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La Poésie en Franc-Maçonnerie 16 mars, 2023

Posté par hiram3330 dans : Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

La Poésie en Franc-Maçonnerie

cercle-silence

La rencontre d’un mot ou d’une idée est toujours essentielle dans un poème ou une planche. Ils sortent soudain de l’anonymat du langage « courant » pour embraser le vocabulaire et donnent à vivre au poète ou au Maçon l’expérience saisissante de « marcher à son pas » dans le temps subtil de l’inspiration, loin du temps linéaire des discours sans relief du quotidien.

On entre ainsi en Poésie comme en Maçonnerie par des mots d’esprit qui jaillissent en nous de sources profondes, gonflent le flot d’autres mots et idées jusqu’aux grands Deltas des Loges. Je vis personnellement comme des rencontres ces inspirations, jusqu’à me souvenir souvent des moments où elles surgissent dans mon imaginaire, tel « Etre Ici et Maintenant » traduisant l’état d’esprit de ceux et celles qui travaillent sur eux-mêmes pour sortir de la douce errance de la pensée et s’ancrer dans le présent, les sens et le mental grands ouverts à ce qu’ils perçoivent dans l’immédiat.

Avec ce poème, je découvrais la légèreté des vers octosyllabiques et les compositions par multiples de quatre vers, particulièrement adaptés aux poèmes-chansons et à l’écriture symbolique. Le nombre « quatre » symbolisant la stabilité matérielle, et le « huit » la totalité et la cohérence de la création en mouvement, les compositions artistiques qui portent leur marque gagnent en équilibre et en régularité, et peuvent illustrer pour des êtres en quête de sens un projet de vie intérieure, concentrant en quelques verbes :

être, rechercher, voir, savoir, une spiritualité en devenir et en action. « Se voir voyant sans être sage » s’inspire aussi des célèbres mots d’Anderson « Ni athée stupide, ni libertin irreligieux », extraits de la Constitution de 1723, charte de la Franc-Maçonnerie moderne, pratiquant la « double dénégation », ou l’art de conjuguer des formules contradictoires.

Or des travaux en sciences cognitives tendent à démontrer qu’ils formulent un modèle de pensée et de la cognition centré sur la fuite du déplaisir, renouvelant les racines émotionnelles premières de l’acte de connaissance, au fondement de l’initiation maçonnique.

La poésie en Maçonnerie embrasse un champ très large d’expressions, exaltant souvent la chaleur des échanges fraternels et de la vie en Loge, et donnant surtout à penser « en liberté », et comme le soleil et la lune à l’Orient des Loges, à rayonner et « réfléchir » les mots et les idées éclairant les consciences et les cœurs.

Chacun peut se projeter sur les quelques mots mis en forme dans un poème, s’y « réfléchir » sans effort et dans ce cadre où tout est mesure se remettre soi-même « en forme ». Dans une société où l’apparence et le paraître sont reine et roi, un poème partagé en fraternité touche autant l’être que le paraître, autant l’esprit que le corps, et les sourires qui fleurissent ici ou là dans l’assemblée disent en silence combien les cœurs s’en réjouissent.

Le poète Maçon est aux premières « loges » de la pratique du symbolisme et de l’analogie entre une idée abstraite et l’image chargée de l’exprimer, et s’inspire de la démarche des poètes symbolistes pour qui le monde ne saurait se limiter à une apparence concrète réductible à la connaissance rationnelle. Il est un mystère à déchiffrer dans les correspondances qui frappent d’inanité le cloisonnement des sens, car les sons, les couleurs, les visions participent d’une même intuition qui fait du poète une sorte de mage.

Le poète symboliste oscille ainsi entre des formes capables à la fois d’évoquer une réalité supérieure et d’inviter son lecteur à un véritable déchiffrement, mettant en œuvre par l’écriture la transcription du sens et la transmission, au fondement de l’initiation maçonnique.

L’écriture elle-même est initiatique, le poète semblant répondre « régulièrement » à la question d’un Frère : « Allez-vous plus loin ? » pour construire son poème, tout en apprenant de lui-même à savoir par lui-même « jusqu’où ne pas aller trop loin ».

La Maçonnerie traduit pareillement ces deux voies complémentaires d’accès à la connaissance et à la conscience par la structure en degrés des Rites, en particulier du Rite Ecossais Ancien et Accepté, où les trois premiers degrés sont dédiés aux Loges dites « symboliques », et les degrés ultérieurs à des Loges dites de Perfection, où montent en charge les Frères et les Sœurs prêts à élargir par eux-mêmes, dans un esprit de responsabilité, le cercle intérieur de leur accomplissement spirituel. Baudelaire, initiateur de l’école symboliste, a illustré magistralement ces deux cheminements par deux sonnets : « Correspondances » et « La Vie Antérieure ».

En méditant sur la Nature dans « Correspondances », écrit en 1857, Baudelaire ouvre une nouvelle voie de connaissance combinant la théorie et la pratique tout en utilisant habilement la structure du sonnet, poème composé de deux quatrains et de deux tercets, le temps de la méditation théorique des quatrains précédant le temps pratique de l’expérimentation des tercets.

Le premier quatrain est bâti sur la métaphore du temple et de la forêt, où alternent l’ombre et la lumière comme dans les temples maçonniques où la sensibilité aux mystères des Apprentis s’éveille peu à peu sous le regard bienveillant de Frères et Sœurs plus « éveillés ».

Dans le second quatrain, le poète établit des correspondances entre la vue, l’odorat et l’ouïe, comme pourrait le faire le Compagnon, pour non seulement écouter mais entendre les « confuses paroles » évoquées dans la première strophe, dont le mystère se laisse seulement approcher et non contempler.

Dans les deux tercets s’établissent des analogies de sens et des équivalences entre la mesure sensible et l’ordre psychologique ou moral, le Maître en fixant les limites tout en risquant la démesure.

Dans « La Vie Antérieure », écrit en 1857 et extrait aussi du recueil « Les Fleurs du Mal », un exotisme exacerbé amplifie le sentiment de perfection liée à l’agencement symétrique des éléments du décor.

Mais pour tendre vers l’ordre et l’harmonie, le poète et le Maçon doivent passer par l’état d’âme chaotique du « spleen », mot d’origine anglaise désignant un état mélancolique sans cause définie. Le secret préservé de la vie des Loges au travail se convertit dans les degrés dits de Perfection en un secret qui « fait languir ».

On entre dans le « vif du sujet », dans l’espace et le temps de l’Artiste et du Maçon à l’œuvre, et le poète dit « je », « j’ai longtemps habité », « j’ai vécu », s’impliquant entièrement dans l’aventure intérieure de sa propre re-connaissance.

La concorde parfaite des éléments de leur re-création n’est possible que s’ils respectent un bon équilibre entre la clarté et l’obscurité, les phases de lumière et d’ombre, de félicité et de doute qui, bien que foncièrement différentes, se complètent.

La parité « régulière » en noir et blanc fait place à des contrastes saisissants de couleurs et le travail prend une autre dimension dans l’accomplissement d’une œuvre.

Le plus ancien manuscrit maçonnique connu, le poème Régius daté de 1390, compte 794 vers octosyllabes et découle sans doute de la transmission orale d’une réglementation coutumière de Métier, assurant ainsi à la fois la transcription et la transmission des « Old Charges », les Anciens Devoirs. Ces « Old Charges », opératives et anglaises, servaient une fois par an lors de l’assemblée annuelle pour recevoir les nouveaux Apprentis et Compagnons.

Destiné aux bâtisseurs opératifs du Moyen-âge, le Régius présente une histoire, ou plutôt une légende de l’art de la construction émanant du Métier lui-même. Sans être réellement de la poésie au sens romantique du terme, le texte du Régius est assez cadencé pour être retenu en mémoire, et être ensuite récité facilement, la cadence, l’assonance et l’allitération, c’est à dire le rythme dans la répétition des sons de voyelles et de consonnes, facilitant cet apprentissage.

Comme les textes destinés à être retenus et transmis, il utilise des phrases sans verbe et de nombreuses répétitions, une construction dite « archaïque » renvoyant à un passé indéterminé et confirmant l’autorité et la sagesse des temps anciens par un « éloge des sept arts « libéraux ».

Les sept arts libéraux désignent les disciplines intellectuelles fondamentales dont la connaissance depuis l’Antiquité hellénistique et romaine était réputée indispensable à l’acquisition de la haute culture. Ils se divisent en deux degrés : le Trivium qui concerne le « pouvoir de la langue » et se divise en Grammaire, Dialectique et Rhétorique, et le Quadrivium qui se rapporte au « pouvoir des nombres » et se compose de l’Arithmétique, de la Musique, de la Géométrie et de l’Astronomie. Loin d’être obsolètes, les arts libéraux restent actuels et indispensables à la progression initiatique et ne peuvent être remplacés par aucune modernité ni virtualité numérique. Ils font partie du corpus que doit connaître le Compagnon, dont le cinquième art, la Géométrie, est aussi le premier dans le Métier.

La Géométrie crée le lien entre opératif et spéculatif, entre la matière et l’esprit. Première porte d’accès à la métaphysique pour un bâtisseur du moyen-âge, la Géométrie exhale et libère le cœur de la matière. 

La Rhétorique contribue à préparer cette libération qui s’accomplit dans les proportions harmonieuses du Temple. L’harmonie des formes fait écho aux harmonies musicales et à la sonorité du lieu sacré.

« Le poème, cette hésitation prolongée entre le son et le sens » (Paul Valery, 1871-1945) darde « à fleuret moucheté » toutes les attentions, tous ces reflets du cœur et de l’âme qui se couvrent de mots pour mieux refléter l’Autre. Dédiés d’abord à nos muses, ils ne s’offrent qu’une fois et ne vivent que « ce que vivent les roses, l’espace d’un matin » (François de Malherbe, XVIème siècle), lorsqu’ils se découvrent et « se » disent.

L’écriture perpétue leur mémoire avec plus ou moins de bonheur, dévoilant aux yeux de tous ce qui ne se destinait qu’à une seule, mais délivrant de la cage dorée du poème des mots volant déjà de leurs propres ailes dans l’esprit libre du poète et de ses semblables. Ainsi l’acrostiche du prénom d’une Maçonne, Françoise, peut-il refléter ses Sœurs tout en restant fidèle au secret qui les relie toutes.

Le poète peut aussi aspirer à dire l’indicible, l’inspiration première soufflant à son oreille l’idée et ses mots clés, ses « mots de passe » et ses « mots sacrés », car « Les œuvres de l’esprit, poèmes ou autres, ne se rapportent qu’à « ce qui fait naître ce qui les fit naître elles-mêmes », et absolument à rien d’autre.

Sans doute, des divergences peuvent se manifester entre les interprétations poéti­ques d’un poème, entre les impressions et les significations ou plutôt entre les résonances que provoquent, chez l’un ou chez l’autre, l’action de l’ouvrage. » (Paul Valery) Mais ces résonances qui se démultiplient dans le flot des idées masquent leur source empreinte de mystère et de silence. Aussi le poète croise-t-il « régulièrement » ceux qui n’ayant fait qu’une partie du chemin, restent enfermés dans le silence de l’autisme, jusqu’à s’engager auprès de ceux qui accompagnent les autistes, symboles vivants d’une société en souffrance.

L’écriture d’un poème est une expérience enivrante éveillant « continuellement en nous une soif et une source. En récompense de ce que nous lui cédons de notre liberté, elle nous donne l’amour de la captivité qu’elle nous impose et le sentiment d’une sorte délicieuse de connaissance immédiate, (de sorte) que la sensation de l’effort se fait elle-même enivrante, et que nous nous sentons possesseurs pour être magnifiquement possédés. Alors plus nous donnons, plus voulons-nous donner, tout en croyant de recevoir.

L’illusion d’agir, d’exprimer, de découvrir, de comprendre, de résou­dre, de vaincre, nous anime. » (Paul Valery) Le cœur du poète est le captif consentant des règles de ses mots d’esprit, et comme le Maçon au Travail, semble d’autant plus inspiré qu’il accepte et intègre les règles du poème, rimes et autres, conférant une « tenue » à son œuvre.

Dans le poème, la musique du vers qui dépend de l’harmonie entre les sonorités et le sens, est soulignée par la rime, l’identité entre deux ou plusieurs mots, situés en principe en fin de vers, de leur voyelle finale accentuée.

La rime a un rôle de structuration aussi bien du vers que du poème entier. Elle souligne la structure sémantique du poème par des répétitions fondées sur des signifiants, les mots, rapprochant des signifiés, les idées, qui autrement seraient restés étrangers l’un à l’autre. Ce rôle de la rime rappelle celui des règles fondatrices de la Franc-Maçonnerie défini par Anderson dans la Constitution de 1722 : « … Ces règles traditionnelles sont notre ciment et notre lien…

Elles permettent à la Franc-Maçonnerie de constituer ce vrai centre d’union où se rencontrent fraternellement des hommes qui, sans elles, seraient demeurés perpétuellement étrangers les uns aux autres. » Les idées des poètes circulent et se fixent dans les mots et les silences des poèmes comme la parole circule en Loge entre les colonnes, ordonnancée par le rituel et le respect du règlement des travaux.

Mais la rime ne saurait se contenter de sonorités banales passant inaperçues, sans trahir sa mission qui est de se faire entendre, de ponctuer le vers soit en frappant, soit en charmant l’oreille. Lors de la composition de son poème, la rime a l’immense mérite de contraindre le poète à penser par séries associatives sonores. Chercher une rime, c’est faire passer dans son esprit tout un cortège de sonorités sœurs, de sorte qu’il s’établit dans la pensée des familles de mots unies par une magie musicale. Très tôt s’est posée la question des rimes dites féminines et masculines, l’« e » atone final, fréquent dans les mots féminins, ne constituant pas un appel phonique suffisant, et l’alternance des rimes masculine et féminine s’est imposé dans les poésies lyriques provençales et françaises.

Mais il s’agit d’un mélange dont le dosage est laissé au goût du poète. Et pour grossir ce trait d’esprit jusqu’à la caricature, je prends un malin plaisir à glisser des acrostiches de prénoms féminins alternant les rimes masculines et féminines, tel « Françoise », dans des planches destinées à des auditoires mixtes.

Cet acrostiche comme tout poème active aussi de manière plaisante les ressorts de la langue, les phonèmes imprimant leurs sons et couleurs et se reliant dans les mots aux autres syllabes pour composer des bouquets harmonieux de vers. Car le poète joue d’abord avec les sons pour accompagner et soutenir le sens de son propos. Quand on parle de sens en poésie, il s’agit plutôt de sentiments, d’impressions, d’expérience à partager. Les sons aident souvent à créer ce climat particulier à chaque poète, à évoquer l’implicite ou l’indicible, cette « sorcellerie évocatoire » appelée de tous ses vœux par Baudelaire, « cette musique avant toute chose » réclamée par Verlaine.

L’harmonie résulte donc du choix et de la combinaison des syllabes pour obtenir les sonorités désirées.

Aussi le choix des mots est-il le premier souci du poète. Selon les traditions poétiques françaises, certains sons correspondent à des effets précis.

L’impression laissée par une syllabe dépend de sa longueur et de sa sonorité. Les syllabes brèves conviennent pour exprimer l’extériorité et la rapidité, les syllabes longues évoquant plutôt l’intériorité et la profondeur. Dans l’acrostiche « Françoise », seuls deux sons, « anche » et « eur », se reproduisent alternativement du premier au dernier vers. « anche » composé de la voyelle nasale « an », à l’effet voilé, atténué et lent, de la consonne « ch », dite « sourde » et « continue », au son prolongé, atténuant encore l’effet de la voyelle précédente, et d’un « e » muet final apportant une longueur et une touche supplémentaire de douceur, se renouvelle dans l’autre rime en « eur », composée de la voyelle nasale « eu » et de la consonne coulante et « ronronnante » « r ».

La rime doit tout à la fois satisfaire l’œil, l’oreille et l’esprit. Scandant la fin des vers, elle crée une accoutumance et une attente chez le lecteur/auditeur, jouant le rôle d’une balise dans les énoncés de mots successifs. Elle constitue donc un endroit privilégié pour le sens car le mot placé à la fin du vers est le mieux mémorisé. Et le sens des rimes ne dépend pas seulement de la forme, mais du sens des mots. Dans le cas présent, « blanche, s’épanche, branches, avalanches, hanches », élargit par le mouvement et l’élan du cœur le champ lexical affectif des mots « intérieur, valeurs, chaleur, Sœurs ».

Avant même l’écriture de la première lettre du poème, l’inspiration du poète passe par le prisme des règles poétiques qu’il s’assigne, les matrices convenant le mieux à l’expression de ses idées et de ses sentiments, et plus globalement à sa personnalité et à ses modèles d’écriture en cours. S’il a potentiellement le choix entre un grand nombre de modèles pour organiser horizontalement ses vers par une structure interne : mètre, césure, coupes, récurrences phoniques, et dérouler son poème selon un rythme vertical par une structure externe : rimes, strophes …, ou s’affranchir des règles précédentes dans le vers libre, le poète sait qu’il n’échappe pas à ses propres règles, et qu’il choisit celles auxquelles il s’attache, auxquelles il s’est déjà lié.

C’est dans le même état d’esprit que les Maçons s’attachent au rite et aux règles de leur Loge et Obédience pour tendre vers l’expression régulée de leurs idées, chacun trouvant son identité dans le modèle commun en apprenant à la fois à écouter et parler aux Frères et Sœurs de la Loge, tendre à « se dire » et « s’écouter » soi-même pour à la fois « s’entendre » avec les autres et « s’entendre » soi-même intérieurement.

C’est dès l’instant de sa conception que le poème « se dit » et « s’écoute », l’auteur et l’auditeur se découvrant autour du poème pour « s’entendre », et réaliser en quelques mots l’expérience de plus en plus intime de l’écoute de l’autre. Roland Barthes distingue ainsi trois niveaux d’audition : une « première écoute alerte » tendue vers la « capture d’un indice » qui, chez l’homme et l’animal, a une fonction « défensive et prédatrice », une « seconde écoute », exclusivement humaine, qui est un « déchiffrement » voué à la lecture des « signes », tendu non plus vers « la proie », mais comme en Franc-Maçonnerie vers « le secret », le « dessous du sens », et « le sacré », l’« écoute religieuse » à vocation de liaison entre le sujet écouteur et le « monde caché des dieux », et une « troisième écoute », redevable à l’écoute psychanalytique s’exerçant « d’inconscient à inconscient », tendant vers « les origines », à qui on demande non d’être « appliquée » mais de « laisser surgir », dans la lignée de « l’écoute panique » des Grecs. Accéder à une « meilleure » écoute, pour le lecteur de poésie, c’est alors intérioriser chacune des strates de l’audition jusqu’à parvenir au point ultime où « l’écoute parle ».

Enfin, pour Roland Barthes, être « meilleur auditeur » de poésie, c’est surtout substituer à une écoute passive et ensorcelée, fondée sur l’identification, une participation active à l’expérience unique de la genèse de l’œuvre.

Ces trois « niveaux » d’écoute rappellent les degrés d’Apprenti, Compagnon et Maître, ternaire structurant l’initiation maçonnique et la quête de sens qui la sous-tend. Comme tous les symboles, ces degrés qui se succèdent dans une suite progressive et linéaire peuvent aussi constituer un triangle, chacun de ses points étant relié aux deux autres. Et si chaque point est essentiel pour équilibrer le triangle commun, lui-même est un symbole rattaché au symbolisme du nombre« 3 ». Les points se relient ainsi par groupes de deux, trois, quatre, cinq, six, sept points et plus, traçant autant de figures symboliques que de grilles de lectures, vecteurs de sens. Si l’inspiration du poète et du Maçon ne diffèrent en rien à la source, ces grilles peuvent « orienter » la pensée par des séries régulées d’analogies et d’associations d’idées.

Par sa symbolique du mouvement, l’étoile à cinq branches reliant la matérialité du carré à la spiritualité du triangle, illustre la circulation des idées au sein de la Loge au travail entre les cinq Officiers qui l’éclairent, sans respecter leur ordre hiérarchique (Vénérable Maître, Premier puis Second Surveillant, Orateur, Secrétaire), mais en suivant le tracé de l’Etoile Flamboyante qui les relie (Vénérable Maître, Second Surveillant, Secrétaire, Orateur, Premier Surveillant, et à nouveau Vénérable Maître, …).

L’ordonnancement de la Loge incite les Maçons à cheminer en pensée en prenant des « chemins de traverse », à transformer intérieurement leur réflexion tout en respectant dans la Loge la fonction symbolique des Officiers qui l’encadrent. Ils peuvent « à loisir » pratiquer l’hermétisme, c’est-à-dire dé-couvrir un uni-vers sous-jacent aux apparences, et s’inspirer de la poésie symboliste de Stéphane Mallarmé et Paul Valéry, qui ne se veut pas descriptive, mais plutôt suggestive et musicale pour atteindre, au-delà des apparences, le mystère des choses.

Les poètes Maçons convertissent pareillement leurs symboles, et notamment l’étoile flamboyante, en clés d’accès à ces mystères.

La tension établie « dans les règles » entre les pointes de cette étoile à cinq branches, comme entre les strophes, les vers et les mots d’un poème, ouvre au centre de l’étoile un espace dégagé au sein duquel rien n’obstrue le cheminement des Maçons en quête de centre, inversant par la même les phases de tracé du cercle dans cette géométrie de l’esprit, la périphérie précédant le centre.

En outre, les branches de l’étoile se croisent en constituant deux segments dont le rapport des longueurs donne le nombre d’or « 1,618 », nombre de l’harmonie vénéré par Pythagore. Ce nombre omniprésent dans la Nature, l’Art et l’architecture sacrée, devient aussi le nombre de l’homme quand il ouvre les bras et s’inscrit lui-même comme ses créations dans cette étoile flamboyante. Léonard de Vinci le représente bras et jambes écartés, générant en lui-même et par lui-même cette harmonie éclairant le cheminement intérieur des êtres en quête de Sagesse, de Force et de Beauté.

Les « Vers dorés de Pythagore », texte grec de soixante et onze vers attribués par les anciens à Pythagore, publiés en 1813, traduits et commentés par Antoine Fabre d’Olivet, philologue et occultiste français, rappellent les principes guidant les Maçons dès leurs premiers pas d’initiés.

« Les anciens avaient l’habitude de comparer à l’or tout ce qu’ils trouvaient sans défaut et beau par excellence : ainsi, par l’« Age d’or » ils entendaient l’âge des vertus et du bonheur ; et par les « Vers dorés », les vers où la doctrine la plus pure étaient renfermée.

Après la mort de Pythagore, et la terrible persécution qui coûta la vie à un si grand nombre de Pythagoriciens, écrasés sous les débris de leur école incendiée, ou contraints de mourir de faim dans le temple des Muses, Lysis, le disciple transcripteur de ces vers, voulant répandre la secte de Pythagore dont on s’attachait à calomnier les principes, crut nécessaire de dresser une sorte de formulaire qui contînt les bases de la morale et les principales règles de conduite données par cet homme célèbre. » 

« Ce vers renfermait adroitement un double sens. Par le premier, il recommandait la tolérance et la réserve aux Pythagoriciens, et à l’exemple des prêtres d’Egypte, établissait deux doctrines, l’une ostensible et vulgaire, conforme à la loi (du pays où ils vivaient) ; l’autre mystérieuse et secrète, analogue à la foi. Il rassurait ainsi les peuples ombrageux de la Grèce, qui, d’après les calomnies qui courraient, auraient pu craindre que les Pythagoriciens n’eussent voulu porter atteinte à la sainteté de leurs Dieux.

Les Pythagoriciens voyaient ainsi (sans en parler) dans les Dieux des nations les attributs de l’Etre ineffable qu’il ne leur était pas permis de nommer, leur rendant le culte consacré par la loi, et les ramenaient tous en secret à l’Unité qui était l’objet de leur foi. »

« Pythagore considérait l’Univers comme un Tout animé dont les Intelligences divines, rangées chacune selon ses perfections dans sa sphère propre, étaient les membres. Ce fut lui qui désigna le premier ce Tout par le mot grec « Kosmos », pour exprimer la beauté, l’ordre et la régularité qui y règnent. C’est de l’Unité considérée comme principe du monde que dérive le nom d’Univers que nous lui donnons.

Pythagore posait l’Unité comme principe de toutes choses, et disait que de cette Unité était sortie une « Duité » infinie. L’essence de cette Unité et la manière dont cette Duité qui en émanait y était enfin ramenée, étaient les mystères les plus profonds de sa doctrine, les objets sacrés de la foi de ses disciples, les points fondamentaux qu’il leur était défendu de révéler. Jamais on n’en confiait l’explication à l’écriture : on se contentait de les enseigner oralement à ceux qui paraissaient dignes de les apprendre. Lorsqu’on était forcé par l’enchaînement des idées d’en faire mention dans les livres, on se servait de symboles et de chiffres, on employait la langue des Nombres ; et ces livres, tout obscurs qu’ils étaient, on les cachait encore avec le plus grand soin ; on évitait par toutes sortes de moyens qu’ils ne tombassent dans les mains de profanes. »

« Le premier précepte que Pythagore donnait à ses disciples entrant dans la route de la perfection, tendait à les replier en eux-mêmes, à les porter à s’interroger sur leurs actions, sur leurs pensées, sur leurs discours, à s’en demander les motifs, enfin à réfléchir sur leurs mouvements extérieurs et intérieurs, et à chercher ainsi à se connaître. La connaissance de soi-même était la première de toutes les connaissances, celle qui devait les conduire à toutes les autres. La morale de Socrate et la philosophie de Platon n’en étaient que le développement, et une inscription dans le premier temple de la Grèce, dans celui de Delphes, la recommandait après celle du juste milieu, comme l’enseignement même du Dieu qu’on y venait adorer : « Rien de trop » et « Connais-toi toi-même » renfermaient en quelques mots la doctrine des sages, et présentaient à leur méditation les principes sur lesquels reposent la vertu, et la sagesse qui en est la suite. »

« L’homme est un composé d’esprit, d’âme et de corps, (dont les modifications) se manifestent par la sensation, le sentiment et l’assentiment, développant les facultés principales de l’instinct, de l’entendement et de l’intelligence. L’instinct est le siège du sens commun ; l’entendement, celui de la raison ; et l’intelligence, celui de la sagacité, ou de la sagesse. L’homme ne peut jamais acquérir aucune science, aucune connaissance véritables, si, à la faveur de l’intelligence qui élit le principe et le pose avec sagacité, l’assentiment ne se détermine ; car on ne sait, on ne connaît jamais véritablement que ce que l’intelligence a consenti. »

« Les préceptes de Pythagore étaient symboliques, c’est-à-dire renfermaient, au figuré, un sens très différent de celui qu’ils paraissaient offrir au sens propre. C’était l’usage des prêtres égyptiens, chez lesquels il les avait puisés, de cacher leur doctrine sous l’écorce des paraboles et des allégories. Le Monde était à leurs yeux une grande énigme, dont les mystères, revêtus d’un style également énigmatique, ne devaient jamais être ouvertement divulgués.

Ces prêtres avaient trois sortes de caractères, et trois manières d’exprimer et de peindre leurs pensées.

La première manière d’écrire et de parler, était claire et simple ; la seconde, figurée ; et la troisième, symbolique.

Ils se servaient, dans la première, de caractères usités par tout le monde, et prenaient les mots dans leur sens propre ; dans la seconde, ils employaient des caractères hiéroglyphiques, et prenaient les mots dans un sens détourné et métaphorique ; enfin ils faisaient usage, dans la dernière, de phrases à double sens, de fables historiques, astronomiques, ou de simples allégories.

Le chef d’œuvre de l’art sacerdotal était de réunir ces trois manières, et de renfermer, sous l’apparence d’un style simple et clair, le sens vulgaire, le figuré et le symbolique. »

Les idées des préceptes comprises rationnellement par les initiés, constituant autant de points de connaissances, doivent encore être reliées entre elles et constituer des réseaux où elles peuvent entrer en rapports harmonieux les unes avec les autres, leurs champs d’influence rappelant les deux segments des branches de l’étoile à cinq branches, dont le rapport des longueurs donne le « nombre d’or » irrationnel, 1,618. Les nombres irrationnels, dont le symbolisme complète celui des nombres entiers dans l’initiation maçonnique, possèdent un nombre infini de chiffres décimaux, et dans cette suite infinie, aucune périodicité ne peut être trouvée permettant d’imaginer les chiffres qui viendront à partir de l’analyse des chiffres qui sont déjà venus.

Mais les nombres irrationnels étant « incommensurables », leur découverte implique celle d’une dimension supra humaine ouvrant l’esprit au sacré, ce que soulignent encore les proportions dites « d’extrême et de moyenne raison » des branches de l’étoile, c’est-à-dire l’identité de proportion entre, d’une part, ses deux parties, et, d’autre part, sa grande partie et le tout. Autrement dit dès que l’harmonie règne entre les parties du microcosme de l’homme, elle couronne pareillement ses relations avec le macrocosme.

Remontons plus avant, aux premiers âges de la Grèce, quand « la Poésie, consacrée au service des autels, ne sortait de l’enceinte des temples que pour l’instruction des peuples : elle était comme une langue sacrée dans laquelle les prêtres, chargés de présider aux mystères de la religion, traduisaient les volontés des Dieux. Les oracles, les dogmes, les préceptes moraux, les lois religieuses et civiles, les enseignements de toutes sortes sur les travaux du corps, sur les opérations de l’esprit, tout enfin ce qu’on regardait comme une émanation, un ordre ou un bienfait de la Divinité, tout était écrit en vers. On donnait à cette langue sacrée le nom de « Poésie », c’est-à-dire « Langue des Dieux » ; nom symbolique qui lui convenait parfaitement, puisqu’il exprimait à la fois son origine et son usage. On disait qu’elle était venue de « Thrace », et on appelait « Olen » celui qui, l’ayant inventée, en avait fait entendre les premiers accents.

Or ce sont encore deux noms symboliques, parfaitement adaptés à l’idée qu’on avait de cette science divine : elle était descendue de Thrace, c’est-à-dire de l’Espace éthéré ; c’est Olen qui l’avait inventée, c’est-à-dire l’Etre universel…

« Un homme né au sein de la Thrace, mais porté dès son enfance en Egypte par le désir de s’instruire, repassa dans sa patrie avec l’une des colonies égyptiennes, pour y propager de nouvelles lumières. Il était initié dans tous les mystères de la religion et de la science : il surpassait tous ceux qui l’avaient précédé, par la beauté de ses vers, la sublimité de ses chants, la profondeur de ses connaissances dans l’art de guérir les maladies et d’apaiser les Dieux.

C’était Orphée : il prit ce nom de celui de sa doctrine qui tendait à guérir, à sauver par les lumières. La tradition mythologique a consacré dans une brillante allégorie, les efforts qu’il fit pour rendre aux hommes la vérité qu’ils avaient perdue. Son amour pour Eurydice, tant chanté par les poètes, n’est que le symbole de l’amour dont il brûlait pour la science divine. Le nom de cette épouse mystérieuse, qu’il voulut en vain rendre à la lumière, ne signifie que la doctrine de la vraie science, l’enseignement de ce qui est beau et véritable, dont il essaya d’enrichir la terre. Mais l’homme ne peut point envisager la vérité, avant d’être parvenu à la lumière intellectuelle, sans la perdre ; s’il ose la contempler dans les ténèbres de sa raison, elle s’évanouit.

Voilà ce que signifie la fable que chacun connaît, d’Eurydice retrouvée et perdue…

« Orphée qui sentit, par sa propre expérience peut-être, le grand inconvénient qu’il y avait de présenter la vérité aux hommes avant qu’ils fussent en état de la recevoir, institua les mystères divins ; école admirable où l’initié, conduit de degré en degré, lentement étudié et éprouvé, recevait la dose de lumière proportionnelle à la force de son intelligence, et doucement éclairé sans risquer d’être ébloui, parvenait à la vertu, à la sagesse, à la vérité…

Les degrés principaux de l’initiation étaient au nombre de trois, comme sont encore aujourd’hui les grades d’Apprenti, de Compagnon et de Maître dans la Franc-Maçonnerie. On ajoutait quelquefois trois degrés secondaires aux trois principaux, et on les terminait par une révélation extraordinaire, qui, en élevant l’initié au rang d’« Epopte », ou de voyant par excellence, lui donnait la véritable signification des degrés qu’il avait déjà parcourus, lui montrait la nature sans voile, et l’admettait à la contemplation des lumières divines.

C’était pour l’Epopte seul que tombait le dernier voile, et qu’on écartait le vêtement sacré qui couvrait la statue de la Déesse. Cette manifestation, appelée « Epiphanie », faisait succéder l’éclat le plus brillant aux ténèbres qui, jusqu’alors, avaient entouré l’Initié. Le grade d’Elu a remplacé, parmi les Francs-Maçons, celui d’Epopte. »

Les chants d’Orphée comme les vers de Pythagore, au fondement de l’initiation aux Mystères, vibrent encore à chaque étape de l’initiation maçonnique, tendent à rendre synchrones les règles morales et la conscience mentale de leurs adeptes, et constituent en eux-mêmes un couple équilibré de forces destiné à relier harmonieusement sur l’axe vertical de la Perpendiculaire de l’Apprenti, les « niveaux » de la connaissance temporelle et de la conscience spirituelle.

L’inspiration de l’idée ou du mot juste espéré par le poète s’appuie sur l’équilibre ou le déséquilibre de ces forces, et « il semble qu’il y ait dans cet ordre des choses mentales, quelques relations très mystérieuses entre le désir et l’événement. Je ne veux pas dire que le désir de l’esprit crée une sorte de champ, bien plus complexe qu’un champ magné­tique, et qui eût le pouvoir d’appeler ce qui nous convient (le mot ou l’idée). Mais, quelles que soient la netteté, l’évidence, la force, la beauté de l’événement spirituel (les mots-idées des points de l’étoile) qui termine notre attente, qui achève notre pensée ou lève notre doute, rien n’est encore irrévocable.

Ici, l’instant suivant a pouvoir absolu sur le produit de l’instant précédent.

C’est que l’esprit réduit à sa seule substance ne dispose pas du fini, et qu’il ne peut absolument pas se lier lui-même. » (Paul Valery) Cet instant de l’inspiration qui semble « régulièrement » suspendu et résorbé lors de la clôture des travaux, semble se réactiver dans les mailles de l’étoile de la Loge au travail, où les Frères et les Sœurs participant à sa dynamique depuis les colonnes, tendent à se transformer eux aussi en poètes inspirés. Car le poète, la poétesse, géomètre de l’âme, demeure pour exercer son Art entre l’écriture et la géométrie, cette zone médiane où le Verbe s’agrège aux mots d’esprit pour ensemencer l’écriture de structures géométriques foisonnant d’idées et de traits d’esprit, exaltant autant les tracés, les plans de l’architecte que le Travail du Compagnon qui les met en œuvre.

« La Muse, dit Platon dans ses Dialogues, inspire immédiatement les poètes, et ceux-ci communiquant à d’autres leur enthousiasme, il s’en forme une chaîne d’hommes inspirés. C’est par le moyen de cette chaîne que la Divinité attire l’âme des hommes, et l’émeut à son gré, en faisant passer sa vertu de chaînon en chaînon, depuis le premier Poète inspiré jusqu’au dernier de ses lecteurs ou de ses rapsodes. »

Car une chaîne humaine vaut plus, ou mieux, que l’addition de ses maillons. Les Maçons peuvent ressentir le delta de cette différence dans la chaîne qui les relie tous, physiquement, mentalement et spirituellement, lors de la clôture des travaux de Loge, et sur les ailes de ce delta, se laisser porter vers un autre Delta à l’Orient, laissant « en plan » l’horizon immanent des contingences, et dans la chaleur fraternelle, aspirer à la dimension transcendante de l’Etre.

Cet esprit inspire les poètes Maçons européens de langue germanique depuis la naissance de la Franc-Maçonnerie moderne, tels Goethe et Schiller, au XVIIIème siècle. « Le franc-maçon est cet homme qui a le courage de croire en la lumière au plus profond de la nuit  » dit Goethe (1749-1832). Son poème « Loge de Maçon » illustre les convulsions de l’âme du Maçon en devenir, et la vie qu’il se forge par ses choix. Le Maçon embrasse sa destinée quand il ose tendre vers sa « fin », et renaître à lui-même par les mots « Meurs et Deviens » de son poème « Nostalgie bienheureuse » Ses derniers mots furent « Plus de lumière ! ».

Schiller (1759-1805), le « poète de la liberté », ami de Goethe, incarne l’idéal humaniste de l’homme. Beethoven, leur contemporain, a composé sa neuvième symphonie inspiré par le poème de Schiller « Ode à la joie ». « Elevez-vous, dit-il, d’une aile hardie, au-dessus du cours de votre temps. Que déjà, dans votre miroir, commence à poindre le siècle futur. » Dans sa « Lettre sur l’éducation esthétique de l’homme », en son siècle plus préoccupé par les besoins pratiques et l’utilité que par l’art, Schiller choisit la beauté car il estime que c’est par l’esthétique que le problème politique sera résolu. C’est par la beauté que l’homme sera conduit à la liberté. Dans ce monde gouverné par les idées, l’homme ne serait plus un « loup pour l’homme », mais le maillon heureux d’une chaîne universelle, capable de contribuer à l’élévation et à l’ennoblissement de l’espèce humaine. Il clame « Honorez les femmes ! »

Dans les pays de langue anglaise les poètes Maçons sont prolifiques, leurs poèmes exaltant particulièrement la fraternité, l’entraide et l’émulation des chaînes d’union dans des pays où les Temples sont souvent imposants, à l’instar de leurs nombreuses actions caritatives.

Leurs nombreux poètes sont aujourd’hui référencés sur des sites internet de poésie maçonnique, tel « Masonic Poets Society » où figurent sous forme bilingue quelques uns de mes poèmes. « Si » écrit par Rudyard Kipling en 1910, est un des poèmes maçonniques les plus connus dans le monde. Sa traduction habituelle en français, où le fond sacrifie l’essentiel à une forme convenue, s’écartant sensiblement de la version anglaise, le revoici fidèle au texte d’origine, modèle d’une transmission d’homme à homme. 

Les poètes Maçons pensent-ils en musique ? On serait tenté de le croire, tant depuis la lyre d’Orphée l’inspiration musicale accompagne l’écriture pour illustrer le cheminement initiatique. Comme le musicien, le poète compose et reçoit son inspiration en un lieu subtil en lui, à l’articulation entre le son et le sens, en ces moments où les sons des mots mettent en musique le silence de la pensée. L’inspiration silencieuse de l’idée s’exprime dans chacun des phonèmes du mot, jusqu’à s’agréger par ensembles limités de mots et de phrases.

A peine émise, l’idée limite son expression, cherche et trouve son « terme », son dernier son en fin de mot, son dernier mot en fin de phrase et dans le poème en fin de vers. Le poème est cette suite de limites régulièrement dépassées et renouvelées, cette succession d’aspirations aux idées et d’expirations de mots résonnant les uns par les autres, cette respiration inspirée de la parole composant des mélodies de sens.

Mais alors ce lieu subtil où se croisent et se fécondent le mot et le sens, rappelant l’Equerre et le Compas croisés sur l’Autel des Serments et régulés par la Règle ou le Livre de la Loi sacrée, n’est-il pas un passage, un pont jeté par le poète au faîte de son inspiration entre la matière et l’esprit ?

Il évoque ce « pontife » résidant sur une montagne sacrée, chargé dans la Grèce antique de l’entretien d’un pont reliant le monde des hommes au monde des dieux. Du haut de cette montagne se répandaient les oracles divins, les lois et les enseignements que les pontifes composaient en vers.

Et dès l’origine une sorte de schisme se produisit entre deux cultes, celui des Thraces consacré à Dionysos l’esprit divin et Déméter la terre-mère, et celui des Grecs proprement dits, consacré au soleil et à la lune, rendu sur le mont Parnasse et à Delphes à Apollon et à Diane. Les Rites maçonniques, et en particulier le Rite Ecossais Ancien et Accepté, garde et même entretient la marque de cette séparation par une différence de sens entre les degrés symboliques et les degrés dits de Perfection.

En Franc-Maçonnerie, dans les Loges et l’esprit des Maçons, les Thraces et les Grecs, Dionysos et Apollon, Déméter et Diane, ont vocation à se rencontrer. « C’est en liant Dionysos et Apollon que la religion grecque a atteint sa hauteur la plus sublime. Cela ne saurait être un simple hasard qu’ils soient venus l’un à l’autre. Ils se sont attirés et cherchés, parce que leurs règnes, malgré le contraste le plus brutal, sont malgré tout, sur le fond, rattachés par un lien éternel.

La lumière et l’esprit d’en haut doivent toujours avoir connu au-dessous de soi le nocturne et la profondeur maternelle, sur lesquels tout être est fondé. A la religion olympienne, qui ne devait pas être une religion de la soumission et du cœur indigent, mais celle de l’esprit clairvoyant, il fut réservé, là où d’autres séparent et maudissent, de reconnaître et d’honorer l’union des contraires, celle que montre l’arc et la lyre. » ( Walter F. Otto, L’esprit de la religion grecque ancienne : Theophania) Dans la Loge Victor Hugo deux fois née comme Dionysos, d’abord au Grand Orient de France, puis il y a onze ans à la Grande Loge de France, l’arc et la flèche du sens tendu entre les mots d’un poète a fécondé la lyre d’un musicien, Gérard Berliner, engendrant « Le Flambeau ».

L’amour fraternel qui sublime ce lien établi dans les Loges maçonniques entre le son et le sens, la lyre et la flèche, rappelle Cupidon, le dieu romain de l’Amour, portant avec son arc une torche allumée. Le feu de l’amour réchauffe le lien entre le son et le sens, et en retour ce lien éclaire l’amour, chaleur et lumière touchant au cœur les Sœurs et les Frères du foyer qu’est la Loge. Il se concentre symboliquement dans la flamme de l’étoile allumée sur le plateau du Vénérable, et se transmet aux deux colonnes lors de l’ouverture de ses travaux. « Que la lumière nous éclaire ! » dit le Vénérable. « Et que l’amour nous allume ! » rajouterait volontiers le poète.

Suspendu à l’inspiration, le poète Maçon se balance entre l’espérance collective de ses Frères et Sœurs et ses propres aspirations. Entre « Espérons ! » et « J’aspire ! » s’écrivent les vers de ses poèmes, s’entendent les sons et les sens, les mots et les idées, et les mélopées silencieuses de leurs chants secrets. Il ouvre la grande ronde des poètes à ceux et celles qui goûtent leur langue, savourent son esprit, ses accents, et quand d’autres disent « Je vous écoute », disent en souriant « Je t’entends », couvrent leurs Muses de présents, de paroles aimantant le temps, et pour étirer le présent, s’invitent au Banquet de Platon et partagent des agapes fraternelles.

Patrick Carré

Hyères, 12 octobre 2013

SOURCE  : http://www.patrick-carre-poesie.net/spip.php?rubrique2

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RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie 12 mars, 2023

Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part I-

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part I-
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RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part I-

 

Je vous propose une réflexion, en plusieurs sur les rapports entre le Pérennialisme et la Franc-Maçonnerie de tradition. Deux voies spirituelles, des itinéraires qui ne sont pas si différents. Dans le but est de se rapprocher de l’Unité, par des exercices de l’esprit, jusqu’à pouvoir le contempler et se revenir dans le monde pour agir, seul et avec le concours des autres.

Un parcours qui met en exergue l’ésotérisme en général, ceux des religions en particulier, ésotérisme réservé aux initiés et qui dépasse les exotérismes des religions souvent réducteurs et dogmatiques. Pérennialisme et Franc-Maçonnerie, permettent aux mystes d’accéder aux mystères, de construire des ponts et abattre les murs de l’incompréhension qui naissent le plus souvent de l’ignorance. Cette réflexion s’inscrit, (sans que cela en soit l’exclusivité) dans la déclaration de principe des constitutions de la Grande Loge de France. Je cite Chapitre I- La Franc-Maçonnerie Universelle et ses Principes alinéa 6 : « Dans la recherche constante de la vérité et de la justice les Francs-Maçons n’acceptent aucune entrave et ne s’assignent aucune limite. » (1)

Alinéa renforcé par l’alinéa 8 je cite à nouveau : « Ils recherchent la conciliation des contraires et veulent unir les hommes dans la pratique d’une morale universelle et dans le respect de la personnalité de chacun. » (2)

Cette réflexion sera largement inspirée de la vie et des écrits de Frithjof Schuon, le choix aurait pu tout aussi bien être celui de René Guénon ; leurs démarches spirituelles sont identiques. D’ailleurs Schuon a été fortement inspiré par Guénon qu’il a fréquenté. J’ai choisi Schuon parce qu’il est moins connu que Guénon, mais bien sûr ce sont deux figures de la pensée et de la démarche traditionnelle, avec le métaphysicien Ananda Coosmaraswany, ils sont les principaux représentants de cette pensée pérennialiste qui critiqua vivement le modernisme et l’abandon du sacré. Ont-ils été à contre-courant de la philosophie des Lumières ? De cette « filosophie universelle » que décrivait le chevalier A. M Ramsay dans son célèbre discours de 1736 et considéré comme l’un des textes fondateurs emblématique de la Franc-Maçonnerie spéculative et des Hauts Grades Maçonniques et en partie leurs références à la Chevalerie de L’Esprit.

(1 et 2) Texte des Constitutions de la Grande Loge de France.

Ce discours fortement inspiré par la Sophia, la sagesse de la philosophie antique grecque, les religions juives et chrétiennes ainsi que les croisades et non par les seules Lumières de la modernité. Je tiens, pour ma part ce discours comme un foisonnement lumineux rassemblant toutes les branches éparses de la spiritualité dans un feu régénérateur intemporel et universel. Un feu constamment entretenu par les meilleures vertus de chaque tradition, qui élèvent l’homme vers les plus hautes sphères de la spiritualité. Un discours qui relie les hommes entre eux au-delà des querelles politiques ou religieuses, un discours adogmatique qui tient sa force de deux mots dans leurs significations étymologiques, ses deux mots sont « Religare » relier, lien et « Katholikás » universel, général. Deux mots qui vont bien avec leur sens premier aux Francs-Maçons de toutes les obédiences. Ces mots sont des bienfaits pour la Franc-Maçonnerie en général, les loges et les Sœurs et les Frères en particulier.

Ainsi, nous sommes dans le cœur du sujet de notre réflexion, le rapport entre Franc-Maçonnerie et la « Tradition Primordiale » selon Guénon ou le Pérennialisme de Schuon. Ces deux penseurs partagent le même désir spirituel la recherche de l’unité, de l’Un. Ils vont agir par leurs écrits, mais aussi par l’exemplarité de leur vie, pour essayer de tendre vers leur projet. Comme la Franc-Maçonnerie se propose de rassembler ce qui est épars, elle nous demande de ne pas exclure les hommes pourvu qu’ils soient libres…. Ainsi Schuon, nous mettras en garde sur le danger du volontarisme religieux, il écrit : « Le danger du volontarisme religieux, c’est qu’il est bien près d’exiger que la foi comporte un maximum de volonté et un minimum d’intelligence ; on reproche en effet à celle-ci, soit d’amoindrir par sa nature même le mérite, soit de s’arroger illusoirement la valeur du mérite en même temps qu’une connaissance en réalité inaccessible. Pour la gnose, l’intelligence n’est qu’une partie, c’est un centre et c’est le point de départ d’une conscience qui englobe tout notre être. » (1) Ce point de réflexion, je pense doit nous amener à comprendre que foi religieuse à caractère dogmatique et foi maçonnique ne sont ni semblables, ni incompatibles.

Par ailleurs vous l’avez compris Guénon et Schuon ne sont pas des ardents défenseurs du modernisme (Voir leurs publications dans Études Traditionnelles).

  1. F. Schuon Comprendre l’Islam Chapitre voie spirituelle  Éditions Points Sagesse

Ils reconnaissent l’incontournable valeur et travail de l’intellect, mais aussi ses limites. Foi et Raison sont les deux leviers, les deux ailes qui participent à l’élévation spirituelle. Mais le réel, le beau, le vrai, le juste ne peut pas se voir sans l’œil du cœur. Le Franc-Maçon ardent défenseur de la justice, sait tempérer la Force du glaive avec la vertu d’amour. Schuon, n’est pas pour autant qu’un contemplatif, il écrit : « L’homme est fait d’intelligence et de volonté ; il est donc fait de compréhension, et de vertus, ou de choses qu’il sait et de choses qu’il accomplit, ou en d’autres termes : de ce qu’il sait et de ce qu’il est. » (1).  En des termes plus maçonniques je dirais qu’il faut : Savoir (pour combattre l’ignorance), Comprendre (travailler, persévérer à son perfectionnement), Agir (pour transmettre l’essentiel l’amour fraternel qui est vérité). C’est du moins ce que j’entrevois en poussant les portes qui sont en dedans de moi, au fil de la connaissance des degrés qui me sont donnés. Comme des grains de blé mis en terre et qui poussent en épis que je me dois de récolter et de moudre sans cesse en y ajoutant le levain de mon intelligence et l’eau de la rosée d’amour de mélanger cette nourriture spirituelle dans le pétrin de mon âme, pour en faire le pain du compagnon, le pain du partage.

Je vous propose de poursuivre cette réflexion entre le Pérennialisme et la Franc-Maçonnerie parce que selon Schuon : « L’analogie et le symbolisme concerne toute manifestation de qualités ; la Conscience concerne l’homme en tant qu’il peut se dépasser lui-même intellectuellement son esprit débouchant sur l’absolu. » (1)

  1. F. Schuon Comprendre l’Islam chapitre voie spirituelle Page 183 Éditions Points Sagesse.

                                    Jean-François Guerry.

À SUIVRE…

Pour aller plus loin, plus haut :

Lire : la Biographie de F Schuon dans Wikipédia.

          F. Schuon Comprendre l’Islam- Éditions Points Sagesse

         F. Schuon L’œil du cœur- Dervy Éditions.

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part II.

Frithjof Schuon

Frithjof Schuon

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part II.

Comme nous l’avons vu dans l’article précédent Part I. La pensée et le mouvement Pérennialiste, est une voie spirituelle qui tend à la recherche de l’Un, de l’unité, de l’harmonie par un retour au statut originel. Pensée partagée par trois principaux métaphysiciens, ésotéristes que sont René Guénon, Frithjof Schuon et Ananda Coomaraswamy ; deux penseurs occidentaux et un oriental. Un chemin, qui va donc de l’Orient vers l’Occident et inversement. Nos métaphysiciens ont pratiqué des voies spirituelles différentes, pour concevoir leur rassemblement en une seule voie, une seule tradition. Tradition qualifiée de primordiale, première par René Guénon. Ananda Coomaraswamy (Ãnanda Kentish Kumãrasvãmī ) fût avant tout un historien de l’art srilankais, spécialiste du sanskrit la langue brahmanique, avant d’être un métaphysicien. Il a étudié le bouddhisme et l’hindouisme, puis a passé une bonne partie de sa vie en occident pour décéder aux États-Unis, un chemin Orient Occident, à l’inverse de nos deux autres penseurs.

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie dans Recherches & Reflexions

Ananda Coosmaraswany

Guénon et Schuon ont étudiés les ésotérismes des religions monothéistes, dont le soufisme de l’islam avant d’aller à la rencontre de l’Orient. Guénon est devenu aussi un spécialiste du symbolisme en général et maçonnique en particulier. Notre triangle de penseurs par des voies spirituelles différentes ils ont convergés vers la connaissance et la contemplation de l’Un, ils ont été aussi inspirés par le néoplatonisme de Plotin et sans doute par la résurgence celui-ci à Florence avec Marsile Ficin, Giordano Bruno et Pic de la Mirandole. Une démarche ascensionnelle de l’esprit, qui caractérise les hypostases de Plotin. Il est probable aussi que Plotin (selon certains auteurs comme Émile Bréhier, il est probable que Plotin accompagna l’empereur Gordien III (en 242) dans une expédition en Inde qui fût brève et désastreuse.) fût influencé par les Upanishad ces textes philosophiques et religieux des Védas objets de méditation. Les analogies ne manquent pas entre l’antiquité grecque et romaine et la Franc-maçonnerie (Voir modestement mon livre Exercices Spirituels antiques et Franc-maçonnerie aux Éditions UBIK Académie Maçonnique de Provence).

 dans Recherches & Reflexions

R Guénon et F Schuon

L’on peut donc sans prendre le risque d’un syncrétisme, affirmer que l’Inde et ses upanishad, le miracle Grec, l’ésotérisme des trois religions monothéistes ( Kabbale, Évangile de Saint-Jean et Soufisme) en y ajoutant l’alchimie ont servis de ferment pour la Franc-maçonnerie spéculative. Une voie spirituelle unique, spécifique, originale et originelle en définitive une spiritualité qui n’a pas besoin d’adjectif. (C’est-à-dire ni laïque, ni religieuse par exemple, simplement Une.)

Une des caractéristiques du Pérennialisme, pourrait être l’union, la réunion de chemins spirituels qui se retrouve pour l’ascension finale au sommet de la même montagne, là où l’homme pourrait contempler la plénitude de l’Un avant de redescendre vers le monde et ses Frères. Une lente ascension vers la recherche d’une Lumière unique, d’une parole commune, d’un souffle originel qui dépasse, surpasse, surplombe tous les dogmes et leurs particularismes. Cette pensée unifiée ne connaissant ni l’espace et le temps étant consubstantielle au désir de connaissance et de sacré de l’homme. Ce Pérennialisme de nos métaphysiciens est universel et fraternel, il s’accorde bien avec l’initiation maçonnique basée sur la fraternité humaine, qui génère une unité spirituelle entre ses membres inspirée par une trois grandes lumières de la Franc-maçonnerie, je veux parler de l’ouverture du compas de l’esprit. Cette pratique permet à la fin des travaux maçonniques de constater que la joie est dans les cœurs de toutes les Sœurs et de tous les Frères et non pas seulement dans le cœur de certains. Ce Pérennialisme exprime de surcroit pour la Franc-maçonnerie qu’elle est un centre d’union qui permet la rencontre de tous les hommes.

Pour conclure aujourd’hui je soumets à votre réflexion ces quelques lignes de F. Schuon qui permettent de mieux comprendre, je pense, pourquoi la Franc-maçonnerie n’assigne à ses membres aucune limite dans la recherche de la vérité et qu’elle pourrait énoncer : « Nous ne voulons pas attribuer à une foi à une foi religieuse comme telle des thèses sapientielles qu’implicitement. »  On entend généralement par sapientielle, la sagesse de ceux qui possèdent le savoir, la science à un degré élevé et aussi les qualités de jugement, d’habileté, de raison, de prudence et j’ajouterais pour ma part l’empathie, l’altruisme. Ceux qui au terme ultime de leur initiation à la porte de l’éternel orient sont capables d’un amour fraternel inconditionnel de l’autre, des autres car sans cela leur initiation ne serait qu’une agitation inutile même si elle est, et surtout si elle n’est qu’intellectuelle, on ne voit bien le réel qu’avec les yeux du cœur. Ce Pérennialisme me fait penser à l’instant au poème du Frère Rudyard Kipling : « Ma Loge mère… »

Une dernière réflexion F. Schuon écrit aussi : Pour « la science des religions », l’ésotérisme vient après le dogme, il en est le développement artificiel, voire emprunté à des sources étrangères ; mais en réalité, l’élément sapientiel vient forcément avant la formulation exotérique, puisque que c’est lui qui, par le fait d’être une perspective métaphysique détermine la forme. Sans fondement métaphysique point de religion ; l’ésotérisme doctrinal n’est que le développement, à partir de la Révélation, de ce qui « était avant. »

C’est bien, à la recherche de ce qui était avant que nous consacrons nos nos efforts, à la recherche de la vérité originelle, du premier souffle, d’un Eden que nous ne pourrons ni retrouver, ni atteindre. C’est donc en pleine conscience que nous sommes quand même sur le chemin qui importe plus le but et que nous devons nous ériger en défenseurs de la justice et de la vérité. En étant des pèlerins de l’amour fraternel, voie unique qui apporte la joie et l’harmonie.

                                                     Jean-François Guerry.

À SUIVRE…  

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part II.
RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part III-
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RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc- Maçonnerie. Part III-

 

Comme nous l’avons vu la recherche de la Vérité et de la Lumière, coïncide avec le désir de la recherche du réel, ce que nous ne percevons n’est pas le réel. L’idée même du réel se dissimule derrière les images et les symboles, derrière la matière et les substances. L’élévation de notre niveau de conscience nous prépare à la recherche des idées dissimulées derrière les symboles. Pour comprendre le monde et notre place dans celui-ci, nous cherchons la Substance derrière les substances, l’absolu derrière les symboles ce qui nous oblige à la levée des voiles au-delà des phénomènes. Chercher les mystères, l’invisible derrière le visible.

Frithjof Schuon écrit : « La distinction entre le réel et l’irréel coïncide en un sens avec celle entre la Substance et les accidents ; ce rapport Substance accidents rend facilement intelligible le caractère réel ou irréel du monde, et montre, à qui est capable de le saisir l’inanité de l’erreur attribuant l’absoluité aux phénomènes. » 

L’absolu étant lié au principe d’unité. Le reste n’étant que des accidents découlant du principe, issu du principe, si l’on considère une unité entre absolu et principe. Parmi les accidents découlant de la Substance-Principe, le plus élevé de ceux-ci serait l’homme accident intermédiaire entre matière et Principe, un accident soumis à la dualité au regard du Principe, Substance pure et Une.

L’initiation, est mouvement du corps et de l’esprit, un processus de concentration (Voyage de la périphérie, de la circonférence vers le point central, vers le Principe dont tout émane.), de purification de l’accident substance intermédiaire, une recherche ascensionnelle, un retournement vers le Principe.

Est-il raisonnable d’envisager ce retour, ce processus initiatique, cette ascendance des substances intermédiaires, vers la substance pure ? Utopie, sauf si l’on considère que le chemin est le but. L’initié devient en quelque sorte un Chevalier de la Lumière, un Chevalier du Soleil, un combattant sorti des ténèbres de l’erreur et prêt au combat pour faire régner la justice et l’amour. Il fait le chemin ascendant, sa transformation alchimique (Référence au Stibium, l’antimoine mâle et femelle à la fois.) pour tenter d’atteindre une forme de pureté. Le chemin vers la Lumière, commence par la sortie de la matière vers l’éther, puis la substance animique, la substance supraformelle, macrocosmique. Cette voie traditionnelle initiatique est toute entière une tension constante à l’élévation spirituelle, jusqu’à la Substance universelle métacosmique, c’est-à-dire au-delà de tout l’Un partie ou totalité de l’être.

La Substance, le Principe ne devient plus dès lors irréel ou abstrait, mais réel puisque visible dans les substances. C’est à ce stade de la réflexion que l’on peut dire que le Grand Architecte de l’Univers est plus qu’un concept, qu’il est un Principe immuable, une Substance pure, présente aussi dans l’homme, ce que certains qualifie de petite flamme éternelle. Ce principe d’unité est capable de réunir ce qui est épars, tous les hommes étant liés et possesseurs de cette parcelle de la Substance pure, du Principe. Aucun obstacle ne s’oppose dès lors au concept de Tradition primordiale de reliance universelle et fraternelle.

Réflexion personnelle : je discerne le cheminement initiatique du Franc-Maçon après être né de la terre, sorti de l’humus de la materia prima avoir éclos comme la merveilleuse fleur de lotus merveille sur les eaux boueuses des ténèbres, sous la Lune fécondante, parcouru la surface des deux globes terrestre et céleste, parvenu à réaliser le chef d’œuvre de sa vie matérielle. L’initié quitte son horizontalité et redressé réapparait plus radieux que jamais, sorti de l’âge de raison au-delà de ses 7 ans il aspire à faire alliance avec ses Frères, et bientôt il fera alliance avec la Substance pure le Principe.

Pour conclure aujourd’hui cette troisième Partie, je cite F. Schuon :

 « Seule la Substance des substances est absolument réelle, quelle est donc seule réelle, à rigoureusement parler, c’est voir la Substance dans tous les accidents (Nous en serions un)et travers eux ; grâce à cette connaissance initiale de la Réalité, le monde devient métaphysiquement « transparent ».

Quand il est dit que le Bodhisattva (1) ne regarde que l’espace, non les contenus, ou qu’il regarde ceux-ci comme étant l’espace, cela signifie qu’il voit la Substance qui par rapport au monde lui apparaît comme un « vide », ou au contraire, que le monde lui apparaît comme un vide en fonction de la plénitude principielle. (…) rapport entre l’eau et ses gouttes. »

                                                     Jean-François Guerry.

À SUIVRE …

(1) Réflexion sur le Bodhisattva :

De sattva être et Bodi éveil, initié ou être éveillé. Le Bouddhisme parle d’un être éveillé venant de l’Eden du paradis : « Un être pur », ayant atteint le Nec plus Ultra, un saint ? Mais surtout un être ayant contemplé le Principe et atteint la compassion, capable d’empathie et d’amour pour tous les hommes ses frères et même pour tous les êtres vivants.

L’on peut peut-être parler d’un être humain conscient de ses forces intérieures, qui a franchit les étapes successives et sa réalisation personnelle pour se mettre au service des autres. Pas pour moi mais pour vous dirait-il. Il a lutté contre ses mauvaises passions, c’est perfectionné pour pratiquer la vertu, à force d’efforts, de méditations, de patience, pour atteindre la sagesse.

En tradition bouddhique l’on parle d’états de l’esprit (ou de conscience) au terme de 7 étapes l’on devient plus habile (Hiram était considéré comme un homme habile dans l’art des métaux, connotation alchimique). La 8 et 9ème étape du Bouddhisme peut être mise en analogie avec les 4èmes et 5èmes degrés du R E A A de Maître S et Maître P, qu’il conviendrait à mon sens d’inverser comme il était d’usage dans les anciens rituels. Les deux initiés sont dans un niveau élevé de pratiques spirituelles. Le Bodhisattva parvenu à 10ème étape a atteint la sapience, il devient buddha. C’est le moment où il devra prononcer ses vœux, comme les F M prononcent leurs serments. Il sera honoré par une titulature spécifique à chacune de ses progressions initiatiques par exemple : doux et noble, entièrement excellent, celui qui regarde le bas avec compassion, celui qui a une grande force, celui qui est amour bienveillant.

Il s’agit vous l’aviez compris, (sauf ceux qui raillent ces titulatures sans en connaître le symbolisme, ce sont les mêmes qui lisent la Bible au premier degré sans y voir sa portée symbolique.) d’une hiérarchie spirituelle et non d’une hiérarchie d’honneur. Toute comparaison entre le bodhisattva et le Franc-Maçon n’est pas inopportune.   

Marsile Ficin et l'Académie Platonicienne de Florence à la Renaissance

Marsile Ficin et l’Académie Platonicienne de Florence à la Renaissance

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part-VI-

Porte d’Orient et Porte d’Occident, deux portes ouvertes vers un même chemin celui de l’élévation de l’esprit. On oppose trop souvent l’Orient et l’Occident, penseurs et initiés du Pérennialisme ont démontré dans leurs recherches, mais aussi et surtout dans leurs parcours de vie que l’on pouvait franchir ces deux portes grâce à la mise en œuvre de leur loi commune celle de l’amour.

Notre esprit occidental, cartésien a tendance à classer, caractériser ; nous voyons dans l’Occident du moins dans l’Occident moderne l’expression du rationalisme, du matérialisme, du sentimentalisme. L’Occident serait dominé par le seul règne de la raison donnant accès à toute connaissance. Pour l’occidental moderne, le spirituel et l’intellectuel se réduiraient à une forme de psychisme ou de psychologisme. Les lumières ont consacré le règne de la raison « le penser par soi-même ». La sacralisation de la raison trouve ses racines dans le Miracle Grec incarné par les philosophes figures de la sagesse, comme Platon et Aristote. Le prolongement, voir le rapt de la philosophie grecque à été réalisé par le christianisme. Cependant, on observe la résurgence à la Renaissance du platonisme ou plus précisément du néoplatonisme dont la figure emblématique est Plotin qui avec Pythagore représente la pointe la plus élevée de la Pyramide de la raison associée à la spiritualité, le monde des idées et la cosmologie et la symbolique des nombres. C’est Marsile Ficin qui fût le principal néoplatonicien de l’École de Florence où l’on trouvait Giordano Bruno ou encore le Phénix de la Renaissance Pic de la Mirandole. Plotin, était un Pérennialiste avant l’heure, il a fréquenté la marmite d’Alexandrie, (comme Pythagore) initié aux mystères de l’Égypte Ancienne, il aurait fait aussi un séjour en Inde comme nous l’avons déjà vu. Marsile Ficin hermétiste, alchimiste, féru d’ésotérisme a été sans aucun doute avec Giordano Bruno un des précoces inspirateur de la Franc-Maçonnerie spéculative (cf la thèse de Charles-Bernard Jameux sur la naissance de la Franc-Maçonnerie spéculative.) La révélation de l’ésotérisme chrétien en particulier de l’Évangile apocryphe de Saint-Jean, la loi d’amour et la compassion bouddhique et son sommet la pure altérité bienveillante concrétisent le principe d’une Tradition Primordiale centre d’union de l’Occident et de l’Orient.

Nous pouvons aussi observer, que la Renaissance et engouement pour les sciences à mis à mal le caractère exclusivement exotérique mais surtout dogmatique de la religion. Il est intéressant de lire Fritjof Schuon : « Les traditionalistes oublient… que l’on ne peut empocher l’homme de faire des découvertes, et que, la découverte une fois faite, l’homme ne peut s’empêcher d’en tirer des conséquences raisonnables. » Plus loin F. Schuon poursuit : « La réalité physique garde forcément ses droits. Ce qui implique qu’elle est symbolique à son tour. Mais c’est le traditionalisme qui garde le dernier mot… Il ne suffit pas de percevoir la réalité objective, il faut aussi pouvoir l’assimiler ; ensuite il y a quelque chose qui manque gravement à la science dite exacte, et c’est la connaissance métaphysique. Certaines réalités non perçues…sont inassimilables, et deviennent pour l’homme des facteurs de déséquilibre et de déchéance, comme le prouve la situation écologique et culturelle du monde actuel. »  Cette citation est relevée dans l’œil du cœur dont la première édition date de 1968 dans Éditions Traditionnelles on remarque le caractère prémonitoire de cette pensée quelques 55 ans avant 2023.

Une autre remarque de F.Schuon sur le concept médiéval me paraît aussi intéressante : « Il y avait de la sagesse dans le concept médiéval « de la double vérité », la théologique et la rationnelle. Car il y a le symbole et il y a le fait ; or le symbole compris vaut infiniment mieux que le fait incompris. Est « vrai » sous le regard divin,  ce qui ouvre la porte vers la vérité à la fois transcendante et immanente. » Il prolonge sa réflexion entre Orient et Occident ainsi : « L’oscillation entre le symbolisme et la réalité objective fait penser à celle entre l’Orient et l’Occident, ou encore en un certain sens, à celle entre « foi et raison », ou entre tradition et le rationalisme matérialiste. »

Je ne puis m’empêcher après cette lecture de penser à l’encyclique de 1998 de Jean Paul II : Fides et Ratio (Foi et Raison), qui nous fait prendre conscience du chemin parcouru par l’église depuis l’inquisition, Galilée ou Giordano Bruno. En exprimant que la Foi et la Raison sont deux ailes  qui permettent à l’esprit de s’élever  vers la contemplation de la vérité ou encore sont les deux ailes qui portent l’espérance du retour de l’unité, de l’harmonie dans le cœur de l’homme.

                                            Jean-François Guerry

À SUIVRE : les orientaux ou les occidentaux séduits par la modernité ?

 

Marsile Ficin la Renaissance École Platonicienne de Florence

Marsile Ficin la Renaissance École Platonicienne de Florence

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie Part -VII-

Et si la Renaissance avait été la période de la fécondation ou pour le moins celle de la germination du Pérennialisme, de la Tradition Primordiale en même temps que la naissance des idées qui allaient structurer la Franc-Maçonnerie spéculative. L’acte de naissance n’aurait pas alors été signé dans les brumes de l’Écosse, mais sur les rives fleuries de l’Arno à Florence en Toscane. Plus précisément par les penseurs de l’Académie Platonicienne Florentine, dont le directeur fût Marsile Ficin (Marsillo Ficino) et le fondateur Cosme de Médicis en 1459. Cette académie consacra la résurgence du platonisme et du néoplatonisme grecs. Alors que le christianisme s’est répandu partout en occident sans partage, à Florence Marsile Ficin entreprend la traduction en latin des œuvres de Platon, Plotin, Porphyre de Tyr, Jamblique, Proclus et Hermès Trismégiste, ce qui va faire la renommée de cette académie, on se rappelle qu’il eut aussi un célèbre élève l’encyclopédiste aussi jeune que talentueux Pic de la Mirandole. Les exégèses de Marsile Ficin sur Platon avaient pour vocation de tenter de réconcilier l’église et Platon, église qui avait reconnu l’évangile ésotérique de Saint-Jean comme texte apocryphe. Marsile Ficin ne fût pas en conflit avec l’église tant qu’il ne s’intéressa pas à l’astrologie, il eut alors des « relations conflictuelles » avec l’inquisition et n’eut la vie sauve que grâce à ses relations et protections, comme d’ailleurs Pic de la Mirandole, d’autres comme Giordano Bruno n’eurent pas cette chance. Parmi les nombreuses œuvres de Marsile Ficin, son exégèse sur le Banquet de Platon et amore, ainsi que son ouvrage de limine  sont restés à la postérité, on notera enfin qu’il s’est beaucoup inspiré de Dante et sa Divine Comédie.

Pourquoi faire une relation entre Marsile Ficin, le Pérennialisme, la Tradition Primordiale et la Franc-Maçonnerie. Simplement à cause de son intérêt pour la philosophie grecque de Platon et Pythagore, le néoplatonisme de Plotin, l’hermétisme et l’alchimie. Il dirigea et inspira cette académie de Florence, à un moment où le christianisme était dominant et qu’il s’était accordé avec la philosophie d’Aristote le meilleur élève de l’Académie de Platon. Alors que Platon voyait une certaine unité entre l’esprit et la matière, comme voie d’accès à la Connaissance. Aristote se distingua par sa méthode séparant matière et esprit, pour Aristote l’ordre matériel du monde est mesuré et organisé par la raison. Alors que tout ce qui touche au spirituel est plus intime, plus individuel et donc non mesurable par l’extérieur, grossièrement une voie de la raison associée à la science et une voie de l’esprit associée à la sagesse.

Marsile Ficin était proche dans sa pensée de l’évangile de Saint-Jean, de Plotin, de l’hermétisme et de l’alchimie on pourrait oser de ce qui allait inspirer la Franc-Maçonnerie spéculative, mêlant esprit et matière, vertus, sciences humaines et transcendance spirituelle. Je dirais équerre et compas ou encore les outils symboliques des petits mystères, et les vertus associées aux grands mystères, une forme d’ascension spirituelle, comparable aux hypostases plotiniennes.

Alors que la méthode aristotélicienne faisait peu d’ombre à l’église, séparant mieux matière et esprit, ce n’était pas le cas du platonisme et encore moins du néoplatonisme. Les grands mystères ésotériques étaient réservés aux penseurs et érudits initiés qu’ils soient laïques ou religieux. Ils étaient aussi les ferments de cette Tradition Primordiale, pérenne susceptible de traverser le temps et l’espace. Marsile Ficin peut nous apparaître dès lors en phase avec cette pensée universelle. Ne mettant aucune limite à sa recherche de la Vérité et de la Connaissance, il étudie les textes de la philosophie grecque et les ésotérismes religieux, ainsi que la Bible. Dans cette recherche de la vérité, il n’en reste pas moins comme Pic de la Mirandole un fervent catholique, démontrant que la philosophie universelle, la Tradition Primordiale n’a rien d’incompatible avec la foi religieuse, il en est de même pour les Francs-Maçons qui savent faire la différence entre foi religieuse et foi maçonnique.

C’est l’art de l’architecture et de la construction, qui expriment le mieux l’alliance entre Raison et Spiritualité. Guy Piau, ancien Grand Maître de la Grande Loge de France et 33èmedegré du R E A A dans une conférence consacrée à Marsile Ficin en Février 1992 écrit :

« Depuis l’antiquité, l’architecture est considérée comme le sommet de l’art. C’est le noble art qui permet, celui qui permet d’exprimer et d’exalter la beauté et l’harmonie. »

Cet art de la construction, ce symbolisme de la construction, construction des temples intérieurs, de ce temple qu’est l’homme qui se perfectionne, pour être en capacité de recevoir la lumière de la Connaissance et de la Vérité, élever son temple vers la vertu pour pouvoir contempler un jour l’Un. Le symbolisme de la construction du temple de Salomon Roi de Sagesse et de Justice n’a donc pas été choisi par hasard par les rédacteurs des rituels maçonniques émaillés par les mythes et les légendes qui sont exemplaires pour donner un sens à la vie des hommes de bonne volonté. Construire des temples à l’Universel.

Guy Piau toujours dans la même conférence écrit à propos de Marsile Ficin : « Pour lui l’architecture et la philosophie sont pleinement liées à l’exaltation de l’archétype universel de l’artiste qui est en l’homme dans sa vérité entre « le ciel de l’esprit » et la « terre du manifesté ». La partie la plus haute de l’homme est-elle celle ou se cache sa flamme artistique là ou se développe son intuition et son imagination qui lui fait vivre et créer des choses plus hautes et belles que lui.

Académie de Marsile Ficin à Florence

Guy Piau nous propose aussi cette citation de Marsile Ficin extraite de son commentaire sur le Banquet de Platon : « Si quelqu’un veut savoir comment la forme corporelle peut ressembler au concept de l’âme et de l’esprit et à la notion de raison, qu’il considère la construction d’un architecte. Celui-ci commence par concevoir une notion de l’édifice, comme une idée dans son âme. Puis il fait bâtir autant que possible l’édifice qu’il a imaginé. Qui peut refuser à l’édifice une certaine existence corporelle et nier qu’il ressemble à l’idée incorporelle de l’architecture à l’initiation de laquelle il a été bâti. » Ce qui constitue et fait vivre l’unité spirituelle, la tradition unique primordiale ne peut être que le lien d’amour commun à toutes les traditions, « l’amour qui meut le soleil et les autres étoiles ». Le lien d’amour est ce qui relie l’homme à son créateur, l’homme à tous les hommes de toutes les traditions et toutes les traditions à la Tradition Primordiale cette terre et ce ciel commun où se dissolvent les différences pour ne faire qu’un centre d’union fraternel.

Disserter, vivre sans cesse l’Amour, c’est reconnaître cette Tradition Primordiale pérenne dans le temps et l’espace être un fidèle d’amour.

On ne parle à mon avis pas assez dans nos Loges de la filiation entre de tels hommes comme Marsile Ficin et la Franc-Maçonnerie.

Je termine cette réflexion d’aujourd’hui avec Guy Piau Frère et poète fin connaisseur du florentin. « Nous pouvons comprendre que Marsile Ficin place l’Amour à l’origine de l’Univers, bien avant la création du monde, car il est de soi parfait. L’Amour est la clé de l’univers. Il accompagne en tout le chaos mais s’enfuit aussi du chaos afin d’illuminer les ténèbres… »

Ainsi, vous ne vous demanderez plus qu’elle est le mystère, la clé de la Franc-Maçonnerie, ni pourquoi autant de femmes et d’hommes y sont fidèles et persévérants, et pourquoi cette belle dame de 300 ans et plus est toujours aussi belle, parce qu’elle est fondée sur l’Amour fraternel, qui l’Amour inconditionnel du monde et de l’autre.

                                             Jean-François Guerry.

 

À SUIVRE …

Note : Les citations et les textes qui figurent dans cet article sont tirés du livre de Guy Piau Franc-Maçonnerie et Hauts Grades paru en Janvier 2023 aux Éditions Numérilivre…

 

Fritjof Schuon

Fritjof Schuon

RÉFLEXION : Analogies entre Pérennialisme et Franc-Maçonnerie- Part VIII- Conclusion temporaire.

 

Après cette courte réflexion, il y a lieu peut-être de renvoyer dos à dos les mystiques dogmatiques et les modernes existentialistes ? Les partisans de l’Orient qui serait un idéal spirituel et les partisans de l’Occident inconditionnels de la raison.

Souvent certains occidentaux, sont fascinés par l’Orient, sans doute une attirance sans mesure pour un exotisme spirituel idéal, parangon d’une pureté originelle. S’il existe quelques territoires peu peuplés comme le Tibet, le Bhoutan en Asie ou encore en Amazonie d’autres minorités qui même rassembler ne peuvent revendiquer une universalité et encore moins une supériorité spirituelle.

L’occidental qui au milieu de sa vie, au midi de sa vie commence un travail sur lui-même et regarde l’héritage légué par ses ancêtres peut revendiquer une spiritualité élevée. Il lui suffit parfois simplement d’ouvrir la fenêtre de sa maison, pour contempler la pâleur de la lune et les myriades d’étoiles propices à son élévation spirituelle, comme le soleil à son lever au point du jour, annonçant l’apparition de la grande lumière. Orient et Occident forment l’unité de l’univers, pourquoi n’y aurait-il pas une unité spirituelle, une unité primordiale, une religion universelle.

Suivons la pensée de Frithjof Schuon : « Pour en revenir au fond de la question : on peut dire que l’Occident moderne est « dévié » tandis que l’Orient traditionnel est « décadent ».

Il reste donc à l’homme occidental certaines qualités héritées de sa tradition et l’homme oriental résiste en tant que véhicule de sa tradition. L’homme occidental, raisonnable à une tendance à l’oubli de l’essentiel, de son essence, tandis que l’homme oriental vit partiellement sous l’hypnose de l’absolu. Et si le Franc-Maçon homme libre et ouvert à la recherche de la Vérité et la Lumière était une incarnation une conjugaison de ces deux hommes. Ou au moins à la recherche de la construction de cet homme fait de matière et d’esprit et espère se perfectionner.

Ainsi F. Schuon nous interroge : « Si l’homme oriental, du fait de son traditionalisme, était cet homme totalement supérieur que d’aucun ont imaginé, il ne se moderniserait pas avec un zèle si démesuré…inversement, si l’occidental, du fait de sa modernité, était un homme à rééduquer de fond en comble, il ne s’intéresserait pas à l’art et la spiritualité de l’Orient…Le problème, ou la solution, n’est pas une réforme de l’Occident par l’Orient, c’est une réforme du monde entier par la Vérité tout court et ceci n’est possible que part l’intermédiaire du Très haut, à laquelle nous devons participer sur notre plan. Car aide-toi et le ciel t’aidera. »

Cette recherche de la Vérité, de l’harmonie cette quête de la Connaissance est le chemin du Franc-Maçon, perfectionnement de l’homme, élévation de sa spiritualité pour une action « hic et nunc »,maintenant et sans délai, ici et maintenant. Le Franc-Maçon grâce son travail et sa persévérance dans sa construction s’élève. Il devient un humble chevalier d’Orient et d’Occident, un soldat de l’universel, conscient qu’il existe une Tradition primordiale, une forme de religion universelle centre d’union fraternelle sans limite. Dis autrement jadis il y a plusieurs pièces dans la maison de l’éternel. Chacun à sa pièce, il suffit d’avoir la clé pour ouvrir sa porte, le Chevalier du Soleil a la clé. F. Schuon évoque le fait que nous nous trouvons dans l’âge de fer ou sombre qui affecte toute l’humanité sans distinction ténèbres d’où sortira la Lumière par révélation et par apocalypse, il reste toujours après l’espoir l’espérance. Si nous constatons l’absence d’unité, la collision entre des mondes qui ne se comprennent pas, dans ce monde clivé, composé d’archipels qui consacre le règne de l’individualisme. L’Orient est-il sensé venir au secours de l’Occident, mais quel Orient ? Celui des dictateurs, des despotes, qui utilisent les religions de leur pays elles-mêmes complices, comme en Russie, en Inde, en Iran, en Turquie doit nous interroger.

Les extrémismes poussent à l’ombre des arbres des religions qui sont souvent incapables d’éliminer ces nématodes (petits animaux) qui pourrissent les racines et les branches, en détournant le meilleur de leurs vertus, dont celle de la tolérance et de la fraternité.

Inversement, quel Occident ! Cet Occident où l’intelligence est mue par la raison, par la critique poussée parfois jusqu’au déraisonnable. Un Occident qui engendre les confusions et les amalgames allant jusqu’à refuser l’éducation au fait religieux, susceptible d’ouvrir l’esprit aux hommes de bonne volonté et combattre l’ignorance, qui fait le lit aux extrémistes.

F. Schuon écrit : « Comme si la faculté rationnelle était toute l’intelligence, et la seule intelligence. » Faut-il dès lors espérer le retour d’une forme de Théosophie, Théosophie dont il est utile de rappeler la définition : doctrine ésotérique du divin, fondée sur la contemplation de l’univers et l’illumination intérieure. En résumé, une alliance du croire et du savoir, de la foi et de la raison, du combat contre l’ignorance, le fanatisme et l’ambition. C’est, le croire et savoir des grecs antiques comme : Pythagore et ses nombres sacrés, Platon son monde des idées, Aristote le maître du savoir, Plotin et son élévation spirituelle et aussi la loi d’Amour du christianisme. Cette Théosophie, est proche de la philosophie perennis. On retrouve la même démarche en Orient avec le Vedanta en Inde recherche de l’unité. On ne peut ignorer aussi, que l’ésotérisme d’Islam est aussi une voie de la Connaissance et de l’Amour.

Le Pérennialisme, la Tradition Primordiale, la philosophia perennis, la Franc-Maçonnerie présente donc des analogies avec ces pensées, on peut oser parler d’une voie spirituelle universelle permettant à l’homme de se construire, pour aller plus loin, plus haut sur le chemin de la spiritualité.

                                            Jean-François Guerry.    

F Schuon, R Guénon
F Schuon, R Guénon
F Schuon, R Guénon
F Schuon, R Guénon

F Schuon, R Guénon

 

 

Les dimensions de la Loge et l’universel maçonnique 25 février, 2023

Posté par hiram3330 dans : Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

Qu’entend on lorsque l’on parle des dimensions de la Loge ? Pourquoi faut-il passer de la Géométrie sans limites à la philosophie temporelle pour revenir enfin dans le champ du sacré intemporel? Comment allier universalité, unité et diversité dans une seule pensée ?

La méthode maçonnique est en effet riche de ces polysémies nées en son sein, de ces correspondances qui toutes tendent vers l’universalité. L’universalité à son tour en vient à se confondre avec l’idée d’Unité. Voici un travail d’ouverture pour la conscience des francs-maçons qui permettra de superposer soi à une loge qui par ses décors illustre et met en scène dans un seul modèle archétypal la totalité cosmogonique et l’unité originelle.

 On retrouvera au centre de ce travail l’idée d’une croix tridimensionnelle, schème directeur de tout bâti sacré destiné à recueillir la Lumière, déjà largement illustré dans les précédents articles de ce blog.

Que veulent dire les dimensions de la Loge ?

Ne peut-on y voir qu’au-delà de l’aspect géométrique, la Franc-Maçonnerie affirme son universalité, à travers le temps et l’espace.

À travers un sujet qui paraît simplement géométrique au premier abord, je me suis aperçu finalement que « les dimensions de la Loge » recouvraient bien d’autres perspectives. En effet, l’instruction au premier degré au REP, nous apprend que la Franc-maçonnerie est universelle. Voyons comment s’exprime cette universalité à travers le temps et l’espace.

Cette instruction du premier degré nous apporte des réponses aux questions suivantes :

Quelle forme de votre loge avait-elle ? Un carré long

De quelle longueur était-elle ? De l’orient à l’occident.

De quelle largeur ? Du midi au septentrion.

Quelle était sa hauteur ? Du zénith au nadir. Des pieds et des coudées sans nombre.

6 directions et 3 axes [i] :

 


[i] Voir « la Geste du Maitre » et « Les Tableaux de Loge des Maîtres » Edition du Maçon 2020 – 2021

tridimensionnelle

croix tridimensionnelle en loge au REP

_________________________________________________________

Ainsi que le font voir ces questions et ces réponses, la forme de la Loge est déterminée (un carré long), tandis que ses dimensions, se confondant avec l’univers, ne le sont pas. Cette description, dans ce qu’elle a de formel, concorde effectivement avec la forme matricielle de toutes les Loges, petites ou grandes. La loge est un contenant qui produit un contenu axial illimité. Ainsi par extension symbolique, l’univers serait issu d’une Grande Loge travaillant sous le maillet du Grand Architecte de l’Univers.

Pour les francs-maçons, héritiers des tailleurs de pierre et bâtisseurs de cathédrales, le « lieu de travail » a la forme d’un carré long, en rapport avec le nombre d’or et la qualification de l’espace, carré aux dimensions incommensurables dans six directions qui sont : l’orient, l’occident, le nord, le sud, le nadir et le zénith. Ces directions sont en conformité avec la réalité de la construction du monde cosmique, monde qui est le lieu géométrique contenant ce que décrit comme étant les sphères célestes en perpétuel mouvement: la « musique des sphères » suggérant l’harmonie de l’univers. C’est d’ailleurs la raison de la présence de la voûte céleste étoilée , avec ses constellations et son pivot: l’étoile Polaire. Véritable point fixe dans l’éternelle circumambulation, elle est justement et symboliquement placée au zénith de la pensée maçonnique.

Les rituels rappellent que la Franc-maçonnerie est universelle. Elle est universelle parce que l’Humanité est une, mais chaque être humain est unique par sa singularité et sa destinée. N’y a-t-il pas ici un paradoxe que seuls les francs-maçons peuvent résoudre?

Dans ce cas posons nous la question : « Quelle signification peut avoir le mot Universel ? » Universel, vient du mot latin « universalis », dont les racines, Unus : Un et Versus : dans la direction de, évoquent au premier degré l’idée de « orienté vers l’unité », signifie donc relatif « au tout ».

                L’Universalité de la Franc-maçonnerie n’est pas une simple question de forme, mais bien une question de fond. En laissant de côté les lois physiques, on peut, sans risque de se tromper, considérer que le terme Universel définit donc l’Humanité dans son ensemble.

Le respect constant des traditions, malgré la diversité des Grandes Loges de tous les pays, malgré la variété des Loges qui les composent, malgré la variété des Frères de toutes origines, de toutes nationalités, de toutes croyances et de toutes opinions qui les animent, assure à l’ordre maçonnique son caractère universel et permet à tous les francs-maçons de se reconnaître entre eux comme Frères.

Ces règles traditionnelles de bons sens sont notre ciment et notre lien. Sans être dogmatiques, elles sont à la fois d’ordre moral et d’ordre pratique. Elles fixent dans ses grandes lignes la vie des Loges, et assignent à tous nos Frères des impératifs moraux intangibles. Elles permettent à la Franc-maçonnerie de constituer ce vrai centre d’union où se rencontrent fraternellement des hommes qui, sans elle seraient demeurés perpétuellement étrangers les uns aux autres.

La Franc-maçonnerie est vaste, complexe et riche de ses différences. L’hétérogénéité des obédiences n’enlève rien à l’universalité qu’elle prône. La Franc-maçonnerie est universelle par son état d’esprit. Les rituels pratiqués sont différents, mais les symboles eux, sont identiques.

Le Franc-maçon a la possibilité de se grandir en construisant un monde meilleur ; il éveille sa conscience et acquiert la liberté intérieure. Le Franc-maçon est épris de sagesse, de générosité, d’humanité, de rectitude. Il doit s’affranchir de ses préjugés et de toute entrave à sa liberté de pensée. Il essaie de vivre en harmonie avec les autres en évitant autant qu’il peut les querelles.

La Franc-maçonnerie est aussi une école de vie, un chemin spirituel de prédilection, une démarche de libération. Si la Franc-Maçonnerie se qualifie comme universelle c’est donc qu’elle possède cette faculté, de par ses Constitutions, ses Rituels et sa méthode d’être acceptable par tous les Hommes et d’être, par conséquent, en adéquation avec la Nature Humaine.

Affirmer une universalité basée sur l’indifférence vis-à-vis des races et des origines ainsi que sur la neutralité à l’encontre des croyances semble donc consister à privilégier l’innée de la nature humaine. C’est la seule façon, assurément, par le recours à la raison, de favoriser la prise de conscience de l’appartenance au tout cosmique en même temps qu’à la communauté humaine. Cette prise de conscience combine un oubli certain de soi à la reconnaissance de l’autre. Il s’agit d’un dépassement qui ouvre donc sur l’universel de la nature humaine et qui, de ce fait, autorise l’avènement de l’altérité, précurseur de la Fraternité. Corollaire de ce sentiment apparait l’amour de la Justice et de la Beauté ; signes de l’harmonie entre les hommes. C’est là que réside le cœur de l’universalité de la Franc-maçonnerie.

A notre époque où le temps manque, où le temps n’a plus le temps d’être, dans l’élan frénétique vers nulle part, vers ailleurs, ou vers un Au-delà, l’entendement de l’espace-temps sacré exige la faculté de synthèse, autrement dit une intelligence et une raison de cœur. La maçonnerie apporte une vision d’un espace-temps qualitativement différent qui constitue le fondement, l’objet et le sujet de l’initiation à une autre vie, à une vie harmonieuse rythmée par le temps cosmique, à une vie dans la réalité.

Notre Temple est devenu une image du Cosmos et en même temps une image de l’Homme lui-même. Un espace et un temps sacré. Une relation entre le ciel et la terre, Dieu et ses créatures.

L’action simultanée et collective des Initiés rend chaque Franc-maçon solidaire de tous ses Frères proches ou lointains dans le temps et dans l’espace. Car la Franc-maçonnerie est effectivement universelle dans le temps et dans l’espace ; elle noue entre ses adeptes un lien puissant et incomparable, parce qu’elle les unit non par le respect d’une discipline extérieure, matérielle ou morale, mais par les fibres mêmes de leur vie intérieure, par le sentiment et la réflexion librement désirée et consentie.

La méthode maçonnique est aussi une symbolique qui ne contraint la pensée de personne, le symbole n’impose rien, il suggère, il éveille ; chacun y voit ce qui correspond à sa nature profonde et tous y puisent leur inspiration.

La vocation de la Franc-maçonnerie est de rassembler et d’unir tous les Hommes de bonne volonté, libres et de bonnes mœurs, dans un idéal de recherche et de perfectionnement moral et intellectuel.
Dans ce but, elle pratique une méthode de pensée faite de complète et entière liberté, qui s’offre à tous sans distinction d’origine, de classe ou de confession.

C’est l’ensemble de ses conceptions, de ses moyens, de ses démarches, qui confèrent à la Franc-maçonnerie le caractère indiscutable d’universalité.

L’Universalité est peut-être la raison qui permet à l’homme d’aller au-delà de lui-même, s’affranchissant des dogmes qui limitent notre liberté de percevoir la profondeur et la richesse du réel. L’Universalité maçonnique s’appuierait sur une conscience libre et fertile, qui assimile et fusionne avec l’ordre de l’univers. C’est ainsi que la conscience de l’universel et de l’incommensurable en nous, permet de rassembler les diversités humaines pour enfin y découvrir l’Unité qui s’y cache…

Th:. M:.   - R:.L:. « Les Cherchants Ecossais » O:. de Hyères -

 le 16/02/2023

SOURCE  :  https://www.ecossaisdesaintjean.org/2023/02/les-dimensions-de-la-loge-et-l-universel-maconnique.html

KSl

Le Nouvel An Chinois : tradition, poésie, taoïsme ! 31 janvier, 2023

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Le Nouvel An Chinois : tradition, poésie, taoïsme !

 
 
 
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L’actualité offre avec le 22 janvier 2023 trois axes de réflexion :

 
  • C’est le 1er jour du nouvel an chinois qui prend le nom d’Année du Lapin (ou du Chat ou du Lièvre) Elément Eau Yin.
  • Un regard sur la logique de l’énergétique taoïste
  • C’est aussi un prétexte pour ouvrir une réflexion sur la permanence du mythe de l’horoscope dans les sociétés modernes.
 
 
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Le Nouvel an chinois

 
 

Bien que le calendrier grégorien soit la référence internationale incontestée, l’existence de calendriers traditionnels ou spécifiques à une religion maintient un espace poétique et culturel.

Depuis près de 5000 ans, le 1er jour de la 2ème lunaison après le solstice d’hiver, est traditionnellement le début de l’année chinoise ; cette année, cela tombe le 22 janvier !

Le calendrier chinois est un calendrier luni-solaire (qui est aussi adopté par d’autres traditions et en particulier la tradition juive) avec deux particularités :

 

o 12 à 13 mois lunaires : chaque mois lunaire démarre avec la nouvelle lune jusqu’à la veille de la nouvelle lune suivante (soit 29 à 30 jours par mois lunaire) – pour rétablir le décalage, il est rajouté des mois lunaires épisodiquement ;

o Pour le décompte des années, c’est la course apparente du soleil qui fait référence.

La légende dit que ce calendrier chinois a été institué lors du règle du mythique Empereur Jaune Houang-Ti en l’an 2697 avant JC.

Le nom de l’année comprend trois éléments :

 
  1. Le caractère Yin ou Yang de l’année : les années paires étant Yang, les années impaires, Yin !
  2. L’élément de l’année : il est choisi dans la liste des cinq éléments : Bois, Feu, Terre, Métal et Eau ; chaque élément affecte deux années ; on dit généralement que la première des deux années correspond à la forme Yang de l’élément et la deuxième année à la forme Yin de l’élément ; à titre d’exemple 2022 et 2023 sont sous l’influence de l’élément Eau : 2022 a été l’Eau Yang, 2023 sera sous l’influence de l’élément Eau Yin.
  3. Le nom d’un animal de la liste des 12 animaux symboliques qui ont un ordre de passage : Le Rat, Le Buffle, Le Lapin (ou Chat ou Lièvre), Le Dragon, Le Serpent, Le Cheval, Le Bouc (ou la chèvre), Le Singe, Le Coq, Le Chien et Le Cochon. Le 22 janvier 2023, nous rentrons dans l’année Lapin (ou Chat ou Lièvre)-Eau-Yin .
 
 

L’astrologie énergétique chinoise donne quelques traits de caractère en rapport avec l’énergie du lapin ! On a coutume de relever :

- une très bonne capacité à la critique

- une propension à vouloir conseiller

- une très grande sensibilité à la frustration et aux échecs

- la recherche de la solitude.

 
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La logique énergétique taoïste du calendrier chinois

  • L’animal symbolise une forme d’énergie (influence du Ciel) ; on compte 12 animaux ; le Chat (ou le lapin) correspond à l’énergie Chao-Yin sous sa forme Yin. On est donc dans une cyclologie à base 12.
  • L’élément symbolise un des cinq éléments (influence de la Terre) ; pour cette nouvelle année ce sera l’élément Eau sous sa forme Yin. On est donc dans une cyclologie à base 10.
  • Chaque année est sous l’influence globale
  • soit de l’énergie Yin
  • soit de l’énergie Yang,
  • alternativement ; cette année ce sera l’énergie Yin ! On est donc une cyclologie à base 2.
  • Ces trois cyclologies traditionnellement ont une date de commencement ; il s’agit de l’année – 2697 avt J.C. Si on les combine, on retrouve la même combinaison tous les 60 ans (6x5x2). C’est la durée du « siècle » chinois. Avec cette nouvelle année nous abordons la 39ème année du siècle actuel débuté le 2 février 1984.
 
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Sans vouloir rentrer dans les détails, l’énergétique taoïste peut se comprendre comme un ensemble de courants d’énergie qui permet la vie et l’influe.

Rappelons que dans la pensée taoïste, les vivants sont sous l’influence de la Terre et du Ciel.

Schématiquement on peut considérer la matière vivante et donc l’être humain comme un substrat organique animé par une énergie qui le met en mouvement.

L’influence céleste décline six énergies et l’influence terrestre cinq éléments ; chaque énergie et chaque élément sont bipolaires (polarités yin et yang).

 
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Les 6 énergies sous les polarités yin et yang deviennent 12 branches terrestres symbolisées par les 12 animaux traditionnels : par ordre

 

1. le rat,

2. le buffle,

3. le tigre,

4. le chat (ou lièvre ou lapin),

5. le dragon,

6. le serpent,

7. le cheval,

8. le bouc (ou mouton ou chèvre),

9. le singe,

10. le coq,

11. le chien

12. et le cochon.

Les 5 éléments sous les polarités yin et yang deviennent les 10 troncs célestes : par ordre

- le bois,

- le feu,

- la terre,

- le métal

- et l’eau.

 

Comme toutes les cyclologies démarrent en l’an 2697 avant JC , chaque année chinoise est sous l’influence d’un triptyque :

- le caractère yin ou yang de l’année,

- l’énergie (symbolisée par un des 12 animaux) de l’année

- et un des cinq éléments.

Et c’est ainsi que cette nouvelle année chinoise est sous l’influence du Tigre, de l’Eau et de la polarité Yang.

 

Ces cyclologies se retrouvent aussi dans le fonctionnement du corps humain sur le plan énergétique ; la médecine chinoise y fait référence aussi bien en acupuncture qu’en phytothérapie.

L’astrologie énergétique chinoise n’est pas une astrologie prédictive événementielle ; elle donne des tendances énergétiques aussi bien pour les êtres vivants que pour la planète.

Pour comprendre cette démarche il faut rappeler les grandes lignes de la logique taoïste en rapport avec les trois cyclologies évoquées précédemment.

Chaque être humain est naturellement en harmonie avec les tendances énergétiques de son année de naissance et cette « imprégnation » durera jusqu’à sa mort !

Si les trois polarités, le yin et le yang, les douze énergies, et les éléments sous leurs dix aspects, constituent une sorte de modèle logique de fonctionnement de tout ce qui concerne la vie, placer un individu sous l’influence d’une trilogie particulière en rapport avec son année de naissance aboutit à faire d’une existence un ensemble forcément déséquilibré par une « empreinte » particulière.

Donc fondamentalement dans la pensée taoïste, tout être humain est vulnérable et fragile et il n’y a pas de « super héros » ; cette reconnaissance de notre incomplétude existentielle explique notre vulnérabilité et notre obligation de nous protéger !

Dans cette relation conflictuelle sur le plan énergétique, nous aurons à gérer des énergies perverses (liées soit à des événements, ou à une mauvaise alimentation ou à des conflits psychologiques mal gérés) capables de nous fragiliser voir d’attenter à notre santé, et des énergies saines, celles qui nous habitent depuis la naissance et celles que l’on peut engranger selon notre mode de vie.

Mais revenons à notre année 2023

 

Elle est donc placée sous l’influence des composantes des trois cyclologies évoquées appliquées à cette année :

  • Le caractère Yin de l’année,
  • l’énergie symbolisée par Le Lapin (ou Lièvre ou Chat) (appelée en chinois l’énergie yang ming)
  • et l’élément Eau sous sa forme yin.

Le caractère Yin donne une tonalité introvertie aux événements.

L’énergie yang ming sous sa polarité Yin (symbolisée par le Lapin) est une énergie qui facilite l’élimination des éléments soit sans vitalité soit nocifs.

L’élément Eau sous sa forme Yin renvoie à ce qui est en rapport avec la forme végétative, la mémoire et la tradition.

 

L’influence des trois cyclologies concerne ce que l’on appelle les énergies saines mais le déséquilibre énergétique inhérent à notre existence nous expose à une fragilité concernant les carences homologues :

  • La polarité Yang de l’année nous expose à une vulnérabilité en rapport avec l’énergie Yin perverse
  • L’énergie Yang ming sous sa polarité Yang (symbolisée par le chat) nous expose à une vulnérabilité en cas d’exposition perverse à son homologue (voir le schéma) en l’occurrence l’énergie Chao yin sous sa forme yin.
  • L’élément Eau sous sa forme Yin fragilise l’élément Feu et facilitera une vulnérabilité à un Feu pervers. (voir le schéma).

L’astrologie énergétique chinoise ne prétend pas annoncer un événementiel prédictif ; elle propose, à partir de l’analyse énergétique taoïste, des pistes de réflexions sur les potentialités et les points faibles aussi bien pour les êtres humains que pour les collectivités.

Si on comprend que l’énergie Yang Ming a pour fonction de se débarrasser de ce qui est malsain, 2023 peut se révéler comme une année de clarification ! Dans un sens ce serait plutôt une bonne nouvelle !

A titre de comparaison, reprenons les faits marquants des deux précédentes années Chat Eau Yin :

- Année 1963

o 22 janvier : signature du traité de l’Élysée par le Général de Gaulle et le Chancelier allemand Adenauer.

o 26 juin : discours de John F. Kennedy à Berlin (Ich bin ein Berliner)

o Assassinat du Président Kennedy

o 200 000 personnes marchent sur Washington pour soutenir les droits civiques Le Dr Martin Luther King prononce son discours « I Have a Dream »

o Les États-Unis, l’Union soviétique et la Grande-Bretagne signent un traité d’interdiction des essais nucléaires

o Mort de Jean XXIII – Election du future pape Paul VI

- Année 1903

  • La première course cycliste du Tour de France
  • Les Britanniques prennent le contrôle de l’ Empire peul .
  • Colonisation de l’Afrique par les puissances européennes
  • Conflits régionaux disséminés (Amérique, Europe, Moyen-Orient, Egypte)

Comment comprendre le goût pour l’astrologie

C’est une banalité que d’observer que l’astrologie offre une réponse à l’inquiétude que les êtres humains développent au sujet de l’avenir qu’ils vivront.

Ce qui pose question c’est de constater une relative satisfaction des personnes qui consultent leurs horoscopes soit sur le caractère général de l’influence supposée d’un signe astral, soit sur le côté prédictif que l’analyse d’un thème peut donner.

Quelle que soit la méthode astrologique on peut reconnaître qu’elles reprennent les grands épisodes de la vie d’un être humain et en particulier santé, amour, richesse, sociabilité, accidents qui sont corrélés avec des éléments d’un thème astral.

Étant donnée la variabilité des situations possibles on peut comprendre que de façon aléatoire il y ait une correspondance entre un vécu et une situation théorique.

En franc-maçonnerie, il y a des symboles qui peuvent être reliés à une approche astrologique : le temple reproduit les éléments de l’influence astrale, les planètes et les étoiles.

o Les étoiles

o Les 12 lacs d’amour de la houppe dentelée

o Le septentrion : Du latin Septentrio, de septem (« sept ») et triones, pluriel de trio (« bœuf de labour »), désignation latine de la Grande Ourse, constellation circumpolaire de l’hémisphère Nord composée de sept étoiles. (source wikipedia)

o La voûte étoilée

o L’orientation du temple

o La circumambulation dextro centrique

Mais stricto sensu, cela ne va pas plus loin et il n’y a pas dans les rituels de corrélation entre un événement rituélique et un thème astral.

Il y de nombreuses manières d’interpréter la position des astres ou l’influence des années de naissance ; citons : l’astrologie humaniste, l’astrologie conditionaliste, l’astrologie structurale, l’astrologie holistique, l’astrologie karmique et aussi les astrologies Gauloise, Aztèque, Tibétaine, Égyptienne et Hindoue !

Signalons que certaines religions interdisent le recours aux astrologies , en particulier la religion catholique et l’Islam !

SOURCE :

ETRE FRANC MACON OU NE PLUS L’ETRE…. 15 décembre, 2022

Posté par hiram3330 dans : Bleu,Contribution,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

ETRE FRANC MACON OU NE PLUS L’ETRE….

 

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J’ai longtemps hésité à écrire cet article fleuve !
Je m’y résous dans le mesure où toute expérience est bonne à partager, pour autant qu’elle soit le reflet d’un vécu, exposé de manière sincère, réfléchie et non malveillante vis à vis de personnes qui pensent différemment.

Oui, j’ai été Franc Maçon.

De la manière la plus simple qu’il soit, je vous raconte comment c’est arrivé.

Un jour, une connaissance avec lequel j’avais lié d’amitié m’interpelle, se révélant comme étant lui-même Franc Maçon.
Appelons le « Jean » : il me dit en résumé : « J’apprécie beaucoup ton regard sur le monde qui t’entoure : je pense que tu es un Franc Maçon qui s’ignore »

J’écoutai ce qu’il avait à me dire…ou me proposer.

De mon côté, il est vrai, j’avais (et ai toujours) une soif de dialogue ouvert sur toutes les questions qui concernent notre existence et nos relations aux autres.
J’écoutai ce qu’il avait à me dire, sans aucun à priori, ni pour, ni contre.

Je me contentai ensuite de lui témoigner mon intérêt, sous réserve que

J’écoutai Jean pendant un très long moment, qui se termina par sa proposition d’être mon « parrain » si je décidais de franchir le pas de ma candidature à envoyer, par son intermédiaire, au « Président » de sa Loge, faisant elle-même partie du GODF
(Grand orient de France)

Je pris longuement le temps de la réflexion, avant de lui répondre de manière positive.
Je revis Jean pour lui remettre ma lettre de candidature.
Il précisa que je serais contacté par différents « enquêteurs » pour trois rendez vous distincts en mon domicile…( pourquoi pas ?)

Quelque deux mois plus tard, je reçu la visite de 3 personnes, qui ne déclinèrent pas leur identité (par discrétion, disaient t’ils…) et qui m’interrogèrent, de manière fort courtoise sur :

Au bout de quelques mois encore, Jean m’informa que j’étais attendu tel jour, telle heure, à tel endroit…

Que de mystères !
Arrivé sur place, en bordure de ville, bâtisse aussi sombre que son quartier, je fus introduit dans une grande salle où l’on me pria d’attendre…

J’eus tout le temps de découvrir les lieux : grandes tables, chaises, bar/cuisine, tableaux, écriteaux divers…

Des bruits me parvenaient, laissant supposer qu’une réunion se passait aux étages supérieurs, auxquels on accédait par un grand escalier en marbre.

Après un certain temps, une personne, fort courtoise, m’invita à le suivre.
En haut des escaliers, il me mis un bandeau sur les yeux, et me pria à nouveau d’attendre : les brouhahas entendu précédemment avaient plus ou moins cessé.

N’y voyant rien, je fus introduit et guidé dans une salle, au centre de laquelle m’attendait un siège sans accoudoirs.

Différentes questions me furent posées, par différents intervenants, questions auxquelles je répondis franchement, et sans complaisance.

A la fin de cette curieuse audition, je fus congédié, et la même personne qui m’avait accueilli me ramena au rez de chaussée, dans cette salle qui, je l’apprendrai bien plus tard, s’appelle : « La Salle Humide ».

Durant mon trajet de retour, je me sentais perplexe, pris en tenaille entre ma curiosité d’en savoir plus, et tout ce mystérieux cérémonial qui n’était pas, je l’avoue, ma tasse de thé…

Quelques semaines plus tard, Jean me re-contacta, m’annonçant que ma candidature avait été retenue et que je serais « initié » à telle date.

Le terme « initiation » me rebutait à ce point que j’ai failli tout arrêter.

Initié à quoi ? pour apprendre quoi en dehors du monde dit « profane » ?

Mais bon, comme on dit en Languedoc-Roussillon, le vin était tiré, et il n’y avait plus …qu’à le boire …

 

Le jour J, retour à la même adresse, accueil par la même personne, qui me conduisit dans un « cabinet de réflexion » d’à peine plus de 1m x 1m, peint tout en noir, avec une bougie, un crâne humain, du sel, et que sais je encore.
Qu’étais je venu faire en cette galère !?

Au bout d’une demi heure, la même personne revint m’apporter un formulaire, destiné à écrire mon « testament de vie » : patienter à nouveau !
Enfin, eu lieu mon Initiation (toujours les yeux bandés) selon tout un cérémonial centré sur différents « voyages » symbolisant le Feu, l’Eau, La Terre et l’Air ( références bien connues dans les différents signes du Zodiaque…)

Le but de l’Initiation était de me faire passer du statut de Profane au stade de Franc Maçon, par le cérémonial qui m’apporterait « La Lumière ».

Je vous passe les détails du cérémonial, qui, en fin de course, aboutit à ce que l’on enlève le bandeau, vous permettant de découvrir…vos Frères.

Vous dire que je n’y ai ressenti aucune émotion, serait un gros mensonge….

 

Mais devenir Franc Maçon commence par être Apprenti.

En fin d’initiation, je reçus un petit tablier blanc, une paire de gants, blancs, et une rose, destinée à ma compagne de cœur.

Je découvris que le « Temple » était organisé selon les quatre points cardinaux Orient (Est) , Occident (Ouest) , Nord et Sud.

L’accès au Temple se fait par l’Occident (La porte, symbolisée par des colonnes)

A l’Orient officient le Vénérable Maître (le chef élu) le Secrétaire et l’Orateur, sur une estrade.

Au Nord siègent les Apprentis et le Second Surveillant (chargé de leur formation)
Au Sud siègent les Compagnons et le Premier Surveillant (chargé de leur formation)

Les Maîtres, eux, s’installent au Nord ou Sud, comme ils le souhaitent et selon les places disponibles.

En son milieu, côté Oriental, un ensemble de carrelages noir et blanc rappelant le jeu de dames, et  constituant le « Pavé Mosaïque »

Lorsqu’il y a une Tenue (réunion) , les Frères sont introduits dans le temple, par le Maître de Cérémonie, et selon l’ordre croissant de leur grade :

D’abord les Apprentis, puis les Compagnons, puis les Maîtres, puis le Collège des Officiers, suivi par le Vénérable Maître et d’éventuels  invités de Haut Rang Maçonnique.
Quel qu’ils soient, les Frères circulent dans le sens des aiguilles d’une montre, en ayant soin de ne jamais fouler le « Pavé Mosaïque »
Être apprenti suppose que

Durant les quelque 16 mois de mon statut d’apprenti réduit au silence, j’observai avec grande acuité, les modes de fonctionnement de notre Atelier (Loge).
A l’ouverture des Travaux, l’Orateur rappelle les principes constitutifs de notre Ordre, repris dans l’article 1 de la Constitution du GODF, rappelant que, je cite :

« La Franc Maçonnerie, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité, elle travaille à l’amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité. Elle a pour principes la tolérance mutuelle, le respect des autres et de soi-même, la liberté absolue de conscience.
Considérant les conceptions métaphysiques comme étant du domaine exclusif de l’appréciation individuelle de ses membres, elle se refuse à toute affirmation dogmatique. Elle a pour devise Liberté-Egalité-Fraternité »

A force de l’entendre tous les 15 jours, je connaissais cet article par cœur, et il n’éveillait en soi, rien de négatif à mes yeux, étant donné qu’il s’agissait que de grands principes auxquels j’adhérais dans leur ensemble.

 

Par la suite, j’eus droit à des « augmentations de salaire », comprenez par là l’élévation au grade de Compagnon d’abord, et de Maître, ensuite.
Tout ou presque, en Franc Maçonnerie est symboles et rituels :

Les trois grades de base font référence aux bâtisseurs du moyen âge, appelée « La Maçonnerie Opérative » alors que la Franc Maçonnerie est dite « Spéculative ».

 

L’Apprenti apprend à tailler la pierre brute à l’aide du ciseau et du maillet.

Il est pour cela revêtu d’un tablier dont la bavette est relevée, de sorte de le protéger contre les éclats supposés de la pierre, et de gants blancs.
Le Compagnon a pour tâche de polir la pierre brute et de veiller à sa rectitude : il utilise pour cela, essentiellement la règle et l’équerre.
Comme il ne risque plus la projection d’éclats, la bavette de son tablier est rabattue,
mais dispose toujours de gants.
Le Maître veille à ce que les pierres ainsi créées s’inscrivent parfaitement dans la Construction, utilisant pour cela divers instruments tels le niveau et le compas.
Ses « décors » sont constitués d’un tablier plus sophistiqué et d’un cordon transversal rappelant celui des Maires.

Chemin faisant, je m’aperçus que les Tenues auxquelles je participais s’appelait
« La loge Bleue » à laquelle se superposait d’autres Loges appelées « Ateliers Supérieurs ou de Perfectionnement » dont faisaient partie la plupart des membres du
« Collège des Officiers »
Le temps de m’y retrouver dans ce lexique opaque, je m’aperçus au fil du temps que ces mêmes Ateliers Supérieurs, constituaient un véritable organe de pouvoir au sein de la Loge,  uns sorte d’État dans l’État des Loges Maçonnique.

Une sorte de microcosme qui oriente ou prend ses décisions, sans jamais en rendre compte de manière limpide à la modeste « Loge Bleue ».

Chaque année, en Juin, ont lieu les élections du nouveau Collège des Officiers, pour l’année Maçonnique suivante, sachant que les « usages » veulent qu’aucun Officier ne peut rester à son poste plus de trois ans, mais doit être réélu chaque année intermédiaire…
Le Collège des Officiers est constitué de :

Ces élections, sensées être démocratiques, ne le sont pas tant que cela, car déjà toute préparées par le Collège des Officiers sortant (où les principaux d’entre eux dans l’ordre hiérarchique)

J’eus sans doute l’impertinence de relever certains dysfonctionnements, manipulations ou mensonges,  preuves à l’appui… : cela fit un grand « plouf » dans la Loge Bleue au sein de laquelle je l’exprimai.

En « Salle Humide » après la tenue, l’un ou l’autre Frère me disait : « j’ai apprécié ton intervention » : c’est gentil mais cela ne change rien au fait que de manière habituelle, une majorité de Frères font figures de …figurants, ou en tout cas ne se « mouillent pas » dès qu’il s’agit de relever de quelconques contradictions entre les grands principes et leur application sur le terrain.

Je n’ai jamais recherché aucune forme de pouvoir : quel pouvoir ? par rapport à qui ? pour quelle motivation ?
Par contre, j’ai toujours été rebelle à toutes formes de manipulations des pouvoirs en place, quels qu’ils soient.

Cela on le connaît déjà par trop, dans « la vie Profane ».

Si l’on retrouve la même chose en Franc Maçonnerie…
Si l’on y retrouve les mêmes nébuleuses hiérarchiques souterraines,
Si l’on y cultive les mêmes principes du non dit, du silence et des clans intérieurs,

A quoi bon ?

 

Il faut également savoir que la notion d’argent n’est pas étrangère au fonctionnement des Obédiences, en effet.

La « Capitation » autrement dit la cotisation annuelle obligatoire pour tous les Frères était en 2010 de 235€ dont 80% retourne à l’Obédience (Paris) et le solde étant consacré à de divers frais de fonctionnement de la Loge locale.
Le GODF gère via de quelconques sociétés connexes, un parc immobilier de bâtiments la plupart du temps conçus à usage de « Temple » et mis à disposition moyennant redevance, à diverses loges appartenant au Grand Orient de France, ou autres Obédiences sœurs voir concurrentes.

Mais bon, rien d’exceptionnel en cela.
Il n’empêche que toutes les Loges, quelles qu’elles soient ont intérêts à garder un nombre suffisant d’adhérents pour faire face à leurs charges.

C’est ainsi par exemple que tout Frère désirant « prendre du recul » quelles qu’en soient les raisons, peut demander d’être mis « en sommeil » , c’est-à-dire qu’il ne participe provisoirement plus aux Tenues, mais continue à payer ses Capitations.

Tel ne fut pas mon choix.

J’ai donc décidé de tirer ma révérence, pour l’unique raison que je ne retrouvais plus les raisons philosophiques et morales essentielles pour lesquelles j’y étais entré.


Mes réflexions, mes doutes, mes questions…

 

  Les conclusions de cet article :

Que la Franc Maçonnerie soit une organisation « secrète » est une évidence, même si certains la considèrent comme uniquement « discrète ».

C’est jouer sur les mots, au vu de son opacité, qui demeure même lorsque l’on en fait partie.

 

Liens

Si vous le souhaitez, vous trouverez sur Internet, des centaines de liens allant de l’éloge, passant par la critique jusqu’à l’abject….

Je vous en propose un seul ayant trait au vocabulaire Maçonnique : pour l’approcher, voir même pour comprendre certains passage de mon article, cliquez ici

 

Il y a sur Internet de nombreux sites ou blogs traitant de ce sujet à des titres divers.
Il est très rare que vous puissiez laisser librement un commentaire…
Ce n’est pas le cas ici : dites ce que vous pensez ou posez vos questions.

La démocratie, c’est aussi et surtout pouvoir s’exprimer librement…
de sorte que… « la parole circule »….

4 décembre 2010

 

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SOURCE  : http://veillecitoyennelibre.over-blog.com/article-etre-franc-macon-ou-ne-plus-l-etre-62323975.html

VEILLE CITOYENNE LIBRE  – BLOG D’EDDY DELHAYE

 

Il était une fois … 13 décembre, 2022

Posté par hiram3330 dans : Contribution , ajouter un commentaire

Il était une fois …

Δ

Il était une fois au pays du compas et de l’équerre

un profane désirant être soi sous les cieux et sur la terre.

Il rêvait d’être un homme mieux devenir maître de son destin,

érudit de la voie du milieu les pas entre Boaz et Jakin.

Il rêvait de polir sa pierre d’étudier la planche à tracer

de découvrir les mystères de son cœur de ses pensées.

Il en rêvait tant qu’il frappa à la porte de l’atelier,

avec ses rêves, il tapa pour en revêtir le tablier.

Δ

Il y rentra les yeux bandés dans le doute du chemin

emmitouflé dans son passé son vécu d’être humain.

Il fit voyage sur voyage et au troisième, coup de maillet,

l’apprenti posa ses bagages dans la vallée des initiés.

Elle était belle cette lumière là haut sur le sommet

cet œil si loin de la pierre de tout ce qu’il avait aimé.

Trois marches à conquérir, debout à la main une épée

pour renaître et faire périr, l’art vulgaire qui l’avait façonné.

Δ

En funambule il souriait sur le mosaïque pavé

en équilibre sur le sentier des actes et des pensées.

Un miroir dans la main il avançait dans le silence,

pas sur de soi, de demain, en lui peu de confiance.

Buvant l’amertume, les regrets, les désillusions de l’attrait,

car la voie choisie n’est jamais fidèle à ce que l »on imaginait.

Cela ressemblait à rien de tout ce qu’il avait pu entendre,

se sentant perdu sans un lien profane pour le comprendre.

Δ

Tous ces symboles, ces rituels, n’étaient que fables humaines.

Des coups de shoote à la truelle, pour l’ego des âmes en peine.

Il hésitait sans ses métaux, à poursuivre et à tailler

sa route seul sans un mot face à lui même, s’en aller.

Vers l’horizon, vers le passage, de l’occident vers l’orient,

acteur de l’heureux présage loin de l’espace temps.

Combattre les incertitudes de l’antique être qu’il était,

aux berges des certitude où le mental veut tout gérer.

Δ

Combattre son être sournois, ses mensonges et sa misère

jusqu’à la limite de soi, de ses forces et ses chimères.

Pour trouver là dans la poussière, l’amour qui brûlait

son corps d’os et de chair, sous la fraternelle voûte étoilée.

Alors, marchant sur le trottoir seul à minuit bien passé,

il se dit dans la nuit noir : « finis ce que tu as commencé,

car malgré les épreuves mon frère,  libre à toi de décider

de laisser entrer la lumière ou de garder les volets fermés« 

Δ

Denis Carnevali

 

 franc-maconnerie4

Pour l’existence de loges maçonniques libres 22 novembre, 2022

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Pour l’existence de loges maçonniques libres

Georges J-f Bertin·Jeudi 21 novembre 2019·

 

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1) De l’utilité maçonnique des obédiences…

2) Les chemins de Compostelle à l’Or.°. de Tours, un exemple de loge libre

3) Notre engagement et notre liberté.

 

De l’utilité maçonnique des obédiences…

 

La Franc-maçonnerie offre à celui ou à celle qui le désire, les moyens de son propre accomplissement. Elle libère par les voies de l’initiation, un accès à ce qui serait le bien le plus précieux pour l’homme, c’est-à-dire le gouvernement de soi.

L’initiation, que l’on doit comprendre comme “magiquement” le passage d’un état à un autre, propose donc à l’homme resté profane, une sorte d’équipement qui lui permettra de s’accorder le souverain bien et de comprendre qu’en quittant les motifs subis de son existence, il pourra prétendre à saisir enfin les arcanes du désir d’être.

 

Cette initiation n’accorde pourtant aucun pouvoir, aucun surcroît instantané, aucun attribut valorisant.

L’initiation doit s’entendre comme la venue prochaine de nouvelles potentialités dont tout le travail sera de se les accorder en propre. Mais ce saut dans les vertiges de la liberté est une des premières grandes difficultés de la démarche.

 

La suite ne se démentira pas. Ni académie, ni petite université du soir, ni le lieu d’une assemblée où il y aurait à savoir et donc à ignorer, la franc-maçonnerie et, ses rituels, par nature, n’existe pas.

 

Car pour réaliser ce qu’elle vient de promettre, elle doit se soustraire au monde. Elle doit s’affranchir de toute attache profane, elle doit disparaître à elle-même, manière de s’apparaître en dehors de toute socialité.

La Loge est alors le lieu d’un séjour, la possibilité d’un ailleurs radical, un moment suspendu, une parenthèse où ce qui s’y déploie relève précisément d’une présence à soi.

 

Il faudra donc renoncer aux réifications et aux fantasmes du débat politique car la loge est bien rarement l’antichambre d’une quelconque réforme. Tout cela est bien plus en rapport avec la règle d’abstinence en psychanalyse, où l’on sait que la séance “n’a jamais été, n’est pas et ne sera jamais”. Nous sommes là en effet dans un monde de représentations secondaires où la réminiscence, le sens de la trace et le sort de l’imaginal tiennent lieu plus sûrement de régimes de rationalité.

 

Les Loges libres, c’est-à-dire sans appartenance obédientielle, ont parfaitement compris cela et considère que le “gouvernement de soi” n’appelle surtout pas le secours d’un pouvoir référentiel.

Et on peut s’interroger sur cette attitude insolite des frères se ralliant à une obédience. Car il y a bien quelque chose de contrevenant dans l’idée de restaurer des liens de dépendance là où l’objet est de s’en dessaisir.

Cette “servitude volontaire” à un appareil administratif, de la bouche de nos sœurs et frères, se justifie bien sûr. Elle permet aux Loges de s’épargner la dérive sectaire, elle garantit les bonnes pratiques, elle cautionne les discours et protège la validité du parcours initiatique.

Mais elle permet aussi l’acquisition immobilière, le contrôle intégral de la communication et l’existence de quelques “fraternelles”, ce qui situe cette maçonnerie prétendument universelle comme étant finalement très parisienne…

 

Pourtant ce couvert institutionnel a un prix. Car là où en 1784 en pleine naissance de la franc-maçonnerie, le philosophe des Lumières Emmanuel Kant s’exclame “ose savoir”, l’obédience prescrit, impose, administre, instruit.

Ce qui est aussi une façon entre elles, de constater leur division, leur souci de l’exclusive et la légitimité qu’elles se disputent en brandissant patentes, constitutions et règlements. Chacune de ces obédiences étant nécessairement la plus authentique d’entre toutes.

 

Une autre maçonnerie existe en France.

 

Elle est significative et pratique sans autre publicité ce qui lui est cher. Vous avez là des femmes et des hommes qui ayant rompu avec la puissance du réseau, traversent la grande solitude de leur indépendance s’étant sans possibilité de retour, éloignés du chaleureux sentiment d’appartenance.

Sans plus de mots d’ordre, de correspondance du Conseil de l’Ordre, de questions à l’étude des Loges, ils travaillent et plutôt sérieusement.

Ils n’ont plus rien à reproduire ni du discours central, ni à consentir aux douces injonctions des Frères en mal de supériorité.

Ils exercent avec ferveur ce projet de ne rien compromettre d’eux pour grandir ce monde d’un peu plus de lumière.

 

Les loges libres savent elles, que la lumière ne s’administre pas.

Elles ont donc abandonné l’idée d’une prétendue utilité maçonnique de l’obédience.

 

Elles pratiquent ainsi une maçonnerie anhistorique – comme depuis toujours – avant même que les obédiences ne les fédèrent et considèrent qu’à partir de là, ça commence à compter…

 

On s’étonnera donc de cette contradiction à désirer la liberté en s’affiliant à une obédience.

On se questionnera sur ce penchant de l’homme à cautionner son désir par d’improbables attaches institutionnelles.

Car la voix et l’esprit d’hommes en quête d’eux-mêmes, ne seraient donc opposables qu’à la condition d’être entendus par un pouvoir, les effets d’une administration et les bienfaits paternels de l’assurance d’un appareil.

 

Pourtant en Loge, le seul événement qui soit, c’est l’événement de la “parole”. Non pas de l’énonciation, du discours ou la production d’une énième épistémè.

C’est le moment où ayant renoncé à tout projet de signification, nous nous en remettons lointainement à ce qui peut se créer en nous, de parlant. Ce qui “parle” c’est le désir d’être. Et cela même est inconditionnel. C’est l’effet d’un “je” et non pas d’un “nous”.

 

Les Loges libres sont respectueuses de leur environnement. Elles ne revendiquent rien d’autre qu’un droit à l’existence que l’on leur offre aujourd’hui très difficilement. Car comment tolérer, dans une sorte de geste autogestionnaire, des femmes et des hommes qui considèrent que le seul bien qu’ils possèdent, c’est précisément le prix qu’ils sont prêts à payer pour ne pas céder sur leur désir?

 

Comment comprendre, que d’eux-mêmes, ils acceptent cette sorte d’ascèse qui ne débouche sur aucune gratification, aucun affichage, aucune valorisation sociale.

 

Mais qu’ayant trouvé dans la nuit de leur nescience les ressorts de la joie et de l’émerveillement, ils se dispensent – comme un projet – d’une autorité supérieure.

 

C’est dire que ces loges libres renoncent aux motifs d’une cause qui viendraient les légitimer. Elles ne se réclament que d’elles-mêmes, non pas dans le sens perverti d’une auto proclamation.

Mais que rien ne les précédant ni même leur succédant, cette désertion du social – de son ordre et de sa symbolique – revient à s’offrir les mécanismes d’une (contre) structure qui ne repose sur plus rien d’autre que le souffle, ce qui est le plus ultime de la démarche maçonnique.

 

Car ce souffle c’est l’initiation.

 

Appartenant alors au monde du symbolique ces femmes et ces hommes deviennent, en fraternité, les vrais sujets de l’histoire. Loin de toute institution, “osant savoir par les moyens de leur propre entendement”, c’est là seulement qu’ils trouvent la plus sûre des “Lumières”.

 

Un maçon libre, octobre 2014. Source GADLU Infos

Les Chemins de Compostelle, une Loge libre !

(par un frère fondateur de la loge libre de Tours).

 

La Respectable Loge « Les Chemins de Compostelle » est une Loge libre !

Mais qu’est-ce que cela signifie « être une Loge libre » ?

 

Toute d’abord, cela signifie « être une Loge souveraine ».

Nulle autre autorité que le conseil des Maîtres n’est autorisé à prendre les décisions qui engagent la loge. Ni arrière loge ni obédience ne peuvent se targuer de décider pour la loge bleue que nous constituons.

Cette situation est plutôt rare en ces temps où la quasi-totalité des loges existantes, en échange de leur confort matériel et de l’accès à un réseau de relations, ont troqué leur indépendance pour une sujétion administrative, réglementaire, et même spirituelle, la loge n’ayant l’autorisation d’utiliser les rituels « qu’en lecture seule », comme on dit dans l’informatique.

 

C’est tellement vrai que, dans la maçonnerie obédientielle, l’installation d’un nouveau

Vénérable Maître est fréquemment confiée à une émissaire du pouvoir central (grand, respectable, illustre, c’est selon) qui a autorité pour valider le choix des Maîtres de la Loge.

Cela est symbolisé par la remise du maillet à l’illustre frère obédientiel, lequel condescend ensuite à le rendre au nouveau Vénérable Maître pour lui permettre de présider la Loge.

 

Dans le même ordre d’idées, la loge sujette ne peut fonctionner que si elle appose à l’Orient, au pied du plateau du Vénérable Maître, la patente qui lui a été délivrée par l’obédience à laquelle elle s’est soumise.

Celle-ci peut lui retirer et même « démolir » la loge si celle-ci ne respecte pas les obligations qu’elle a contractées envers elle.

Or, si l’on peut admettre la rupture entre une obédience et une loge pour non-respect des engagements contractés, je refuse qu’une obédience puisse « démolir » une loge.

C’est une aberration initiatique car ce sont les obédiences qui émanent des loges et non le contraire.

 

Certains considèrent qu’aucune loge ne saurait être créée en-dehors du système obédientiel ni reconnue par lui.

Je laisse à Marius Lepage le soin de répondre :

« Lorsque le nombre de Maçons suffisant est acquis pour que les Travaux rituels puissent être ouverts, une Loge est valablement formée. Elle peut alors se réclamer de la même ancienneté que la plus ancienne Grande Loge produisant des documents historiques irréfutables ! Une Loge juste et parfaite est aussi bien et autant l’Ordre que si elle fonctionnait depuis des temps immémoriaux, car existant dans l’Esprit de l’Ordre, elle existe elle-même en esprit et en vérité de toute éternité. » Marius Lepage, cité par Jean Reyor, in sur la route des Maîtres Maçons, chapitre XIX, page 196.

 

Malheureusement, l’une des dérives les plus navrantes de la démocratie est que les hommes qui ont été élus oublient d’où provient leur légitimité et, comme ils méconnaissent ou nient toute autre source de légitimité, leur pouvoir, privé de celle-ci, se transforme vite en une tyrannie maquillée de démagogie.

Et ce qui est vrai dans le domaine profane a malheureusement contaminé le domaine initiatique qui aurait dû en rester préservé.

 

Mais le but de cette planche n’est pas l’attaque des obédiences.

 

Je voulais simplement rappeler que le fondement de la liberté d’une loge c’est la souveraineté de son conseil des Maîtres, et rien d’autre ! La Loge indépendante choisit librement son mode de fonctionnement et elle adapte librement (et prudemment) le rite que les Maîtres ont régulièrement reçu et ont pour devoir de transmettre sans faillir.

 

Les risques de cette liberté:

 

Mais cette liberté n’est pas sans risques. En effet, la servitude a l’avantage de préserver des errances. « Pourquoi nous as-tu fait sortir d’Egypte », reprochaient les Hébreux à Moïse et Aaron dans le désert, «quand nous étions assis auprès de la marmite de viande et mangions du pain à satiété. A coup sur, vous nous avez amené dans ce désert pour faire mourir de faim toute cette multitude.» Exode, 16,3 .

 

Or, si nous ne risquons pas de mourir de faim, bien des épreuves nous guettent.

Quelles sont-elles ? Des épreuves matérielles, certes.

 

Souvent, ce qui empêche les frères et les sœurs de franchir le pas de l’indépendance, c’est qu’ils risquent de ne plus être reconnus par des frères et sœurs qui leur refusent alors de travailler sous le même toit. Et trouver un refuge n’est pas toujours aisé !

 

En effet, il peut être onéreux de louer un espace que l’on n’occupera au mieux que quelques soirées par mois et s’installer de façon précaire dans un local provisoire à chaque tenue peut s’avérer à la fois pénible et lassant.

Dans les deux cas, il faut faire l’apprentissage de la pauvreté ou tout au moins de l’inconfort, loin du douillet cocon des bâtiments officiels.

 

Des épreuves psychologiques, aussi.

 

Il n’est pas facile de se couper de ce qui apparaît comme la maçonnerie universelle.

Certes, des frères et des sœurs peuvent continuer à visiter les frères et les sœurs dissidents, au moins pendant un certain temps et dans la mesure où ils ont la personnalité suffisante pour résister aux pressions qui s’exercent sur eux afin que l’isolement des « hérétiques » soit efficace.

 

Mais par contre il est souvent difficile à supporter d’être considéré comme d’ex-frères ou d’ex-sœurs, surtout quand on sait que cette notion est totalement contraire à la réalité de l’initiation.

Comme le disait Guénon : « Une fois qu’elle est reçue, la qualité initiatique n’est nullement attachée au fait d’être membre actif de telle ou telle organisation. Dès lors que le rattachement à une organisation traditionnelle a été effectué, il ne peut être rompu par quoi que ce soit, et il subsiste alors même que l’individu n’a plus avec cette organisation aucune relation apparente. Le lien établi par le caractère initiatique ne dépend en rien de contingences telles qu’une démission ou une exclusion qui sont d’ordre simplement « administratif ».

Il est donc tout à fait inexact de parler d’un « ex-maçon » comme on le fait couramment. »

 

Enfin, la raréfaction des contacts avec les autres maçons est difficile à supporter et manque à la formation des jeunes apprentis. C’est pourquoi il est nécessaire que la loge libre puisse nouer des relations avec d’autres loges, libres elles aussi, ou affiliées aux rares obédiences refusant le sectarisme.

 

Des épreuves initiatiques, enfin :

 

Même si les loges obédientielles n’en sont pas exemptes, les dérives liées à la personnalité des frères ou des sœurs sont peut-être encore plus pressantes dans une loge libre.

 

En effet, celles-ci n’ont pas le garde-fou de la mobilité maçonnique qui, dans la maçonnerie obédientielle, permet aux membres mécontents ou déçus de rejoindre un autre atelier. Et il n’y a plus « au-dessus » la pression normative de l’obédience s’efforçant d’éviter toute vague (et même toute vaguelette) qui pourrait porter atteinte aux intérêts du groupe qu’elle gère.

 

Ainsi, la Loge libre risque la dérive sectaire ou la soumission à un guru qui s’en emparera par séduction, ruse ou menace, et l’entraînera dans des chemins d’errance et des impasses.

 

Comment donc se préserver de ces errances ?

 

Une Loge libre ne vivra que si elle apporte à l’Orient qui l’abrite un souffle à la fois nouveau et ancien, en rupture évidente avec la maçonnerie obédientielle qui tient le devant de la scène.

Il faut qu’elle fasse de sa pauvreté, de son isolement et de sa liberté les meilleurs atouts de son utilité initiatique.

Sa pauvreté la protégera des tentations de la routine et de l’embourgeoisement, elle l’aidera à accueillir des frères et des sœurs plus diversifiés et provenant de milieux et de classes d’âge qu’on ne voit plus ou qu’on n’a jamais vus dans la maçonnerie courante : des jeunes et des chômeurs, les deux peut-être ? Nous voilà bien loin de la maçonnerie de l’élite économique et politique, objet de tous les fantasmes du monde profane !

Son isolement la protégera des tentations de la gloire ou plutôt de la gloriole et de la fausse fraternité des « relations » pour retrouver la vraie fraternité du travail initiatique en commun.

Il lui évitera les tentations médiatiques et la recherche de la fausse reconnaissance des puissants et du P.A.F maçonnique.

Sa liberté la protégera du conformisme et du « politiquement correct » qui sévit dans toutes les obédiences et qui fait qu’on attend obligatoirement d’un maçon qu’il soit humaniste, démocrate, républicain, progressiste, … que sais-je encore ? Sans même qu’il y ait de questions à se poser sur le sens de ces mots dans leur relation avec la démarche initiatique.

 

Ce sont ces caractéristiques qui feront de la loge libre à la fois un refuge et un tremplin pour les hommes et les femmes libres. Le fameux adage, trop souvent employé à tort et à travers dans les loges maçonniques, pourra enfin prendre ici toute sa force et toute sa vigueur : « un maçon libre dans une loge libre ».

 

Mais liberté ne veut pas dire errance sans boussole car la démarche initiatique n’est pas une auberge espagnole où chacun peut apporter ce qu’il veut manger. En fait, dans l’auberge initiatique, c’est à chacun de découvrir ce qu’il y a à manger, la substantifique moelle étant bien cachée sous des formes apparemment différentes.

Ne négligeons pas non plus le titre distinctif d’une loge. La nôtre s’appelle « les chemins de Compostelle ».

 

Cela signifie que, quels que soient les itinéraires empruntés, même si chacun fait son chemin, le but est unique et ne saurait être échangé contre un autre ou se trouver en un lieu qui ne soit pas le bout du chemin On peut certes, en cours de route, se détourner du chemin le plus court pour accomplir quelque dévotion ou pèlerinage secondaire, fort intéressant, mais qui n’est pas Saint Jacques.

 

Quand on l’a trouvé, on en est content mais l’on ne sera satisfait qu’à Compostelle.

 

Transposé dans le domaine initiatique, cela veut dire qu’il faut soumettre notre liberté à l’aune de la Tradition et de la régularité.

 

La régularité, bien entendu, n’a rien à voir avec la reconnaissance administrative de quelque Grande Loge ou Grand Orient, autoproclamé dispensateur de légitimité maçonnique. La Tradition n’est pas un vague respect de coutumes dont on apprécie l’éclat cérémoniel.

 

Non ! Tradition et régularité font allusion à la transmission de l’influence spirituelle dans des circonstances et selon des règles qui en garantissent l’origine.

 

Pour paraphraser les çufis, c’est une affaire de silsillah et de barakah, ou bien, dans le symbolisme du tissage, de chaîne et de trame. On peut aussi dire que la barakah relève de la Shruti (influence spirituelle, d’origine non-humaine) et la silsillah de la Smriti (transmission, produit de l’exercice des facultés humaines).

Or, l’homme qui, au XX° siècle, a le plus clairement exposé la doctrine traditionnelle et surtout la finalité de l’initiation, c’est bien René Guénon et son œuvre est une boussole qui doit nous éviter de perdre le Nord.

 

Entendons-nous bien ! Pour revenir à la notion de pèlerinage, savoir où est le Nord n’interdit d’utiliser aucun chemin mais, à la fin des fins, il faudra bien toujours retrouver le Nord si l’on veut s’orienter correctement.

 

Triple contrainte et triple influence :

 

Pour préciser mes propos, je dirai que la loge obédientielle est éloignée de la véritable démarche initiatique par une triple contrainte et une triple influence :

 

Trois contraintes frappent les loges obédientielles.

 

- Le partage des soucis de l’obédience (équilibre budgétaire, gestion immobilière, augmentation d’effectifs et rentrée de capitations) qui entraîne les frères et les sœurs vers des préoccupations matérielles dont ils ne devraient pas de préoccuper.

 

- La participation aux nécessités de représentation de l’obédience qui leur font miroiter l’intégration dans une hiérarchie inutile où, à côté des généreux et des sincères, brillent les médiocres, les ambitieux, les envieux et les « faux glorieux ».

 

- L’envahissement des questions de réglementation et la juridisation qui enchaîne leur liberté et la réduit à la médiocrité du politiquement correct et du « consensus mou ».

 

Trois influences les distraient au point de les détourner de l’initiation :

 

- dans certaines obédiences, on ne saurait concevoir la maçonnerie autrement que préoccupée de problèmes sociétaux, soucieuse d’influer sur les décisions des puissants et d’avoir un avis unanime ou majoritaire sur tout, de la laïcité à l’euthanasie, en passant par le préservatif et la résolution de la crise économique.

 

 

- ailleurs, se voulant philosophe, on confond initiation et discours savant sur Kant ou Platon.

 

- encore ailleurs, on se croit érudit et l’on se targue de tout savoir de l’origine du grade de Maître, ou de collectionner les anciens rituels et les anciens devoirs.

Sans oublier nos frères américains pour qui la charité maçonnique est, comme en Europe au XIXème siècle, une façon de pallier les défaillances de leur système de protection sociale.

 

Je ne blâme pas – qui suis-je pour cela ? – les frères ou les sœurs qui pensent que cela est l’initiation et ce sont certainement là des loisirs plus intelligents et plus utiles que la plupart de ceux auxquels se livrent nos contemporains.

 

Mais, une loge libre à mieux à faire.

 

Alors, que faire dans une loge libre ?

 

En fait, une fois débarrassé de la triple contrainte (en termes de capitation, de réglementation et de représentation) et de la triple influence (en termes sociétal, philosophique et érudit) du cadre obédientiel, à quoi sert il de faire partie d’une loge libre ?

 

Car s’il s’agit de reproduire ce que l’on fait dans une loge obédientielle, il ne sert à rien de s’en libérer.

 

Et, de fait, on connaît peu de loges libres qui pratiquent le clubisme à l’anglaise, mâtiné de « charity-business » façon Rotary ou Lyons’Club. Lorsque l’on considère la maçonnerie sous cet angle, il n’est pas très judicieux de s’éloigner des réseaux d’influence constitués par les obédiences.

 

De même, je ne connais pas de loge libre tentée par la démarche sociétale propre aux obédiences « a dogmatiques » et « libérales ». Là encore, le besoin de réseau et de reconnaissance extérieure n’est guère compatible avec la solitude d’une petite unité.

 

Par contre, une loge libre peut tomber dans l’érudition ou dans la dérive philosophique. Elle sera alors loge de recherche et s’attachera à une œuvre, qui n’est certes pas sans intérêt, mais restera dans un domaine extra-initiatique si rien d’autre ne vient la compléter. Cela peut être un piège car, bien entendu, cette loge passera à côté de l’essentiel.

 

Pour comprendre l’intérêt de mener à bien l’aventure d’une loge libre, il faut revenir au sens de l’initiation. Celui-ci est indissolublement lié aux notions d’involution et de cycle.

 

Pour commencer, admettons que l’homme a perdu un état primordial qui convenait à l’être spirituel et co-créateur du monde qu’il était. Cet état est appelé dans la tradition judéo-chrétienne Etat adamique et cette perte est relevée dans toutes les Traditions. Elle correspond à la chute à laquelle il est fait allusion dans le volet exotérique des enseignements traditionnels.

 

Apparue peu après la chute avec le personnage légendaire d’Hénoch (Genèse V,24), l’initiation vise à réintégrer cet état afin de retrouver la fusion avec le Principe créateur puis avec le Tout inconnaissable qui donne sens à l’existence. C’est une remontée à la Source. C’est la quête de l’Homme véritable, celle des Petits Mystères qui ouvre la porte de l’Homme universel et des Grands Mystères.

 

Pour retrouver cet état, l’homme – qui s’en éloigne de plus en plus au fil de l’involution – doit utiliser la méthode initiatique qui permet la transmission régulière (silsillah) de l’influence spirituelle (barakah) à travers les générations.

D’après Guénon, malgré leur déchéance et leurs déviations, la franc-maçonnerie et le compagnonnage sont en occident les seules organisations initiatiques à n’avoir pas perdu le lien traditionnel.

 

En Orient, celui-ci est resté plus solide … tout au moins à son époque car l’involution s’est poursuivie depuis sa mort, il y a un peu plus de soixante ans, avec les effets désastreux que l’on connaît, particulièrement dans la tradition islamique menacée désormais à l’interne dans son identité même.

 

Avec la disparition des métiers – au sens traditionnel du terme -, l’initiation maçonnique reste donc bien seule en Occident … et sa déchéance est grande, surtout depuis que, devenue spéculative, elle a perdu la connaissance des sept degrés qui, dans la maçonnerie opérative, permettaient à un nombre de plus en plus réduit d’initiés véritables de pratiquer à la fois l’invocation, la méditation et la mise en œuvre des rituels, travail extérieur et collectif indispensable dans une initiation fraternelle de type artisanal, la dernière qui reste en occident.

 

Or, même si l’invocation semble impossible car la Parole des Maîtres a été perdue, même si les techniques de méditation ont été oubliées, une loge libre doit s’attacher à pratiquer l’étude des rituels et la mise en œuvre de leur symbolisme actif dans un cadre collectif et fraternel.

 

Cela ne permettra certainement pas aux maçons qui la pratiquent d’atteindre la délivrance, ni même le seuil des petits mystères mais cela les mettra au moins sur la voie qu’ils pourront poursuivre dans un futur état de leur être et dans une autre modalité de leur existence.

 

C’est toujours mieux que rien et c’est ce que l’on peut espérer de mieux en Occident.

D’autant qu’il n’est pas souhaitable d’abandonner sa tradition comme certains l’on fait. Il faut donc d’essayer de vivre son ésotérisme en s’appuyant sur la base exotérique judéo-chrétienne propre à notre civilisation. Guénon nous l’a clairement demandé, même si, lui, a vécu en pratiquant des exotérismes divers, mais cette adaptation aux pratiques du pays d’accueil est la caractéristique du véritable Rose-Croix que lui était et que nous ne sommes pas.

 

Conclusion sur le titre distinctif de la Loge :

 

Pour terminer, je dirai que le titre distinctif de notre Loge, « Les Chemins de Compostelle » ; correspond tout à fait à sa situation de Loge indépendante car il évoque le pèlerinage. Et le pèlerinage passe par l’ascèse :

 

- d’une pauvreté relative (on n’y possède que ce que l’on peut transporter avec soi),

 

- d’un isolement relatif (on est seul dans son effort au long des chemins),

 

- des risques matériels et psychologiques (inconfort, danger des contrées traversées, errance et choix des mauvaises routes),

Il passe aussi par la question de ce que l’on veut en faire : Le fait on pour le sport, pour la découverte culturelle, pour l’aventure et les aventures ? Mais il offre surtout la possibilité d’associer recherche intérieure personnelle et fraternité collective tout au long du chemin… comme notre Loge.

 

Notre engagement et notre liberté.

 

RL Les sept frères libres et réunis. Or.°. d’Angers.

 

L’engagement maçonnique suppose une liberté. Et il n’est d’engagement valable que celui où chaque conscience particulière se mûrit en loge dans l’interaction qui se produit avec ses frères et sœurs.

 

Ainsi le franc-maçon ne se satisfait pas d’organiser ni d’observer des rituels s’il n’y trouve pas l’occasion d’éprouver la fraternité de ses sœurs et de ses frères.

 

Aucune de nos actions en loge ne sera viable si elle néglige certes le reflet d’une certaine efficacité (polir sa pierre) mais aussi d’une recherche de vie spirituelle (la recherche de la Lumière, celle que nous avons demandée lors de notre première entrée dans le Temple).

 

Notre engagement de ce fait ne peut se satisfaire, -ce serait contre-productif par rapport à nos idéaux-, des rêves d’embrigadement qui peuvent se révéler ici où là, quand un ou des individus, voire des organisations maçonniques, prétendent détenir la vérité.

La Lumière alors s’en trouve considérablement obscurcie même si leur discours est séduisant sur le plan des savoirs.

De fait, nous visons à la Connaissance (au sens propre naître avec puisque nous naissons une nouvelle fois lors de notre initiation).

En Franc-maçonnerie, c’est le franc-maçon qui est libre après avoir choisi d’être libre et c’est singulièrement le projet d’une loge libre. Et c’est le devoir impérieux des responsables de la loge que d’y veiller contre les dogmatismes d’où qu’ils viennent.

 

Notre liberté est ici un pur jaillissement, invention perpétuelle du franc-maçon par lui-même, elle est totale sans bornes par le seul fait qu’elle est.

« Le seul mot de Liberté est tout e qui m’exalte encore, disait André Breton, car je le crois propre à entretenir le vieux fanatisme humain », il entendait par là ce qui résiste aux démons du dehors, ce que nous appelons les métaux.

 

 

Mais, MTCS, MTCF, cette liberté n’est jamais acquise une fois pour toutes, il y faut un accompagnement, soit une pédagogie, au sens propre.

Et cet accompagnement, c’est bien la loge qui le produit, car c’est elle-et elle seule- le maître collectif.

 

Dans une loge nous faisons un jour la rencontre merveilleuse de personnes qui autrement nous auraient été perpétuellement étrangères, et ceci transcende toutes les conditions sociales, culturelles, de pouvoir ou de position établie.

 

La Franc-maçonnerie en effet n’est pas une éthique de Grands Hommes, un aristocratisme d’un nouveau genre qui sélectionnerait des frères ou des sœurs choisis en fonction de leur réussite personnelle pour en faire une élite hautaine et solitaire.

Car l’existence la plus humble est déjà séparation, décision. Aussi, pour nous prémunir de ces tentations qui ressurgissent sans cesse, notre pédagogie se doit de veiller, par la confrontation constante et l’interaction en loge de tout ce qui alourdirait notre pensée, qui pervertirait notre existence (c’est-à-dire l’a conduirait par des voies hors du chemin de lumière qui est le nôtre).

Et nous savons aussi que la grande masse des hommes préfèrent la servitude dans la sécurité au prix même de leur liberté.

 

Il y faut persévérance et humilité, mais aussi affirmation de nos convictions d’hommes et de femmes libres.

 

Et parfois nous ne devons pas refuser, dans la rupture si besoin en est, l’affirmation de notre force collective, de l’énergie qui nous habite.

Elle est à la fois intérieure à chacun, spirituelle, efficace et manifeste.

Il peut donc arriver que notre pédagogie soit celle de l’affrontement, il y va de la sauvegarde de l’égrégore.

 

Car si la liberté n’est pas que sommes-nous, MTCS, MTCF ? Et la Liberté cela se défend.

 

Retour sur la Méthode.

 

Pour les Franc-maçons, les énergies vitales que les rites mettent en œuvre excluent les formes obsessionnelles du devoir et de la moralité profanes.

Nos rites sont ouverture pour chacun à ses possibilités de liberté, au contraire de celles qui caractérisent les individus prisonniers de leurs cuirasses, élevés dans une atmosphère de mépris de la vie et de leur corps, dans l’angoisse sur le terrain de laquelle se créent les idéologies quand celles-ci, niant la vie, forment la base des dictatures, et manifestent le fondement de la peur de vivre d’une manière libre et indépendante.

 

Comme dans l’Alchimie, le processus de transformation auquel l’initié se soumet l’y conduit.

Il en actualise à chaque étape ou « degré » (ce qui n’a rien à voir avec les grades du monde profane) les étapes de la cosmogonie où il s’inscrit et que portent à la fois les rites et les légendes maçonniques.

Dans nos loges, véritables athanors, nous franc-maçons nous libérons des aspects d’une vie corrompus par l’action du temps puisque, travaillant de midi à minuit, nous y faisons une expérience « autre » et du Tout Autre.

 

Ainsi la voie maçonnique est d’abord et essentiellement « éducative ».

Le symbolisme que nous vivons ne peut donc en aucun cas, s’apparenter à un discours d’école, car aucun individu ou système ne peut être porteur d’une vérité obligatoire, tant le symbole demeure opaque, non transparent.

Précisément, en loge, sauf à basculer dans un tout autre univers,-dogmatique, celui des « sachants »;-il appartient à chaque FM de se saisir de nos symboles à son niveau sur la base des expériences qu’il est le seul à pouvoir relier aux images symboliques que nous confrontons, librement, à notre vécu.

 

La démarche maçonnique propose, dans cette logique, une progression lente et structurée, librement consentie, vers la Connaissance manifesté par la Lumière.

 

Chacun de nous est donc invité à la découvrir à son propre rythme, elle lui sera manifestée ou non selon son choix.

 

C’est ce que nous avons de fait à réaliser pour créer dans notre être un certain degré de plénitude à l’image des voyages décrits par Dante, dans la Divine Comédie, qui amènent dans leur principe, vers leur source, l’initié à des purifications successives, après des étapes de dégradation (les épreuves) puis de perfectionnement.

 

Cette progression passe par un développement harmonieux, et une éthique partagée élargie, bien au -delà d’une simple morale imposée.

Elle n’est nullement dogmatique.

Il appartient à chacun, dans l’esprit de liberté qui caractérise notre franc-maçonnerie de chercher sa propre voie spirituelle en toute liberté, nul ne pouvant se substituer à l’autre.

 

Et c’est singulièrement le cas de nos loges libres.

 

Nous éviterons ainsi à éviter deux écueils :

 

- d’une part, la transmission limitée à la seule livraison de savoirs que d’aucuns seraient sensés posséder, système inerte et non vivant coupant de fait toute voie à la réalisation personnelle

 

- d’autre part en refusant de nous soumettre à l’autorité d’un maître, à la personnalité de celui qui en rajoute en introduisant de la distance avec la base, à celui qui exercerait peu ou prou un pouvoir que d’aucuns trouvent merveilleux ou fascinant.

 

Poursuivons donc MTCS, MTCF, dans les voies qui nous sont tracées et ce dans l’esprit même voulu par nos passés maîtres fondateurs soit : engagement et liberté, cette liberté que nous chérissons comme valeur dés lors que nous avons compris que la porte du temple qu’un jour nous avons tous franchie « n’est pas un frontière ».

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De l’imaginaire à la foi 16 octobre, 2022

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De l’imaginaire à la foi

 
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Par Gilbert Garibal
9 octobre 2022

 

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Les forces de l’esprit

La tradition orale – caractéristique originelle de la franc-maçonnerie – a bien entendu ses qualités et ses défauts. Si elle permet la transmission, par le bouche à oreille, de ce trésor qui constitue l’une des pratiques ancestrales de l’« humain » – dans la définition même de notre nature – elle est en même temps le véhicule des « idées reçues » qui traversent le temps et s’y inscrivent ! Comme la moule s’accroche au rocher !

En ce sens, la Psychanalyse et l’Analyse Transactionnelle, entre autres modèles et « théories de l’esprit » sont, à l’image de l’équerre et du fil à plomb, à la fois de précieux outils de « rectification » et de « complémentarité » en maçonnerie. Quoiqu’en disent les détracteurs des sciences de l’homme, dans nos rangs même, qui n’ont généralement qu’une approche par le « on dit », des théories en cause, donc sans implication personnelle. Et qui montrent ici, tout à la fois, intolérance, ignorance et vanité ! Les mauvais compagnons sont nombreux !

Par exemple, dire encore que les rituels maçonniques se suffisent à eux-mêmes, les prendre comme des vérités premières, voire des principes vitaux et sacrés – alors qu’ils sont des conducteurs cérémoniels et des véhicules de morales – est totalement abusif. Et faux ! Ils sont très utiles et respectables, certes, en termes de valeurs, mais absolument insuffisants à la compréhension de l’homme et son fonctionnement. Normal, puisque ce n’est pas leur fonction ! La méthode symbolique est méritoire mais elle a ses limites !

Autre exemple : Continuer d’affirmer de façon péremptoire – en fait par seul « ouï-dire » – que l’esprit est supérieur au corps…alors que les neurosciences ont prouvé leur interdépendance depuis longtemps déjà et qu’elles parlent aujourd’hui de « corps-esprit » jumelés ! Cette habitude du « dire, c’est croire », n’est pas que maçonnique ! L’homme est un animal fictionnel ! Depuis « la mise en place » de la pensée et de l’imaginaire, s’est enracinée dans notre cerveau, une disposition aux croyances. Le domaine du croire précité se décline en « tenir pour vrai », auto-persuasion, autosuggestion (cf. méthode la méthode Coué, moquée en France mais qui prouve son efficacité hors de nos frontières !) convictions, opinions, etc., autant de mots pour désigner les mécanismes « producteurs » de la certitude individuelle. Celle-ci établie – par adhésion personnelle, religieuse ou philosophique – peut s’exercer sans la preuve par le fait : les notions de Dieu, de divin, de divinités, d’Être suprême, de Principe créateur, de Grand Architecte de l’Univers, ces créations humaines poétiques, en sont le meilleur exemple. Les « forces de l’esprit » peuvent même, à l’extrême, conduire le sujet, au gré de rites lancinants et répétitifs, à des « états modifiés de conscience », tels l’extase et la transe. Il s’agit de fait ici, d’une forme d’autohypnose, provoquée notamment par l’irruption dans le sang de diverses hormones, dont nos propres opiacés circulants (entre autres, les « endorphines » inductrices d’euphorie à fonction antalgique). Sans aller jusque-là, rappelons tout de même que la maçonnerie a elle-même bien « flirté » en son temps avec les pratiques magiques !

Nous le savons, les théories freudiennes (valorisées par Lacan) doivent beaucoup aux légendes de la Grèce antique et à ses philosophes. Lesquels nourrissent toujours la franc-maçonnerie actuelle. Ces derniers, pour leur part, avaient postulé les premiers, avec lyrisme, que nous sommes habités par trois fées turbulentes qui se disputent en nous, mais inséparables : raison, intuition, imagination. Elles sont toujours d’actualité et nous serions à même d’ailleurs de les masculiniser en trois lutins modernes, avec pour nom : le Logicien (rigoureux), l’Expert (averti) et le Poète (rêveur).

Constat : nous ne pourrions pas vivre sans notre imaginaire (siège de l’imagination, du rêve, de la création, de l’invention, de l’innovation, de l’enthousiasme). Et cet imaginaire n’est autre que l’irrationnel (à comprendre non comme le contraire de la raison mais n’en relevant pas : les mythes, les légendes et les religions relèvent évidemment de l’irrationnel !). Rêver en restant lucide n’est pas être irrespectueux !

Certes, l’irrationnel a son versant négatif, (superstition, passion excessive, violence, folies meurtrières dont les guerres, etc.), mais il est incontestable que ce même irrationnel a aussi la faculté “d’amplifier l’esprit”. Sans l’irrationnel, la raison s’assècherait : aucune grande réalisation (scientifique ou autre) ne peut faire l’économie de l’imagination et de l’intuition. Sans l’imaginaire, la franc-maçonnerie, campée sur son socle mythique, n’existerait pas ! Einstein le confirme : « l’imagination est plus importante que la raison ! ». Mais poétiser n’est pas raisonner.

Il n’est pas étonnant que de ce milieu psychique en « interactions » permanente, émerge en nous des doutes, des hésitations, des craintes. Alors même que nous devons gérer au quotidien notre peur existentielle, elle-même constitutive de notre Moi. Nous apprenons cette peur dès notre irruption au monde, avec l’intériorisation d’un dispositif de défense propre au vivant : l’instinct de conservation. Autant de choses que les rituels ne disent pas mais qu’il convient de se rappeler ou de savoir en maçonnerie, au XXIème siècle !

Vaincre la mort

En grandissant et adulte devenus, nous avons constamment peur, de la crainte de traverser la rue à celle de tomber malade, donc de souffrir, de mourir. Puis encore, nous avons peur de perdre nos proches : conjoint, enfants, parents, amis.

Nous sommes aussi taraudés par les peurs « modernes », autant d’éventualités qui vont du licenciement au manque d’argent, de la privation de nourriture à la disparition du confort matériel, de la perte de notre mémoire à celle de notre autonomie. Et partant, nous craignions de ne plus exister aux yeux des autres, toujours pour la même raison de sauvegarde : Indépendants par essence, nous sommes dépendants par force ! En vérité, l’être humain n’est pas conditionné à « la perte », comme le sont la plupart des animaux. Nous le constatons aussi, en loge, avec le « manque » soudain dans nos rangs, lorsqu’un de nos frères, l’une de nos sœurs, passent à l’Orient Eternel.

Dès lors, exposés comme tout un chacun aux aléas de l’existence, comment prétendre à quelque certitude, à une « vérité vraie » ? Même les modèles mathématiques les plus sophistiqués sont tous contestables et remplaçables par d’autres. Il vaudrait donc mieux parler de réduire la part d’incertitude (théorie du modèle et de l’écart).

Ainsi pour nous francs-maçons, qui nous inter-enseignons le doute, il convient de nous méfier et même de nous éloigner de toute “attitude de surplomb”. Qui consisterait (au fil de nos degrés encore trop souvent confondus avec des grades !) à nous donner hiérarchiquement en loge des leçons assorties de bons ou mauvais points, et en ville revenus, à vouloir y jouer à toute force l’exemplarité ! A une époque où est mieux accueilli le « passeur » de désirs que le « marchand » de formats ou de modèles. Pour faire image encore, je pense en matière de surplomb précisément, que « notre vérité », ne réside pas forcément dans l’aplomb du fil mais aussi dans ses oscillations « métaphoriques ». C’est-à-dire, au gré du balancier de la vie, dans notre comportement entre la frustration et la satisfaction, la maladie et la guérison, l’orgueil et l’humilité, de la colère à l’apaisement, de la haine à l’amour !

Tout comme notre lutte quotidienne pour devenir meilleur apparaît dans l’angle entre les deux branches mobiles du compas. Comme le chemin entre notre besoin éperdu d’être aimé et d’autres êtres à aimer que soi se situe dans l’espace séparant les deux branches de l’équerre. Ou encore, quand il est question de la recherche de l’âme sœur, le parcours menant de la solitude à la rencontre se dessine symboliquement dans la distance entre le maillet et le ciseau ! Pour créer l’œuvre ensemble. Bref, nos tentatives d’accès à la certitude sont dans l’interrogation permanente, dans la patiente recherche, le mouvement productif, dans la preuve par les faits. Non dans le « regardez-moi », la domination, la suffisance. Etre sûr de soi au sens vaniteux, rappelle que cet adjectif est issu du mot « vain » ! A preuve certains tabliers maçonniques : plus ils sont brodés de fils d’or et cousus de fioritures, plus ils nous éloignent de l’humilité (de humus, terre). C’est vraiment en sortant du paraître, que l’on parvient à être !

Ainsi, il s’agit, selon la règle psychologique des 3P, empruntée à l’Analyse Transactionnelle (Puissance, Protection, Permission) de se donner les moyens de penser et d’agir (Le gouvernement de soi-même) de prendre soin de soi (notre vie signifie la survie !) et de s’autoriser à être et à faire (Oser exister !). Ainsi, il n’y a pas meilleure autorité pour tenir les commandes, que soi-même ! Au nom de l’estime de soi et des autres.

Alors et seulement l’appréhension et l’angoisse font place à la confiance en soi, à la maîtrise de soi. La culpabilité s’efface devant la responsabilité, et le sens de la vie devient enfin le sens de ma vie ! Parce que la seule véritable certitude que nous ayons est celle de notre finitude. Donc un encouragement, un engagement, à vivre le mieux possible notre éternité sur terre. La mort des autres, bien entendu, nous renvoie sans cesse à la nôtre. Faut-il la craindre ? Rappelons-nous, en guise d’apaisement, la belle et noble formule d’Epicure : « La mort ne nous concerne ni morts ni vifs. Vifs, parce que nous sommes ; morts, parce que nous ne sommes plus ! ».

Philosopher, c’est apprendre à mourir, nous dit Platon et Montaigne après lui. C’est à dire accepter notre sort et vivre pleinement chaque jour comme s’il était l’ultime.

La franc-maçonnerie propose aussi sa voie pour vaincre la mort, à sa façon. Mais ce n’est certainement pas en créant une rivalité dans la « course aux tabliers » qu’entretiennent encore trop d’organisations maçonniques, qui se détournent de leur objectif spirituel. La compétition est un jeu profane qui les égare ! C’est en remettant à l’Orient de sa loge bleue son tablier blanc à l’Apprenti, qu’il demeurera à vie, que l’Art Royal s’honore et remplit sa vraie fonction initiatique. Et que l’initié devient ainsi éternel !

La création, hasard ou volonté ?

L’origine de la franc-maçonnerie – celle du « mestier » comme celle de réflexion – nous ramenant aux constructions religieuses et aux hommes d’église, il est logique que Dieu – ou l’hypothèse Dieu – soit évoqué ici. Aux bâtisseurs qui ont lancé les cathédrales vers le ciel, puis à leurs successeurs spéculatifs et à nous-mêmes, « penseurs d’aujourd’hui » dans nos loges, s’est posée et se pose toujours la même question : Y- a- t-il une volonté dans l’univers ? Formuler cette interrogation, après la classique question individuelle : Qui suis-je, d’où viens-je ? Où vais-je ? C’est déjà formuler une croyance. C’est se demander, avec l’intelligence dont nous sommes dotés, si l’univers est l’œuvre d’un constructeur et dans l’affirmative qui a créé ce constructeur ? Et si la théorie du big bang est recevable, c’est se heurter à une autre question vertigineuse : Comment quelque chose peut naître de rien ?

Ces questions « philosophiques » de tout temps se posent aujourd’hui à la science qui, devant l’horloge et son extrême précision ne conteste plus le postulat d’un horloger ! Mais si ses progrès fulgurants en termes cosmologiques (découverte de nouveaux univers, notamment) apportent toujours de nouvelles théories, elle reste dans l’incapacité de les démontrer ! Cette volonté à l’origine de l’Univers et son expansion aurait donc un sens. Et qui dit sens, dit conscience pour l’interpréter et en témoigner. Celle du philosophe Baruch Spinoza (1632-1677) l’analyse tel un principe panthéiste qui anime la Nature (comprenant tout ce qui existe) et nous en montre l’harmonie et la beauté. La franc-maçonnerie déiste ne dit pas autre chose quand elle affirme son adhésion à un Principe créateur qu’elle nomme Grand Architecte de l’Univers. Un emprunt au poète Philibert de l’Orme.

Rappelons au passage que les « promoteurs » de la franc-maçonnerie, James Anderson et Jean-Théophile Desaguliers, ont eu, pour leur part, le mérite de « mettre de côté » leur formation et exercice protestants, afin de proposer aux premiers adhérents une religion naturelle, (ou loi naturelle) croyance fondée sur les données de la raison et de la conscience individuelle, sans le concours des églises. Ce concept d’un dieu personnel, totalement éloigné du « socle biblique », a évidemment été vite déconsidéré par les courants théologiques…et les premiers francs-maçons français, qui ont installé au gré des loges, dès 1725, une maçonnerie chrétienne. Aujourd’hui, les notions précitées de « « Grand Architecte de l’Univers » ou de « Principe créateur », qui n’existaient pas à l’époque, ne sont guère éloignées de cette religion naturelle, quand elles sont proposées comme symboles à interpréter librement. Il nous revient d’ailleurs de réfléchir sur la différence entre un dieu symbolique et un dieu révélé, les deux relevant de la fiction, tout respect gardé pour les religions dites du « Livre ». Ce Livre étant celui de la religion considérée, mais en aucun cas le « grand livre de l’humanité », comme certaines obédiences persistent encore à l’affirmer, à propos de la Bible. Fiction n’est pas réalité, encore moins vérité !

On peut aussi s’étonner du désir des Obédiences et Suprêmes Conseils ayant opté pour un dieu symbolique et espérant fébrilement, malgré tout la « reconnaissance » de la Grande Loge Unie d’Angleterre qui exige de ses « délégations internationales », la croyance en un Dieu révélé ! Comme s’il était vital de recevoir cet « adoubement » d’une instance qui montre ici une belle intolérance et atteint le grandiose en s’identifiant à la main de Dieu ! Fiction, encore et toujours !

On ne peut toutefois pas parler de croyances et de religions sans aborder ce qui peut dans un pays, les faire cohabiter pacifiquement et les séparer de l’autorité publique : la laïcité. C’est ce principe de séparation de la société civile et de l’institution qui permet la liberté de conscience. Non seulement, la laïcité n’interdit pas les religions, mais elle en préserve l’existence. Tout comme, de la même façon, elle doit préserver les non-croyants et les agnostiques, de toute ingérence de la religion dans la vie civile. Il y a un droit à la croyance, comme il existe un droit à la non-croyance. A part le Grand Orient de France, les obédiences françaises sont bien trop silencieuses sur ce point !

Certes, il est clair que si les croyances se sont aujourd’hui diluées, le fait religieux ne peut être balayé d’un revers de main. Ce serait du même coup, geste impensable, rejeter les initiés (es) qui la fréquente : l’église, le temple, la synagogue, la mosquée, ont leur place dans la cité, comme la loge y a la sienne ! Les religions sont utiles depuis des siècles et le seront encore, qu’elles soient appréhendées comme moteur qui dynamise et aide à vivre ou « consolatum », qui apprend à mourir, deux aspects de la condition humaine. Priver l’homme de religion, serait l’amputer de lui-même, disent en chœur philosophes et poètes, après Benjamin Constant. Comme priver l’homme de franc-maçonnerie, serait le priver d’un outil puissant, producteur de liberté !

Nous venons en loge, ce lieu d’intelligence collective, pour nous transformer, avec l’idéal de transformer le monde. En clair, pour y cultiver ensemble une « raison raisonnable », intuitive, imaginative. Au total altruiste. N’est-ce pas là notre croyance même, puisque croire c’est aimer ?!

Sans être une religion la franc-maçonnerie est bien en soi, une forme de miracle ! Celui de traverser le temps, à son rythme, depuis le Moyen-Âge !

SOURCE : https://450.fm/2022/10/09/de-limaginaire-a-la-foi/

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Francs-maçons : quelques anecdotes autour de Bruxelles 2 octobre, 2022

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Francs-maçons : quelques anecdotes autour de Bruxelles

 
10 septembre 2022
Francs-maçons : quelques anecdotes autour de Bruxelles dans Recherches & Reflexions f3ccdd27d2000e3f9255a7e3e2c48800-1662017166-696x391

De notre confrère rtbf.be – Par Gérald Decoster

Dans « Retour aux sources », autour du documentaire « Franc-maçonnerie. L’obsession des Dictateurs », Élodie de Sélys vous propose une passionnante discussion sur la question avec l’historien Hervé Hasquin et le philosophe Arnaud de la Croix.

La franc-maçonnerie est un sujet qui captive encore et toujours un vaste public, entre mystères, ésotérisme, puissance et influence avérés… ou pas ? Pour ses adeptes, cette philosophie n’a rien de secrète, elle est discrète… Nombre de francs-maçons ne cachent pas leur appartenance à une Loge. C’est le cas d’Hervé Hasquin mais aussi de Jean van Win, auteur de l’ouvrage « Bruxelles maçonnique : faux mystères et vrais symboles »… Car la discrétion cultivée autour de la maçonnerie donne lieu à diverses interprétations de sites et monuments…

Au registre des pseudos – ou avérés – éléments maçonniques que recèle Bruxelles, la première place du podium revient à son parc. Conçu au cours du dernier tiers du XVIIIe siècle dans le grand plan de réhabilitation du site de l’ancien palais du Coudenberg détruit par l’incendie de 1731, nombre d’auteurs voient dans son plan la majeure partie des outils de la Loge : ciseau, compas, équerre, maillet, marteau, niveau, perpendiculaire, règle (ou levier) et truelle…

Jean van Win n’est pas seul à penser que l’arrière-plan maçonnique du parc de Bruxelles n’est que pure élucubration. L’auteur y voit l’usage probable de la Croix de Lorraine, ancienne version, avec ses deux traverses d’égale longueur. Selon lui, le tracé du parc serait purement urbanistique, ce qui est exact : l’espace vert a été pensé comme articulation principale du nouveau quartier, destiné à faciliter la circulation en dégageant des perspectives vers divers artères et bâtiments marquants existant ou à venir.

Extrait de " Description de la ville de Bruxelles enrichie de plan de la ville et de perspectives " – George Fricx, 1782. Académie Royale de Belgique.
Portique de la place Royale, vers le Sablon.

Il y a d’abord le futur palais des États de Brabant, l’actuel palais de la Nation, édifié en 1783. De l’autre côté, il y a la place Royale, qui finira par s’ouvrir sur la rue de la Régence en 1827 avant d’être prolongée en 1872 vers le palais de Justice de Poelaert. Autre axe en devenir, la rue Héraldique qui allait se dessiner entre les futurs hôtels Bender et Belgiojoso qui, plus tard, seront réunis pour constituer le palais royal de Guillaume Ier des Pays-Bas, notre futur palais royal… Enfin, le dernier axe s’ouvre sur le nouveau quartier à édifier en dehors des anciens remparts, via l’actuelle place du Trône…

Quant à l’actuel palais de la Nation, sièges de la Chambre et du Sénat, il recèle bel et bien quelques éléments de toute évidence maçonniques. Le fronton du palais a été sculpté par le franc-maçon Gilles-Lambert Godecharle. Voici sa clé de lecture : au centre, la Justice distribue les vertus avec l’aide de la Sagesse et avec celle de la Force, condamne les Vices, une image se retrouvant dans les anciens rituels maçonniques : « Que venez-vous faire en loge ? Je viens construire des temples à la vertu et creuser des cachots pour le vice ».

Corps central du Palais de la Nation, Bruxelles.

Corps central du Palais de la Nation, Bruxelles. monument.heritage.brussels-région de Bruxelles-Capitale/Inventaire du patrimoine architectural.

À gauche du corps central de l’édifice, le trophée sculpté à droite de l’entrée de la Présidence du Sénat est aussi parfaitement maçonnique. L’œil du Grand architecte de l’univers domine un compas, une équerre, la Bible et une colonne tronquée ; étrangement, on y découvre aussi le gourdin d’Hercule…

Via la place Royale, avant d’emprunter le Mont-des-Arts, le promeneur est dominé par la statue de Charles de Lorraine, gouverneur général des Pays-Bas autrichiens de 1741 à son décès en 1780. À côté se dresse ce qui demeure de son palais et sa chapelle où, la légende veut que des tenues maçonniques aient été organisées par le Gouverneur franc-maçon…

Jean van Win conteste formellement l’appartenance de Charles de Lorraine à la maçonnerie, pour la simple raison qu’il était Grand Maître de l’ordre Teutonique qui, dans ses statuts, interdisait à ses membres de faire partie d’aucun autre ordre !

Quant aux cérémonies maçonniques dans la chapelle du palais, ç’aurait été tout bonnement impossible car, le rite de l’époque impliquait dans ses trois premiers Grades, l’utilisation d’épées dégainées, inadmissible dans un lieu consacré. De plus, pourquoi utiliser la chapelle alors que le palais, ancien palais de Nassau, acquis en 1756, dont l’aile remplacée par un bâtiment au goût du jour comptait suffisamment de vastes salles aptes à accueillir des cérémonies importantes ?

La superbe Rotonde du premier étage du palais possède un riche pavement. Au centre, une rose compose un échantillonnage des marbres que proposait la Belgique du temps de Charles de Lorraine. Autour d’elle, un damier de marbre blanc et noir fait penser au Pavé mosaïque se trouvant dans toute loge maçonnique… Vrai ou faux ?

Palais de Charles de Lorraine, la Rotonde. Palais de Charles de Lorraine/KBR Brussels.

La superbe Rotonde du premier étage du palais possède un riche pavement. Au centre, une rose compose un échantillonnage des marbres que proposait la Belgique du temps de Charles de Lorraine. Autour d’elle, un damier de marbre blanc et noir fait penser au Pavé mosaïque se trouvant dans toute loge maçonnique… Vrai ou faux ?

Jean van Win rejette totalement cette idée. Le Pavé mosaïque d’une loge est toujours rectangulaire. Le pavement du palais de Lorraine est d’un type assez répandu au XVIIIe siècle et n’est, en aucun cas, à comparer avec un hypothétique Pavé de Loge. Pas plus d’ailleurs que celui identique du salon Italien ou Rotonde du château royal de Laeken, par ailleurs restauré de fond en comble à la suite de l’incendie du 1er janvier 1879…

Enfin, autre idée : le fronton du château de Laeken, sculpté par Godecharle, serait d’essence maçonnique. Pour Jean van Win, il s’agit d’une allégorie d’ordre mythologique exprimant le temps qui passe. Mais, pour certains, les trois Parques qui déroulent le fil de la vie illustreraient l’appartenance d’Albert de Saxe-Teschen, époux de la gouvernante générale des Pays-Bas autrichien, Marie-Christine d’Autriche, sœur de Joseph II à une Loge.

Corps central du château royal de Laeken, Bruxelles.

Corps central du château royal de Laeken, Bruxelles. monument.heritage.brussels-région de Bruxelles-Capitale/Inventaire du patrimoine architectural.

Certes, le duc de Saxe-Teschen faisait bien partie d’une loge de Dresde, « Zu den drei Schwerdtern », « Les Trois Épées ». Ceux qui expliquent le point de vue maçonnique du fronton confondent avec la loge « Zu den Drei Schwestern », « Les Trois Sœurs », en relation erronée avec les trois Parques… un simple D devenu S change d’évidence, bien des choses !

Il reste difficile de prouver bien des hypothèses faisant de tel monument ou de tel un lieu ou un symbole maçonnique. Ainsi, Joël Goffin, dans son ouvrage « Le Quartier Royal de Bruxelles, un chef-d’œuvre maçonnique » (Édition Samsa) propose une étude fouillée sur le parc de Bruxelles et le quartier qui l’environne… Bonne découverte !

Quelques propositions de lectures ?

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 » Hitler et la franc-maçonnerie « , par Arnaud de la croix, Tallandier, 2020.

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« Un roi franc-maçon : Léopold Ier de Belgique », par Jean van Win, préface d’Arnaud de la Croix, Éditions Télélivre, 2015.

À visiter : le Musée Belge de la Franc-Maçonnerie, 73 rue de Laeken, 1000 Bruxelles.

 

SOURCE : https://450.fm/2022/09/10/francs-macons-quelques-anecdotes-autour-de-bruxelles/

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TRANSMETTRE 18 août, 2022

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Robert Mingam

 

TRANSMETTRE

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Quoi, comment, à qui… et pourquoi !

D’aussi loin que remonte l’histoire de l’humanité, des vestiges nous parviennent, attestant d’une évidente volonté de transmission du savoir et des connaissances acquises par l’homme, plus particulièrement au cours des millénaires qui nous ont précédés.

L’Homme a toujours cherché à améliorer ses connaissances, afin de maîtriser son avenir. Cependant, la seule expérience de son propre vécu ne pouvant lui suffire, sa durée de vie étant bien trop limitée pour cela, l’homme a exploré les moyens d’acquérir et de transmettre le savoir de ses aînés. Que ce soit par des représentations graphiques peintes sur les parois de ses habitations ou directement de façon orale, il s’est appliqué à pérenniser ses connaissances pour les générations à venir. L’exemple le plus connu est sans aucun doute l’Ancien Testament, (ou tout du moins les cinq livres constituant le Pentateuque), qui furent transmis oralement pendant des générations de père en fils.

La naissance de l’écriture, puis de l’imprimerie par Gutenberg, marque un tournant décisif dans la transmission du savoir. Aujourd’hui, chacun peut immédiatement trouver ce qu’il cherche sur internet. Cependant, pouvoir profiter de la quasi-totalité des acquis des générations précédentes ne comporte pas que des avantages car certains documents peuvent être faux, corrompus, voir mal compris. D’autant que la science ayant ses limites, ses interprétations peuvent être multiples. C’est pourquoi la vérité n’appartient qu’à ceux qui inlassablement la cherchent.

Si la science peut être accessible à tous, la spiritualité, quant à elle, est individuelle, et ses moyens d’accès sont nombreux. Qu’elle soit guidée par la foi ou par une recherche personnelle, elle permet d’élever sa conscience en différents niveaux. Pour ce faire, toute spiritualité ayant son point d’ancrage, elle fait généralement référence à un évènement fondateur, parfois historique, parfois mythique et le plus souvent sur les deux.

Les évènements auxquels se réfèrent nombre de sociétés réputées ésotériques peuvent être appréhendés de plusieurs façons. Soit sur un plan strictement scientifique, c’est à dire par le constat de faits liés à des preuves matérielles ; Soit sur un plan symbolique, liant les faits à des valeurs propres à définir un corpus doctrinal. Si l’histoire peut apporter la preuve des évènements sur lesquels se fondent les traditions, ce sont les mythes qui transcendent la vérité des faits et véhiculent des valeurs spirituelles pouvant s’y rapporter.

Ces valeurs peuvent être d’ordre moral, spirituel, prophétique ou pratique selon qu’elles s’adressent à tel ou tel type d’individu, et sont généralement transmises par initiations successives. L’originalité de cette méthode est de garantir l’authenticité de ses filiations.

La franc-maçonnerie quant à elle, est réputée initiatique. C’est-à-dire qu’elle véhicule de façon ininterrompue, un certain nombre de traditions dont elle se considère dépositaire, soit par filiation historique soit par filiation spirituelle. Dans ce dernier cas, la transmission se fait lors de cérémonies d’ordination de type sacerdotal où les utilisateurs doivent s’engager à respecter rigoureusement l’esprit et la lettre des Rites qu’ils entendent utiliser, sous réserve de perdre leur légitimité en cas de manquement.

Ainsi, depuis que le Grand Orient de France a fait scission d’avec la Grande Loge d’Angleterre, deux courants de pensée sont apparus et ont divisé l’Ordre maçonnique, bien que revendiquant de part et d’autre leur légitimité à représenter l’idéal maçonnique dans sa pureté. Pour les uns qui considèrent que la tradition requiert une transmission sacralisée, c’est la préexistence d’une règle basée sur les Anciens Devoirs et l’Ancien Testament qui fait force de loi. Pour les autres, la tradition est un support ésotérique, sur lequel la qualité du Maçon s’inscrit pour son évolution spirituelle au sein de l’Ordre.

Ces sortes de divisions internes, s’exacerbent d’autant plus que d’importants bouleversements ébranlent la société. On parle alors de Maçonnerie régulière, c’est-à-dire attachée à une règle initiatique, et faisant référence au Grand Architecte de l’Univers, et de maçonnerie séculière travaillant au progrès de l’humanité. Pourtant ces différences sont compatibles entre elles, pour preuve les invocations et évocations que tous formulent au sein de leurs ateliers, à l’ouverture et à la fermeture de nos travaux.

Ceci, d’ailleurs, n’est nullement particulier aux rites initiatiques, mais s’applique tout aussi bien aux rites d’ordre exotérique ou religieux, qui ont pareillement leur efficacité propre. Nous retrouvons ce même schéma au sein du catholicisme où l’église séculière de Rome ne s’oppose pas à celle des monastiques qui suivent la Règle de Saint Benoît !

Cependant, pour que ces rites soient efficients, il convient qu’ils soient accomplis selon des règles parfaitement établies, et par qui, en a reçu le pouvoir temporel ou spirituel, voir les deux. C’est là que la Franc-maçonnerie se divise vraiment. Les uns considèrent que le pouvoir spirituel ne peut se transmette que lors de cérémonies à caractère ésotérique, tandis que les autres se contentent du pouvoir temporel et limité, que leur octroie leur administration.

Mais quelle que soit l’option choisie, le rôle de celui qui confère l’initiation à un autre est bien véritablement un rôle de « transmetteur », au sens le plus exact de ce mot ; il n’agit pas en tant qu’individu mais en tant que support d’une influence qui n’appartient pas à l’ordre individuel ; il est uniquement un anneau de la « chaîne » dont le point de départ est en dehors et au-delà de sa propre humanité (d’où l’invocation au Grand Architecte de l’Univers). C’est pourquoi il ne peut agir en son propre nom, mais au nom de l’organisation à laquelle il est rattaché et dont il tient ses pouvoirs, ou, plus exactement encore, au nom du principe que cette organisation représente visiblement.

Encore faut-il que cette organisation ne soit pas manipulée par des idéologies préjudiciables à l’esprit d’indépendance et de liberté de conscience de ses membres. Réputée a dogmatique et apolitique, la Franc-maçonnerie ne peut, et ne doit pas souffrir de la vindicte populaire, sous le prétexte fallacieux d’être soumise, contre son gré, à l’autorité politique de ses dirigeants.

Les questions proposées à l’étude des Loges, qu’elles soient sociales ou sociétales, pour lesquelles les maçons sont annuellement sollicités, démontrent à quel point la diversité de leurs points de vue ne peut converger vers un consensus, voir sur une conscience politique. En conséquence, la franc-maçonnerie ne devrait transmettre que des valeurs morales susceptibles de s’épanouir au sein des diverses couches de la société. Mais, ce bel idéal de fraternité initiatique a son côté sombre, celui de ses réseaux d’influences qui polluent et desservent l’image de l’Ordre, encouragés par qui en tire un substantiel avantage. Bien que nul ne peut s’autoriser à parler au nom de la Franc-maçonnerie, sans immanquablement la trahir, certaines autorités au pouvoir régalien ne s’en privent pas. La réflexion philosophique, passée au crible d’une censure sélective est alors mise au service de l’action politique, ce qui est très éloigné de l’esprit de transmission initiatique de ses rituels.

L’ésotérisme, en Franc-maçonnerie, nous amène à considérer toutes les traditions comme étant les éléments constitutifs d’un archétype pour l’évolution de l’humain. Dépositaire d’aucun secret, la Franc-maçonnerie ne véhicule aucun dogme. Elle perpétue une technique dite initiatique, où chacun peut acquérir et transmettre ce qu’il reçoit en partage. La fraternité y joue un rôle prédominant, surtout dans ses premiers degrés, mais par le choix ciblé des symboles qu’elle propose, elle suscite un travail en profondeur qui permet d’élever la conscience spirituelle de ses membres.

Transmettre comment !

La Franc-maçonnerie est donc initiatique. C’est-à-dire qu’elle transmet ses valeurs au cours de travaux comparables à un éveil progressif de la conscience. Elle n’enseigne rien, elle suggère seulement des voies à explorer. Elle ne change pas les personnes qu’elle initie, elle leur permet simplement d’évoluer. Pour cela, elle utilise des Rites et des Rituels qui, en faisant vivre des traditions ancestrales sont porteurs d’un langage qui met en relation avec le sacré. C’est pourquoi il convient de transmettre fidèlement et sans trahir ce que l’on a reçu, en s’interdisant toute modification, toute invention, ce qui exige de grands efforts de compréhension, d’humilité et de respect. Aussi, pour transmettre ces valeurs sur lesquelles nous nous reconnaissons tous, encore faut-il les avoir acquises, bien comprises, et intégrées. Ce qui n’est pas toujours le cas chez certains Maîtres inexpérimentés, qui toutefois se proposent à des postes de responsabilité, sans toujours avoir la pleine conscience du devoir des charges qu’ils devront assumer. La maturité maçonnique n’est pas systématiquement proportionnelle au temps passé sur les colonnes. Aussi est-il utile, voir raisonnable, de s’assurer auparavant du bien-fondé de la motivation des postulants, et du sérieux de leurs engagements, avant de leur confier un office, car c’est par l’exemplarité de leur fonction qu’ils seront à même de faire vivre le rituel et de nourrir l’égrégore de leur loge.

Le rôle de la transmission dans un ordre initiatique est de permettre à chacun de naître et de renaître par étapes successives, de croître et de produire, trois fonctions correspondant aux degrés d’apprentissage, de compagnonnage, et de maîtrise, nécessaires pour agir au mieux dans la société. Aussi, rien ne se transmet dans l’anarchie, mais selon un processus organisé, fruit d’une tradition, et avec tout le cérémonial nécessaire.

L’initiation imposée au profane lors de sa première entrée dans le sanctuaire du temple est censée marquer une rupture avec son passé. Cependant l’initiation avec un grand I n’est jamais complètement acquise. C’est un combat permanent pour respecter les engagements contractés sur l’Autel des Serments. Honnêteté, probité, tolérance, fraternité etc, toutes ces valeurs qui font reconnaître un véritable franc-maçon. Ce combat nécessite un soutien, comme celui des Sœurs et des Frères associés à notre quête et témoins de nos efforts. C’est pourquoi il est souhaitable, voir nécessaire, de revenir souvent se ressourcer et partager les bienfaits d’une chaîne solide au sein d’un atelier où règne l’harmonie.

Transmettre à qui !

Parler de transmission initiatique à un profane n’a aucun sens: la transmission initiatique ne peut s’adresser qu’à des individus parfaitement préparés.

Dans un monde où règnent l’égoïsme et la course au pouvoir, très peu d’individus prennent conscience de leurs devoirs vis-à-vis de leurs semblables, et seraient prêts à s’engager bénévolement au progrès de l’humanité. C’est pourquoi la Franc-maçonnerie sélectionne par cooptation ses membres parmi des hommes et des femmes de bonne volonté, disponibles et susceptibles de pérenniser l’altruisme de ses valeurs.

La transmission est avant tout un acte de communication et d’échange entre les êtres ; c’est aussi un acte d’Amour. On transmet la vie, on transmet un savoir, on transmet l’Amour d’un Art, on transmet une tradition…C’est perpétuer et organiser la continuité dans l’échange. Elle nécessite un choix et une responsabilité personnelle, voir collective dans la transmission de l’identité initiatique. Le sens de notre quête montre que notre vie de Maçon est liée à l’action.

C’est pourquoi il est de notre devoir à tous, de guider ceux ou celles que nous avons reconnus aptes à nous rejoindre, et de les accompagner sur le chemin de l’initiation. Pas seulement les officiers en charge d’enseigner par l’exemplarité de leur fonction, le processus initiatique du rituel ! Pas seulement les Surveillants qui accompagnent les Apprentis et les Compagnons durant les premières années de leur parcours maçonnique. Non, nous tous, qui par notre écoute, nos conseils et nos encouragements, les soutiendrons dans ce long cheminement qui les conduiront peut être un jour, à prendre des responsabilités et transmettre à leur tour ce que nous leur aurions possiblement apporté.

Car le maçon ayant ouvert sa conscience et son entendement par le cheminement initiatique, se doit de rentrer dans une dynamique de transmission de ses connaissances, de ses valeurs, de son éthique et de son expérience, pour remplir sa mission de rayonnement sur son entourage, et participer plus ou moins activement au progrès de l’humanité. Passeur de lumière, il est de son devoir de partager ses acquis avec toutes personnes susceptibles de les recevoir, et plus tard les transmettre. Ce n’est pas la moindre de ses responsabilités car le choix lui incombe la prudence et le discernement, lorsqu’il s’agit de sélectionner de nouveaux adeptes. Il existe un risque bien réel dans ce domaine, et l’on peut s’interroger sur les précautions ou attitudes à prendre et à observer.

C’est pourquoi, outre les différentes rencontres et enquêtes des profanes en instance, la Franc-maçonnerie a prévu trois degrés de transmission, trois niveaux d’intégration où le nouvel initié va se parfaire pour mériter la confiance de ses pairs.

Transmettre pourquoi !

Comme je l’ai dit précédemment, La Franc-maçonnerie ne transmet pas de secrets, mais une technique permettant progressivement d’acquérir des connaissances théoriques propres à créer l’harmonie universelle, ainsi qu’une certaine maîtrise permettant de les mettre en œuvre. Elle encourage ses membres à s’investir pour le progrès de l’humanité, tout en laissant à chacun de ses membres le soin de préciser, à sa convenance, le sens de ces mots.

La Franc-maçonnerie possède un patrimoine qu’elle se doit de préserver, celui du travail de ses pairs, ces premiers maçons spéculatifs qui nous ont légué cet esprit d’indépendance, de liberté, de tolérance et de fraternité qui nous anime aujourd’hui. C’est cette tradition initiatique, cette quête personnelle, ce désir de progresser et de comprendre pour agir, au-delà des opinions partisanes et des carcans sociaux, de la pensée unique, des clichés réducteurs et stériles, c’est cette tradition initiatique dis-je, qui nous permet de tendre vers l’idéal que nous nous sommes tous librement imposé : le perfectionnement spirituel, moral et matériel de l’humanité.

Par ses valeurs humanistes, ses traditions certes d’un autre âge, et son approche symbolique des mystères, le franc-maçon est parfois considéré comme un marginal un peu fêlé. Mais, comme l’écrivait si justement notre Frère Michel Audiard, « il faut bien être un peu fêlé pour laisser passer la lumière ».

J’ai dit

Robert MINGAM

sgvitruvian

mabulle

SOURCE  : https://www.francmaconneriemisraimite-mingam.fr/

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