pensée par la rigueur comportementale que l’on impose à une chair généralement livrée à une certaine liberté. La tension physique qu’engendrent des positions si peu familières à l’homme est en effet propice à l’effort et au travail. Combattant la nonchalance, qui se manifeste par une attitude de relâchement, ce maintien artificiel et peu confortable du corps requiert une attention soutenue, et suscite à son tour la concentration. Il a un effet structurant. Plantagenet ne s’y trompe pas lorsqu’il déclare : « remarquons combien cette marche rituelle est pénible : brutalement coupée par trois arrêts, elle brise notre élan ; à chaque fois elle nous contraint à un nouvel effort pour repartir » (2001 : 161). Au-delà de cette idée, tenace en Occident, selon laquelle « ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort8 » et qui veut que toute souffrance fût revêtue d’un caractère initiatique, selon l’exemple de la passion christique, le formalisme rigide infligé au corps conduit avant tout à un dressage dont nous étudierons ultérieurement la nature et les effets.
15Enfin, force est de constater que la gestuelle extrêmement contraignante prescrite par le rituel recoupe l’aspect fonctionnel que recouvre la triangulation de la parole, aux effets pondérateurs. À propos de la position dite de l’ordre, posture obligatoire et assez inconfortable pour ceux et celles qui s’expriment oralement, Jules Boucher remarque ainsi que « indépendamment de la valeur réelle du signe, il faut remarquer que ce geste, si simple en apparence, empêche tout autre geste et par suite toute véhémence. Combien d’orateurs — profanes — parlent plus encore avec leurs mains qu’avec leur voix ! » (1998 : 323).
Triangulation de l’espace et du temps rituels
- 9 Voir notamment La dimension cachée (1971).
16On sait, depuis les études fort éclairantes menées par Edward T. Hall dans le domaine de la proxémique9, que la gestion de l’espace et les distances qui séparent des individus sont, en elles-mêmes, un acte de communication, mais aussi des données remplies de sens révélant des appartenances culturelles parfois insoupçonnées. La franc-maçonnerie témoigne, si besoin en était encore, de l’importance que revêtent les données spatiales dans l’accomplissement et la compréhension des rôles incombant à chaque communicant dans un contexte particulier.
17En loge, le positionnement des individus dans l’espace du temple définit des fonctions spécifiques : à l’Orient, où se lève la lumière, est situé le Vénérable Maître, à l’Occident crépusculaire est le Couvreur, et ainsi de suite — c’est d’ailleurs l’une des raisons pour laquelle la géométrie tient une place cruciale dans la voie maçonnique. De la même manière, le positionnement des objets de culte ne doit rien au hasard. Il est toujours investi d’une signification, il est signifiant par lui-même. Il va sans dire que cet ancrage territorial du système sémantique à travers une localisation pertinente des personnes et des choses permet de rendre très concrets les messages symboliques que véhicule la cérémonie (« ici, tout est symbole », déclare-t-on à l’apprenti lors de son initiation). C’est ainsi que la modélisation ternaire de la parole, médiatisée entre le requérant et le Vénérable Maître par une tierce personne (Premier ou Second Surveillant), s’enracine également dans une triangulation spatiale, ce qui aboutit à une répétition du schéma ternaire. En effet, celui qui sollicite la parole pour le requérant auprès du Vénérable Maître est toujours le Surveillant qui se trouve sur les colonnes opposées, face au requérant. Ce croisement des prises de parole forme donc un triangle visible, un triangle humain qui incarne géographiquement la dynamique du chiffre trois.
18Nous reproduisons ci-dessous le schéma en vigueur au Rite écossais (au Rite Français, la position des colonnes et des surveillants est inversée par rapport au Rite écossais, mais la triangulation spatiale demeure), qui montre bien le croisement systématique de la parole et la triangulation spatiale qui en résulte :
19Il est à noter, cependant, qu’à l’inverse de la plupart des rites (notamment des rites politiques), où se « jouent des rapports de domination et de sujétion, hypostasiés à ce ballet qui définit les fonctions, exprime les allégeances, confirme les rangs et les statuts » (Lardellier, 2003 : 95), le rite maçonnique, créateur de lien social, ne fait guère reposer les rôles assignés aux adeptes sur la situation professionnelle et financière que chacun occupe sur l’échelle sociale, dans le monde profane. C’est ainsi qu’un ouvrier d’usine accèdera progressivement au grade de Maître, tandis que le PDG d’une grande entreprise ouvrira sa voie maçonnique au grade d’Apprenti, comme tout un chacun, avec les corvées qui accompagnent cette première étape (installation du Temple, préparation des Agapes et service durant le repas, etc.), qui se veut un apprentissage de la patience et de l’humilité, une familiarisation, aussi, avec une dimension symbolique souvent inconnue du néophyte.
20D’autre part, les fonctions de chacun ne sont guère figées, puisque les membres du groupe changent de rôle au fil des ans. Or, ce principe d’égalité et de circularité est, encore une fois, spatialement et communicationnellement inscrit. Au Rite Écossais Ancien et Accepté, par exemple, le Vénérable Maître, après avoir occupé des fonctions centrales à l’Orient durant quelques années, se voit-il relégué à l’Occident, près du Parvis. Outre que ce positionnement diamétralement opposé lui confère un angle de vision — et par conséquent un angle de compréhension — différent sur le Temple, il traduit le passage d’une position supérieure à une position inférieure. En devenant Couvreur, il quitte la place dominante et ordonnatrice pour une place d’exécution, en contre-bas. Il en va de même pour les autres officiers de la loge (citons l’interversion des Premier et Second Surveillants, notamment).
- 10 Maria Deraisme, par exemple, avec la fondation du Droit Humain, en 1893. Avant cela, dès le xviiie(…)
21On ne s’étonnera donc guère que le niveau figure parmi les outils et symboles privilégiés de l’institution, ni même que le principe d’égalité présidant aux travaux maçonniques ait pu contribuer à la diffusion des idées émancipatrices jadis émises par les philosophes des Lumières. Sans verser dans la théorie du complot ou du projet intentionnel que certains, tel l’abbé Barruel (1803), prêtent à la franc-maçonnerie, il semble avéré qu’en favorisant le brassage social (puis la mixité, à partir du xixe siècle, dans quelques obédiences10), les loges précipitèrent la chute d’un régime inégalitaire. « La Franc-Maçonnerie vint ainsi offrir un excellent terrain de culture au ferment des idées révolutionnaires », souligne Oswald Wirth (2001 : 54). Les idées progressistes qu’elle véhiculait étaient d’ailleurs jugées subversives et dangereuses, tant par le pouvoir politique que par le pouvoir ecclésiastique. On peut aisément le comprendre à la lecture de certains textes du dix-huitième siècle : « Ramener les hommes à leur égalité primitive par le retranchement des distinctions que la naissance, le rang, les emplois ont apporté parmi nous. Tout maçon en loge est gentilhomme » (Le sceau rompu, 1745 : 22 ; cité par Gayot, 1991 : 125). Tout semble concourir à faire de l’espace maçonnique un espace sociopète, selon le mot de Edward T. Hall, un lieu de partage, de cohésion et d’intégration.
22Comme l’espace de la loge, le temps maçonnique se trouve lui aussi soumis au principe de triangulation. Il serait fastidieux et surtout ambitieux de vouloir dresser une liste exhaustive de ce temps triangulaire, tant celui-ci est riche. Quelques exemples significatifs suffiront néanmoins à en rendre compte. Les maçons, tout d’abord, travaillent entre les heures symboliques de « Midi » et « Minuit » (périodes elles-mêmes transitoires puisqu’elles marquent tout à la fois l’apogée du jour et de la nuit, et leur déclin imminent), à l’âge non moins symbolique et transitionnel de « trois ans ». Parmi les fêtes maçonniques, mentionnons également les fêtes de la Saint-Jean d’hiver et de la Saint-Jean d’été, correspondant aux deux équinoxes. Comme les heures de midi et de minuit, les équinoxes traduisent un point d’équilibre précaire et transitionnel, l’apogée d’un état et par conséquent sa proche déchéance, selon la loi de la dialectique des contraires.
23Autre expression de cette triangulation, lors de l’ouverture et de la fermeture des travaux, le Vénérable Maître, assisté des Premier et Second Surveillants, procède à l’allumage puis à l’extinction des feux. Au début de la tenue, chacun d’entre eux se tient devant l’un des trois piliers nommés Sagesse, Force et Beauté, afin d’allumer des bougies. Faisant le tour dans le sens des aiguilles d’une montre, ils échangent leur place et chaque officier se retrouve ainsi, l’instant d’après, face au pilier devant lequel était positionné son voisin de gauche. Ce mouvement circulaire en trois étapes autour des trois piliers forme une roue spatio-temporelle dynamique, proche de la svastika indienne. Certains maçons voient d’ailleurs dans ce moment cérémoniel une représentation de la création du monde (Doignon, 2005), un espace-temps zéro à partir duquel apparaissent progressivement l’espace et le temps sacrés. Cette interprétation semble corroborée par l’allumage des bougies qui provoque le passage des ténèbres à la lumière, ainsi qu’il est fait dans la Genèse où les mots fiat lux précèdent l’apparition des différents éléments du monde ; mais également par la signification attribuée aux trois piliers : la Sagesse « conçoit », la Force « exécute », et la Beauté « orne ». Il s’agit bien d’un acte de création primordial, similaire à celui du « Grand architecte de l’univers », et se déroulant en trois phases, à savoir conception, réalisation puis contemplation esthétique du produit fini.
24L’omniprésence de la figure deltaïque, suggérant, selon certains maçons, un triangle temporel, semble confirmer ces vues. Ainsi Jean-Marie Ragon perçoit-il les points de cette figure géométrique comme évoquant le Passé, le Présent et l’Avenir (1853 : 369). Le sens de cette triade correspond parfaitement à la philosophie maçonnique, ancrée dans la tradition et tournée vers l’avenir d’un monde meilleur via une tentative de perfectionnement au quotidien. Les franc-maçons se sont d’ailleurs souvent inspirés, dans leurs réflexions, du célèbre tableau de Gauguin intitulé D’où venons-nous ?, Qui sommes-nous ?, Où allons-nous ?, preuve que leur voie s’interroge sur l’identité et le devenir de l’homme à travers les trois temporalités classiques que nous reconnaissons. Car comme toute tradition, la franc-maçonnerie opère à un niveau à la fois diachronique et synchronique. Soucieuse de transmettre des valeurs régulatrices, elle agit sur l’axe vertical du passé, où la mémoire relie la chaîne générationnelle à un temps originel, mais également sur l’axe horizontal de l’espace communicationnel qui met les vivants en présence (Debray, 1997). Nous pouvons résumer ainsi ce mouvement maçonnique, qui se nourrit au présent de la sagesse des anciens pour tenter de construire une société idéale.
- 11 Il semble utile de rappeler que le terme sacré, issu du latin sacer, évoque ce qui est séparé (sép (…)
25Ajoutons enfin que le temps du rituel est rythmé par trois coups de maillet, répétés trois fois, par la triade Vénérable — Premier Surveillant — Second Surveillant, au début et à la fin de la tenue. Ce rythme ternaire ouvre et ferme l’accès au temps sacré, de même que les pas d’entrée sur le pavé mosaïque, puis la sortie hors du temple, équivalent à un va-et-vient entre l’espace sacré intra-muros et l’espace profane à laquelle les adeptes sont rendus dès la fin de la cérémonie rituelle11. Lorsque commencent les travaux, le Vénérable Maître n’affirme-t-il pas « nous ne sommes plus dans le monde profane » ? La figure du Vénérable est semblable à celle d’un chef d’orchestre (métaphore chère aux chercheurs de Palo Alto) qui, par ses coups de maillet injonctifs, introduit des ruptures rythmiques dans le temps mais aussi dans l’espace communicationnels de la cérémonie (silence/possibilité de prise de parole, immobilisme/gesticulation, position debout/assise), donnant le tempo d’une partition connue. Elle crée en outre une « synchronie interactionnelle », pour reprendre une expression de William Condon et de Edward T. Hall, chaque participant agissant en même temps que ses confrères et de manière identique à eux. Et si, pour les théoriciens modernes, toute communication doit être envisagée comme un système, dans lequel les multiples éléments interagissent les uns par rapport aux autres, le rituel maçonnique possède cette particularité rare qu’il est un système intentionnel et pré-régulé, qui cherche à optimiser au maximum ce caractère systémique et interactionnel. Ainsi en est-il de la « triple batterie » et de « l’acclamation », à l’annonce desquelles tous les maçons frappent rapidement trois fois dans leurs mains, et répètent ces gestes trois fois, en criant « Liberté », « Égalité », « Fraternité ».
- 12 Sur le temps, voir l’ouvrage d’Edward T. Hall, La danse de la vie. Temps culturel, temps vécu (198 (…)
26Les penseurs de ce que l’on a appelé « la nouvelle communication », en effet, ont montré que l’espace et le temps12, au-delà de leur aspect physique, mathématiquement mesurable, forment des cadres culturels organisés et vécus de manière différente d’un continent à un autre, engendrant ainsi des modes de communication spécifiques. Mais de telles constructions, relatives puisque variant selon les époques et les lieux, sont généralement le fruit d’une élaboration longue et inconsciente, déterminée par l’histoire particulière des peuples et les paramètres environnementaux dans lesquels ils s’insèrent. Les individus répondent ainsi à des codes et règles tacites sans avoir conscience d’évoluer dans une dimension artificielle. Or, la maçonnerie offre l’exemple d’un programme culturel conscient et volontaire, d’une composition sémantique qui s’affiche comme telle, et qui a cependant — là est le paradoxe — une prétention universelle (les Ordres internationaux, faisant fi des divers particularismes locaux, appliquent le même rituel aux quatre coins de la planète), comme si sa valeur atteignait quelque absolu en saisissant l’essence de l’homme, le point nodal de ses aspirations.
Vers une triangulation de l’individu : pure métaphore ou symbolisme opératoire ?
27La franc-maçonnerie introduit l’homme dans l’« empire des signes », pour reprendre l’expression que Roland Barthes a forgée à propos de la culture japonaise. Signes corporels et symboles divers jalonnent le laborieux parcours de l’adepte. Mais au stade de ce constat, il convient de s’interroger sur la fonction que remplissent ces signes : simple jeu d’analogies au sein duquel l’individu se meut plaisamment ; ou véritable projet transmutatoire engageant l’être lui-même, faisant de lui l’objet d’un changement radical ? Déchiffrage d’un langage codé ou règles opératives modifiant l’humain en profondeur ?
28La réponse est donnée dès le grade d’apprenti, puisque l’on exhorte le jeune initié à dégrossir la pierre brute, qui n’est autre que lui-même. Oswald Wirth (2001) rappelle, en guise d’introduction au premier tome de son ouvrage : « De la création de l’homme par lui-même naît l’homme perfectionné, le Fils de l’Homme ». D’où l’importance accordée au corps, matière imparfaite qu’il faut patiemment ennoblir pour que s’ennoblisse aussi l’esprit, et dont la métanoïa ou conversion débute lors de l’initiation, ainsi que le relève Bruno Etienne (2002). Michel Foucault a fort bien montré que le dressage des esprits était indissociable du dressage des corps, ce que les institutions dites « totales » ont également compris et exploitent avec brio (1993 : 31-31). L’interaction corps-esprit/esprit-corps est reconnue depuis fort longtemps, puisqu’en des siècles reculés l’ascèse corporelle, au sein de l’institution religieuse et de certaines sociétés mystiques, avait pour but de purifier l’âme. Blaise Pascal ne déclarait pas autre chose lorsqu’il affirmait « qu’il faut s’agenouiller et faire les gestes de la foi pour croire »…
29En revanche, il existe une différence notable entre le dressage pratiqué par les institutions totales, au rang desquelles on peut ranger l’armée, et celui auquel procède l’institution maçonnique. Car le premier développe un conditionnement de type pavlovien, privatif de toute liberté de pensée, d’expression et de comportement, tandis que le second, anti-dogmatique et émancipateur, a pour effet de libérer le sujet de ses préjugés (le maçon est dit « libre et de bonnes mœurs »). Le rituel maçonnique ne peut donc être bénéfique que s’il est rigoureux et que son sens est parfaitement compris. « Tout symbole, tout rite — mise en action des symboles — perdent leur valeur, et ne sont plus que des “simagrées” dès qu’ils ne sont plus exactement respectés comme ils devraient l’être », affirme avec raison Jules Boucher. Puis de renchérir : « Et le plus souvent ils ne sont pas respectés, parce qu’ils ne sont pas compris » (1998 : 323).
- 13 Selon Philippe Breton et Serge Proulx (2002), la communication se décline en trois modes : mode in (…)
- 14 « Le geste est le signe extérieur de cette volition », déclare Jules Boucher (1998 : 323).
- 15 Mircea Eliade affirme que « l’initiation correspond à une mutation ontologique du régime existenti (…)
30Le corps est bien plus qu’un vecteur de communication à visée informative. Favorisant le mode expressif13, il est le creuset matriciel dans lequel s’accomplissent de véritables transformations mentales14. Au-delà du fait qu’il est un langage dont il faut décoder le sens pour en saisir la pleine valeur, le dispositif matériel et physique du rituel maçonnique possède un caractère performatif, qui se révèle à son tour hautement signifiant par les changements cognitifs, sentimentaux et comportementaux qu’il introduit. On rejoint là la conviction de la philosophe Hannah Arendt, pour laquelle « être et paraître coexistent », et celle de nombreux penseurs avançant l’hypothèse que toute transformation ontologique s’enracine nécessairement dans une transformation phénoménale15. Ainsi pourrait-on appliquer, en l’inversant, l’approche de John Austin : « Quand faire, c’est dire ». Des bâtisseurs de cathédrales et maçons francs opératifs, en effet, qui en furent la source d’inspiration principale, la maçonnerie spéculative a conservé une certaine concrétude à travers la mise en geste des mots et la mise en acte des idées. Pascal Lardellier, évoquant le rôle de ce « corps, puissamment sémantique », souligne avec justesse que
[...] le rite exige toujours de ses participants une démonstration physique, « une création de présence » (E. Schieffelin). Ne pouvant en aucun cas être vécu de manière abstraite, in absentiae, il impose une incarnation, sans laquelle aucune action symbolique ne saurait être atteinte. Car pour être crédible, ce rite se doit d’être vécu, investi de l’intérieur (2003 : 94).
31En outre, l’effet cathartique produit par la mise en scène des corps — effet identique à celui que revêtait la tragédie selon Aristote — ne doit pas être négligé. L’élève de Platon évoquait avec raison « cette imitation qui est faite par des personnages en action et non au moyen du récit », et qui « opère la purgation propre à pareilles émotions » (1952 : 1449b). À son tour, Jacqueline de Romilly a mis en évidence la fonction psychologique et sociale de la tragédie grecque, qui permettait d’extérioriser la violence via un phénomène d’identification du spectateur à l’acteur-personnage, et de l’évacuer ainsi hors des murs de la cité. Le rituel maçonnique accomplit une purification assez semblable grâce au spectacle visuel qu’il livre. Il va même plus loin que la tragédie si l’on considère que tous les spectateurs sont également des acteurs de la pièce qui se joue, le geste se joignant à l’observation.
32Les gestes que l’apprenti exécute sont d’ailleurs très évocateurs : le bras et la main disposés en équerre au dessous de la gorge sont destinées à juguler les passions provenant du cœur et à les empêcher de troubler l’âme, ainsi que l’explique le rituel au premier degré du Rite écossais ancien et accepté. Ce signe dit « guttural » devient un signe « pectoral » au grade de compagnon, la main se situant alors au niveau du cœur.
Franc-maçon formé par les outils de sa loge (gravure anglaise du XVIIIe siècle, Bibliothèque nationale, Paris)
33L’objectif opératif est si prépondérant que certains, tel Jules Boucher, font remarquer que ces positions correspondent à des chakras et mobilisent ainsi les centres d’énergie de l’être. Par ailleurs, l’idée d’une thérapie de groupe fondée sur une approche systémique, c’est-à-dire sur une régulation des relations que les éléments du groupe entretiennent les uns avec les autres, est assez proche, même si elle diffère dans sa mise en œuvre, des thérapies familiales de Don D. Jackson et de Paul Watzlawick et plus largement du Mental Research Institute, fondées sur la notion d’homéostasie.
- 16 Les devoirs enjoints aux Maçons libres, texte partiellement reproduit par Gérard Gayot (1991 : 61)
34L’aspect physique est tellement essentiel qu’un maçon doit être « un homme exempt de défaut du Corps, qui peut le rendre incapable d’apprendre l’Art »16, de l’avis de certains adeptes. Il ne s’agit bien évidemment pas de discrimination, mais de la conviction que les lumières de la maçonnerie demeureraient à jamais inaccessibles à celui dont un corps infirme ne permettrait pas l’accomplissement du rituel, la spécificité de l’initiation étant par ailleurs le vécu d’une progression extérieur/intérieur. On voit là tout ce qui peut séparer la tradition maçonnique de certaines mystiques ou traditions ésotériques proposant une élévation spirituelle en s’adressant directement et uniquement à l’esprit. Passer du contact sensible des choses matérielles à leur conceptualisation, de la conceptualisation à l’imagination, de l’imagination à la monstration, de la monstration à l’intériorisation, et de cette dernière à une appréhension de nature intuitive : tel est l’un des objectifs de la voie maçonnique. Mais à l’instar de la tradition alchimique, cette dernière s’appuie toujours, initialement, sur un support physique, un substrat matériel, destiné à servir de déclencheur transmutatoire.
- 17 La physique quantique postule, par exemple, qu’un chat peut être à la fois mort et vif. Elle démon (…)
35Dans l’accession à un mode de connaissance intuitif, le maniement des symboles joue un rôle déterminant. Signifiant moins abstrait, moins arbitraire surtout, que ne le sont les mots, formés de lettres et de sons conventionnels selon la linguistique saussurienne, le symbole possède en effet une sorte de lien naturel avec le signifié, puisqu’il procède par substitutions et transferts sémantiques. Il tient lieu de jonction entre les réalités strictement matérielles et les concepts purement intelligibles, les sens et la raison (l’idée d’une réunion de deux parties séparées est d’ailleurs présente dans l’étymologie du mot symbole, « sumbolon », et du verbe grec « sumballein » qui signifie « mettre ensemble »). S’il est un vecteur d’information et de communication privilégié, c’est précisément parce qu’il est doté de cette nature bicéphale qui introduit l’adepte dans un entre-deux. Il crée une voie médiane, ou troisième voie, pour ceux qui refusent le réductionnisme du matérialisme et de l’idéalisme. Procédant par triangulation, évitant le piège du principe de non-contradiction d’Aristote, que la physique quantique a récemment mis à mal17, il ouvre des perspectives nouvelles. En outre, la plupart des symboles prétendent à l’universalité. Empruntant au registre de Jung, on peut dire que ceux-ci possèdent une dimension archétypale qui les rend accessibles à chacun.
- 18 Sur cette distinction, voir Bruno Étienne (2002 : 21-22).
- 19 Voir également François-André Isambert (1979).
36L’efficacité du symbole — notamment du symbole de condensation, réalisant une propagation affective et énergétique inconsciente, par opposition au symbole de référence18 —, a été relevée par nombre de chercheurs. Pascal Lardellier note ainsi : « Et le contexte rituel dans son ensemble va aller jusqu’à générer des états modifiés de conscience, la réalité devenant symbolique, et le symbolique performatif, puisque capable de transformer cette réalité » (2003 : 92)19. Les alchimistes, qui œuvraient également à partir d’une voie initiatique, hermétique et herméneutique, répétaient inlassablement les mêmes gestes dans les mêmes alambics, assortis des mêmes prières, paroles et symboles, ce qui était censé produire un éveil de la conscience et une transformation corporelle, conjointement à une transmutation de la matière hermétiquement scellée, sujet et objet ne faisant plus qu’un.
37En conclusion, on peut dire que le rituel maçonnique repose sur l’intuition que l’homme est une vaste structure de relations externes et internes, dont le perfectionnement dépend d’une alchimie communicationnelle à plusieurs niveaux. Proposant un modèle interactionniste global, fondé non seulement sur le « dire », mais aussi sur le « voir », le « faire » et le « ressentir », il utilise le principe de triangulation de la prise de parole, de la gestuelle ainsi que de la gestion spatio-temporelle, qui vise à produire une dialectique visible-invisible, transcendance-immanence, théorie-pratique. In fine, celle-ci doit engendrer une triangulation de l’agent lui-même (du type soufre-sel-mercure, soit esprit-âme-corps), c’est-à-dire une transmutation de l’individu par la réconciliation des contraires qu’opère le modèle ternaire, prélude à l’unification finale de l’être. La philosophie maçonnique, avec son approche praxéologique, semble bien faire partie de ces systèmes d’« idées » qui « deviennent des forces matérielles », selon les mots de Régis Debray (1994 : 22). Cette thèse médiologique se trouve d’ailleurs énoncée près d’un siècle auparavant et dans des termes similaires par le maçon Edouard Plantagenet (1992 : 142), lorsque ce dernier explique que « l’idée froide », purement abstraite, entre en contact avec les sentiments fécondants durant le rituel et « se transforme soudainement en idée-force en s’intégrant dans notre personnalité ». Loin de se cantonner au plan individuel, cette transformation du maçon vise à transformer à son tour l’ensemble de la collectivité maçonnique et même de la société profane, étant entendu que le perfectionnement des parties constitutives d’un groupe participe également du perfectionnent de la structure globale.
Bibliographie
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Notes
Les obédiences maçonniques sont des « Ordres ». L’obédience mixte internationale « Le Droit Humain » a d’ailleurs fait de Ordo ab Chaos sa devise. Rappelons, enfin, que les franc-maçons se mettent « à l’ordre », l’ordre étant une position particulière constitutive du rituel.
1 Dans cette étude, nous nous attacherons principalement à l’analyse du Rite écossais ancien et accepté.
2 Pascal Lardellier (2003) distingue entre les « rites d’interaction », qui mobilisent un nombre réduit de personnes (deux à cinq), et les « rites sociaux ou communautaires ».
3 « La truelle, outil liant par définition », souligne Gilbert Garibal (2004 : 130).
4 Sur cette distinction des différents niveaux de communication (contenu / relation), on consultera avec profit l’ouvrage de Paul Watzlawick, Janet Helmick Beavin et Don D. Jackson (1976).
5 Pour cette analyse du schéma de Claude Shannon, on se reportera à l’ouvrage de Philippe Breton et Serge Proulx (2002 : 130-131).
6 Calendrier maçonnique du Grand Orient de France datant de 1873 partiellement reproduit par Gérard Gayot (1991 :111).
7 « Le ternaire s’impose à nous dans des domaines très divers parce qu’il réalise l’équilibre entre deux forces opposées : l’actif et le passif », affirme ainsi Jules Boucher (1998 : 92).
8 Affirmation du philosophe allemand Friedrich Nietzsche.
9 Voir notamment La dimension cachée (1971).
10 Maria Deraisme, par exemple, avec la fondation du Droit Humain, en 1893. Avant cela, dès le xviiie siècle, furent créées des « loges d’adoption » où la présence des femmes était attestée. Aujourd’hui, seules quelques loges encore attachées aux origines ne reconnaissent pas la mixité (la Grande Loge Nationale Française, notamment).
11 Il semble utile de rappeler que le terme sacré, issu du latin sacer, évoque ce qui est séparé (séparé précisément du monde profane, terme provenant de profanum, qui signifie « ce qui est devant le temple », à l’extérieur de l’enceinte sacrée).
12 Sur le temps, voir l’ouvrage d’Edward T. Hall, La danse de la vie. Temps culturel, temps vécu (1984).
13 Selon Philippe Breton et Serge Proulx (2002), la communication se décline en trois modes : mode informatif, mode argumentatif et mode expressif. Ce dernier mode est celui qui fait la part belle à l’imagination, à la création, au partage des sentiments.
14 « Le geste est le signe extérieur de cette volition », déclare Jules Boucher (1998 : 323).
15 Mircea Eliade affirme que « l’initiation correspond à une mutation ontologique du régime existentiel » (1992 : 12).
16 Les devoirs enjoints aux Maçons libres, texte partiellement reproduit par Gérard Gayot (1991 : 61).
17 La physique quantique postule, par exemple, qu’un chat peut être à la fois mort et vif. Elle démontre également que la lumière peut être considérée comme phénomène ondulatoire et phénomène corpusculaire, selon les instruments de mesure que l’on utilise.
18 Sur cette distinction, voir Bruno Étienne (2002 : 21-22).
19 Voir également François-André Isambert (1979).
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Titre | Franc-maçon formé par les outils de sa loge (gravure anglaise du XVIIIe siècle, Bibliothèque nationale, Paris) |
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Pour citer cet article
Référence papier
Céline Bryon-Portet, « Le principe de triangulation dans les rites maçonniques », Communication, Vol. 27/1 | 2009, 259-277.
Référence électronique
Céline Bryon-Portet, « Le principe de triangulation dans les rites maçonniques », Communication [En ligne], Vol. 27/1 | 2009, mis en ligne le 05 juin 2013, consulté le 30 septembre 2019. URL : http://journals.openedition.org/communication/1353 ; DOI : 10.4000/communication.1353
Cet article est cité par
- Bryon-Portet, Céline. (2011) La tension au coeur de la recherche anthropologique. Anthropologie et Sociétés, 35. DOI: 10.7202/1007863ar
Auteur
Céline Bryon-Portet
Céline Bryon-Portet est maître de conférences en sciences de l’information et de la communication, Directrice de la communication à l’ENSIACET-INP de Toulouse (École Nationale Supérieure des Ingénieurs en Arts Chimiques et Technologiques – Institut National Polytechnique) et chercheure associée à l’unité mixte de recherche « États Sociétés Idéologies Défense » (ESID) de l’Université Paul Valéry, Montpellier3. Courriel : soline33@yahoo.fr
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