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Francs-Maçons En Terres D’Islam 4 octobre, 2013

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Francs-Maçons En Terres D’Islam

Posted: 27 Aug 2013 10:00 PM PDT

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 L’Emir Abd el-Kader
Du Maroc À L’Iran, De La Turquie À L’Arabie Saoudite, Leur Histoire Est Ignorée, Leur Place Et Leur Influence Sont Largement Niées. Antoine Sfeir, Écrivain Et Rédacteur En Chef Des Cahiers De L’orient, Lève Le Voile, Il Évoque La Franc-Maçonnerie Dans Les Pays Musulmans — Ainsi Qu’en Israël
Vous avez décidé de consacrer le dernier numéro de la revue que vous dirigez, Les Cahiers de l’Orient, aux francs-maçons. Pourquoi ce choix?
D’abord parce qu’il s’agit d’un véritable tabou. J’ai toujours entendu parler des francs-maçons au Moyen-Orient, mais, en l’absence de transparence, je n’ai jamais vraiment su quels étaient leur influence ni leur poids réel.
Alors, j’ai voulu en savoir davantage, d’autant plus que des signes de renouveau apparaissent çà et là. D’où l’idée d’y consacrer le dernier numéro des Cahiers de l’Orient.
Est-ce qu’on peut tenter de situer, sur un plan historique, la grande histoire de la maçonnerie au Moyen-Orient?
Au Machrek l’Orient Arabe, c’est, incontestablement, à partir du XIXe siècle que l’on a vu poindre la « lumière » de la maçonnerie, les premières tentatives voyant le jour essentiellement au Liban.
Tout commence avec les entreprises de soierie françaises qui viennent, dans les vallées du Chouf et ailleurs, exploiter des usines de vers à soie et envoyer leur production à Lyon.
Parallèlement, sur le plan culturel, les Jésuites et les congrégations s’installent au Liban et dépendent de la province de Lyon. Les Lyonnais, ou des industriels originaires de la région lyonnaise sont très présents.
Et, paradoxalement, les premiers maçons qui viennent de France, puis leurs émules libanais, sont d’abord des élèves de ces congrégations religieuses, formés à l’excellence puis convertis à ce qui est alors perçu comme une religion du progrès, version émancipée de la foi chrétienne.
La maçonnerie au Liban va se développer à la fin du XIXe siècle, au moment où, dans l’Empire ottoman, commence à poindre la révolution des Jeunes Turcs de 1908, parce que se répand dès cette époque le rêve d’un grand royaume arabe qui sera activé par la promesse anglaise faite à Lawrence d’Arabie.
À ce moment-là, les maçons, réunis dans des comités d’indépendance, sont les artisans de l’indépendance des États-nations, sous l’influence, bien entendu, de différents intellectuels français.
Les deux comités les plus importants, du reste, se trouvent au Caire et à Paris, notamment pour l’indépendance du Liban et de la Syrie. On assiste à un vrai travail, parallèle d’ailleurs à la Renaissance arabe, un vrai renouveau culturel.
On peut dater les débuts de la franc-maçonnerie aux années 1850-1860. Au Liban et en Syrie.
Par la suite, le mouvement va faire tache d’huile. La Jordanie n’existe pas encore, mais la Palestine, elle, existe. Or, avec l’arrivée des Anglais dans la région, et selon une démarche similaire, l’établissement des protestants, vers 1830, va également aboutir à l’installation des maçons en Palestine.
Ce qui s’accélérera pendant la Première Guerre mondiale et le mandat britannique.
La franc-maçonnerie, pur produit de la colonisation?
Il faut être plus subtil que cela. C’est une forte aspiration arabe à l’indépendance et au progrès qui rencontre une structure européenne efficace. Voilà pourquoi il se produit une floraison de loges maçonniques avec l’arrivée des Européens.
Un tremplin sera constitué par les événements survenus au Liban en 1860 : les massacres des chrétiens par les Druzes jouent un grand rôle dans la prise de conscience des élites.
Surtout lorsque les intellectuels mesureront la portée de l’intervention d’Abd El-Kader, exilé par les Français en Syrie, qui va sauver à lui seul plus de 10 000 chrétiens, à Damas.
Or Abd el-Kader est maçon. Depuis l’Algérie. Dans son silence forcé, à Damas, il va être un maçon assidu et lui donner un autre départ dans tout le Levant.
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Qu’en est-il du reste du monde arabe?
Il faut mettre l’Égypte à part, car, dans ce pays, on voit apparaître des maçons et des germes de maçonnerie universels dès l’expédition de Bonaparte.
Mais le développement se fera par étapes. La première phase sera, bien entendu, incarnée par les saint-simoniens, qui vont arriver, chez Ibrahim Pacha, pour enseigner le français aux officiers égyptiens, dans les casernes.
Parmi ces saint-simoniens, Ismaïl Urbain, qui sera aussi tenté par la maçonnerie, mais qui ne fera pas, d’après ce qu’on sait, acte d’initiation.
Le second départ, ce sera l’initiation d’Ismaïl Pacha, fils d’Ibrahim Pacha, khédive d’Égypte.
Il va être initié par les Français, notamment par le groupe de Ferdinand de Lesseps qui compte surtout des maçons constructeurs.
Et le Maghreb?
Là, on peut parler davantage du poids de la colonisation. Nous avons d’ailleurs les contributions très détaillées des colons français à l’édification d’une maçonnerie locale.
Dès l’arrivée des Français, les loges vont se multiplier. Avant tout en Algérie, puis en Tunisie et au Maroc.
Cela prendra plus de temps au Maroc, en raison du caractère très construit de la société traditionnelle et de l’ancrage islamique, très fort.
Mais, tout de même, le futur roi Mohammed V, père de Hassan II, aura la réputation tenace d’être franc-maçon, même s’il n’a jamais été vraiment possible de le prouver.
L’Algérie semble toutefois être une terre d’élection…
Absolument. Et le fait demeure. Quand on retrouve aujourd’hui des « Arabes » musulmans dans les loges en France, ce sont à 90 % des Algériens.
La maçonnerie a toujours connu un vrai succès en Algérie. Et également en Tunisie.
En raison d’un engouement de la part des classes moyennes et du lien naturel entre la maçonnerie et l’éducation.
Pour les mêmes raisons, il y aura une vraie influence maçonnique en Turquie et en Iran.
Cela dit, la Turquie et l’Iran sont un peu à part.
Deux cas intéressants, en effet. Deux énormes morceaux. On se rend compte que, dès 1916, les constitutionnalistes en Iran sont avant tout des francs-maçons. Ils constituent la charpente, la pierre de touche du nouvel État iranien.
Ils se laisseront un peu dépasser par la nomination du chah, le père du dernier chah, mais resteront quand même très présents.
Ils le seront également aux côtés des zoroastriens, bien entendu, dans la classe moyenne, dans la haute bourgeoisie et dans la fonction publique. Ce sont de grands serviteurs de l’État iranien.
En Turquie, c’est entièrement différent. De tout temps, c’est-à-dire depuis les liens instaurés entre l’Empire ottoman et l’Occident, il a existé des échanges, grâce aux nombreux Ottomans qui poursuivaient leurs études ou allaient accomplir leur spécialité en Europe, notamment en Angleterre.
Dans un premier temps, il va y avoir une influence primordiale de la loge anglaise, donc le rite écossais ancien, mais, en même temps, on va assister, dès la IIIe République, à une implantation du Grand Orient français.
Cette mixité des cultures, ce syncrétisme est très propre à la Turquie. Au point qu’il y aura une sorte de va-et-vient entre les francs-maçons turcs et certains courants mystiques de l’Islam, et ce jusqu’à nos jours.
Il semble ainsi que, selon certaines rumeurs, beaucoup des islamistes prétendument modérés aujourd’hui au pouvoir en Turquie aient fait un passage par l’initiation…
Donc la Turquie est un pays où la maçonnerie est encore très forte…
Oui, ainsi qu’en Iran. Les maçons iraniens ont été pointés du doigt au moment de la révolution khomeiniste. Ils ont très mal supporté les dix ans qui ont suivi. Mais depuis le cessez-le-feu avec l’Irak, à la fin des années 1980, ils ont retrouvé une certaine visibilité.
Peut-on dire qu’au Moyen-Orient, d’une manière générale, les maçons jouent actuellement un rôle très important, par exemple dans des structures laïques comme le parti Baas, en Syrie ou en Irak?
Oui, dans tout parti séculier, ils sont importants.
Si on veut dresser un tableau global, les maçons sont très bien implantés en Turquie, en Syrie, au Liban et en Israël. Ce n’est pas un hasard d’ailleurs.
En Israël aussi?
Dès l’établissement du premier kibboutz, en 1910, c’est l’introduction, en Palestine, de la franc-maçonnerie, qui existait, notamment dans les grandes villes, grâce aux Anglais, comme on l’a dit, et aux protestants, mais très peu dans les campagnes.
Dès l’arrivée des juifs en Palestine, jusqu’à la création d’Israël, en 1948, la maçonnerie s’implante solidement grâce aux vecteurs de pénétration des kibboutzim et des moshavim.
À partir de la proclamation de l’État d’Israël, le milieu travailliste et laïque des grands leaders, des pères fondateurs, va entretenir des liens étroits avec la maçonnerie.
Seulement travailliste?
À présent, on compte beaucoup de maçons de l’autre côté, parmi la droite laïque, mais on n’en trouve pas au point de départ, en 1948. Cela viendra plus tard, essentiellement du fait des Azkhénazes d’ailleurs. Les Séfarades restent encore très méfiants…
Et les pays du golfe Persique?
Au Yémen dans et toute la péninsule arabique, la maçonnerie est très faible et pratiquement inexistante, sauf parmi les expatriés, qu’ils soient Arabes ou étrangers.
Quels sont les domaines de prédilection de la maçonnerie orientale?
Exactement les mêmes centres d’intérêt qu’en Europe. Les mêmes thèmes. Mais on ne parle pas de « laïcité » ; on parle de « sécularisation ».
Les sujets clefs sont l’éducation, la réforme de l’État et, parfois, un grand thème de société tel celui de la femme, l’interruption volontaire de grossesse, la contraception, le planning familial.
Le champ de la réflexion reste quand même nettement plus restreint qu’en Occident. Ce ne sont pas les mêmes moyens qui sont utilisés. Beaucoup de médecins travaillent entre eux. Dans ce qu’ils nomment les fraternelles.
Le planning familial a été introduit grâce au travail des maçons, notamment en Égypte, par l’intermédiaire des Nations unies… Travail de très longue haleine, commencé sous Nasser.
Mais quand, en 1971, 1972, 1973, on a commencé à vouloir être vraiment efficace, on s’est rendu compte qu’il fallait également former les intéressées, et notamment les femmes paysannes.
Un véritable travail sur le terrain a été accompli, à la fois par l’Unicef et par les maçons locaux…
Donc la femme est un objectif important…
Très. Même si très peu de femmes peuvent imaginer entrer en maçonnerie dans l’Orient actuel. Malgré certaines avancées, la femme reste surtout un sujet d’intérêt pour les maçons masculins.
Politiquement, les francs-maçons ont-ils une spécificité?
On les retrouve essentiellement à gauche. Parce que, dans tout l’Orient, c’est la gauche qui essaie encore de faire bouger les choses, alors que la droite, elle, non seulement détient le pouvoir, mais aussi a fait de telles concessions aux islamistes qu’elle ne peut plus maintenant accueillir les francs-maçons.
Les francs-maçons ne peuvent pas accepter, par exemple, le fait que Sadate ait pu autant céder aux islamistes, sur la question de l’excision des femmes ainsi que sur celle de la charia ou, pour être plus précis, l’inspiration de la Constitution égyptienne à travers la charia. Du reste, Sadate est un homme qui nous a tous fascinés par son recueillement à Jérusalem, mais on s’est peu penchés sur son bilan intérieur…
Il ne faut pas oublier que, du jour au lendemain, il a fait passer son pays entre les mains des États-Unis, alors que l’Égypte était autonome ou autosuffisante sur le plan céréalier : 85 % du blé égyptien proviennent du surplus américain. En conséquence, les maçons ne peuvent pas se sentir à l’aise dans le parti au pouvoir en Égypte.
Plus généralement, il y a un engagement, chez tous les maçons orientaux quels qu’ils soient, dans la lutte pour la démocratisation. C’est une constante qui prend beaucoup plus de poids aujourd’hui où l’on assiste à une telle rupture de représentativité.
Est-ce qu’il y a des professions où ils sont plus présents?
Oui, les professions libérales : médecins, avocats, magistrats, enseignants. On les retrouve également dans la haute fonction publique, surtout chez les magistrats. En ce qui concerne les enseignants, il faut savoir que l’école publique n’est pas très considérée en Orient.
Je ne parle pas de la Turquie et de l’Iran, mais du reste des pays arabes, où l’enseignement privé est tenu pour beaucoup plus prestigieux. En toute logique, on compte de nombreux francs-maçons dans l’enseignement privé.
On en rencontre aussi énormément parmi les milieux d’affaires. Beaucoup de businessmen, qui ont utilisé dans le passé la maçonnerie comme des réseaux, sont maintenant militants au sein des obédiences acceptées.
Est-ce que les francs-maçons ont joué un rôle, par exemple, dans le dialogue israélo-arabe?
Ils ont essayé, certainement. À travers un tissu associatif : Identité et dialogue, par exemple, pour le Maroc.
En Tunisie aussi, un peu. Au Levant, ils ont été obligés de s’adapter, j’allais dire, à l’hypocrisie ambiante : on parlait avec les Israéliens, mais dehors, dans le secret et la clandestinité.
On ne communiquait pas à l’intérieur du système national. Pas dans les pays, pas dans le cadre classique. À l’extérieur, en visite à Paris, ou à Londres. À Paris, par exemple, on se retrouvait, on échangeait, il y avait même des réunions entre loges, entre obédiences… mais, pas officiellement, pas institutionnellement.
Grâce à cette discrétion, des travaux importants ont été accomplis dans les loges. Ces travaux-là — ces planches, comme ils disent — ont été passés à qui de droit et ont fait leur chemin. C’est incontestable dans des domaines comme l’éducation. Un exemple : à un moment donné, il y a eu des négociations très dures entre la Syrie et le Liban concernant la mise à niveau de l’éducation entre les deux pays.
Un travail de fourmi a été mené, à tous les échelons de l’institution, pour que l’éducation libanaise ne pâtisse pas de cette mise à niveau.
Il faut expliquer que le cœur de l’État, en Syrie, est noyauté par les Alaouites et que l’on compte parmi ces derniers beaucoup de maçons.
On a souvent dit que Hafez El-Assad en faisait partie.
Y a-t-il beaucoup de noms aussi célèbres chez les maçons?
On cite généralement Assad, mais aussi Moussa Prince, qui était un grand avocat libanais représentant un pôle du débat intellectuel au Liban, avant et durant la guerre. Il fut surtout l’inspirateur de Camille Chamoun, président de la République entre 1952 et 1958, puis l’un des dirigeants incontestés des partis chrétiens libanais.
Moussa Prince était certainement l’un des meilleurs représentants du Grand Orient. Son décès a laissé un vide immense. Il faut aussi parler de la famille sunnite Sohl. Sami Sohl, l’un des pères de l’indépendance, et Premier ministre de Camille Chamoun, était un maçon.
Il y a eu également d’autres dirigeants musulmans, comme certains anciens Premiers ministres, toujours vivants, qui ont accepté, par exemple, de soutenir le fameux traité Libano-Israélien de 1983, qu’Amine Gemayel n’a pas ratifié.
On cite également beaucoup l’entourage d’Assad, tel Mustapha Tlass. Difficile à vérifier.
Les musulmans ne revendiquent plus leur appartenance, comme Abd El-Kader a pu le faire. Désormais, ils ont peur. N’oublions pas, quand même, qu’il existe des pays où il suffit qu’un citoyen soit montré du doigt par un islamiste influent pour qu’il passe aussitôt en justice.
Est-ce qu’il existe des lois contre les maçons dans les pays arabes?
Oui, dans toute la péninsule arabique, puisque les maçons y sont considérés comme des mécréants.
Le Yémen est en train de changer, parce que c’est un régime marxiste. Mais, en Arabie saoudite et dans les Émirats, il y a une véritable suspicion.  Au Maroc, actuellement, on ne peut pas dire non plus que les maçons aient le vent en poupe.
En revanche, au Levant, il y a une sorte de regain, de même qu’en Jordanie, où, sans se déclarer publiquement, les maçons n’hésitent plus à tenir la dragée haute aux islamistes, notamment dans des débats, qu’ils soient politiques, parlementaires, médiatiques ou intellectuels.
Peut-on tenter d’avancer quelques chiffres?
C’est très difficile. Autant peut-on avancer une fourchette pour Israël, aux alentours de 10 000, l’Iran et la Turquie, autant il est impossible d’évoquer sérieusement une donnée chiffrée pour les autres pays.
Depuis cinq ans, il y a une véritable renaissance de la maçonnerie au Liban, et en Syrie, assez étonnamment d’ailleurs mais pas paradoxalement, parce que ce pays reste quand même aux mains d’un régime très séculier.
Comment expliquez-vous ce regain?
Les loges locales ont acquis une forme d’autonomie nouvelle. Elles sont devenues autocéphales. Par exemple, on sait, d’une façon certaine, que l’ancien patron de la chambre de commerce et d’industrie de Syrie, un sunnite de Damas décédé il y a deux ans, était l’un des grands maîtres de la maçonnerie.
Mais, à la limite, il en a presque usé comme d’un moyen de se créer des relations d’affaires. On suppose que son fils, qui a repris le flambeau, est aussi franc-maçon.
Quant au Maghreb, on pense que les maçons y sont plus nombreux chez les Kabyles que dans le Constantinois. Ils sont également assez nombreux dans l’Algérois. Mais, pour en savoir davantage, il faudrait ouvrir les cartons consacrés à l’Algérie qu’on a découverts au Grand Orient, lesquels ne sont pas encore exploités.
Et l’Égypte?
C’est redevenu un pays important. Sous Nasser, beaucoup de petits ou grands entrepreneurs sont partis s’établir au Canada, en Angleterre et quelques-un aux États-Unis.
Sous Sadate, ils sont en majeure partie revenus. Aujourd’hui, il y a en Égypte des entreprises énormes, de taille internationale. Oaskom, par exemple, qui occupe une position de force dans la téléphonie mobile, du Moyen-Orient à l’Afrique. Ces groupes internationaux ont ramené avec eux des cadres qui ont fait des études supérieures et qui sont concernés par la maçonnerie.
Si la maçonnerie locale était une sorte d’Église autocéphale, avec ce sang neuf, on constate un renouveau dans la bourgeoisie égyptienne, cette nouvelle classe moyenne qui fait la force de l’Égypte, même si le pays est en cessation de paiement. Un nombre élevé de maçons commencent depuis un certain temps à s’organiser.
Et ils essaient de tenir la dragée haute aux islamistes. Car le grand danger, partout, reste l’islamisme, beaucoup plus que l’État. On connaît, hélas ! la rengaine des fondamentalistes musulmans contre l’ennemi judéo-maçonnique.
Compte tenu du besoin criant de modernité dans le monde arabe, iriez-vous jusqu’à dire que les maçons ont plus de poids dans le monde arabe qu’ils n’en ont en Europe?
C’est à peu de chose près exact. Dans le cadre d’une citoyenneté communautaire, ils aident à transcender, ne serait-ce que dans un premier temps, les clivages anciens de la société.
Quelle ne fut pas ma surprise de voir en 2000, au Liban, des maçons musulmans être les premiers à dénoncer la « maladie de l’Islam » ! On se plaignait, après les attentats du 11 septembre 2001, que les intellectuels musulmans n’aient pas dénoncé la fièvre islamiste.
Je n’ai constaté cette dénonciation ni en Europe ni en Occident, en général, sauf au Proche-Orient, dans les loges maçonniques. En Syrie, par exemple, il existe actuellement un véritable mouvement de réforme qui dit clairement que l’Islam doit s’arrêter à 622 et doit rester confiné aux relations de l’homme avec son créateur.
Ce mouvement-là, qui commence à avoir du succès, puisque le livre Nouvelle Lecture du Coran a été vendu à près de 300 000 exemplaires, est dû au Professeur Mohammed Chahrour ou à des gens comme Ziad Hafez, qui cherche à tracer un pont entre l’Orient et les États Unis.
Les deux sont certainement influencés par des idées maçonniques, et d’autres intellectuels avec eux.
Est-ce que ce mouvement de réforme va aboutir à l’aggiornamento tant désiré
L’avenir nous le dira.
— Le dernier numéro des Cahiers de l’Orient, fondés en 1985 par Antoine Sfeir, écrivain et rédacteur en chef, est intitulé L’Équerre et le Croissant, enquête sur la franc-maçonnerie en terres d’islam. Revue trimestrielle d’études et de réflexion sur le monde arabe et musulman, les Cahiers de l’Orient se veulent très attachés à la Francophonie, qui constitue, selon leur charte rédactionnelle, « l’un des derniers lieux privilégiés de la liberté ».
Propos recueillis par Christian Makarian, le 29/05/2003
Antoine Sfeir
Billet proposé par Aron O’Raney
Source l’excellent site : http://oraney.blogspot.fr/

La symbolique des gants blancs 30 août, 2013

Posté par hiram3330 dans : Chaine d'union,Contribution , 4 commentaires

La symbolique des gants blancs

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Les gants blancs que nous portons ont des doigtiers distincts, ce ne sont pas de vulgaires mitaines, chaque doigt relève d’une symbolique planétaire particulière, conservant ainsi son indépendance propre, et surtout son rayonnement propre.

Voici le tableau de correspondance planétaire:

L’index est associé à Jupiter,
Le médius est associé à Saturne,
L’annulaire est associé au Soleil,
l’auriculaire est associé au Mercure,
Le pouce à Vénus.
La batterie paume contre paume est associée à la Lune.

Le gant blanc doit être tissé d’une seule pièce, coutume qui provient du Moyen-âge, où le gant doit être à l’image de la Sainte Tunique, sur le plan symbolique, nous pouvons en tirer l’enseignement suivant: malgré la diversité de rayonnement offerte par les doigts, il y a une unité en vue d’un but commun, celui de la bénédiction et de la vie spirituelle pour les mystiques, celui de l’accomplissement de la Fraternité Universelle pour les rationalistes.

Dans l’Eglise ancienne, tout comme en Franc-maçonnerie, le port des gants est un symbole de pureté, pureté des œuvres et du cœur.

En maçonnerie s’y est adjoint la symbolique provenant de la légende biblique d’Hiram, mais ce n’est pas ici le propos d’y entrer en détail, puisque nous sommes au 1er degré symbolique de la Franc-maçonnerie bleue.

En maçonnerie le gant revêt des aspects plus subtils que dans l’Eglise catholique, en-dehors de pureté, nous pouvons y voir un emblème de douceur, de souplesse, de déférence.

Si nous faisons un tour du côté des sciences occultes, nous pouvons constater qu’un magnétisme réel émane de l’extrémité des doigts, les mains gantés de blanc laissent filtrer un magnétisme transformé et bénéfique.

La position du maçon dans la loge, dite du « sphinx », permet de canaliser les énergies telluriques qui progressent du monde de la terre vers le monde des cieux. Les paumes des mains gantés, reposant sur les genoux, permet de filtrer cette énergie magnétique.

Dans les années 1960, un savant soviétique d’origine arménienne, Kirlian, réussira à photographier cette énergie qui forme comme une aura autour du corps humain.

Bien entendu, la technique pour obtenir ces photographies, a été mise en doute par les adeptes de la déesse raison, moderne idole de cette fin de siècle, à qui l’on a sacrifié l’effet Kirlian, mais aussi la mémoire de l’eau, mise en évidence par le Pr.Benvéniste.

La modification sur l’être humain apporté par ce signe extérieur que sont les gants blancs, dans une assemblée maçonnique, est remarquable, qui n’a pas remarqué l’impression de quiétude, d’apaisement, qui se dégage de nos cérémonies.

La sérénité est provoquée par le filtre magnétique que son nos gants blancs.

Dans certaines Loges, des maçons ne portent pas de gants, voire de Tablier, qu’ils jugent obsolète, inutile de dire que cette attitude est purement profane, s’il existe des maçons sans tablier, l’inverse est vrai, il existe des profanes à tablier, mais heureusement pour notre Fraternité, le fait est rare.

Mais ceux qui abandonnent les gants sont dans l’erreur ésotérique, et mettent en péril la cohésion et le caractère initiatique de la Franc-maçonnerie.

Il existait une très belle tradition abandonnée de nos jours, celle d’offrir au nouvel initié deux paires de gants blancs, la première pour le travail en loge, la deuxième pour l’offrir à la femme qu’il estimait le plus.

De nos jours, depuis le milieu du XIXe siècle, la tradition a été abandonnée pour une rose, ce qui est un non-sens sur le plan ésotérique, la rose coupée est éphémère, les gants blancs sont éternels.

La deuxième paire de gants blancs reçus le jour de l’initiation, évoquent pour le maçon le souvenir de ses engagements. Lorsque l’initié sera tenté de faillir à ses engagements maçonniques, la femme qu’il estime le plus, lui montrera alors les gants offerts, pour lui rappeler sa condition de Franc-maçon, par conséquent d’Initié.

La femme est alors la gardienne de son honneur. Quelle mission plus haute pourrait-on confier à la femme que l’on estime le plus?

Nous honorons leurs vertus et aimons à rappeler leur souvenir. Cet emblème vous est donné par vos Frères pour que vous le donniez vous-même à la femme qui a le plus droit à votre estime t à votre affection. Acceptez Madame, ce souvenir à titre d’hommage.

Lorsque j’ai été initié voici 23 ans, je connaissais l’ancien usage, aussi je devais le lendemain de la cérémonie, acheter une paire de gants blancs supplémentaires, pour les offrir à l’être que je pensais digne de les recevoir.

Le grand Johann Wolfgang von Goethe a chanté la profondeur et la beauté de cette cérémonie de remise des gants blancs.

Le jeune Goethe est reçu Apprenti maçon à Weimar le 23 juin 1780 lors de la Saint-Jean d’Eté, et offre sa paire de gants blancs, à sa grande et fidèle amie, Mme Charlotte von Stein, et il lui fit remarquer la chose suivante :

- Si ce cadeau est en apparence fort modeste, madame, il présente ce caractère particulier de ne pouvoir être offert par un Maçon qu’une seule fois en sa vie.

Mme Stein que Goethe appelé avec tendresse Charlotte, devait accepter ces gants, et les garder tout au long de son existence, les montrant au grand écrivain, lorsque celui-ci s’éloignait de ses engagements maçonniques.

N’est-ce pas magnifique mes frères, ce n’est pas avec une rose que l’on pourrait faire cela. Une rose, on peut la sécher, mais c’est un symbole de mort, nous sommes en présence d’une momie sans âme, alors que les gants sont destinés à l’infini, à la pureté des sentiments.

Dans la maçonnerie opérative, c’est le nouvel initié qui offrait une paire de gants aux assistants de la Loge, comme le montrent les Schaw Statutes adressés en 1599 à la loge de Kilwinning en Ecosse, document qui est le plus ancien compte-rendu de loge connu à ce jour. Il y a eu donc évolution, mais à mes yeux, et je ne le répéterais jamais assez, la rose aboutissement de ce processus est une involution, car nous n’avons plus aucun rapport avec nos gants.

Les gants que nous arborons sont blancs, pourquoi cette couleur, les gants pourraient très bien être bleus, rouges, ou verts à pois jaunes. Ceci est dû à la symbolique très forte attaché au blanc.

Le blanc est la couleur de celui qui va changer de condition, pour la plupart des peuples, c’est la couleur de l’Est et de l’Ouest, des deux points extrêmes et mystérieux où le Soleil, naît et meurt chaque jour.

Le blanc est la couleur du passage, couleur privilégiée par lesquels s’opèrent les mutations de l’être, selon le schéma classique de toute initiation: mort et renaissance.

Le blanc de l’ouest est celui de la mort, le blanc de l’est est celui du retour, de l’aube.

Le blanc est également la couleur des êtres du monde surnaturel, des spectres et autres créatures de la nuit, c’est la couleur du linceul. Pour Mircea Eliade, dans les rites d’initiation, le blanc est la couleur de la première phase, celle de la lutte contre la mort.

Le blanc est la couleur des responsabilités assumées, de pouvoirs pris et reconnus, de renaissance accomplie, de consécration. Moïse dans la tradition islamique est associé à la couleur blanche. Dans la pensée ésotérique Soufi, le blanc est le secret, le mystère fondamental, couleur essentielle de la Sagesse, venue des origines et vocation du devenir de l’homme. Pour Jules Boucher auteur d’un livre fort répandu en Maçonnerie, mais aujourd’hui un peu dépassé, le blanc est le symbole de la paix et de la sérénité de l’initié parvenu à la plénitude de l’initiation quand il a développé en lui la spiritualité pure dégagée de toute sentimentalité.

Le blanc est aussi la couleur des chevaliers du Temple de Salomon, surnommés les « chevaliers au blanc-manteau ».

Personnellement, j’associerais le Blanc des gants, à la symbolique de la Licorne. En effet la Licorne représente la pureté et la justice, l’unité et la pénétration du divin dans la créature.

L’unité se retrouve dans nos gants constitués d’une seule pièce de tissu, la pureté par la couleur blanche, la pénétration du divin par ceux qu’ils représentent dans l’initiation. Un parallèle intéressant pourrait être fait entre la Licorne et la Maçonnerie, mais cela serait l’objet d’un autre travail.

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Merci à notre ami Christian-Joel pour ce partage public …

Axiomes alchimiques 28 janvier, 2013

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Axiomes alchimiques

Axiomes alchimiques dans Recherches & Reflexions alchemistandapprentice_3

1. – Tout ce qu’on peut accomplir par une méthode simple ne doit pas être essayé par une méthode compliquée.
Il n’y a qu’une seule Vérité dont l’existence n’a pas besoin de preuve, parce qu’elle est elle-même sa propre preuve pour ceux qui sont à même de la percevoir. Pourquoi se servir de la complexité pour chercher ce qui est simple ? Les sages disent : “Ignis et Azoth tibi sufficiunt”. Le corps est déjà en votre possession. Tout ce qu’il vous faut, c’est le Feu et l’Air.

2. – Nulle substance ne peut être rendue parfaite sans une longue souffrance.
Grande est l’erreur de ceux qui s’imaginent que la pierre des philosophes peut être durcie sans avoir été préalablement dissoute ; leur temps et leur travail sont perdus.

3. – La nature doit être aidée par l’art toutes les fois qu’elle manque de force.
L’art peut servir la nature, mais non la supplanter. L’art sans la nature est toujours anti-naturel. La nature sans l’art n’est pas toujours parfaite.

4. – La nature ne peut être améliorée qu’en elle-même.
La nature d’un arbre ne peut pas être changée par l’arrangement des branches, ni par l’addition d’ornements ; il ne peut être amélioré qu’en perfectionnant le sol sur lequel il croît, ou par la greffe.

5. – La nature use de la nature, la comprend et la vainc.
Il n’y a point d’autre connaissance que la connaissance de soi-même. Tout être ne peut réaliser vraiment que sa propre existence, mais non celle d’un élément qui lui est totalement étranger.

6. – Celui qui ne connaît pas le mouvement ne connaît pas la nature.
La nature est le produit du mouvement. Au moment où le mouvement éternel cesserait, la nature entière cesserait d’exister. Celui qui ne connaît pas les mouvements qui se produisent dans son corps est un étranger dans sa propre maison.

7. – Tout ce qui produit un effet pareil à celui produit par un élément composé est également un composé.
L’Un est plus grand que tous les autres nombres, car il a produit l’infinie variété des grandeurs mathématiques ; mais nul changement n’est possible sans la présence de l’Un qui pénètre toutes choses, et dont les facultés sont présentes dans ses manifestations.

8. – Rien ne peut passer d’un extrême à l’autre sauf à l’aide d’un moyen.
Un animal ne peut pas arriver au céleste avant d’avoir passé par l’homme. Ce qui est antinaturel doit devenir naturel avant que sa nature puisse devenir spirituelle.

9. – Les métaux ne peuvent pas se changer en d’autres métaux avant d’avoir été réduits à la prima materia.
La volonté propre, opposée à la volonté divine, doit cesser d’être pour que la volonté divine puisse envahir le cœur. Nous devons nous dépouiller de toute sophistication, devenir semblables à des enfants, pour que la parole de sagesse puisse retentir dans notre esprit.

10. – Ce qui n’est pas mûr doit être aidé par ce qui est parvenu à maturité.
Ainsi commencera la fermentation. La loi de l’induction régit toutes les régions de la nature.

11. – Dans la calcination, le corps ne se réduit pas, mais il augmente de quantité.
Le véritable ascétisme consiste à abandonner ce dont on n’a pas besoin, lorsqu’on a reçu quelque chose de meilleur.

12. – Dans l’alchimie, rien ne porte de fruit sans avoir été préalablement mortifié.
La lumière ne peut pas luire à travers la matière, si la matière n’est pas devenue assez subtile pour laisser passer les rayons.
13. – Ce qui tue produit la vie ; ce qui cause la mort amène la résurrection ; ce qui détruit crée.
Rien ne sort de rien. La création d’une forme nouvelle à pour condition la transformation de l’ancienne.

14. – Tout ce qui renferme une semence peut être augmenté, mais point sans l’aide de la nature.
Ce n’est qu’au moyen de la graine que le fruit portant des graines plus nombreuses vient à la vie.

15. Toute chose se multiplie et s’augmente au moyen d’un principe masculin et d’un principe féminin.
La matière ne produit rien si elle n’est pénétrée par la force. La nature ne crée rien si elle n’est imprégnée par l’esprit. La pensée reste improductive si elle n’est rendue active par la volonté.

16. – La faculté de tout germe est de s’unir à tout ce qui fait partie de son royaume.
Tout être dans la nature est attiré par sa propre nature représentée dans d’autres êtres. Les couleurs et les sons de nature semblable forment des accords harmonieux ; les substances qui ont des rapports les unes avec les autres peuvent se combiner ; les animaux de la même espèce s’associent entre eux, et les puissances spirituelles s’unissent aux germes avec lesquels elles ont de l’affinité.

17. – Une matrice pure donne naissance à un fruit pur.
Ce n’est que dans le sanctuaire le plus intime de l’âme que se révèlera le mystère de l’esprit.

18. – Le feu et la chaleur ne peuvent être produits que par le mouvement.
La stagnation, c’est la mort. La pierre jetée dans l’eau forme des cercles excentriques progressifs, qui sont produits par le mouvement. L’âme qui ne s’émeut pas ne peut point s’élever et se pétrifie.

19. – Toute la méthode commence et finit par une seule méthode : la cuisson.
Voici le grand arcane : c’est un esprit céleste descendant du soleil, de la lune et des étoiles, et qui est rendu parfait dans l’objet saturnien par une cuisson continuelle, jusqu’à ce qu’il ait atteint l’état de sublimation et la puissance nécessaires pour transformer les métaux vils en or. Cette opération s’accomplit par le Feu Hermétique. La séparation du subtil d’avec l’épais doit se faire avec soin, en ajoutant continuellement de l’eau ; car plus les matériaux sont terrestres, plus ils doivent être dilués et rendus mobiles. Continue cette méthode jusqu’à ce que l’âme séparée soit réunie au corps.

20. – L’œuvre entière s’accomplit en employant uniquement de l’eau.
C’est la même eau que celle sur laquelle se mouvait l’Esprit de Dieu dans le principe, lorsque les ténèbres étaient sur la face de l’abîme.

21. – Toute chose doit retourner à ce qui l’a produite.
Ce qui est terrestre vient de la terre ; ce qui appartient aux astres provient des astres ; ce qui est spirituel procède de l’Esprit et retourne à Dieu.

22. – Où les vrais principes manquent, les résultats sont imparfaits.
Les imitations ne sauraient donner des résultats purs. L’amour purement imaginaire, la sagesse comme la force purement imaginaires ne peuvent avoir d’effet que dans le royaume des illusions.

23. – L’art commence où la nature cesse d’agir.
L’art accomplit au moyen de la nature ce que la nature est incapable d’accomplir sans l’aide de l’art.

24. – L’art hermétique ne s’atteint pas par une grande variété de méthodes. La Pierre est une.
II n’y a qu’une seule vérité éternelle, immuable. Elle peut apparaître sous maints différents aspects : mais, dans ce cas, ce n’est pas la vérité qui change, c’est nous qui changeons notre mode de conception.

25. – La substance qui sert à préparer l’Arcanum doit être pure, indestructible et incombustible.
Elle doit être pure d’éléments matériels grossiers, inattaquable au doute et à l’épreuve du feu des passions.

26. – Ne cherche pas le germe de la pierre des philosophes dans les éléments.
C’est seulement au centre du fruit qu’on peut trouver le germe.

27. – La substance de la pierre des philosophes est Mercurielle.
Le sage la cherche dans le Mercure ; le fou cherche à la créer dans la vacuité de son propre cerveau.

28. – Le germe des métaux se trouve dans les métaux, et les métaux naissent d’eux-mêmes.
La croissance des métaux est très lente ; mais on peut la hâter en y ajoutant la Patience.

29. – N’emploie que des métaux parfaits.
Le Mercure imparfait, tel qu’on le trouve ordinairement dans certaines contrées de l’Europe, est tout à fait inutile pour cette œuvre. La sagesse du monde est folie aux yeux du Seigneur.

30. – Ce qui est grossier et épais doit être rendu subtil et fin par calcination.
Ceci est une opération très pénible et très lente, parce qu’elle est nécessaire pour arracher la racine même du mal ; elle fait saigner le cœur et gémir la nature torturée.

31. – Le fondement de cet art consiste à réduire les Corpora en Argentum Vivum.
C’est la Solutio Sulphuris Sapientium in Mercurio.Une science dépourvue de vie est une science morte ; une intelligence dépourvue de spiritualité n’est qu’une lumière fausse et empruntée.

32. – Dans la Solution, le Dissolvant et la Dissolution doivent rester ensemble.
Le Feu et l’Eau doivent être rendus aptes à se combiner. L’intelligence et l’amour doivent rester à jamais unis.

33. – Si la semence n’est pas traitée par la chaleur et l’humidité, elle devient inutile.
La froidure contracte le cœur et la sécheresse l’endurcit, mais le Feu de l’Amour Divin le dilate, et l’Eau de l’Intelligence dissout le résidu.

34. – La terre ne produit nul fruit sans une humidité continue.
Nulle révélation n’a lieu dans les ténèbres si ce n’est au moyen de la lumière.

35. – L’Humectation a lieu par l’Eau, avec laquelle elle a beaucoup d’affinité.
Le corps lui-même est un produit de la pensée, et a pour cette raison la plus grande affinité avec l’intelligence

36. – Toute chose sèche tend naturellement à attirer l’humidité dont elle a besoin pour devenir complète en sa constitution.
L’Un, de qui sont sorties toutes choses, est parfait ; et c’est pourquoi celles-ci renferment en elles-mêmes la tendance à la perfection et la possibilité d’y atteindre.

37. – Une semence est inutile et impuissante, si elle n’est mise dans une Matrice appropriée.
Une âme ne peut pas se développer et progresser sans un corps approprié, parce que c’est le corps physique qui fournit la matière nécessaire à son développement.

38. – La chaleur active produit la couleur Noire dans ce qui est humide ; dans tout ce qui est sec, la couleur Blanche ; et, dans tout ce qui est blanc, la couleur Jaune.
D’abord vient la Mortification, puis la Calcination, et ensuite l’éclat doré produit par la lumière du Feu Sacré qui illumine l’âme purifiée.

39. – Le Feu doit être modéré, ininterrompu, lent, égal, humide, chaud, blanc, léger, embrassant toutes choses, renfermé, pénétrant, vivant, intarissable, et le seul employé par la nature.
C’est le Feu qui descend des cieux pour bénir toute l’humanité.

40. – Toutes les opérations doivent être faites dans un seul Vaisseau et sans le retirer du Feu.
La substance employée pour la préparation de la Pierre des Philosophes doit être rassemblée en un seul lieu et ne doit pas être dispersée en plusieurs lieux. Quand une fois l’or a perdu son éclat, il est difficile de le lui rendre

41. – Le Vaisseau doit être bien clos, en sorte que l’eau ne s’en échappe pas ; il doit être scellé hermétiquement, parce que, si l’esprit trouvait une fissure pour s’échapper, la force serait perdue : et en outre il doit être bien clos, afin que rien d’étranger et d’impur ne puisse s’introduire et s’y mélanger.
II doit toujours y avoir à la porte du laboratoire une sentinelle armée d’un glaive flamboyant pour examiner tous les visiteurs, et renvoyer ceux qui ne sont pas dignes d’être admis.

42. – N’ouvrez pas le Vaisseau avant que l’Humectation soit achevée.
Si le Vaisseau est ouvert prématurément, la plus grande partie du travail est perdue.

43. – Plus la Pierre est alimentée et nourrie, plus la volonté s’accroîtra.
La sagesse divine est inépuisable ; seule est limitée la faculté de réceptivité de la forme.

Source : http://www.collegium-rosae-crucis.com/

et : http://logedermott.over-blog.com/

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Les axiomes hermétiques 16 décembre, 2012

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Les axiomes hermétiques

Les axiomes hermétiques dans Chaine d'union hermes-caducee-252x300

1. – Tout ce qu’on peut accomplir par une méthode simple ne doit pas être essayé par une méthode compliquée.

Il n’y a qu’une seule Vérité dont l’existence n’a pas besoin de preuve, parce qu’elle est elle-même sa propre preuve pour ceux qui sont à même de la percevoir. Pourquoi se servir de la complexité pour chercher ce qui est simple ? Les sages disent : « Ignis et Azoth tibi sufficiunt ». Le corps est déjà en votre possession. Tout ce qu’il vous faut, c’est le feu et l’air.

2. – Nulle substance ne peut être rendue parfaite sans une longue souffrance.

Grande est l’erreur de ceux qui s’imaginent que la pierre des philosophes peut être durcie sans avoir été préalablement dissoute ; leur temps et leur travail sont perdus.

3. – La nature doit être aidée par l’art toutes les fois qu’elle manque de force.

L’art peut servir la nature, mais non la supplanter. L’art sans la nature est toujours anti-naturel. La nature sans l’art nest pas toujours parfaite.

4. – La nature ne peut être améliorée qu’en elle-même.

La nature d’un arbre ne peut pas être changée par l’arrangement des branches, ni par l’addition d’ornements ; il ne peut être amélioré qu’en perfectionnant le sol sur lequel il croît, ou par la greffe.

5. – La nature use de la nature, la comprend et la vainc.

Il n’y a point d’autre connaissance que la connaissance de soi-même. Tout être ne peut réaliser vraiment que sa propre existence, mais non celle d’un élément qui lui est totalement étranger.

6. – Celui qui ne connaît pas le mouvement ne connaît pas la nature.

La nature est le produit du mouvement. Au moment où le mouvement éternel cesserait, la nature entière cesserait d’exister. Celui qui ne connaît pas les mouvements qui se produisent dans son corps est un étranger dans sa propre maison.

7. – Tout ce qui produit un effet pareil à celui produit par un élément composé est également un composé.

L’Un est plus grand que tous les autres nombres, car il a produit l’infinie variété des grandeurs mathématiques ; mais nul changement n’est possible sans la présence de l’Un qui pénètre toutes choses, et dont les facultés sont présentes dans ses manifestations.

8. – Rien ne peut passer d’un extrême à l’autre sauf à l’aide d’un moyen.

Un animal ne peut pas arriver au céleste avant d’avoir passé par l’homme. Ce qui est antinaturel doit devenir naturel avant que sa nature puisse devenir spirituelle.

9. – Les métaux ne peuvent pas se changer en d’autres métaux avant d’avoir été réduits à la prima materia.

La volonté propre, opposée à la volonté divine, doit cesser d’être pour que la volonté divine puisse envahir le coeur. Nous devons nous dépouiller de toute sophistication, devenir semblables à des enfants, pour que la parole de sagesse puisse retentir dans notre esprit.

10. – Ce qui n’est pas mûr doit être aidé par ce qui est parvenu à maturité.

Ainsi commencera la fermentation. La loi de l’induction régit toutes les régions de la nature.

11. – Dans la calcination, le corps ne se réduit pas, mais il augmente de quantité.

Le véritable ascétisme consiste à abandonner ce dont on n’a pas besoin, lorsqu’on a reçu quelque chose de meilleur.

12. – Dans l’alchimie, rien ne porte de fruit sans avoir été préalablement mortifié.

La lumière ne peut pas luire à travers la matière, si la matière n’est pas devenue assez subtile pour laisser passer les rayons.

13. – Ce qui tue produit la vie ; ce qui cause la mort amène la résurrection ; ce qui détruit crée.

Rien ne sort de rien. La création d’une forme nouvelle à pour condition la transformation de l’ancienne.

14. – Tout ce qui renferme une semence peut être augmenté, mais point sans l’aide de la nature.

Ce n’est qu’au moyen de la graine que le fruit portant des graines plus nombreuses vient à la vie.

15. – Toute chose se multiplie et s’augmente au moyen d’un principe masculin et d’un principe féminin.

La matière ne produit rien si elle n’est pénétrée par la force. La nature ne crée rien si elle n’est imprégnée par l’esprit. La pensée reste improductive si elle n’est rendue active par la volonté.

16. – La faculté de tout germe est de s’unir à tout ce qui fait partie de son royaume.

Tout être dans la nature est attiré par sa propre nature représentée dans d’autres êtres. Les couleurs et les sons de nature semblable forment des accords harmonieux ; les substances qui ont des rapports les unes avec les autres peuvent se combiner ; les animaux de la même espèce s’associent entre eux, et les puissances spirituelles s’unissent aux germes avec lesquels elles ont de l’affinité.

17. – Une matrice pure donne naissance à un fruit pur.

Ce n’est que dans le sanctuaire le plus intime de l’âme que se révèlera le mystère de l’esprit.

18. – Le feu et la chaleur ne peuvent être produits que par le mouvement.

La stagnation, c’est la mort. La pierre jetée dans l’eau forme des cercles excentriques progressifs, qui sont produits par le mouvement. L’âme qui ne s’émeut pas ne peut point s’élever et se pétrifie.

19. – Toute la méthode commence et finit par une seule méthode : la cuisson.

Voici le grand arcane : c’est un esprit céleste descendant du soleil, de la lune et des étoiles, et qui est rendu parfait dans l’objet saturnin par une cuisson continuelle, jusqu’à ce qu’il ait atteint l’état de sublimation et la puissance nécessaires pour transformer les métaux vils en or. Cette opération s’accomplit par le feu hermétique. La séparation du subtil d’avec l’épais doit se faire avec soin, en ajoutant continuellement de l’eau ; car plus les matériaux sont terrestres, plus ils doivent être dilués et rendus mobiles. Continue cette méthode jusqu’à ce que l’âme séparée soit réunie au corps.

20. – L’oeuvre entière s’accomplit en employant uniquement de l’eau.

C’est la même eau que celle sur laquelle se mouvait l’Esprit de Dieu dans le principe, lorsque les ténèbres étaient sur la face de l’abîme.

21. – Toute chose doit retourner à ce qui l’a produite.

Ce qui est terrestre vient de la terre ; ce qui appartient aux astres provient des astres ; ce qui est spirituel procède de l’Esprit et retourne à Dieu.

22. – Où les vrais principes manquent, les résultats sont imparfaits.

Les imitations ne sauraient donner des résultats purs. L’amour purement imaginaire, la sagesse comme la force purement imaginaires ne peuvent avoir d’effet que dans le royaume des illusions.

23. – L’art commence où la nature cesse d’agir.

L’art accomplit au moyen de la nature ce que la nature est incapable d’accomplir sans l’aide de l’art.

24. – L’art hermétique ne s’atteint pas par une grande variété de méthodes. La Pierre est une.

II n’y a qu’une seule vérité éternelle, immuable. Elle peut apparaître sous maints différents aspects : mais, dans ce cas, ce n’est pas la vérité qui change, c’est nous qui changeons notre mode de conception.

25. – La substance qui sert à préparer l’Arcanum doit être pure, indestructible et incombustible.

Elle doit être pure d’éléments matériels grossiers, inattaquable au doute et à l’épreuve du feu des passions.

26. – Ne cherche pas le germe de la pierre des philosophes dans les éléments.

C’est seulement au centre du fruit qu’on peut trouver le germe.

27. – La substance de la pierre des philosophes est mercurielle.

Le sage la cherche dans le mercure ; le fou cherche à la créer dans la vacuité de son propre cerveau.

28. – Le germe des métaux se trouve dans les métaux, et les métaux naissent d’eux-mêmes.

La croissance des métaux est très lente ; mais on peut la hâter en y ajoutant la patience.

29. – N’emploie que des métaux parfaits.

Le mercure imparfait, tel qu’on le trouve ordinairement dans certaines contrées de l’Europe, est tout à fait inutile pour cette oeuvre. La sagesse du monde est folie aux yeux du Seigneur.

30. – Ce qui est grossier et épais doit être rendu subtil et fin par calcination.

Ceci est une opération très pénible et très lente, parce qu’elle est nécessaire pour arracher la racine même du mal ; elle fait saigner le coeur et gémir la nature torturée.

31. – Le fondement de cet art consiste à réduire les Corpora en Argentum Vivum.

C’est la Solutio Sulphuris Sapientium in Mercurio. Une science dépourvue de vie est une science morte ; une intelligence dépourvue de spiritualité n’est qu’une lumière fausse et empruntée.

32. – Dans la solution, le dissolvant et la dissolution doivent rester ensemble.

Le feu et l’eau doivent être rendus aptes à se combiner. L’intelligence et l’amour doivent rester à jamais unis.

33. – Si la semence n’est pas traitée par la chaleur et l’humidité, elle devient inutile.

La froidure contracte le coeur et la sécheresse l’endurcit, mais le feu de l’amour divin le dilate, et l’eau de l’intelligence dissout le résidu.

34. – La terre ne produit nul fruit sans une humidité continue.

Nulle révélation n’a lieu dans les ténèbres si ce n’est au moyen de la lumière.

35. – L’humectation a lieu par l’eau, avec laquelle elle a beaucoup d’affinité.

Le corps lui-même est un produit de la pensée, et a pour cette raison la plus grande affinité avec l’intelligence

36. – Toute chose sèche tend naturellement à attirer l’humidité dont elle a besoin pour devenir complète en sa constitution.

L’Un, de qui sont sorties toutes choses, est parfait ; et c’est pourquoi celles-ci renferment en elles-mêmes la tendance à la perfection et la possibilité d’y atteindre.

37. – Une semence est inutile et impuissante, si elle n’est mise dans une matrice appropriée.

Une âme ne peut pas se développer et progresser sans un corps approprié, parce que c’est le corps physique qui fournit la matière nécessaire à son développement.

38. – La chaleur active produit la couleur noire dans ce qui est humide ; dans tout ce qui est sec, la couleur blanche ; et, dans tout ce qui est blanc, la couleur jaune.

D’abord vient la mortification, puis la calcination, et ensuite l’éclat doré produit par la lumière du feu sacré qui illumine l’âme purifiée.

39. – Le feu doit être modéré, ininterrompu, lent, égal, humide, chaud, blanc, léger, embrassant toutes choses, renfermé, pénétrant, vivant, intarissable, et le seul employé par la nature.

C’est le feu qui descend des cieux pour bénir toute l’humanité.

40. – Toutes les opérations doivent être faites dans un seul vaisseau et sans le retirer du feu.

La substance employée pour la préparation de la pierre des philosophes doit être rassemblée en un seul lieu et ne doit pas être dispersée en plusieurs lieux. Quand une fois l’or a perdu son éclat, il est difficile de le lui rendre

41. – Le vaisseau doit être bien clos, en sorte que l’eau ne s’en échappe pas ; il doit être scellé hermétiquement, parce que, si l’esprit trouvait une fissure pour s’échapper, la force serait perdue : et en outre il doit être bien clos, afin que rien d’étranger et d’impur ne puisse s’introduire et s’y mélanger. II doit toujours y avoir à la porte du laboratoire une sentinelle armée d’un glaive flamboyant pour examiner tous les visiteurs, et renvoyer ceux qui ne sont pas dignes d’être admis.  

42. – N’ouvrez pas le vaisseau avant que l’humectation soit achevée.

Si le vaisseau est ouvert prématurément, la plus grande partie du travail est perdue.

43. – Plus la pierre est alimentée et nourrie, plus la volonté s’accroîtra.

La sagesse divine est inépuisable ; seule est limitée la faculté de réceptivité de la forme.

Source : http://livres-mystiques.com/

&

http://hautsgrades.over-blog.com/article-les-axiomes-hermetiques-112474727.html

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Pinocchio ou l’ange humain 17 janvier, 2012

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Pinocchio ou l’ange humain

 Pinocchio ou l'ange humain dans Recherches & Reflexions PinocchioEnrico-Mazzanti-1883-217x300

Pinocchio, personnage sorti de l’imagination de Carlo Collodi (Pseudonyme de C. Lorenzini) est l’inspiration de notre histoire à tous. Cette histoire particulièrement « signée » de l’Esprit est spécialement destinée aux quêteurs de vérités oubliées. « Soyez comme des petits enfants pour entrer dans le royaume » enseigne Jésus en clé d’énigme. Alors allons y et penchons-nous sur les histoires de notre enfance avec des yeux neufs, un esprit ouvert, conscient de la présence de messages codés en attente de découvertes.

 

La marionnette…

est la représentation de l’Humain. Pantin de bois, manœuvré par la main de son créateur, il est sa manifestation, le dédoublement de son esprit. Des fils le rendent à l’apparence du vivant. Il est facile d’oublier ses fils, presque invisibles, et parfois la vanité offre la délicieuse sensation d’être totalement libre. Bien sûr, c’est un leurre car l’Humain n’a en lui qu’une seule chose qui lui appartienne et dont il est responsable : Le Choix. Tout le reste lui est prêté, énergies, pensées, environnement. Prenez conscience que dans le flux incessant de pensées et de mots qui nous viennent étrangement à l’Esprit, nous choisissons ceux qui nous paraissent les plus justes. Et nous supposons que ce flux vient du plus profond de nous-mêmes, alors que c’est, à peine visible, un des fils qui nous anime en marionnette de chair.

 

Voici donc l’histoire de Pinocchio telle que vous ne l’avez jamais lue.

A tout les curieux qui lisent ces lignes, bienvenue dans l’étrange histoire d’un pantin à la recherche de son Père. Alors ouvrez grand vos yeux et votre cœur !

 

La Naissance

Pinocchio a eu plusieurs origines selon les versions proposées. L’originale mentionne un charpentier trouvant un morceau de bois qui avait pour particularité de rire et de parler. C’est justement cette version qui fut dernièrement traduit en film cinématographique par Steve Barron ; elle a l’avantage de proposer de remarquables effets spéciaux et une touchante prestation de Martin Landau en Gepetto. A tel point qu’il est possible d’avancer que les inspirations du film sont plus profondes que celle du livre ; c’est pour cette raison que je m’y référerai.

Nous sommes, en ces temps de fin de millénaire, baignés de quantités d’influences qui s’expriment à travers les récepteurs-cerveaux humains. Les idées, les inspirations, les événements sont le reflet de dévoilements qui n’ont encore jamais été donnés jusqu’alors. D’où l’importance d’un regard plus aiguisé sur les informations qui nous entourent.

 

Gepetto

homme célibataire, s’est renfermé dans une solitude sentimentale, par amour pour Léona, devenue l’épouse de son frère. Fidèle à ses sentiments, il reste seul avec son désespoir qui s’exprime pourtant dans une gravure qu’il fit sur une souche, dans la forêt. Elle représente un cœur avec les initiales de son rêve inaccessible. Il mit véritablement l’énergie de son amour dans cette gravure. Quelques années plus tard, cette souche, miraculeusement et par magie, lui roule à ses pieds et refuse de finir brûlée dans sa cheminée. Intrigué, Gepetto découvre alors le cœur gravé sur cette bûche et décide d’en faire une marionnette. Dans la version du dessin animé de Walt Disney, c’est une fée bleue ailée qui donne la vie à la bûche.

Nous avons donc un Homme qui veut être Père et qui façonne son enfant « virtuel ». Ce système de naissance nous apparaît en dehors de tout acte créateur logique, et pourtant. La reproduction biologique constitue notre repère principal, et il est logique qu’il y en ait d’autres. Celui décrit dans le conte est le reflet d’une autre réalité, celui de la création divine. Et oui, rien que cela ! Rappelez-vous : « Dieu créa l’homme à son image », « Il le façonna avec de l’argile », etc. Pour créer un système autonome, il faut avoir préalablement finalisé sa forme, ses organes et fonctions. C’est ce que nous faisons lorsque nous créons une machine. Dans le cadre d’un être vivant, les organes sont imaginés et la forme est conçue, bien sûr. Puis, la Vie, cette étincelle mystérieuse, est intégrée. Bref, on transmet la Vie tout au plus, mais on ne la donne pas.

Pinocchio est né par le façonnage d’une substance, et ce symbole correspond aussi à la création des anges. Affirmation gratuite j’en conviens, mais rappelez-vous comment l’Adam Glébeux fut créé: à partir de la poussière de la terre. (Gen. 2-7). Notre science nous démontre que les êtres naissent à partir d’un germe dans une matrice, mais il est d’autres façons de créer la vie. Certains chercheurs déjà manipulent les gènes et développent des vies programmées. Le conte de Pinocchio, identiquement à la Genèse, apporte le thème d’un autre système de création. Cela reste un symbole, mais à son origine, les systèmes biologiques angéliques ou humains sont nés d’une conception, d’un champ « forme » habillé de matière. La création biologique humaine fut ensuite synthétisée en germe transplantable. Ce champ d’énergie humain, les ondes de formes, tout cela n’est plus de la science fiction. Voyez l’acupuncture ou les champs morphiques (cf. le biologiste anglais : Ruppert Sheldrake) qui sont l’expression de ce champ énergie impalpable qui est en « dessous » de la matière. La création de ce Pinocchio en bois en est l’expression symbolique et imagée.

 

La Fée bleue

Bien sûr, il lui manque la vie, et, selon les façons de l’aborder, c’est soit une fée, soit un acte magique qui en est l’origine. Mais alors qui la donne ? La Fée bleue ailée, bien sûr, quelle question ! Je m’égare en apparence pour mieux revenir… La fée bleue qui vole est apparue bien des fois pour orienter les hommes incrédules. On la nomme Marie, la Mère de Dieu, c’est à dire la source de la Vie. Mère de Dieu ? Rendez-vous compte, Dieu aurait-il donc été créé lui aussi ? Oui, même notre Dieu à une « Maman » matière !

 

L’oeil de Pin

Pour en revenir à notre Pinocchio. Il est le fruit d’un travail minutieux, laborieux, de la manipulation de la matière. Les symboles représentés sont précis. Pinocchio, littéralement, en italien, « L’œil de Pin », est fait de bois. Symboliquement le bois est une graine nourrie de chaleur, d’eau et de lumière, qui se transforme en arbre. Et vous savez que l’arbre est un symbole lié à l’humain dans ses éléments constitutifs : la sève pour le sang, le tronc pour son corps, les branches pour les ramifications de son esprit, les feuilles pour les récepteurs de photosynthèse, c’est à dire les récepteurs de « Lumières », etc. Tout cela dire que le véritable être de bois, c’est nous-mêmes ! Ne restons donc pas de bois.

En cabale française, « BOIS » laisse apparaître « BIOS », la vie ou bien Bi-os, deux origines, humaine et divine. Veuillez noter au passage ce clin d’œil de l’esprit qui signale en ces lettres : O-B-IS ! Obéir, oui, car se libérer des fils a demandé à notre Pinocchio d’obéir à sa conscience et à son père.

C’est aussi un autre impératif : BOIS ! Hasard ? Non, bien sûr, « Buvez mon sang » est l’exemple le plus connu. Cela veut dire : Assimilez mon enseignement. J’en viens naturellement au PIN, homophonie de PAIN, qui est, lui aussi, né du labeur de l’homme sur un travail d’une substance. Le « Mangez mon pain », est l’expression d’une exemplarité d’action, car il n’y a d’amour que des preuves d’amour.

Tel est l’humain, un être de bois qui se modèle. Vous avez cependant remarqué que les termes associés au bois ont une connotation négative : « langue de bois », « rester de bois », et même « chèque en bois », pour désigner des valeurs vides. Effectivement, notre Pinocchio est à sa naissance une valeur, mais vide de principes et de compréhension. Il est le garnement, le chenapan immature et non le bon garçon vertueux. Tel est l’humain par essence.

 

La dualité

Toutes les traditions le mentionnent : le bipède humain n’a pas une origine terrestre, mais angélique. Au cours de la fameuse révolte, il exprima ses pulsions d’égoïsme, d’orgueil, de vanité qui sommeillaient en lui, et ce fut une bonne chose ! Lors de l’incarnation terrestre, ces instincts ataviques se réveillent pour qu’il puisse les combattre et acquérir une énergie, une volonté de développer des qualités. Faut-il le savoir !

Question : Pourquoi notre gentille fée bleue a créé un esprit à Pinocchio si méchant, alors que notre Geppetto ne désirait qu’un fils agréable ? Est-elle un brin, espiègle ? Non, point de hasard dans les tortueuses pérégrinations de la pensée et des projets des dieux. Comprenez que la terre est une terre d’élection et de sélection de valeurs et de qualités. Et c’est justement l’histoire de notre Pinocchio avec sa naissance si mystérieuse. Une marionnette qui parle, n’a-t-on jamais vu ça ? L’humain est bien un animal qui parle. non ?

Ha ! J’ai failli oublier ! Notre fée est tout de même pleine de précautions. Elle donne à notre cher Pinocchio une conscience : un criquet ! Il est petit, perturbant et toujours de bons conseils, mais jamais une obligation. Vous comprenez à présent pourquoi cette conscience est « extérieure » à l’esprit de Pinocchio, car si sa conscience était déjà intériorisée, il n’aurait pas de travail à faire sur lui. Cette conscience extérieure lui donnera l’occasion d’exercer ses choix (mot que l’on trouve en anagramme dans les 4 dernières lettres de PinocCHIO = CHOI) par de judicieux conseils. Chez l’humain, cette conscience est aussi « extérieure » dans le sens de liberté de choix. Elle est la petite voix qui nous pousse à bien faire.

 

Le temps des épreuves

Durant toutes ses épreuves, Pinocchio subit une métamorphose particulière : son nez s’allonge à chaque mensonge. Cette caractéristique amusante apporte deux enseignements.

1. Le premier est celui de la loi de cause à effet. Une action se répercute plus ou moins sur son « émetteur » selon son importance. Plus Pinocchio ment, plus son nez s’allonge. Il ne peut y échapper, qu’il le veuille ou non il est assujetti à cette loi. Pour l’humain, cette loi existe, mais le « choc en retour » est différé dans le temps. D’où pour lui la difficulté de compréhension pour établir des liens entre les causes et les effets. Cette loi est connue sous le terme de Karma.

2. Le deuxième symbole lié à l’allongement du nez, est la mise en valeur d’un impératif : « Suis ta conscience, ton intuition ! ». Pourquoi ? Parce que c’est par le nez que s’effectue l’inspiration. Le nez est le symbole de l’intégration de substance air-esprit. « Avoir du nez », ou « Avoir le nez creux », sont des expressions assimilées à l’inspiration, l’intuition. Dieu souffle dans les narines d’Adam un souffle de vie pour qu’il prenne possession d’un esprit personnel. Ainsi, le nez qui s’allonge devant les yeux ébahis de Pinocchio est sa propre injonction à « sentir » mieux, à réfléchir, selon un autre niveau.

 

Les 2 compères

Vous avez pu apercevoir que deux compères mi-hommes, mi-animaux, entrent en scène. Ce sont un renard et un chat, ou une chatte dans le film. Ce couple malfaisant est, à l’image inversée de Jiminy criquet, la tentation, les mauvais penchants qui feront parti des choix de Pinocchio. Le système des choix est alors respecté : Le bien d’un coté et le mal de l’autre. Pinocchio pourra donc faire son apprentissage de façon autonome. C’est identique pour l’humain. Outre la petite voix de la conscience, des pulsions, des envies de plaisirs ou de bonheurs faciles le poussent souvent à mal faire les choses. Cette inspiration à mal faire est souvent incompréhensible pour l’homme sur terre, ignorant de sa raison d’être. Le fait de mettre des obstacles ne veut pas forcément dire que l’on veut sa perdition, mais plutôt un renforcement de ses capacités. Il ne viendrait pas à l’esprit d’un coureur de 110 mètres de blâmer la présence des haies. Les épreuves ne sont rien d’autre que des tests de sélection. Le savoir facilite l’acceptation de l’épreuve mais n’en dispense pas. Le renard exprime le caractère malin, intelligent de l’inspiration du mal, le chat en exprime le caractère sournois et autonome.

Pinocchio commence à jouir de la vie de manière indépendante, ou du moins le croit-il. Mais vivre sa première liberté n’est pas chose facile et bien sûr, il fit quelques bêtises. La plus grosse, dans le film, fut de saccager une pâtisserie, le lieu des plaisirs. Pour ceux qui connaissent l’histoire de la chute des anges, reconnaissez l’étape où ceux-ci profitèrent de leur nouvelle liberté jusqu’à la sentence prononcée par le tribunal selon les désordres commis. Pinocchio a vécu la même chose, comme par hasard, et curieusement, ce fut Gepetto qui fut mis en jugement, responsable paternel de son fils. Pourquoi ? Parce que le véritable responsable du désordre, ce fut le créateur lui-même. C’est lui qui infusa en ces anges des velléités de liberté. Etant au dessus des temps Il savait naturellement ce qu’il faisait.

 

Le Théâtre…

prononcé fut de confier la garde de Pinocchio au sieur Lorenzini, directeur d’un théâtre de marionnette. Ce lieu symbolique correspond à une sorte de monde à l’intérieur du monde, avec une mise en scène particulière d’un auteur sur un peuple de marionnettes. Essayez de deviner. Le théâtre représente la terre, monde à l’intérieur du monde, où les marionnettes humaines jouent leur rôle. C’est amusant comme les « hasards » sont troublants, Pinocchio est déguisé en soldat dans la pièce dans laquelle il joue, luttant contre un géant pour libérer la reine. Par la suite, il sauve la reine à partir d’un navire qui arbore un drapeau « Liberté ».

Eh oui, l’humain doit lutter contre un géant sur cette terre. qui n’est pas autre chose que lui-même ! Sauvez la reine ? C’est sauver l’Amour, le principe féminin. Tout cela dans un navire, son corps, qui est sous la bannière de la Liberté. Le plus étrange est qu’il doit lutter contre un dragon-baleine contre lequel il va effectivement se battre plus tard. Le théâtre représente bien la vie, mais mise en scène avec un scénario. Lorenzini, directeur du théâtre, est en fait le nom véritable de l’auteur du conte. Dans la version originale, le directeur du théâtre est prénommé « le mangeur de feu ». Peut-être les auteurs du film ont-ils voulu rendre un hommage à l’auteur, avec le souci de garder le caractère pyrotechnique du personnage ! Lorenzini dans le film met le feu au théâtre, le transformant en enfer, prenant ainsi le rôle du « méchant ». Il en faut toujours un.

La traduction pour l’humain de cet épisode dans la vie de Pinocchio n’est pas difficile à deviner. L’auteur de notre monde a laissé le feu s’installer, et nous vivons dans notre propre enfer. Le monde autour de nous part dans une dérive certaine, et notamment en ce qui concerne les catastrophes naturelles. La guerre, les combats, les animosités, tout cela représente le « feu » de notre théâtre. En cabale, le mot THE-ATRE signifie « foyer de Dieu » (THE pour Théos). Vous allez me dire : « Mais pourquoi l’auteur du scénario terrestre laisse-t-il le feu se propager ? ». Oui, toute la compréhension de ce qui nous arrive vient de cette question.

 

Et Dieu…

Dieu sait bien sûr ce qu’il fait, ou alors il serait criminel. Si vous êtes athée, la question ne se pose pas, mais si vous êtes croyant, comment comprendre que Dieu, Allah, Jéhova, ou le « Grand Architecte de l’Univers » laisse faire avec une désinvolture révoltante les terribles crimes auxquels nous assistons ? Serait-il insensible au malheur, ou lui-même complice des crimes pour non-assistance ? N’est-il pas tout puissant après tout ? Il faut bien admettre qu’il laisse faire, avec joie, non, mais il laisse faire, et encore plus grave, il amplifie les malheurs. Il y a de quoi se révolter non ? Mais au plus terrible de l’épreuve, les cours se soudent et émergent de véritables valeurs sur les cendres des catastrophes. Regardez comment les villageois oublient leurs querelles bassement humaines lorsque toutes les maisons sont détruites, suite à un tremblement de terre. Le voisin devient un frère de souffrance, mais un frère tout de même. Du chaos émergent de véritables cours, et c’est pourquoi « on » accélère les conséquences de nos choix erronés. Dieu et le Malin travaillent de concert. pour faire naître des consciences et des âmes.

Pinocchio par la suite cherche à se réfugier, cherche sa source, sa souche, et cela correspond à la recherche du paradis, du bonheur, de notre véritable origine, à travers différentes visites de « lieux ». Après avoir quitté le théâtre, Pinocchio parcourt différents environnements, c’est à dire pour l’humain plusieurs mondes, plusieurs planètes. « Il y a plusieurs demeures dans le royaume de mon Père » disait le violent Jésus. Ne croyez pas qu’un humain se forge sur une seule vie, sur un seul monde, ce serait trop facile.

 

Le Karma

Pinocchio va ensuite essayer de faire fructifier son argent de façon naïve, pour Geppetto, mais sa bonne conscience lui dicte son ordre de pensée : « Les miracles ne poussent pas sur les arbres. Les miracles viennent du cœur « . Effectivement, je rajouterai même qu’on ne doit attendre que le miracle de ses efforts.et il existe ! Sachez qu’une qualité développée non seulement amplifie les autres qualités, comme par magie, mais provoque, un jour ou l’autre, mais rarement à court terme, plutôt à long terme, un cadeau en retour qui « tombe du ciel ». C’est la loi du karma. Cet épisode des 5 pièces d’or désigne la richesse humaine ( Le chiffre 5 pour désigner l’humain et ses 5 sens), qui est donc la richesse de cœur . Le fait de vouloir enterrer son trésor pour le faire fructifier correspond au trait psychologique classique de l’attente consciencieuse immobile. « On ne peut se changer » est l’adage préféré de ceux qui renonce à multiplier leurs valeurs. A partir d’un certain âge, beaucoup ne cherchent plus à faire évoluer leur caractère, ils « enterrent » leurs trésors. Dommage, quelle naïveté de pantin !

 

Puis vient l’épreuve principale…

Celle où les enfants, avec Pinocchio, arrivent au pays des jouets. C’est le lieu rêvé ! Il n’y a ni livres ni maîtres et les vacances durent tout le temps. Dans le film, c’est une véritable fête foraine ou les dégradations et violences sont encouragées. L’ami de Pinocchio dans cette épreuve porte un nom étrange : Lumignon ! C’est, d’après la définition classique, un petit morceau de chandelle qui diffuse une lumière faible.

Effectivement, chaque être est un « petit bout de lumière » qui brille plus ou moins fortement. Depuis longtemps les traditions associent la valeur d’un être à son intensité « lumineuse ». Comment l’interpréter rationnellement ? Vous connaissez la solution : Le mot Lumière est choisi non seulement pour exprimer ce qui est l’attribut d’un esprit brillant ou hautement spirituel mais aussi par perception plus ou moins consciente d’une aura émanée. Déjà nos artistes, très sensibles au sens visuel, dessinaient des auréoles autour de la tête de nos saints hommes. A présent, l’étude des phénomènes énergétiques est plus rationnelle, les Chinois ont d’ailleurs fondé des techniques de guérison et de bien-être par l’utilisation de cette force intérieur, le « Chi » et les méthodes d’acupuncture.

Plus récemment, le scientifique russe Kirlian découvre en 1939 une méthode pour prendre des photographies d’émanations énergétiques des corps. L’interprétation des couleurs des auras révèle des choses étranges. Notamment le fait qu’une aura de pétale de rose coupée reste presque à l’identique du pétale entier. D’autres expériences montrent que ces émanations colorées sont dépendantes, non seulement de l’état de santé physique, mais aussi des sentiments exprimés. La fameuse Lumière décrite depuis longtemps n’est pas une simple image de magnificence, c’est une réalité.

Voici donc notre Pinocchio avec son « petit bout de lumière » comme deux larrons en foire. C’est l’expérience ultime, la liberté totale. Le phénomène de groupe l’entraîne malgré lui à s’identifier à la norme du plus nombreux. L’image correspondante de l’humain sur cette planète n’est-elle pas alors un peu simpliste ? Malheureusement non, voyez les manifestations de masse. Le pays des jouets un monde plein de leurres car ces enfants terribles ont toute liberté de faire le mal sans conséquences immédiates. Casser, polluer, détruire, se quereller, nous voyons ces mêmes lumignons tous les jours en regardant les informations télévisées.

 

La punition tombe…

après avoir bu une eau vraiment spéciale. Ils se transforment en ânes. Les corps se transforment en leur correspondance la plus proche, en résonance d’osmose. En traduction symbolique, nos anges humains, selon les lieux où ils se trouvent, ont toujours cette liberté de choix qui induit des lois de réaction plus ou moins rapides. Boire de cette eau signifie assimiler un enseignement, une façon de vivre qui peut être constructive ou bien dissolue, les transformant ainsi en animaux. Pourquoi l’âne ? Parce qu’ils ne peuvent plus utiliser le verbe, mais en sont réduit à braire. L’âne est le symbole d’une personne ignorante à l’esprit borné. La transformation des enfants capricieux en ânes fait les affaires de notre Lorenzini, le Lucifer à qui profite ces transformations. Pour l’humain, la transformation est aussi effective dans un certain sens car le phénomène de résonance s’exprime à la mort de l’individu. Il se retrouve pour les étapes suivant son départ dans des milieux et des états qui correspondent au potentiel lumineux qu’il a construit en lui.

 

Pourtant…

Pinocchio ne se transformera pas entièrement en âne et pourra s’échapper des griffes de Lorenzini. Son courage et sa vivacité le sauvent. « Le royaume des cieux est pour les violents » dit-on parfois. Refuser de suivre ce que la majorité impose pour l’accomplissement d’un idéal est la véritable renaissance, la véritable initiation. Et l’épisode suivant l’évoque de belle façon.

Pinocchio se rend alors compte de la disparition de son père parti à sa recherche. Il s’est embarqué sur l’océan pour retrouver son fils. Cet acte d’amour a ému notre pantin qui part lui aussi vers cet immense océan pour le rejoindre. L’océan évoqué n’est pas en réalité seulement un lieu géographique mais un espace psychique, spirituel. Il est infini, insondable, soumis à des tempêtes ou à des vents violents. Il est sujet à des marées cycliques, des vagues, des températures, tout comme un esprit qui s’agite. Il est fait de cette eau primordiale d’où a jailli la vie. Cet océan est tout simplement le Verbe, la véritable matrice. Le père se cache dans une immensité que le fils doit parcourir. Il le trouvera bien sûr, mais selon des conditions bien précises !

 

Jonas

Pinocchio va donc subir l’épisode biblique de Jonas. Il va être avalé vivant par un poisson énorme. Selon les versions racontées, il est question d’une baleine, d’un requin ou d’un monstre marin. En voici la traduction : Se faire avaler par la baleine, c’est la mort initiatique. Selon la tradition islamique, la baleine est liée dans l’alphabet arabe à une coupe, une arche, qui est rapproché symboliquement du cœur. La lettre arable « nûn » est une coupe surmontée d’un point indiquant son centre : c’est le « germe d’immortalité contre le cœur « . Et ce n’est pas par hasard non plus si le Christ est représenté par l’Ichtus, le poisson. Laissez-moi vous aider à traduire cette coupe liée à ce poisson. L’image de la baleine est identique à l’image de la caverne où la vierge apparut et où les francs-maçons descendent pour faire leur testament philosophique.

Descendre dans la caverne ou être avalé par le poisson, c’est pénétrer dans sa propre personne, son propre cœur, c’est réussir à s’intérioriser totalement pour disparaître ou bien mourir. Il faut pour renaître à un autre état tout d’abord mourir à l’ancien, comme un papillon qui naît de la mort d’une chenille. (Ou d’un fils à partir de pantin de bois). Faire peau neuve est nécessaire pour se transformer. Le poisson exprime celui qui sait respirer de l’eau-esprit, la caverne étant le cerveau de notre matière-matrice. Le poisson est donc le Verbe-fils et la caverne la Mère-Matrice. Et c’est là que Pinocchio trouvera son père, dans la caverne-ventre de notre poisson, c’est à dire à l’intérieur de son cœur que son esprit parcourt depuis si longtemps. Où pouvait-il trouver son père autre qu’à l’intérieur de ses sentiments ?

Cet amour intériorisé librement exprimé permettra à Pinocchio d’acquérir suffisamment d’énergie pour être transformé par notre gentille fée bleue en un véritable petit garçon. L’enfant s’est fait fils et transforme son géniteur-créateur en Père. Ce message n’est pas nouveau puisque le violent Jésus, ce Pinocchio mystérieux, désignait déjà le Dieu de l’ancien testament en un Père à retrouver et à aimer.

 

Conclusion

Un détail qui vous a peut-être échappé : pourquoi ce nom de Pinocchio, « Œil de pin » ? Et bien c’est tout simplement l’expression de cette mémoire angélique implanté en l’humain. L’œil de pin, c’est l’échange entre le corps de l’ange et l’esprit humain, à travers la glande pinéale, littéralement « en forme de pomme de pin ». Cette glande épiphyse secrète des éléments et des vibrations, c’est notre « troisième œil ». Elle participe en tant que lien à notre potentiel angélique. (En cabale française : EPI-PHYSE, ce qui est « au dessus » de la « nature »). Ce clin d’œil n’est pas fortuit.

Nous sommes tous des PINOCCHIOS = 111 sans le savoir, chacun devant devenir librement un jour LE FILS DE DIEU = 111. Nous sommes faits de ce bois qui a engendré des enfants perdus à la recherche de leurs origines. La solution du « mal être » qui nous anime parfois est au plus profond de nous, dans l’océan de nos sentiments, dans le tréfonds de notre cœur. Et souvenez-vous, à la fin du film, notre Pinocchio demande à son père de lui façonner une petite fille, exprimant son besoin fondamental de cette âme sœur. C’est alors une autre histoire qui commence.

Je sais que sur un conte il y a une infinité d’interprétations et que toutes participent à des compréhensions nouvelles. Celle que je viens de décrire n’est pas courante, mais fait partie d’une trame unitaire en relation avec les autres légendes. En fin de compte, les légendes racontent entre les lignes l’histoire angélique de l’Homme en formation. Il faut y prêter attention pour ne pas rester un enfant orphelin d’un destin particulier. L’histoire de Pinocchio est merveilleuse de recoupements. Merci à son auteur.

Bruno, Décembre 1999

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Merci à Daniel B… pour cette transmission

janvier 6012

Du Jeu des Tarots. 10 octobre, 2009

Posté par hiram3330 dans : Bleu,Chaine d'union,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

Court de Gébelin, Antoine: Monde primitif, analysé et comparé avec le monde moderne
vol. 8, tom. 1, Paris 1781
Considéré dans divers objets concernant l’histoire, le blason, les monnoies, les jeux, les voyages des phéniciens autour du monde, les langues américaines, etc. ou dissertations mêlées
p. 365-410
 
 

Du Jeu des Tarots.

 

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Où l’on traite de son origine, où on explique ses Allegories, & où l’on fait voir qu’il est la source de nos Cartes modernes à jouer, etc. etc.

1.
Surprise que causeroit la découverte d’un Livre Egyptien.

Si l’on entendoit annoncer qu’il existe encore de nos jours un Ouvrage des anciens Egyptiens, un de leurs Livres échappé aux flammes qui dévotèrent leurs superbes Bibliothèques, & qui contient leur doctrine la plus pure sur des objets intéressans, chacun seroit, sans doute, empressé de connoître un Livre aussi précieux, aussi extraordinaire. Si on ajoûtoit que ce Livre est très-répandu dans une grande partie de l’Europe, que depuis nombre de siècles il y est entre les mains de tout le monde, la surprise iroit certainement en croissant: ne seroit-elle pas à son comble, si l’on assuroit qu’on n’a jamais soupçonné qu’il fût Egyptien; qu’on le possède comme ne le possedant point, que personne n’a jamais cherché à en déchiffrer une feuille: que le fruit d’une sagesse exquise est regardé comme un amas de figures extravagantes qui ne signifient rien par elles-mêmes? Ne croiroit-on pas qu’on veut s’amuser, se jouer de la crédulité de ses Auditeurs?

2.
Ce Livre Egyptien existe.

Le fait est cependant très-vrai: ce Livre Egyptien, seul reste de leurs superbes Bibliothèques, existe de nos jours: il est même si commun, qu’aucun Savant n’a daigné s’en occuper; personne avant nous n’ayant jamais soupçonné son illustre origine. Ce Livre est composé de LXXVII feuillets ou tableaux, même de LXXVIII, divisés en V classes, qui offrent chacune des objetes aussi variés qu’amusans & instructifs: ce Livre est en un mot le JEU DES TAROTS, jeu inconnu, il est vrai, à Paris, mais très-connu en Italie, en Allemagne, même en Provence, & aussi bisarre par les figures qu’offre chacune de ses cartes, que par leur multitude.

Quelqu’étendues que soient les Contrées où il est en usage, on n’en étoit pas plus avancé sur la valeur des figures bisarres qu’il paroît offrir: & telle est son antique origine qu’elle se perdoit dans l’obscurité des tems, qu’on ne savoit ni où quand il avoit été inventé, ni le motif qui y avoit rassemblé tant de figures extraoridnaires, si peu faites ce semble pour marcher de pair, telles qu’il n’offre dans tout son ensemble qu’une énigme que personne n’avoit jamais cherché à résoudre.

Ce Jeu a même paru si peu digne d’attention, qu’il n’est jamais entré en ligne de compte dans les vues de ceux de nos Saans qui se sont occupés de l’origine des Cartes: ils n’ont jamais parlé que des Cartes Françoises, ou en usage à Paris, dont l’origine est peu ancienne; & après en avoir prouvé l’invention moderne, ils ont cru avoir épuisé la matiere. C’est qu’en effet on confond sans cesse l’établissement d’une connoissance quelconque dans un Pays avec son invention primitive: c’est ce que nous avons déjà fait voir à l’égard de la boussole: les Grecs & les Romains eux-mêmes n’ont que trop confondu ces objets, ce qui nous a privé d’une multitude d’origines intéressantes.

Mais la forme, la disposition, l’arrangement de ce Jeu & les figures qu’il offre sont si manifestement allégoriques, & ces allégories sont si conformes à la doctrine civile, philosophique & religieuse des anciens Egyptiens, qu’on ne peut s’empêcher de le reconnoître pour l’ouvrage de ce Peuple de Sages: qu’eux seuls purent en être les Inventeurs, rivaux à cet égard des Indiens qui inventoient le Jeu des Echecs.

Division.

Nous ferons voir les allégories qu’offrent les diverses Cartes de ce Jeu.
Les formules numériques d’après lesquelles il a été composé.
Comment il s’est transmis jusques à nous.
Ses rapports avec un Monument Chinois.
Comment en naquirent les Cartes Espagnoles.
Et les rapports de ces dernieres avec les Cartes Françoises.


Cet Essai sera suivi d’une Dissertation où l’on établit comment ce Jeu étoit appliqué à l’art de la Divination; c’est l’ouvrage d’un Officier Général, Gouverneur de Province, qui nous honore de sa bienveillance, & qui a retrouvé dans ce Jeu avec une sagacité très-ingénieuse les principes Egyptiens sur l’art de deviner par les Cartes, principes qui distinguèrent les premieres Bandes des Egyptiens mal nommés Bohêmiens qui se répandirent dans l’Europe; & dont il subsiste encore quelques vestiges dans nos Jeux de Cartes, mais qui y prêtent infiniment moins par leur monotonie & par le petit nombre de leurs figures.

Le Jeu Egyptien, au contraire, étoit admirable pour cet effet, tenfermant en quelque façon l’Univers entier, & les Etats divers dont la vie de l’Homme est susceptible. Tel étoit ce Peuple unique & profonf, qu’il imprimoit au moindre de ses ouvrages le sceau de l’immortalité, & que les autres semblent en quelque sorte se traîner à peine sur ses traces.

ARTICLE I.
Allégories qu’offrent les Cartes du Jeu de Tarots.

Si ce Jeu qui a toujours été muet pour tous ceux qui le connoissent, s’est développé à nos yeux, ce n’a point été l’effet de quelques profondes méditations, ni de l’envie de débrouiller son cahos: nous n’y pensions pas l’instant avant. Invité il y a quelques années à aller voir une Dame de nos Amies, Madame la C. d’H., qui arrivoit d’Allemagne ou de Suisse, nous la trouvâmes occupée à jouer à ce Jeu avec quelques autres Personnes. Nous jouons à un Jeu que vous ne connoissez sûrement pas… Cela se peut; quel est-il?.. Le Jeu des Tarots… J’ai eu occasion de le voir étant fort jeune, mais je n’en ai aucune idée… C’est une rapsodie des figures les plus bisarres, les plus  extravagantes: en voilà une, par exemple; on eut soin de choisir la plus chargée de figures, & n’ayant aucun rapport à son nom, c’est le Monde: j’y jette les yeux, & aussi-tôt j’en reconnois l’Allégorie: chacun de quitter son Jeu & de venir voir cette Carte merveilleuse où j’appercevois ce qu’ils n’avoient jamais vû: chacun de m’en  montrer une autre: en un quart-d’heure le Jeu fut parcoutu, expliqué, déclaré Egyptien: & comme ce n’étoit point le jeu de notre imagination, mais l’effet des rapports choisis & sensibles de ce jeu avec tout ce qu’on connoît d’idées Egyptiennes, nous nous promîmes bien d’en faire part quelque jour au Public; persuadés qu’il autoit pour agréable une découverte & un présent de cette nature, un Livre Egyptien échappé à la barbarie, aux ravages du Tems, aux incendies accidentelles & aux volontaires, à l’ignorance plus désastreuse encore.

Effet nécessaire de la forme frivole & légere de ce Livre, qui l’a mis à même de triompher de tous les âges & de passer jusques à nous avec une fidélité rare: l’ignorance même dans laquelle on a été jusques ici de ce qu’il representoit, a été un heureux sauf-conduit qui lui a laissé traverser tranquillement tous les Siècles sans qu’on ait pensé à le faire disparoître.

Il étoit tems de retrouver les Allégories qu’il étoit destiné à conserver, & de faire voir que chez le Peuple le plus sage, tout jusqu’aux Jeux, étoit fondé sur l’Allégorie, & que ces Sages savoient changer en amusement les connoisances les plus utiles & n’en faire qu’un Jeu.

Nous l’avons dit, le Jeu des Tarots est composé de LXXVII Cartes, même d’une LXXVIIIe, divisées en Atous & en IV couleurs. Afin que nos Lecteurs puissent nous suivre, nous avons fait graver les Atous; & l’As de chaque couleur, ce que nous appellons avec les Espagnols, Spadille, Baste, & Ponte.

ATOUS.

Les Atous au nombré de XXII, représentent en général les Chefs temporels & spirituels de la Société, les Chefs Physiques de l’Agriculture, les Vertus Cardinales, le Mariage, la Mort & la résurrection ou la création; les divers jeux de la fortune, le Sage & le Fou, le Tems qui consume tout, &c. On comprend ainsi d’avance que toutes ces Cartes sont autant de Tableaux allégoriques relatifs à l’ensemble de la vie, & susceptibles d’une infinité de combinaisons. Nous allons les examiner un à un, & tâcher de déchiffrer l’allégorie ou l’énigme particuliere que chacun d’eux renferme.

No. 0, Zero.
Le Fou.

On ne peut méconnoître le Fou dans cette Carte, à sa marotte, & à son hoqueton garni de coquillages & de sonnettes: il marche très-vîte comme un fou qu’il est, portant derriere lui son petit paquet, & s’imaginant échapper par-là à un Tigre qui lui mord la croupe: quant au fac, il est l’emblême de ses fautes qu’il ne voudroit pas voir; & ce Tigre, celui de ses remords qui le suivent galopant, & qui sautent en croupe derriere lui.

Certe belle idée qu’Horace a si bien encadrée dans de l’or, n’étoit donc pas de lui, elle n’avoit pas échappé aux Egyptiens: c’étoit une idée vulgaire, un lieu commun; mais prise dans la Nature toujours vraie, & présentée avec toutes les graces dont elle est susceptible, cet agréable & sage Poëte sembloit l’avoir tirée de son profond jugement.

Quant à cet Atout, nous l’appellons Zero, quoiqu’on le place dans le jeu après le XXI, parce qu’il ne compte point quand il est seul, & qu’il n’a de valeur que celle qu’il donne aux autres, précisément comme notre zero: montrant ainsi que rien n’existe sans sa folie.

No. I.
Le Jouer de Gobelets, ou Bateleur.

Nous commençons par le no. I. pour suivre jusques au 21, parce que l’usage actuel est de commencer par le moindre nombre pour s’élever de-là aux plus hauts: il paroît cependant que les Egyptiens commençoient à compter par le plus haut pour descendre de-là jusqu’au plus bas. C’est ainsi qu’ils solsifioient l’Octave en descendant, & non en montant comme nous. Dans la Dissertation qui est à la suite de celle-ci, on suit l’usage des Egyptiens, & on en tire le plus grand parti. On aura donc ici les deux manieres: la nôtre la plus commode quand on ne veut considérer ces Cartes qu’en elles-mêmes: & celle-là, utile pour en mieux concevoir l’ensemble & les rapports.

Le premier de tous les Atous en remontant, ou le dernier en descendant, est un Joueur de Gobelet; on le reconnoît à sa table couverte de dés, de gobelets, de couteaux, de bales, &c. A son bâton de Jacob ou verge des Mages, à la bale qu’il tient entre deux doigts & qu’il va escamoter.

On l’appelle Bâteleur dans la dénomination des Cartiers: c’est le nom vulgaire des personnes de cet état: est-il nécessaire de dire qu’il vient de baste, bâton ?

A la tête de tous les Etats, il indique que la vie entiere n’est qu’un songe, qu’un escamotage: qu’elle est comme un jeu perpétuel du hasard ou du choc de mille circonstances qui ne dépenditent jamais de nous, & sur lequel influe nécessairement pour beaucoup toute administration générale.

Mais entre le Fou & le Bateleur, l’Homme n’est-il pas bien:

No. II, III, IV, V.
Chefs de la Société.

Les Numéros II & III représentent deux femmes: les Numéros IV & V, leurs maris: ce sont les Chefs temporels & spirituels de la Société.

Roi & Reine.Le No. IV. représente le Roi, & le III. la Reine. Ils ont tous les deux pour attributs l’Aigle dans un Ecusson, & le sceptre surmonté d’un globe thautifié ou couronné d’une croix, appellée Thau, le signe par excellence.

Le Roi est vu de profil, la Reine de face: ils sont tous les deux assis sur un Trône, La Reine est en robe traînante, le dossier de son  Trône est élevé: le Roi est comme dans une gondole ou chaise en coquille, les jambes croisées. Sa Couronne est en demì cercle surmontée d’une perle à croix. Celle de la Reine se termine en pointe. Le Roi porte un Ordre de Chevalerie.

Grand-Prêtre & Grande-Prêtresse.

Le No. V. représente le Chef des Hiérophantes ou le Grand-Prêtre: le No. II. la Grande-Prêtresse ou sa femme: on sait que chez les Egyptiens, les Chefs du Sacerdoce étoient mariés. Si ces Cartes étoient de l’invention des Modernes, on n’y verroit point de Grande-Prêtresse, bien moins encore sous le nom de Papesse, comme les Cartiers Allemands ont nommé celle-ci ridiculement.

La Grande-Prêtresse est assise dans un fauteuil: elle est en habit long avec une espèce de voile derriere la tête qui vient croiser sur l’estomac: elle a une double couronne avec deux cornes comme en avoit Isis: elle tient un Livre ouvert sur ses genoux; deux écharpes garnies de croix se croisent sur sa poltrine & y forment un X.

Le Grand-Prêtre est en habit long avec un grand manteau qui rient à une agraffe: il porte la triple Thiare: d’une main, il s’appuie sur un Sceptre à triple croix: & de l’autre, il donne de deux doigts étendus la bénédiction à deux personnages qu’on voit à ses genoux.

Les Cartiers Italiens ou Allemands qui ont ramené ce jeu à leurs connoissances, ont fait de ces deux personnages auxquels les Anciens donnoient le nom de Pere & de Mere, comme on diroit Abbé & Abbesse, mots Orientaux signifiant la même chose, ils en ont fait, dis-je, un Pape & une Papesse.

Quant au Sceptre à triple croix, c’est un monument absolument Egyptien: on le voit sur la Table d’Isis, sous la Lettre TT; Monument précieux que nous avons déjà fait graver dans toute son étendue pour le donner quelque jour au Public. Elle a rapport au triple Phallus qu’on promenoit dans la fameuse Fête des Pamylies où l’on se réjouissoit d’avoir retrouvé Osiris, & où il étoit le symbole de la régénération des Plantes & de la Nature entiere.

No. VII.
Osiris Triomphant.

Osiris s’avance ensuite; il paroît sous la forme d’un Roi triomphant, le Sceptre en main, la Couronne sur la tête: il est dans son char de Guerrier, tiré par deux chevaux blancs. Personne n’ignore qu’Osiris étoit la grande Divinité des Egyptiens, la même que celle de tous les Peuples Sabéens, ou le Soleil symbole physique de la Divinité suprême invisible, mais qui se manifeste dans ce chef-d’oeuvre de la Nature. Il avoit été perdu pendant l’hyver: il reparoît au Printems avec un nouvel éclat, ayant triomphé de tout ce qui lui faisoit la guerre.

No. VI.
Le Mariage.

Un jeune homme & une jeune femme se donnent leur foi mutuelle: un Prêtre les bénit, l’Amour les perce de ses traits. Les Cartiers appellent ce Tableau, l’Amoureux. Ils ont bien l’air d’avoir ajouté eux-mêmes cet Amour avec son arc & ses flèches, pour rendre ce Tableau plus parlant à leurs yeux.

On voit dans les Antiquités de Boissard [T. III. Pl. XXXVI.], un Monument de la même nature, por peindre l’union conjugale; mais il n’est composé que de trois figures.

L’Amant & l’Amante qui se donnent leur foi: l’Amour entre deux sert de Tèmoin & de Prêtre.

Ce Tableau est intitulé Fidei Simulacrum, Tablèau de la Foi conjugale: les personnages en sont désignés par ces beaux noms, Vérité, Honneur & Amour. Il est inutile de dire que la vérité désigne ici la femme plutôt que l’homme, non-seulement parce que ce mot est du genre féminin, mais parce que la Fidelité constante est plus essentielle dans la femme. Ce Monument précieux fut élevé par un nommé T. Fundanius Eromenus ou l’aimable, à sa très-chere Epouse Poppée Demetrie, & à leur fille chérie Manilia Eromenis.

Planche V.
No. VIII. XI. XII. XIII.
Les quatre Vertus Cardinales.

Les Figures que nous avons réunies dans cette Planche, sont relatives aux quatre Vertus Cardinales.

No. XI. Celle-ci représente la Force. C’est une femme qui s’est rendue maitresse d’un lion, & qui lui ouvre la gueule avec la même facilité qu’elle ouvriroit celle de son petit épagneul; elle a sur la tête un chapeau de Bergere.

No. XIII. La Tempérance [recte: XIV]. C’est une femme aîlée qui fait passer de l’eau d’une vase dans un autre, pour tempérer la liqueur qu’il renferme.

No. VIII. La Justice. C’est une Reine, c’est Astrée assise sur son Trône, tenant d’une main un poignard; de l’autre, une balance.

No. XII. La Prudence est du nombre des quatre Vertus Cardinales: les Egyptiens purent-ils l’oublier dans cette peinture de la Vie Humaine ? Cependant, on ne la trouve pas dans ce Jeu. On voit à sa place sous le No. XII. entre la Force & la Tempérance, un homme pendu par les pieds: mais que fait-là ce pendu ? c’est l’ouvrage d’un malheureux Cartier présomptueux qui ne comprenant pas la beauté de l’allégorie renfermée sous ce tableau, a pris sur lui de la corriger, & par-là même de le défigurer entierement.

La Prudence ne pouvoit être représentée d’une maniere sensible aux yeux que par un homme debout, qui ayant un pied posé, avance l’autre, & le tient suspendu examinant le lieu où il pourra le placer surement. Le titre de cette carte étoit donc l’homme au pied suspendu, pede suspenso: le Cartier ne sachant ce que cela vouloit dire, en a fait un homme pendu par les pieds.

Puis on a demandé, pourquoi un pendu dans ce Jeu ? & on n’a pas manqué de dire, c’est la juste punition de l’Inventeur du Jeu, pour y avoir représenté une Papesse.

Mais placé entre la Force, la Tempérance & la Justice, qui ne voit que c’est la Prudence qu’on voulut & qu’on dut représenter primitivement ?

Planche VI.
No. VIIII. ou IX.
Le Sage ou le Chercheur de la Vérité & du Juste.

Le No. IX. représente un Philosophe vénérable en manteau long, un capuchon sur les épaules: il marche courbé sur son bâton, & tenant une lanterne de la main gauche. C’est le Sage qui cherche la Justice & la Vertu.

On a donc imaginé d’après cette peinture Egyptienne, l’Histoire de Diògene qui la lanterne en main cherche un homme en plein midi. Les bons mots, sut-tout les Epigrammatiques, sont de tout siècle: & Diogène étoit homme à mettre ce tableau en action.

Les Cartiers ont fait de ce Sage un Hermite. C’est assez bien vu: les Philosophes vivent volontiers en retraite, ou ne sont guères propres à la frivolité du siècle. Heraclide passoit pour fou aux yeux de ses chers Concitoyens: dans l’Orient, d’ailleurs, se livrer aux Sciences spéculatives ou s’Hermetiser, est presque une seule & même chose. Les Hermites Egyptiens n’eutent rien à reprocher à cet égard à ceux des Indes, & aux Talapoins de Siam: ils étoient ou sont tous autant de Druides.

No. XIX.
Le Soleil.

Nous avons réuni sous cette planche tous les tableaux relatifs à la lumiere: ainsi après la lanterne sourde de l’Hermite, nous allons passer en revue le Soleil, la Lune & le brillant Sirius ou la Canicule étincelante, tous figurans dans ce jeu, avec divers emblêmes.

Le Soleil est représenté ici comme le Pere physique des Humains & de la Nature entiere: il éclaire les hommes en Société, il préside à leurs Villes: de ses tayons distillent des larmes d’or & de perles: ainsi on désignoit les heureuses influences de cet astre.

Ce Jeu de Tarots est ici parfaitement conforme à la doctrine des Egyptiens, comme nous l’allons voit plus en détail à l’article suivant.

No. XVIII.
La Lune.

Ainsi la Lune qui marche à la suite du Soleil est aussi accompagnée de larmes d’or & de perles, pour marquet également qu’elle contribue pour sa part aux avantages de la terre.

Pausanias nous apprend dans la Description de la Phocide, que selon les Egyptiens, c’étoient les Larmes d’Isis qui enfloient chaque année les eaux du Nil & qui rendoient ainsi fertiles les campagnes d’Egypte. Les relations de ce Pays parlent aussi d’une Goutte ou larme, qui tombe de la Lune au moment où les eaux du Nil doivent grossir.

Au bas de ce tableau, on voit une Ecrevisse ou Cancer, soit pour marquer la marche rétrograde de la Lune, soit pour indiquer que c’est au moment où le Soleil & la Lune sortent du signe de Cancer qu’arrive l’inondation causée par leurs larmes au lever de la Canicule qu’on voit dans le tableau suivant.

On poutroit même réunit les deux motifs: n’est-il pas très-ordinaire de se déterminer par une foule de conséquences qui forment une masse qu’on seroit souvent bien embarrassé à démêler ?

Le milieu du tableau est occupé par deux Tours, une à chaque extrémité por désigner les deux fameuses colonnes d’Hercule, en-deça & au-delà desquelles ne passerent jamais ces deux grands luminaires.

Entre les deux colonnes sont deux Chiens qui semblent aboyer contre la Lune & la garder: idées parfaitement Egyptiennes. Ce Peuple unique pour les allégories, comparoit les Tropiques à deux Palais gardés chacun par un chien, qui, semblables à des Portiers fideles, retenoient ces Astres dans le milieu des Cieux sans permettre qu’ils se glissassent vers l’un ou l’autre Pôle.

Ce ne sont point visions de Commentateurs en us. Clement, lui-même Egyptien, puisqu’il étoit d’Alexandrie, & qui par conséquent devoit en savoir quelque chose, nous assure dans ses Tapisseries [Ou Stromates, Liv. V.] que les Egyptiens représentoient les Tropiques sous la figure de deux Chiens, qui, semblables à des Portiers ou à des Gardiens fideles, empêchoient le Soleil & la Lune de pénétter plus loin, & d’aller  jusqu’aux Pôles.

No. XVII.
La Canicule.

Ici nous avons sous les yeux un Tableau non moins allégorique, & absolument Egyptien; il est intitulé l’Etoile. On y voir, en effet, une Etoile brillante, autout de laquelle sont sept autres plus petites. Le bas du Tableau est occupé par une femme panchée sur un genou qui tient deux vases renverses, dont coulent deux Fleuves. A côté de cette femme est un papillon sur une fleur.

C’est l’Egyptianisme tout pur.

Cette Etoile, par excellence, est la Canicule ou sirius: Etoile qui se leve lorsque le Soleil sort du signe du Cancer, par lequel se termine le Tableau précédent, & que cette Etoile suit ici immédiatement.

Les sept Etoiles qui l’environment, & qui semblent lui faire leur cour, sont les Planettes: elle est en quelque sorte leur Reine, puisqu’elle fixe dans cet instant le commencement de l’année; elles semblent venir recevoir ses ordres pouir régler leur cours sur elle.

La Dame qui est au-dessous, & fort attentive dans ce moment à répandre l’eau de ses vases, est la Souveraine des Cieux, Isis, à la bienfaisance de laquelle on attribuoit les inondations du Nil, qui commencent au lever de la Canicule; ainsi ce lever étoit l’annonce de l’inondátion. C’est pour cette raison que la Canicule étoit consacrée à Isis, qu’elle étoit son symbole par excellence.

Et comme l’année s’ouvroit ègalement par le lever de cet Affre, on l’appelloit Soth-Is, ouverture de l’année; & c’est sous ce nom qu’il étoit consacré à Isis.

Enfin, la Fleur & le Papillon qu’elle supporte, étoient l’emblême de la régénération & de la résurrection: ils indiquoient en même tems qu’à la faveur des bienfaits d’Isis, au lever de la Canicule, les Campagnes de l’Egypte, qui étoient absolument nues, se couvriroient de noeuvelles moissons.

Planche VIII.
No. XIII.
La Mort.

Le no. XIII. représente la Mort: elle fauche les Humains, les Rois & les Reines, les Grands & les Petits; rien ne résiste à sa faulx meurtriere.

Il n’est pas étonnant qu’elle soit placée sous ce numéro; le nombre treize fut toujours regarde comme malheureux. Il faut que très-anciennement il soit arrivé quelque grand malheur dans un pareil jour, & que le souvenir en ait influé sur toutes les anciennes Nations. Seroit-ce par une suite de ce souvenir que les treize Tribus de Hébreux n’ont jamais été comptées que pour douze ?

Ajoutons qu’il n’est pas étonnant non plus que les Egyptiens ayent inseré la Mort dans un jeu qui ne devroit réveiller que des idées agréables: ce Jeu étoit un jeu de guerre, la Morte devoit donc y entrer: c’est ainsi que le jeu des échecs finit par échec mat, pour mieux dire par Sha mat, la mort du Roi. D’ailleurs, nous avons eu occasion de rappeller dans le Calendrier, que dans les festins, ce Peuple sage & réfléchi faisoit paroître un squelette sous le nom de Màneros, sans doute afin d’engager les convives à ne pas se tuer par gourmandise. Chacun a sa maniere de voir, & il ne faut jamais disputer des goûts.

No. XV.
Typhon.

Le no. XV. représente un célebre personnage Egyptien, Typhon, frere d’Osiris & d’Isis, le mauvais Principe, le grand Démon d’Enfer: il a des ailes de chauve-souris, des pieds & des mains d’harpie; à la tête, de vilaines cornes de cerf: on l’a fait aussi laid, aussi diable qu’on a pu. A ses pieds sont deux petits Diablotins à longues oreilles, à grande queue, les mains liées derriere le dos: ils sont eux-mêmes attachés par une corde qui leur passe au cou, & qui est arrêtée au piédestal de Typhon: c’est qu’il ne làche pas ceux qui sont à lui; il aime bien ceux qui sont siens.

No. XVI.
Maison-Dieu, ou Château de Plutus.

Pour le coup, nous avons ici une leçon contre l’avarice. Ce tableau représente une Tour, qu’on appelle Maison-Dieu, c’est-à-dire, la Maison par excellence; c’est une Tour remplie d’or, c’est le Château de Plutus: il tombe en ruines, & ses Adorateuers tombent écrasés sous ses débris.

A cet ensemble, peut-on méconnoître l’Histoire de ce Prince Egyptien dont parle Hérodote, & qu’il appelle Rhampsinit, qui, ayant fait constraire une grande Tour de pierte pour renfermer ses trésors, & dont lui seul avoit la clef, s’appercevoit cependant qu’ils diminuoient à vue d’oeil, sans qu’on passât en aucune maniere pat la seule porte qui existât à cet édifice. Pour découvrir des voleurs aussi adroits, ce Prince s’avisa de tendre des piéges autour des vases qui contenoient ses richesses. Les voleurs étoient les deux fils de l’Architecte dont s’étoit servi Rhampsinit: il avoit ménagé une pierre de telle maniere, qu’elle pouvoit s’ôter & se remettre à volonté sans qu’oi s’en apperçût. Il enseigna son secret à ses enfans qui s’en servirent merveilleusement comme on voit. Ils voloient le Prince, & puis ils se jettoient de la Tour en bas: c’est ainsi qu’ils sont représentés ici. C’est à la vérité le plus beau de l’Histoire; on trouvera dans Hérodote le reste de ce conte ingénieux: comment un des deux freres fut pris dans les filets: comment il engagea son frere à lui couper la tête: comment leur mere voulut absolument que celui-ci rapportât le corps de son frere: comment il alla avec des outres charges sur un âne pour enivrer les Gardes du cadavre & du Palais: comment, après qu’ils eurent vuldé ses outres malgré ses larmes artificieuses,  & qu’ils se furent endormis, il leur coupa à tous la barbe du coté droit, & leur enleva le corps de son frere: comment le Roi fort étonné, engagea sa fille à se faire raconter par chacun de ses amans le plus joli tour qu’ils eussent fait: comment ce jeune éveillé alla auprès de la belle, lui raconta tout ce qu’il avoit fait: comment la belle ayant voulu l’arrêter, elle ne se trouva avoir saisi qu’un bras postiche: comment, pour achever cette grande aventure, & la mener à une heureuse fin, ce Roi promit cette même sienne fille au jeune homme ingénieux qui l’avoit si bien joué, comme à la personne la plus digne d’elle; ce qui s’exécuta à la grande satisfaction de tous.

Je ne sais si Hérodote prit ce conte pour une histoire réelle; mais un Peuple capable d’inventer de pareilles Romances ou Fables Milésiennes, pouvoit fort bien inventer un jeu quelconque.

Cet Ectivain rapporte un autre fait qui prouve ce que nous avons dit dans l’Histoire du Calendrier, que les statues des Géans qu’on promene dans diverses Fêtes, désignerent presque toujours les saisons. Il dit que Rhampsinit, le même Prince dont nous venons de parler, fit élever au Nord & au Midi du Temple de Vulcain deux satues de vingt-cinq coudées de haut, qu’on appelloit l’Eté & l’Hiver: on adoroit, ajoute-t-il, celle-là, & on sacrifioit, au contraire, à celle-ci: c’est donc comme les Sauvages qui reconnoissent le bon Principe & l’aiment, mais qui ne sacrifient qu’au mauvais.

No. X.
La Roue de Fortune.

Le dernier numero de cette Planche est la Roue de Fortune. Ici des Personnages humains, sous la forme de Singes, de Chiens, de Lapins, &c. s’élevent tour-à-tour sur cette roue à laquelle ils sont attachés: on diroit que c’est une satyre contre la fortune, & contre ceux qu’elle éleve rapidement & qu’elle laisse retomber avec la même rapidité.

Planche VIII.
No. XX.
Tableau mal nommé le Jugement dernier.

Ce Tableau représente un Ange sonnant de la trompette: on voit aussi-tôt comme sortir de terre un vieillard, une femme, un enfant nuds.

Les Cartiers qui avoient perdu la valeur de ces Tableaux, & plus encore leur ensemble, ont vu ici le Jugement dernier; & pour le rendre plus sensible, ils y ont mis comme des espèces de tombeaux. Otez ces tombeaux, ce Tableau sert également à désigner la Création, arrivée dans le Tems, au commencement du Tems, qu’indique le no. XXI.

No. XXI.
Le Tems, mal nommé le Monde.

Ce Tableau, que les Cartiers ont appellé le Monde, parce qu’ils l’ont considéré comme l’origine de tout, représente le Tems. On ne peut le méconnoître à son ensemble.

Dans le centre est la Déesse du Tems, avec son voile qui voltige, & qui lui sert de ceinture ou de Peplum, comme l’appelloient les Anciens. Elle est dans l’attitude de courir comme le Tems, & dans un cercle qui représente les révolutions du Tems; ainsi que l’oeuf où tout est sorti dans le Tems.

Aux quatre coins du Tableau sont les emblêmes des quatre Saisons, qui forment les révolutions de l’année, les mêmes qui composoient les quatre têtes des Chérubins. Ces emblêmes sont,

L’Aigle, le Lion, le Boeuf, & le Jeune-Homme,
L’Aigle représente le Printems, où reparoissent les oiseaux.
Le Lion, l’Eté ou les ardeuts du Soleil.
Le Boeuf, l’Automne où on laboure & où  on seme.
Le Jeune-Homme, l’Hiver, où l’on se réunit en société.

ARTICLE II.
Les Couleurs.

Outre les Atous, ce Jeu est composé de quatre Couleurs distinguées par leurs emblêmes: on les appelle Épée, Coupe, Bâton & Denier.

On peut voir les As de ces quatre couleurs dans la Planche VIII.

A représente l’As d’Epée, surmonté d’une couronne qu’entourent des palmes.
C, l’As de Coupe: il a l’air d’un Château; ce’st ainsi qu’on faisoit autre fois les grandes tasses d’argent.
D, l’As de Bâton; c’est une vrai massue.
B, l’As de Denier, environné de guirlandes.

Chacune de ces couleurs est composée de quatorze Cartes, c’est-à-dire de dix Cartes numérotées depuis I. jusqu’à X, & de quatre Cartes figurées, qu’on appelle le Roi, la Reine, le Chevalier ou Cavalier, & son Ecuyer ou Valet.

Ces quatre Couleurs sont relatives aux quatre Etats entre lesquels étoient divisés les Egyptiens.

L’Épée désignoit le Souverain & la Noblesse toute Militaire.
La Coupe, le Clergé ou le Sacerdoce.
Le Bâton, ou Massue d’Hercule, l’Agriculture.
Le Denier, le Commerce dont l’argent est le signe.

Ce Jeu fondé sur le nombre septenaire.

Ce Jeu est absolument fondé sur le nombre sacré de sept. Chaque couleur est de deux fois sept cartes. Les Atous sont au nombre de trois fois sept; le nombre des cartes de soixante-dix-sept; le Fou étant comme 0. Or, personne n’ignore le rôle que ce nombre jouoit chez les Egyptiens, & qu’il étoit devenu chez eux une formule à laquelle ils ramenoient les élémens de toutes les Sciences.

L’idée sinistre attachée dans ce Jeu au nombre treize, ramene également fort bien à la même origine.

Ce Jeu ne peut donc avoir été inventé que par des Egyptiens, puisqu’il a pour base le nombre sept; qu’il est relatif à la division des habitans de l’Egypte en quatre classes; que la plupart de ses Atous se rapportent absolument à l’Egypte, tels que les deux Chefs des Hiérophantes, homme & femme, Isis ou la Canicule, Typhon, Osiris, la Maison-Dieu, le Monde, les Chiens qui désignent le Tropique, &c; que ce Jeu, entiérement allégorique, ne put être l’ouvrage que des seuls Egyptiens.

Inventé par un homme de génie, avant ou après le Jeu des Echecs, & réunissant l’utilité au plaisir, il est parvenu jusqu’à nous à travers tous les siècles; il a durvécu à la ruine entiere de l’Egypte & de ces connoissances qui la distinguoient; & tandis qu’on n’avoit nulle idée de la sagesse des leçons qu’il renfermoir, on ne laissoit pas de s’amuser du Jeu qu’elle avoit inventé.

Il est d’ailleurs aisé de tracer la route qu’il a tenue pour arriver dans nos Contrées. Dans les premiers siècles de l’Eglise, les Egyptiens étoient très-répandus à Rome; ils y avoient porté leurs cérémonies & le culte d’Isis; par conséquent  le Jeu dont il s’agit.

Ce Jeu, interessant par lui-même, fut borné à l’Italie jusqu’à ce que les liaisons des Allemands avec les Italiens le firent connoître de cette seconde Nation; & jusqu’à ce que celles des Comtes de Provence avec l’Italie, & sur tout le séjour de la Cour de Rome à Avignon, le naturalisa en Provence & à Avignon.

S’il ne vint pas jusqu’à Paris, il faut l’attribuer à la bisarrerie de ses figures & au volume de ses Cartes qui n’etoient point de nature à plaire à la vivacité des Dames Françoises. Aussi fut-on obligé, comme nous le verrons bientôt, de réduire excessivement ce Jeu en leur faveur.

Cependant l’Egypte elle-meme ne jouit point du fruit de son invention: réduits à la servitude la plus déplorable, à l’ignorance la plus profonde, privés de tous les Arts, ses Habitans seroient hors d’état de fabriquer une seule Carte de Jeu.

Si nos Cartes Françoises, infiniment moins compliquées, exigent le travail soutenu d’une multitude de mains & le concours de plusieurs Arts, comment ce Peuple infortuné autoit-il pu conserver les siennes ? Tels sont les maux qui fondent sur une Nation asservie, qu’elle perd jusques aux objets de ses amusemens: n’ayant pu conserver ses avantages les plus précieux, de quel droit prétendroit-elle à ce qui n’en étoit qu’un délassement agréable ?

Noms Orientaux conservés dans ce Jeu.

Ce Jeu a conservé quelques noms qui le déclareroient également Jeu Oriental si on n’en avoit pas d’autres preuves.

Ces Noms sont ceux de Taro, de Mat & de Pagad.

1. Tarots.

Le nom de ce Jeu est pur Egyptien: il est composé du mot Tar, qui signifie voie, chemin; & du mot Ro, Ros, Rog, qui signifie Roi, Royal. C’est, mot-à-mot, le chemin Royal de la vie.

Il se rapporte en effet à la vie entiere des Citoyens, pisqu’il est formé des divers Etats entre lesquels ils sont divisés, & que ce Jeu les suit depuis leur naissance jusqu’à la mort, en leur montrant toutes les vertus & tous les guides physiques & moraux auxquels ils doivent s’attacher, tels que le Roi, la Reine, les Chefs de la Religion, le Soleil, la Lune, &c.

Il leur apprend en même tems par le Joueur de gobelets & par la roue de fortune, que rien n’est plus inconstant dans ce monde que les divers Etats de l’homme: que son seul réfuge est dans la vertu, qui ne lui manque jamais au besoin.

2. Mat.

Le Mat, nom vulgaire du fou, & qui subsiste en Italien, vient de l’Oriental Mat, assommé, meurtri, félé. Les Foux ont toujours été représentés comme ayant le cerveau félé.

3. Pagad.

Le Joueur de gobelets est appellé Pagad dans le courant du Jeu. Ce nom qui ne ressemble à rien dans nos Langues Occidentales, est Oriental pur & très-bien choisi: Pag signifie en Orient, Chef, Maître, Seigneur: & Gad, la Fortune. En effet, il est représente comme disposant du sort avec sa baguette de Jacob ou sa verge des Mages.

Article III.
Maniere dont on joue aux Tarots.

1o. Maniere de donner les Cartes.

Un de nos Amis, M. L’A. R. a bien voulu nous expliquer la maniere dont on le joue: c’est lui qui va parler, si nous l’avons bien compris.

On joue ce Jeu à deux, mais on donne les Cartes comme si on jouoit trois: chaque Joueur n’a donc qu’un tiers des Cartes: ainsi pendant le combat il y a toujours un tiers des Troupes qui se reposent; on pourroit les appeller le Corps de réserve.

Car ceu Jeu est un Jeu de guerre, & non un Jeu pacifique comme on l’avoit dit mal-à-propos: or dans toute Armée il y a un Corps de réserve. D’ailleurs, cette réserve rend le Jeu plus difficile, puisqu’on a beaucoup plus de peine à deviner les Cartes que peut avoir son adversaire.

On donne les Cartes par cinq, ou de cinq en cinq.

Sur les 78 Cartes, il en reste donc trois à la fin; au lieu de les partager entre les Joueurs & la réserve ou le Mort, celui qui donne les garde pour lui; ce qui lui donne l’avantage d’en écarter trois.

2o. Maniere de compter les points de son Jeu.

Les Atous n’ont pas tous la même valeur.

Les 21. 20. 19. 18 & 17. sont appellés les cinq grands Atous.

Les 1. 2. 3. 4. 5. sont appellés les cinq petits.

Si on en a trois des grands ou trois des petits, on compte cinq points: dix points, si on en a quatre; & quinze, si on en a cinq.

C’est encore une maniere de compter Egyptienne: le dinaire ou denier de Pythagore étant égal au quaternaire, puisque un, deux, trois & quatre ajoutés ensemble font dix.

Si on a dix Atous dans son Jeu, on les étale, & ils valent encore dix points, si on en a treize, on les étale aussi, & ils valent quinze points, indépendamment des autres combinaisons.

Sept Cartes portent le Nom de Taros par excellence: ce sont les Cartes privilégiées; & encore ici, le nombre de sept. Ces Cartes sont:

Le Monde ou Atout 21.
Le Mat ou Fou 0.
Le Pagad ou Atout 1.
(> Atous-Tarots)

Et les quatre Rois.

Si on a deux de ces Atous-Tarots, on demande à l’autre, qui ne l’a ? si celui-ci ne peut répondre en montrant le troisieme, celui qui a fait la question marque 5. points: il en marque 15. s’il les a tous trois. Les séquences ou les 4 figures de la même couleur valent 5. points.

3o. Maniere de jouer ses Cartes.

Le Fou ne prend rien, rien ne le prend: il forme Atout, il est de toute couleur également.

Joue-t-on un Roi, n’a-t-on pas la Dame, on met le Fou, ce qui s’appelle excus.

Le Fou avec deux Rois, compte 5. points: avec trois, quinze.

Un Roi coupé, ou mort, 5. points pour celui qui coupe.

Si on prend Pagad à son adversaire, on marque 5. points.

Ainsi le Jeu est de prendre à son adversaire les figures qui comptent le plus de points, & de faire tous ses efforts pour former des séquences: l’adversaire doit faire tous les siens pour sauver ses grandes figures: par conséquent voir venir, en sacrifiant de foibles Atous, ou les plus foibles Cartes de ses couleurs.

Il doit sur tout se faire des renonces, afin de sauver ses fortes Cartes en coupant celles de son adversaire.

4o. Ecart de celui qui donne.

Celui qui donne ne peut écarter ni Atous ni Rois; il se seroit trop beau Jeu, puisqu’il se sauveroit sans péril. Tout ce qu’on lui permer en faveur de sa primauté, c’est d’écarter une séquence: car elle compte, & elle peut lui former une renonce, ce qui est un double avantage.

5o. Maniere de compter les mains.

La partie est en cent, comme au Piquet, avec cette difference, que ce n’est pas celui, qui arrive le premier à cent lorsque la partie est commencée qui gagne, mais celui qui fait alors le plus de points; car il faut que toute partie commencée aillé jusqu’au bout: il offre ainsi plus de ressource que le Piquet.

Pour compter les points qu’on a dans ses mains, chacune des sept Cartes appellées Tarots, avec une Carte de couleur, vaut 5. points.

La Dame avec une Carte, 4.

Le Cavalier avec une Carte, 3.

Le Valet avec une Carte, 2.

2. Cartes simples ensemble, 1.

On compte l’excedent des points qu’un des adversaires a sur l’autre, & il les marque: on continue de jouer jusqu’à ce qu’on soir parvenu à cent.

Article IV.
Jeu des Tarots considéré comme un Jeu de Géographie Politique.

On nous a fait voir sur un Catalogue de Livres Italiens, le titre d’un Ouvrage où la Géographie est entrelacée avec le Jeu des Tarots: & nous n’avons pu avoir ce Livre Contient il des leçons de Géographie à graver sur chaque Carte de ce Jeu: Est-ce une application de ce Jeu à la Géographie: Le champ de conjectures est sans fin, & peut-être qu’à force de multiplier les combinaisons, nous nous éloignerions plus des vúes de cet Ouvrage. Sans nous embarasser de ce qu’il a pu dire, voyons nous-même comment les Egyptiens auroient pu appliquer ce Jeu à la Géographie Politique, telle qu’elle étoit connire de leur tems, il y a à peu-près trois mille ans.

Le Tems ou le Monde, le moment où la Terre sortit du cahos, où elsè prit une forme, se divisant en Terres & en mers, & où l’homme fut créé pour de venit le Maiître, le Roi de cette belle propriété.

Les quatre Vertus Cardinales, correspondent aux IV. côtes du Monde, Orient, Occident, Nord & Midi, ces quatre points relatifs à l’homme, par lesquels il est au centre de tout; qu’on peut appeller sa droite, sa gauche, sa face & son dos, & d’où ses connoissances s’étendent en rayons jusqu’à l’extrémité de tout, suivant l’étendue de ses yeux physiques premierement, & puis de ses yeux intellectuels bien autrement perçans.

Les quatre Couleurs seront les IV. Régions ou parties du Monde correspondantes aux quatre points cardinaux, l’Asie, l’Afrique, l’Europe & la Celto-Scythie ou les Pays glacés du Nord: division qui s’est augmentée de l’Amerique depuis sa découverte, & où pour ne rien perdre de l’ancienne on a substitué à la Celto-Scythie les Terres polaires du Nord & du Midi.

L’Epée représente l’Asie, Pays des grandes Monarchies, des grandes Conquêtes, des grandes Révolutions.

Baton, l’Egypte nourriciere des Peuples, & symbole du Midi, des Peuples noirs.

Coupe, le Nord, d’où descendirent les Peuples, & d’où  vint l’Instruction & la Science.

Denier, l’Europe ou l’Occident, riche en mines d’or dans ces commencemens du monde, que si mal à propos nous appellons le vieux-tems, les tems antiques.

Chacune des X. Cartes numérotées de ces IV. couleurs, sera une des grandes Contrées de ces IV. Régions du Monde.

Les X. Cartes d’Epée auront représenté, l’Arabie; l’Idumée, qui régnoit sur les Mers du Midi; la Palestine peuplée d’Egyptiens; la Phénice, Maîtresse de la Mer Méditerranée; la Syrie ou Aramée; la Mésopotamie ou Chaldée, la Médie, la Susiane, la Perse & les Indes.

Les X. Cartes de Baton auroit représenté les trois grandes divisions de l’Egypte, Thébaide ou Egypte supérieure, Delta ou basse Egypte, Heptanome ou Egypte du milieu divisée en sept Gouvernements. Ensuite l’Ethiopie, la Cyrénaique, ou à sa place les terres de Jupiter Ammon, la Lybie ou Carthage, les Pacifiques Atlantes, les Numides vagabons, les Maures appuyés sur l’Ocean Antlantique; les Gétules, qui placésd au Midi de l’Atlas, se répandoient dans ces vastes Contrées que nous appelons aujourd’hui Nigritie & Guinée.

Les X. Cartes de Denier auront représenté l’Isle de Crète, Royaume de l’illustre Minos, la Grèce & ses Isles, l’Italie, la Sicile & ses volcans, les Baléares célèbres par l’habiletéde leurs troupes de trait, la Bétique riche en troupeaux, la Celtibérie abondante en mines d’or: Gadix ou Cadir, l’Isle d’Hercule par excellence, la plus commerçante de l’Univers; la Lusitanie & les Isles Fortunées, ou Canaries.

Les X. Cartes de Coupe, l’Arménie & son mont Ararat, l’Ibérie, les Scythes de l’Imaüs, les Scythes du Caucase, les Cimmériens des Palus-Méotides, les Getes ou Goths, les Daces, les Hyperboréens si célèbres dans cette haute Antiquité, les Celtes errants dans leurs forêts glacées, l’Isle de Thulé aux extrémités du Monde.

Les quatre Cartes figurées de chaque couleur aoront contenu des détails géographiques relatifs à chaque Région.

Les Rois, l’état des Gouvernements de chacune, les forces des Empires qui les composoient, & comment elles étoient plus ou moins considérables suivant que l’Agriculture y étoit en usage & en honneur; cette source intarissable de richesses toujours renaissantes.

Les Rèines, le développement de leurs Religions, de leurs Moeurs, de leurs Usages, sur-tout de leurs Opinions, l’Opinion ayant toujours été regardée comme la Reine du monde. Heureux celui qui saura la diriger; il sera toujours Roi de l’Univers, maître de ses semblables; c’est Hercule l’eloquent qui mene les hommes avec des freins d’or.

Les Cavaliers, les exploits des Peuples, l’Histoire de leurs Hèros ou Chevaliers; celle de leurs Tournois, de leurs Jeux, de leurs batailles.

Les Valets, l’Histoire des Arts, leur origine, leur nature; tout ce qui regarde la portion industrieuse de chaque Nation, celle qui se livre aux objets méchaniques, aux Manufactures, au Commerce qui varie de cent manieres la forme des richesses sans rien ajouter au fond, qui fait circuler dans l’Universe ces richesses & les objets de l’industrie; qui met à même les Agricoles de faire renaître les richesses en leur fournissant les débouchés les plus prompts de celles qu’ils ont déjà fait naître, & comment tout es étranglé dès que cette circulation ne joue pas avec liberté, puisque les Commerçans  sont moins occupés, & ceux qui leur fournissent découragés.

L’ensemble des XXI ou XXII Atous, les XXII Lettres de l’Alphabet Egyptien commun aux Hébreux & aux Orientaux, & qui servant de chiffres, sont nécesaires pour tenir compte de l’ensemble de tant de contrées.

Chacun de ces Atous aura eu en même tems un usage particulier. Plusieurs auront été relatifs aux principaux aobjets de la Géographie Céleste, si on peut se servir de cette expression. Tels,

Le Soleil, La Lune, le Cancer, les Colonnes d’Hercule, les Tropiques ou leurs Chiens.

La Canicule, cette belle & brillante Portiere des Cieux.

L’Ourse céleste, sur laquelle s’appuient tous les Astres en exécutant leurs révolutions autour d’elle, Constellation admirable représentée par les sept Taros, & qui semble publier en caractères de feu imprimès sur nos têtes & dans le Firmament, que notre Systême solaire fut fondé comme les Sciences sur la Formule de sept, & peut être même la masse entiere de l’Univers.

Tous les autres peuvent être considérés relativement à la Géographie politique & morale, au vrai Gouvernement des Etats: & même au gouvernement de chaque homme en particulier.

Les quatre Atous relatifs à l’autorité civile & religieuse, font connoître l’importance pour un Etat de l’unité de Gouvernement, & de respect pour les Anciens.

Les quatre Vertus Cardinales montrent que les Etats ne peuvent se soutenir que par la bonté du Gouvernement, par l’excellence de l’instruction, par la pratique des vertus dans ceux qui gouvernent & qui sont gouvernés: Prudence à corriger les abus, Force pour maintenir la paix & l’union, Tempérance dans les moyens; Justice envers tous. Comment l’ignorance, la hauteur, l’avaricie, la sottise dans les uns, engendrent dans les autres un mépris funeste: d’où résultent les désordres qui ébranlent jusques dans leurs fondemens les Empires où on viole la Justice, où on force tous les moyens, où l’on abuse de sa force, & où on vit sans prévoyance. Désordres qui ont détruit tant de Familles dont le nom avoit retenti si long-tems par toute la Terre, & qui avoient regné avec tant de gloire sur les Nations étonnées.

Ces vertus ne sont pas moins nécessaires à chaque Individu. La Tempérance régle ses devoirs envers soi-même, sur-tout envers son propre corps qu’il ne traite trop souvent que comme un malheureux esclave, martyr de ses affections desordonnées.

La Justice qui régle ses devoirs envers son prochain & envers la Divinité elle-même à qui il doit tout.

La Force avec laquelle il se soutient au milieu des ruines de l’Univers, il se tit des efforts vains & insensés des passions qui l’assiégent sans cesse de leurs flots impétueux.

Enfin, la Prudence avec laquelle il attend patiemment le succès de ses oins, prêt à tout événement & semblable à un fin joueur qui ne risque jamais son jeu & sait tirer parti de tout.

Le Roi triomphant devient alors l’emblême de celui qui au moyen de ces vertus a été sage envers lui-même, juste envers autrui, fort contre les passions, prévoyant  à s’amasser des ressources contre les tems d’adversité.

Le Tems qui use tout avec une rapidité inconcevable, la Fortune qui se joue de tout; le Bâteleur qui escamote tout, la Folie qui est de tout, l’Avarice qui perd tout; le Diable qui se fourre par-tout: la Mort qui engloutit tout, nombre septenaire singulier qui est de tout pays, peut donner lieu à des observations non moins importantes & non moins variées.

Enfin, celui qui a tout à gagner & rien à perdre, le Roi veritablement triomphant, c’est le vrai Sage qui la lanterne en main est sans cesse attenif à ses démarches, ne fait aucune école, connoit tout ce qui est bien pour en jouir, & apperçoit tout ce qui est mal pour l’éviter.

Telle seroit ou à peu près l’explication géographiquo-politique-morale de cet antique Jeu: & telle doit être la fin de tous, Humanité, que vous seriez heureuse, si tous les jeux ye terminoienet ainsi!

Article V.
Rapport ce Jeu avec un Monument Chinois.

M. Bertin qui a rendu de si grands services à la Littérature & aux Sciences, par les excellens Mémoires qu’il s’est procurés, & qu’il a fait publier sur la Chine, nous a communiqué un Monument unique qui lui a été envoyé de cette vaste Contrée, & qu’on fait remonter aux premiers âges de cet Empire, puisque les Chinois le regardent comme un Inscription relative au deséchement des eaux du Déluge par Yao.

Il est composé de caractères qui forment de grands compartiments en quarté-long, tous égaux, & précisément de la même grandeur que les Cartes du Jeu des Tarots.

Ces compartiments sont distribués en six colonnes perpendiculaires, dont les cinq premieres renferment quatorze compartiments chacune, tandis que la sixiéme qui n’est remplie qu’à moirié n’en contient que sept.

Ce Monument est donc composé de soixante-dix-sept figures ainsi que le  Jeu de Tarots: & il est formé d’après la même combinaison du nombre sept, puisque chaque colonne est de quatorze figures, & que celle qui ne l’est qu’à demi, en contient sept.

Sans cela, on auroit pu arranger ces soixante-dix-sept compartiments de maniere à ne laisser presque point de vuide dans cette sixiéme colonne: on n’auroit eu qu’à faire chaque colonne de treize compartiments; & la sixiéme en auroit eu douze.

Ce Monument est donc parfaitement semblable, quant à la disposition, au Jeu des Tarots, si on les coloit sur un seul Tableau: les quatre couleurs feroient les quatre premierers colonnes à quatorze cartes chacune: & les atous au nombre de vingt-un, rempliroient la cinquiéme colonne, & précisément la moitié de la sixiéme.

Il seroit bien singulier qu’un rapport pareil fût le simple effet du hasard: il est donc très-apparent que l’un & l’autre de ces Monuments ont été formés d’après la même théorie, & sur l’attachement au nombre sacré de sept; ils ont donc l’air de n’être tous les deux qu’une application différente d’une seule & même formule, antérieure peut-être à l’existence des Chinois & des Egyptiens: peut-être même trouvera-t-on quelque chose de pareil chez les Indiens ou chez les Peuples du Thibet placés entre ces deux anciennes Nations.

Nous avons été fort tentés de faire aussi graver ce Monument Chinois; mais la crainte de le mal figurer en le réduisant à un champ plus petit que l’original, joint à l’impossibilité où nos moyens nous mettent de faire tout ce qu’exigeroit la perfection de notre ouvrage, nous a retenu.

N’omettons pas que les figures Chinoises sont en blanc sur un fond très-noir; ce qui les rend très-saillantes.

Article VI.
Rapport de ce Jeu avec Quadrilles ou Tournois.

Pendant un grand nombre de siècles, la Noblesse montoit à cheval, & divisée en couleurs ou en factions, elle exécutoit entr’elle des combats feints ou Tournois parfaitement analogues à ce qu’on exécute dans les jeux de cartes, & sur-tout dans celui des Tarots, qui étoit un jeu militaire de même que celui des échecs, en même tems qu’il pouvoit être envisagé comme un jeu civil, en quoi il l’emportoit sur ce dernier.

Dans l’origine, les Chevaliers du Tournois étoient divisés en quatre, même en cinq bandes relatives aux quatre couleurs des Tarots & à la masse des Atous. C’est ainsi que le dernier divertissement de ce genre qu’on ait vu en France, fut donné en 1662, par Louis XIV, entre les Tuileries & le Louvre, dans cette grande place qui en a conservé le nom de Carousel. Il étoit composé de cinq Quadrilles. Le Roi étoit à la tête des Romains: son Frere, Chef de la Maison d’Orléans, à la tête des Persans: le Prince de Condé commandoit les Turcs: le Duc d’Enguien son fils, les Indiens: le Duc de Guise, les Américains. Trois Reines y assisterent sous un dais: la Reine-Mere, la Reine régnante, la Reine d’Angleterre veuve de Charles II. Le Comte de Sault, fils du Duc de Lesdiguieres, temporta le prix & le reçur des mains de la Reine-Mere.

Les Quadrilles étoient ordinairement composés de 8 ou de 12 Cavaliers pour chaque couleur: ce qui, à 4 couleurs & à 8 par Quadrille, donne le nombre 32, qui forme celui des Cartes pour le Jeu de Piquet: & à 5 couleurs, le nombre 40 qui est celui des Cartes pour Jeu de Quadrille.

Article VIII.
Jeux de Cartes Espagnols.

Lorsqu’on examine les Jeux de Cartes en usage chez les Espagnols, on ne peut s’empêcher de reconnoître qu’ils sont un diminutif des Tarots.

Leurs Jeux les plus distingués sont celui de l’Hombre qui se joue à trois: & le Quadrille qui se joue à quatre & qui n’est qu’une modification du Jeu de l’Hombre.

Celui-ci signifie le Jeu de l’Homme ou de la vie humaine; il a donc un nom qui correspond parfaitement à celui du Tarot.

Il est divisé en quatre couleurs qui portent les mêmes noms que dans les Tarots, tels que Spadille ou épée, Baste ou bâton, qui sont les deux couleurs noires; Copa ou Coupe, & Dinero ou Denier, qui sont les deux couleurs rouges.

Plusieurs de ces noms se sont transmis en France avec ce Jeu: ainsi l’as de pique est appellé Spadille ou épée; l’as de trefle, Baste, c’est-à-dire, bâton. L’as de coeur est appellé Ponte, de l’Espagnol Punto, as, ou un point.

Ces Atous, qui sont les plus forts, s’appellent Matadors, ou les Assommeurs, les Triomphans qui ont détruit leurs ennemis.

Ce Jeu est entierement formé sur les Tournois; la preuve en est frappante, puisque les couleurs en sonst appellées Palos ou pieux, les lances, les piques des Chevaliers.

Les Cartes elle-mêmes sont appellées Naypes, du mot Oriental Nap, qui signifie prendre, tenir: mot-à-mot, les Tenans.

Ce sont donc quatre ou cinq Quadrilles de Chevaliers qui se battent en Tournois.

Ils sont quarante, appellés Naypes ou Tenans.

Quatre couleurs appellées Palos ou rangs de piques.

Les Vainqueurs sont appellés Matadors ou Assommeurs, ceux qui sont venus à bout de défaire leurs ennemis.

Enfin les noms des quatre couleurs, celui même du Jeu, démontrent qu’il a été formé en entier sur le Jeu des Tarots; que les Cartes Espagnoles ne sont qu’une imitation en petit du Jeu Egyptien.

Article VIII.
Cartes Françoises.

D’après ces données, il n’est personne qui ne s’apperçoive sans peine que les Cartes Françoises ne sont elles-mêmes qu’une imitation des Cartes Espagnoles, & qu’elles sont ainsi l’imitation d’une imitation, par conséquent une institution bien dégénerée, loin d’être une invention originale & premiere, comme l’ont cru mal à propos nos Savans qui n’avoient en cela aucun point de comparaison, seul moyen de découvrir les causes & les rapports de tout.

On suppose ordinairement que les Cartes Françoises furent inventées sous le Regne de Charles VI, & pour amuser ce Prince foible & infirme: mais ce que nous nous croyons en droit d’affirmer, c’est qu’elles ne furent qu’une imitation des Jeux méridionaux.

Peut-être même serions-nous en droit de supposer que les Cartes Françoises sont plus anciennes que Charles VI, puisqu’on attribue dans Ducange [Au mot Charta] à S. Bernard de Sienne, contemporain de Charles V, d’avoir condamné au feu, non-seulement les masques & les dez à jouer, mais même les Cartes Triomphales, ou du Jeu appellé la Triomphe.

On trouve dans la même Ducange les Statuts Criminels d’une Ville appellée Saona, qui défend également les Jeux de Cartes.

Il faut que ce Statuts soient très-anciens, puisque dans cet Ouvrage on n’a pu en indiquer le tems: cette Ville doit être celle de Savone.

Ajoûtons qu’il falloit que ces Jeux fussent bien plus anciens que S. Bernard de Sienne: auroit-il confondu avec les dez & les masques un Jeu nouvellement inventé pour amuser un grand Roi ?

Nos Cartes Françoises ne présentent d’ailleurs nulle vue, nul génie, nul ensemble. Si elles ont été inventées d’après les Tornois, pourquoi a-t-on supprimé le Chevalier, tandis qu’on consrvoit son Ecuyer ? pourquoi n’admettre dès-lors que treize Cartes au lieu de quatorze par couleur ?

Les noms des couleurs se sont dégénérés au point de n’offrir plus d’ensemble. Si on peut reconnoître l’épée dans la pique, comment le bâton est-il devenu trefle ? comment est-ce que le coeur & le carreau correspondent à coupe & à denier; & quelles idées réveilent ces couleurs ?

Quelle idée présentent également les noms donnés aux quatre Rois ? David, Alexandre, César, Charlemagne, ne sont pas même relatifs aux quatre fameuses Monarchies de l’Antiquité, ni à celles des tems modernes. C’est un monstrueux composé.

Il en est de même des noms des Reines: on les appelle Rachel, Judith, Pallas & Argine: il est vrai qu’on a cru que c’étoient des noms allégoriques relatifs aux quatre manieres dont une Dame s’attire les hommages des hommes: que Rachel désigne la beauté, Judith la force, Pallas la sagesse, & Argine, où l’on ne voit que l’anagramme Regina, Reine, la naissance.

Mais quels rapports ont ces noms avec Charles VI ou avec la France ? que ces allégories sont forcées ?

Il est vrai qu’entre les noms de Valets on trouve celui de la Hire, qui pourroit se rapporter à un des Généraux François de Charles VI; mais ce seul rapport est-il suffisant pour brouiller toutes les époques ?

Nous en étions ici lorsqu’on nous a parlé d’un Ouvrage de M. l’Abbé Rive, où il discute le même objet: après l’avoir cherché en vain chez la plûpart de nos Libraires, M. de S. Paterne nous le prête.

Cet Ouvrage est intitulé:

Notices historiques & critiques de deux Manuscrits de la Bibliothèque de M. le Duc de la Valliere, dont l’un a pour titre le Roman d’Artus, Comte de Bretaigne, & l’autre, le Romant de Pertenay ou de Lusignen, par M. l’Abbé Rive, &c. à Paris, 1779, in 4o. 36 pages.

A la page 7, l’Auteur commence à discuter ce qui regarde l’origine des Cartes Françoises; nous avons vu avec plaisir qu’il soutient, 1o. que ces Cartes sont plus anciennes que Charles VI; 2o. qu’elles sont une imitation des Cartes Espagnoles:nous allons donner un Précis succinct de ses preuves.

« Les Cartes, dit-il, sont au moins de l’an 1330; & ce n’est ni en France, ni en Italie, ni en Allemagen qu’elles paroissent pour la premiere fois. On les voit en Espagne vers cette année, & bien long-tems avant qu’on en trouve la moindre trace dans aucune autre Nation.

Elles y ont été inventées, selon le Dictionnaire Castillan de 1734., par un nommé Nicolao Pepin…

On les trouve en Italie vers la fin de ce même Siècle, sous le nom de Naibi, dans la Chronique de Giovan Morelli, qui est de l’an 1393. »

Ce savant Abbé nous apprend en même tems que la premiere piece Espagnole qui en atteste l’existence, est d’environ l’an 1332.  « Ce sont les Statuts d’un Ordre de Chevalerie établi vers ce tems-là en Espagne, & où les été établi par Alphonse XI, Roi de Castille. Ceux qu’on y admettoit faisoient serment de ne pas jouer aux Cartes.

On les voit ensuite en France sous le Regne de Charles V. Le Petit Jean de Saintré ne fut honoré des faveurs de Charles V que parce qu’il ne jouoit ni aux dez ni aux Vartes, & ce Roi les proscrivit ainsi que plusieurs autres Jeux, par son Edit de 1369. On les décria dans diverses Provinces de la France; on y donna à quelques-unes de leurs figures des noms faits pour inspirer de l’horreur. En Provence, on en appella les Valets Tuchim. Ce nom désignoit une race de voleurs qui, en 1361, avoient causé dans ce Pays & dans le Comtat Venaissin, un ravage si horrible, que les Papes furent obligés de faire prêcher une Croisade pour les exterminer. Les Cartes ne furent introduites dans la Cour de France que sous le Successeur de Charles V. On craignit même en les y introduisant, de blesser la décence, & on imagina en conséquence un prétexte: ce fut celui de calmer la mélancolie de Charles VI.. On inventa sous Charels VII le Jeu de Piquet. Ce Jeu fut cause que les Cartes se répandirent, de la France, dans plusieurs autres parties de l’Europe. »

Ces détails sont très-interessans; leurs conséquences le sont encore plus. Ces Cartes contre lesquelles on fulminoit dans le XIVe Siècle, & qui rendoient indigné des Ordres de Chevalerie, étoient nécessairement très-anciennes: elles ne prouvoient être regardées que comme des restes d’un honteux Paganisme: c’étoient donc les Cartes des Tarots; leur figure bisarre, leurs noms singuliers, tels que la Maison-Dieu, le Diable, la Papesse, &c. leur haute Antiquité qui se perd dans la nuit des tems, les sorts qu’on en tiroit, &c. tout devoit les faire regarder comme un amusement diabolique, comme une oeuvre de la plus noire magie, d’une sorcellerie condamnable.

Cependant le moyen de ne pas jouer! on inventa donc des Jeux plus humains, plus épurés, dégagés de figures qui n’étoient bonnes qu’à effrayer: de-là, les Cartes Espagnoles & les Cartes Françoises qui ne furent jamais vouées à l’interdit comme ces Cartes maudites venues de l’Egypte, mais qui cependant se traînoient de loin sur ce Jeu ingénieux.

De-là sur-tout le Jeu de Piquet, puisqu’on y joue à deux, qu’on y écarte, qu’on y a des séquences, qu’on y va en cent: qu’on y compte le Jeu qu’on a en main, & les levées, & qu’on trouve nombre d’autres rapports aussi frappans.

Conclusion.

Nous osons donc nous flarter que nos Lecteurs recevront avec plaisir ces diverses vues sur des objets aussi communs que les Cartes, & qu’ils trouveront qu’elles rectifient parfaitement les idées vagues & mal combinées qu’on avoit eues jusques à présent sur cet objet.

Qu’on n’avancera plus comme démontrées ces propositions.
Que les Cartes n’existent que depuis Charles VI.
Que les Italiens sont le dernier Peuple qui les ait adoptées.
Que les figures du Jeu des Tarots sont extravagantes.
Qu’il est ridicule de chercher l’origine des Cartes dans les divers états de la vie civile.
Que ces Jeux sont l’image de la vie paisible, tandis que celui des Echecs est l’image de la guerre.
Que le Jeu des Echecs est plus ancien que celui des Cartes.
C’est ainsi que l’absence de la vérité, en quelque genre que ce soit, engendre une foule d’erreurs de toute espèce, qui deviennent plus ou moins désavantageuses, suivant qu’elles se lient avec d’autres vérités, qu’elles contrastent avec elles ou qu’elles les repoussent.

Application de ce Jeu à la Divination.

Pour terminer ces recherches & ces développemens sur le Jeu Egyptien, nous allons mettre sous les yeux du Buplic la Dissertation que nous annoncée & où l’on prouve comment les Egyptiens appliquoient ce Jeu à l’art de deviner, & de quelle maniere ce même point de vue s’est transmis jusques dans nos Cartes à jouer faites à l’imitation de celles-là.

On y verra en particulier ce que nous avons déjà dit dans ce Volume, que l’explication des Songes tenoit dans l’Antiquité à la Science Hiéroglyphique & Philosophique des Sages, ceux-ci ayant cherché à réduite en science le résultat de leurs combinaisons sur les Songes dont la Divinité permettoit l’accomplissement; & que toute cette science s’évanouit dans la suite des tems, & fut sagement défendue, parce qu’elle se réduisit à de vaines & futiles observations, qui dans des Siècles peu éclairés auroient pu être contraires aux intérêts les plus essentiels des foibles & des superstitieux.

Cet Observateur judicieux nous fournir de nouvelles preuves que les Cartes Espagnoles sont une imitation de l’Egypte, puisqu’il nous apprend que ce n’est qu’avec un Jeu de Piquet qu’on consulte les sorts, & que plusieurs noms de ces Cartes sont absolument relatifs à des idées Egyptiennes.

Le Trois de denier est appellé le Seigneur, ou Osiris.
Le Trois de coupe, la Souveraine, ou Isis.
Le Deux de coupe, la Vache, ou Apis.
Le Neuf de denier, Mercure.
L’As de bâton, le Serpent, symbole de l’Agriculture chez les Egyptiens.
L’As de denier, le Borgne, ou Apollon.

Ce nom de Borgne, donné à Apollon ou au Soleil comme n’ayant qu’un oeil, est une épithète prise dans la Nature & qui nous fournira une preuve à ajoûter à plusieurs autres, que le fameux personnage de l’Edda qui a perdu un de ses yeux à une célèbre fontaine allégorique, n’est autre que le Soleil, le Borgne ou l’Oeil unique par excellence.

Cette Dissertation est d’ailleurs si remplie de choses, & si propre à donner de saines idées sur la maniere dont les Sages d’Egypte consultoient le Livre du Destin, que nous ne doutons pas qu’elle ne soit bien accueillie du Public, privé d’ailleurs jusqu’à présent de recherches pareilles, parce que jusques à présent personne n’avoit eu le courage s’occuper d’objets qui paroissoient perdus à jamais dans la profonde nuit des tems.

Recherches sur les Tarots,
et sur la Divination par les Cartes des Tarots,

par M. Le C. de M. ***

I.
Livre de Thot.

Le desir d’apprendre se développe dans le coeur de l’homme à mesure que son esprit acquiert de nouvelles connoissances: le besoin de les conserver, & l’envie de les transmettre, fit imaginer des caracterers dont Thot ou Mercure fut regardé comme l’inventeur. Ces caracteres ne furent point, dans le principe, des signes de convention, qui n’exprimassent, comme nos lettres actuelles, que le son des mots; ils étoient autant d’images véritables avec lesquelles on formoit des Tableaux, qui peignoienet aux yeux les choses dont on vouloit parler.

Il est naturel que l’Inventeur de ces Images ait été le premier Historien: en effet, Thot est considéré comme ayant peint les Dieux [Les Dieux, dans l’Ecriture & dans l’expression Hiéroglyphique, sont l’Eternel & les Vertus, représentés avec un corps.], c’est-à-dire, les actes de la Toute-puissance, ou la Création, à laquelle il joignit des Préceptes de Morale. Ce Livre paroît avoir été nommé A-Rosh; d’A, Doctrine, Science; & de Rosch [Rosh est le nom Egyptien de Mercure & de sa Fête qui se célébroit le premier jour de l’an.], Mercure, qui, joint à l’article T, signifie Tableaux de la Doctrine de Mercure; mais comme Rosh veut aussi dire Commencement, ce mot Ta-Rosh fut particulierement consacré à sa Cosmogonie; de même que l’Ethotia, Histoire du Tems, fut le titre de son Astronomie; & peut-être qu’Athothes, qu’on a pris pour un Roi, fils de Thot, n’est que l’enfant de son génie, & l’Histoire des Rois d’Egypte.

Cette antique Cosmogonie, ce Livre des Ta-Rosh, à quelques légeres altérations près, paroît être parvenu jusqu’à nous dans les Cartes qui portent encore ce nom [Vingt-deux Tableaux forment un Livre bien peu volumineux; mais si, comme il paroît vraisemblable, les premieres Traditions ont été conservées dans des Poëmes, une simple Image qui fixoit l’attention du Peuple, auquel on expliquoit l’événement, suffisoit pour lui aider à les retenir, ainsi que les vers qui les décrivoient.], soit que la cupidité les ait conservées pour filouter le désoeuvrement, ou que la superstition ait préservé des injures du tems, des symboles mysterieux qui lui servoient, comme jadis aux Mages, à tromper la crédulité.

Les Arabes communiquerent ce Livre [On nomme encore Livret aus Lansquenet, ou Lands-Knecht, la Série de Cartes qu’on donne aux pontes.] ou Jeu aux Espagnols, & les Soldats de Charlequint le porterent en Allemagne. Il est composé de trois Séries supérieures, représentant les trois premiers siècles, d’Or, d’Argent & d’Airain: chaque Série est formée de sept Cartes [Trois fois 7, nombre mystique, fameux chez les Cabalistes, les Pythagorieniens, &c.].

Mais comme l’Ecriture Egyptienne se lisoit de gauche à droite, la vingt-unieme Carte, qui n’a été numérotée qu’avec des chiffres modernes, n’en est pas moins la premiere, & doit être lue de même pour l’intelligence de l’Histoire; comme elle est la premiere au Jeu de Tarots, & dans l’espece de Divination qu’on opéroit avec ces Images.

Enfin, il y a une vingt-deuxieme Carte sans numéro comme sans puissance, mais qui augmente la valeur de celle qui la précede; c’est le zéro des calculs magiques: on l’appelle la Folie.

Premiere Série.
Siècle d’Or.

La vingt-unieme, ou premiere Carte, représente l’Univers par la Déesse Isis dans un ovale, ou un oeuf, avec les quatre Saisons aux quatre coins, l’Homme ou l’Ange, l’Aigle, le Boeuf & le Lion.

Vingtieme, celle-ci est intitulée le Jugement: en  effet, un Ange sonnant de la trompete, & des hommes sortant de la terre, ont dû induire un Peintre, peu versé dans la Mythologie, à ne voir dans ce tableau que l’image de la Résurrection; mais les Anciens regardoient les hommes comme enfans de la Terre [Les dents semées par Cadmus, &c.]; Thot voulut exprimer la Création de l’Homme par la peinture d’Osiris, ou le Dieu générateur, du porte-voix ou Verbe qui commande à la matiere, & par des Langues de Feu qui s’échappent de la nuée, l’Esprit [Peint même dans nos Historiens sacrés.] de Dieu ranimant cette même matiere; enfin, par des hommes sortant de la terre pour adorer & admirer la Toute-puissance: l’attitude de ces hommes n’annonce point des coupables qui vont paroître devant leur Juge.

Dix-neuvieme, la Création du Soleil qui éclaire l’union de l’homme & de la femme, exprimée par un homme & une femme qui se donnent la main: ce signe est devenu depuis celui des Gémeaux, del’Androgyne: Duo in carne una.

Dix-huitieme, la Création de la Lune & des Animaux terrestres, exprimés par un Loup & un Chien, pour signifier les Animaux domestiques & sauvages: cet emblême est d’autant mieux choisi, que le Chien & le Loup sont les seuls qui hurlent à l’aspect de cet astre, comme regrettant la perte du jour. Ce caractere me feroit croire que ce Tableau auroit annoncé de très-grands malheurs à ceux qui venoient consulter les Sorts, si l’on n’y avoir peint la ligne du Tropique, c’est-à-dire, du départ & du retour du Soleil, qui laissoit l’espérance consolante d’un beau jour & d’une meilleure fortune. Cependant deux Fortresses qui défendent un chemin tracé de sang, & un marais qui termine le Tableau, présentent toujours des difficultés sans nombre à surmonter pour détruire un présage aussi sinistre.

Dix-septieme, la Création des Ètoiles & des Poissons, représentées par des Etoiles & le Verseau.

Seizieme, la Maison de Dieu renversée, ou le Paradis terrestre dont l’homme & la femme sont précipités par la queue d’une Comete ou l’Èpée  Flamboyante, jointe à la chûte de la grêle.

Quinzieme, le Diable ou Typhon, derniere Carte de la premiere Série, vient troubler l’innocence de l’homme & terminer l’âge d’or. Sa queue, ses cornes & ses longues oreilles l’annoncent comme un être dégradé: son bras gauche levé, le noude plié, formant une N, symbole des êtres produits, nous le fait connoître comme ayant été créé; mais le flambeau de Prométhée qu’il tient de la main droite, paroît completter la lettre M, qui exprime la génération: en effet, l’Histoire de Typhon nous induit naturellement à cette explication; car, en privant Osiris de sa virilité, il paroît que Typhon vouloit empiéter sur les droits de la Puissance productrice; aussi fut-il le pere des maux qui se répandirent sur la terre.

Les deux Êtres enchaînés a ses pieds marquent la Nature humaine dégradée & soumise, ainsi que la génération nouvelle & perverse, dont les ongles crochus expriment la cruauté; il ne leur manque que les ailes (le Génie ou la Natur angélique), pour être en tout semblables au diable: un de ces êtres touche avec sa griffe la cuisse de Typhon; emblême qui dans l’Ecriture Mythologique fut toujours celui de la génération [La naissance de Bacchus & de Minerve sont le Tableau Mythologique des deux générations.] charnelle: il la touche avec sa griffe gauche pour en marquer l’illégitimité.

Typhon enfin est souvent pris pour l’Hiver, & ce Tableau terminant l’âge d’or. annonce l’intempérie des Saisons, que l’homme chassé du Paradis va éprouver par la suite.

Seconde Série.
Siècle d’Argent.

Quatorzieme, l’Ange de la Tempérance vient instruire l’homme, pour lui faire éviter la mort à laquelle il est nouvellement condamné: il est peint versant [Peut-être son attitude a-t-elle trait à la culture de la Vigne.] de l’eau dans du vin, pour lui montrer la nécessité  d’affoiblir cette liqueur, ou de tempérer ses affections.

Treizeime; ce nombre, toujours malheureux, est consacré à la Mort, qui est représentée fauchant les têtes couronnées & les têtes vulgaires.

Douzieme, les accidens qui attaquent la vie humaine, représentés pa run homme pendu par le pied; ce qui veut asussi dire qui, pour les éviter, il faut en ce monde marcher avec prudence: Suspenso pede.

Onzieme, la force vient au secours de la Prudence, & terrasse le Lion, qui a toujours été le symbole de la terre inculte & sauvage.

Dixieme, la Roue de Fortune, au haut de laquelle est un Singe couronné, nous apprend qu’après la chûte de l’homme, ce ne fut déjà plus la vertu qui donna les dignités: le Lapin qui monte & l’homme qui est précipité, expriment les injustices de l’inconstante Déesse: cette roue en même-tems est l’emblême de la roue de Pythagore, de la façon de tirer les sorts par les nombres: cette Divination est appellée Arithomancie.

Neuvieme, l’Hermite ou le Sage, la lanterne à la main, cherchant la Justice sur la Terre.

Huitieme, la Justice.

Troisieme Série.
Siècle de Fer.

Septieme, le Chariot de Guerre dans lequel est un roi cuirassé, armé d’un javelot, exprime les dissensions, les meurtres, les combats du siècle d’airain, & annonce les crimes du siècle de fer.

Sixieme, l’Homme peint Flottant entre le vice & la vertu, n’est plus conduit par la raison: l’Amour ou le désir [La concupiscence.], les yeux bandés, prêt à lâcher un trait, le fera pencher à droite ou à gauche, suivant qu’il sera guidé par le hasard.

Cinquieme, Jupiter ou l’Eternel monté sur son Aigle, la foudre à la main, menace la Terre, & va lui donner des Rois dans sa colere.

Quatrieme, le Rois armé d’une massue [Osiris est souvent représenté un fouet à la main, avec un globe & un T: tout cela réuni, peut avoir produit dans la tête d’un Cartier Allemand une Boule Impériale], dont l’ignorance a fait par la suite une Boule Impériale: son casque est garni par-derriere de dents de scie, pour faire connoître que rien ne pouvoit assouvir son insatiabilité [Ou sa vengeance, si c’est Osiris irrité.].

Troisieme, la Reine, la massue à la main; sa couronne a les mêmes ornemens que le casque du Roi.

Deuxieme, l’Orgueil des Puissans, représenté par les Paons, sur lesquels Junon montrant le Ciel de la main droite, & la Terre de la gauche, annonce une Religion terrestre ou l’Idolâtrie.

Premiere, le Bateleur tenant la verge des Mages, fait des miracles & trompe la crédulité des Peuples.

Il est suivi d’une carte unique représentant La Folie qui porte son sac ou ses défauts par derriere, tandis qu’un tigre ou les remords, lui dévorant les jarrets, retarde sa marche vers le crime [Cette Carte n’a point de rang: elle complette l’Alphabet sacré, & répond au Tau qui veut dire complément, perfection: peut-être a-t-on voulu représenter dans son sens le  plus naturel le résultat des actions des hommes.].

Ces vingt-deux premieres Cartes sont non-seulement autant d’hiéroglyphes, qui placés dans leur ordre naturel retracent l’Histoire des premiers tems, mais elles sont encore autant de lettres [L’Alphabet Hébreu est composé de 22 Lettres.] qui différemment combinées, peuvent former autant de phrases; aussi leur nom (A-tout) n’est que la traduction littérale de leur emploi & proptiété générale.

II.
Ce Jeu appliqué à la Divination.

Lorsque les Egyptiens eurent oublié la premiere interprétation de ces Tableaux, & qu’ils s’en furent servis comme de simples lettres pour leur Ecriture sacrée, il étoit naturel qu’un peuple aussi superstitieux attachât une vertu occulte [Aussi la science des Nombres & la valeur des Lettres a-t-elle été fort célébre autrefois.] des caract?eres respectables par leur antiquité, & que les Prêtres, qui seuls en avoient l’intelligence, n’employoient que pour les choses religieuses.

On inventa même de nouveaux caractères, & nous voyons dans l’Ecriture-Sainte que les Mages ainsi que ceux qui étoient initiés dans leurs secrets, avoient une divination par la coupe [La Coupe de Joseph.].

Qu’ils opéroient des merveilles avec leur Bâton [La Verge de Moyse & Mages de Pharaon.].

Qu’ils consultoient les Talismants [Les Dieux de Laban & les Théraphim, l’Urim & le Thummim.] ou des pierres gravées.

Qu’ils devinoient les choses futures par des Epées [Ils faisoient plus: ils fixoient le sort des combats; & si le Roi Joas avoit frappé la terre sept fois, au lieu de trois, il auroit détruit la Syrie, II. Rois, XIII, 19.], des Flèches, des Haches, enfin par les armes en général. Ces quatre Signes furent introduits parmi les Tableaux religieux aussi-tôt que l’établissement des Rois eut amené la différence des états dans la Société.

L’Epée marqua la Royauté & les Puissans de la Terre.

Les Prêtres faisoient usage de Canopes pour les Sacrifices, & la Coupe désigna le Sacérdoce.

La Monnoie, le Commerce.

Le Bâton, Houlette, l’Aiguillon représenterent l’Agriculture.

Ces quatre Caractères déjà mystérieux, une fois réunis aux Tableaux Sacrés, durent faire espérer les plus grandes lumieres; & la combinaison fortuite qu’on obtenoit en mêlant ces Tableaux, formoit des phrases que les Mages lisoient ou interprétoient comme des Arrêts du Destin; ce qui leur étoit d’autant plus facile qu’une construction due au hasard devoit produire naturellement une obscurité consacrée au style des Oracles.

Chque Etat eut donc son symbole qui le caractérisa; & parmi les différens Tableaux qui porterent cette image, il y en eut d’heureux & de malheureux, suivant que la position, le nombre des symboles & leurs ornemens, les tendirent propres à annoncer le bonheur ou l’infortune.

III.
Noms de diverses Cartes, conservés par les Espagnols.

Les noms de plusieurs de ces Tableaux conservés par les Espagnols, nous en font connoître la propriété. Ces noms sont au nombre de sept.

Le trois de denier, nombre mystérieux, appellé le Seigneur, le Maître, consacré au Dieu suprême, au Grand Iou.

Le trois de coupe, appellé la Dame, consacré à la Reine des Cieux.

Le Borgne ou l’As de denier, Phoebeoe lampadis instar., consacré à Apollon.

La Vache ou les deux coupes, consacrée à Apis ou Isis.

Le grand Neuf, les neuf coupes; consacré au Destin.

Le petit Neuf de denier, consacré à Mercure.

Le Serpent ou l’As de bâton (Ophion) symbole fameux & sacré chez les Egyptiens.

IV.
Attributs Mythologiques de plusieurs autres.

Plusieurs autres Tableaux sont accompagnés d’attributs Mythologiques qui paroissent destinés à leur imprimer une vertu particuliere & secrette.

Tels que les deux deniers entourés de la Ceinture mystique d’Isis.

Le quarte de denier, consacré à la bonne Fortune, peinte au milieu du Tableau, le pied sur sa boule & la voile déployé.

La Dame de bâton consacrée à Cérès; cette Dame est couronnée d’épis, porte la peau du lion, de même qu’Hercule le cultivateur par excellence.

Le Valet de coupe ayant le bonnet à la main, & portant respectueusement une coupe mystérieuse, couverte d’un voile; il semble en allongeant le bras, éloigner de lui cette coupe, pour nous apprendre qu’on ne doit approcher des choses sacrées qu’avec crainte, & ne chercher à connoître celles qui sont cachées qu’avec discrétion.

L’As d’Epée consacré à Mars. L’Epée est ornée d’une couronne, d’une palme & d’une branche d’olivier avec ses bayes, pour signifier la Victoire & ses fruits: il ne paroît y avoir aucune Carte heureuse dans cette couleur que celle-ci. Elle est unique, parce qu’il n’y a qu’une façon de bien faire la guerre; celle de vaincre pour avoir la paix. Cette épée est soutenue par un bras gauche sortant d’un nuage.

Le Tableau du bâton du Serpent, dont nous avons parlé plus haut, est orné de fleurs & de fruits de même que celui de l’Epée victorieuse; ce bâton mystérieux est soutenu par un bras droit sortant aussi d’une nuée, mais éclatante de rayons. Ces deux caractères semblent dire que l’Agriculture & l’Epée sont les deux bras de l’Empire & le soutien de la Société.

Les Coupes en général annonçoient le bonheur, & les deniers la richesse.

Les Bâtons destinés à l’Agriculture en pronostiquoient les récoltes plus ou moins abondantes, les choses qui devoient arriver à la campagne ou qui la regardoient.

Ils paroissent mélangés de bien & de mal: les quatre figures ont le bâton verd, semblable en cela au bâton fortuné, mais les autres Cartes paroissent, par des ornemens qui se compensent, indiquer l’indifférence:  le deux seul, dont les bâtons sont couleur de sang, semble consacré à la mauvaise fortune.

Toutes les Epées ne présagent que des malheurs, sur-tout celles qui marquées d’un nombre impair, portent encore une épée sanglante. Le seul signe de la victoire, l’épée couronnée, est dans cette couleur le signe d’un heureux événement.

V.
Comparaison de ces Attributs avec les valeurs
qu’on assigne aux Cartes modernes pour la Divination.

Nos Diseurs de bonne-fortune ne sachant pas lire les Hiéroglyphes, en ont soustrait tous les Tableaux & change jusqu’aux noms de coupe, de bâton, de denier & d’épée, dont ils ne connoissoient ni l’etynologie, ni l’expression; ils ont substitué ceux de coeur, de carreau, de trefle & de pique.

Mais ils ont retenu certaines tournures & plusieurs expressions consacrées par l’usage qui laissent entrevoir l’origine de leur divination. Selon eux,

Les Coeurs, (les Coupes), annoncent le bonheur.
Les Trefles, (les Deniers), la fortune.
Les Piques, (les Epées), le malheur.
Les Carreaux [Il est à remarquer que dans l’Ecriture symbolique les Egyptiens traçoient des carreaux pour exprimer la campagne.], (les Bâtons), l’indifference & la campagne.
Le neuf de pique est une carte funeste.

Celui de coeur, la carte du Soleil; il est aisé d’y reconnoître le grand neuf, celui des coupes: de même que le petit neuf dans le neuf de trefle, qu’ils regardent aussi comme un carte heureuse.

Les as annoncent des Lettres, des Nouvelles: en effet qui est plus à même d’apporter des nouvelles que le Borgne, (le Soleil) qui parcourt, voit & éclaire tout l’Univers ?

L’as de pique & le huit de coeur présagent la victoire; l’as couronné la pronostique de même, & d’autant plus heureuse qu’il est accompagné des coupes ou des signes fortunés.

Les coeurs & plus particulierement le dix, dévoilent les événemens qui  doivent arriver à la ville. La coupe, symbole duc Sacerdoce, semble destinée à exprimer Memphis & le sejour des Pontifes.

L’as de coeur & la dame de carreau annoncent une tendresse heureuse & fidelle. L’as de coupe exprime un bonheur unique, qu’on posséde seul; la dame de carreau indique une femme qui vit à la campagne, ou comme à la campagne: & dans quels lieux peut-on espèrer plus de vérité, d’innocence, qu’au village ?

Le neuf de trefle & le dame de coeur, marquent la jalousie. Quoique le neuf de denier soit une carte fortunée, cependant une grande passion, même heureuse, pour une Dame vivant dans le grand monde, ne laisse pas toujours son amant sans inquiétude, &c. &c. On trouveroit encore une infinité des similitudes qu’il est inutile de chercher, n’en voilà déjà que trop.

VI.
Maniere dont on s’en servoit pour consulter les Sorts.

Supposons actuellement que deux hommes qui veulent consulter les Sorts, ont, l’un les vingt-deux lettres, l’autre les quatre couleurs, & qu’après avoir chacun mêlé les caractères, & s’être donné reciproquement à couper, ils commencent à compter ensemble jusqu’au nombre quatorze, tenant les tableaux & les cartes à l’envers pour n’en appercevoir que le dos; alors s’il arrive une carte à son rang naturel, c’est-à-dire, qui porte le numéro appellé, elle doit être mise à part avec le nombre de la lettre sortie en même tems, qui sera placé au-dessus: celui qui tiendra les tableaux y remettra cette même lettre, pour que le livre du Destin soit toujours en son entier, & qu’il ne puisse y avoir, dans aucun cas, des phrases incomplettes; puis il remêlera & redonnera à couper. Enfin on coulera trois fois les cartes à fond avec les mêmes artentions; & lorsque cette opération sera achevée, il ne s’agira plus que de lire les numéros qui expriment les lettres sorties. Le bonheur ou le malheur que présage chacune d’elles, doit être combiné avec celui qu’annonce la carte qui leur correspond, de même que leur puissance en plus ou en moins est déterminée par le nombre de cette même carte, multiplié par celui qui caractérise la lettre. Et voilà pourquoi la Folie qui ne produit rien, est sans numéro; c’est, comme nous l’avons dit, le zéro de ce calcul.

VII.
C’étoit une grande portion de la Sagesse ancienne.

Mais si les Sages de l’Egypte se servoient de tableaux sacrés pour prédire l’avenir, lors même qu’ils n’avoient aucune indication qui pût leur faire présumer les événemens futurs, avec quelles espérances ne devoient ils pas se flatter de les connoître lorsque leurs recherches étoient précédées par des songes qui pouvoient aider à développer la phrase produite par les tableaux des sorts !

Les Prêtres chez cet ancien Peuple formerent de bonne-heure une Société savante, chargée de conserver & d’étendre les connoissances humaines. Le Sacerdoce avoit ses Chefs, & les noms de Jannès & Mambrès, que Saint Paul nous a conservés dans sa seconde Epître à Timothée, sont des titres qui caractérisent les fonctions augustes des Pontifes. Jannès [De même que Pharaon signifie le Souverain sans être le nom particulier d’aucun Prince qui ait gouverné l’Egypte.] signifie l’Explicateur, & Manbrès le Permutateur, celui qui fait des prodiges.

Le Jannès & le Mambrès écrivoient leurs interprétations, leurs découvertes, leurs miracles. La suite non-interrompue de ces Mémoires [Le Pape Gelase I. mit en 491 quelques Livres de Jannès & Mambrès au nombre des apocryphes.] formoit un corps de Science & de Doctrine, o`les Prêtres puisoient leurs conoissances physiques & morales: ils observoient, sous l’inspection de leurs Chefs, le cours des Astres, les inondations du Nil, les Phénomènes, &c. Les Rois les assembloient quelquefois pour s’aider de leurs conseils. Nous voyons que du tems du Patriarche Joseph ils furent appellés par Pharaon pour interpréter un songe; & si Joseph seul eut la gloire d’en découvrir le sens, il n’en reste pas moins prouvé qu’une des fonctions des Mages étoit d’expliquer les songes.

Les Egyptiens [Long-tems encore après cette époque les Mages reconnurent le doigt de Dieu dans les Miracles de Moyse.] n’avoient point encore donné dans les erreurs de l’idolâtrie; mais Dieu dans ces tems reculés manifestant souvent aux hommes sa volonté, si quelqu’on avoit pû regarder comme téméraire de l’interroger sur ses décrets éternels, il auroit au moins dû paroître pardonnable de chercher à les pénétrer, lorsque la Divinité sembloit, non-seulement approuver, mais même provoquer, par des songes, cette curiosité: aussi leur interpréatation fut-elle un Arts sublime, une science sacrée dont on faisoit une étude particuliere, reservée aux Ministres des Autels: & lorsque les Officiers de Pharaon, prisonniers avec Joseph, s’affligeoient de n’avoir personne pour expliquer leurs songes, ce n’est pas qu’ils n’eussent des compagnons de leur infortune; mais c’est qu’enfermés dans la prison du Chef de la Milice, il n’y avoit personne parmi les soldats qui pût faire les cérémionies religieuses, qui eût les tableaux sacrés, bien loin d’en avoir l’intelligence. La réponse même du Patriarche paroît expliquer leur pensée: est-ce que l’interpréatation, leur dit-il, ne dépend pas du Seigneur ? racontez-moi ce que vous avez vu.

Mais pour revenir auy fonctions des Prêtres, ils commencoient par écrire en lettres vulgaires le songe dont il s’agissoit, comme dans route divination où il y avoit une demande positive dont il falloit chercher la réponse dans le Livre des Sorts, & après avoir mêlé les lettres sacrées on en tiroit les tableaux, avec l’attention de les placer scrupuleusement sous les mots dont on cherchoit l’explication; la phrase formée par ces tableaux, étoit déchiffrée par le Jannès.

Supposons, par exemple, qu’un Mage eût voulu interpréter le songe de Pharaon dont nous parlions tout-à-l’heure, ainsi qu’ils avoient essayé d’imiter les miracles de Moyse, & qu’il eût amené le bâton fortuné, symbole par excellence de l’Agriculture, suivi du Cavalier & du Roi [Le Valet vaut 1., Le Cavalier 2., La Dame 3., Le Roi 4.]; qu’il sortît en même tems du Livre du Destin la Carte du Soleil, la Fortune & le fol, on aura le premier membre de la phrase qu’on cherche. S’il sort ensuite le deux & le cinq de bâton, dont le symbole est marqué de sang, que des tableaux sacrés on tire un Typhon & la Mort, il auroit obtenu une espèce d’interprétation du songe du Roi, qui pourroit avoir été écrit ainsi en lettres ordinaires:

Sept vaches grasses & sept maigres qui les dévorent.

Bâton.
Le Roi.
4
Le Cavalier.
2
Le
Soleil.
La
Fortune. 
Le Fol. 
2 | de
Bâ- | ton.
5 | de
Bâ- | ton.
Typhon. La
Mort.

Calcul naturel qui résulte de cet arrangement.


Le Bâton vaut 1. Le Soleil annonce le bonheur
Le Roi 4. La Fortune [Précédée d’une Carte heureuse.] de même.
Le Cavalier 2. Le Fol ou zéro met le Soleil aux centaines.

Total

7.
***


Les Signe de l’Agriculture donne sept.

On lira donc, sept années d’une agriculture fortunée donneront une abondance cent fois plus grande qu’on ne l’aura jamais éprouvée.

Le second membre de cette phrase, fermé par le deux & le cinq de bâton, donne aussi le nombre de sept qui, combiné avec le Typhon & la Mort, annonce sept années de disette, la famine & les maux qu’elle entraîne.

Cette explication paroîtra encore plus naturelle si l’on fait attention au sens & à la valeur des lettres que les tableaux représentent.

Le Soleil répondant au Gimel, veut dire, dans ce sens, rétribution, bonheur.

La Fortune ou le Lamed signifie  Régle, Loi, Science.

Le Fol n’exprime rien par lui-même, il répond au Tau, c’est simplement un signe, une marque.

Le Typhon ou le Zaïn annonce l’inconstance, l’erreur, la foi violée, le crime.

La Mort ou le Thet indique l’action de balayer: en effet, la Mort est une terrible balayeuse.

Teleuté en Grec qui veut dire la fin, pourroit être, en ce sens, un dérivé de Thet.

Il n eseroit pas difficile de trouver dans les moeurs Egyptiennes l’origine de la plûpart de nos superstitions: par exemple, il paroît que celle de faire tourner le tamis pour connoître un voleur, doit sa naissance à la coutume que ce Peuple avoit de marquer les voleurs avec un fer chaud, d’un … T, & d’un … Samech [Tau, signe: Samech, adhésion.], en mettant ces deux caractères, l’un sur l’autre, pour en faire un chiffre, Signum adherens, qui servît à annoncer qu’on se méfiât de celui qui le portoit, on produit une figure qui ressemble assez à une paire de ciseaux piqués dans un cercle, dans un crible, lequel doit se détacher lorsqu’on prononcera le nom du voleur & le fera connoître.

La Divination par la Bible, l’Evangile & nos Livres Canoniques, qu’on appelloit le sort des Saints, dont il est parlé dans la cent neuviéme Lettre de Saint Augustin & dans plusieurs Conciles, entr’autres celui d’Orléans; les sorts des Saint-Martin de Tours qui étoient si fameux, paroissent avoir été envisagés comme un contre-poison de la Divination Egyptienne par le Livre du Destin. Il en est de même des présages qu’on tiroit de l’Evangile, ad apperturam libri, lorsqu’après l’élection d’un Evéque on vouloit connoître quelle seroit sa conduite dans l’Episcopat.

Mais tel est le sort des choses humaines: d’une Science aussi sublime, qui a occupé les plus Grands Hommes, les plus savans Philosophes, les Saints les plus respectables, il ne nous reste que l’usage des enfans de tirer à la belle lettre.

VIII.
Cartes auxquelles les Diseurs de bonne-aventure, attachent des pronostics.

On se sert d’un Jeu de Piquet qu’on mêle, & on fait couper par la personne intéressée.

On tire une Carte qu’on nomme As, la seconde Sept, & ainsi en remontant jusqu’au Roi: on met à part toutes les Cartes qui arrivent dans l’ordre du calcul qu’on vient d’établir: c’est-à-dire que si en nommant As, Sept, ou tel autre, il arrive un As, un Sept, ou celle qui a été nommée, c’est celle qu’il faut mettre à part. On recommence toujours jusqu’à ce qu’on ait épuisé le Jeu; & si sur la fin il ne reste pas assez de Cartes pour aller jusqu’au Roi inclusivement, on reprend des Cartes, sans les mêler ni couper, pour achever le calcul jusqu’au Roi.

Cette opération du Jeu entier se fait trois fois de la même maniere. Il faut avoir le plus grand soin d’arranger les Cartes qui sortent du Jeu, dans l’ordre qu’elles arrivent, & sur la même ligne, ce qui produit une phrase hiéroglyphique; & voici le moyen de la lire.

Toutes les peintures représentent les Personnages dont il peut être question; la premiere qui arrive est toujours celle dont il s’agit.

Les Rois sont l’image des Souverains, des Parens, des Généraux, des Magistrats, des Vieillards.

Les Dames ont les mêmes caractères dans leur genre relativement aux circonstances, soit dans l’Ordre politique, grave ou joyeux: tantôt elles sont puissantes, adroites, intriguantes, fidelles ou légeres, passionnées ou indifférentes, quelquefois rivales, complaisantes, confidentes, perfides, &c. S’il arrive deux Cartes du même genre, ce sont les secondes qui jouent les seconds rôles.

Les Valets sont des jeunes Gens, des Guerriers, des Amoureux, des Petits-Maîtres, des Rivanx, &c.

Les Sept & les Huit sont des Demoiselles de tous les genres. Le Neuf de coeur se nomme, par excellence, la Carte du soleil, parce qu’il annonce toujours des choses brillantes, agréables, des succès, sur-tout s’il est réuni avec le Neuf de trefle, qui est aussi une Carte de merveilleux augure. Le Neuf de carreau désigne le retard en bien ou en mal.

Le Neuf de pique est la plus mauvaise Carte: il ne présage que des ruines, des maladies, la mort.

Le Dix de coeur désigne la Ville; celui de carreau, la campagne; le Dix de trefle, fortune, argnet; celui de pique, des peines & des chagrins.

Les As annoncent des lettres, des nouvelles.

Si les quatre Dames arrivent ensemble, cela signifie babil, querelles.

Plusieurs Valets ensemble annoncent rivalité, dispute & combats.

Les trefles en général, sur-tout s’ils sortent ensemble, annoncent succès, avantage, fortune, argent.

Les carreaux, la campagne, indifférence.

Les coeurs, contentement, bonheur.

Les piques, pénurie, soucis, chagrins, la mort.

Il faut avoir soin d’arranger les Cartes dans le même ordre qu’elles sortent, & sur la même ligne, pour ne pas déranger la phrase, & la lire plus facilement.

Les événemens prédits, en bien ou en mal, peuvent être plus ou moins avantageux ou malheureux, suivant que la Carte principale qui les annonce est accompagnée: les piques, par exemple, accompagnés de trefles, sur-tout s’ils arrivent entre deux trefles, sont moins dangereux; comme le trefle entre deux piques ou accolé d’un pique, est moins fortuné.

Quelquefois le commencement annonce des accidens funestes; mais la fin des Cartes est favorable, s’il y a beaucoup de trefles; on les regarde comme amoindris, plus ou moins, suivant la quantité: s’ils sont suivis du Neuf, de l’As ou du Dix, cela prouve qu’on a couru de grands dangers, mais qu’ils sont passés, & que la Fortune change de face.

Les As:

1 de carreau, 8 de coeur, bonne Nouvelle.
1 de coeur, Dame de pique, Visite de femme.
1 de coeur, Valet de coeur, Victoire.
1, 9 & Valet de coeur,  l’Amant heureux.

 

1, 10 & 8 de pique,  Malheur
1 de pique, 8 de coeur,  Victoire.

 

1 de trefle, Valet de pique, Amitié.


Les 7:

7 & 10 de coeur, Amitié de Demoiselle.
7 de coeur, Dame de careau, Amitié de femme.
7 de carreau, Roi de coeur, Retard.



Les 9:

Trois Neufs ou trois Dix, Réussité.


Les 10:

10 de trefle, Roi de pique, Présent.
10 de trefle & Valet de trefle, un Amoureux.
10 de pique, Valet de careau, quelqu’un d’inquiet.
10 de coeur, Roi de trefle, Amitié sincère.


 

Herausgegeben von
Hans-Joachim Alscher
Stand: 1. August 2002

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RAPPORTS SPIRITUELS ET TEMPORELS DE L’ARC-EN-CIEL 2 août, 2009

Posté par hiram3330 dans : Chaine d'union,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

RAPPORTS SPIRITUELS ET TEMPORELS DE L’ARC-EN-CIEL

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Louis-Claude de Saint-Martin

 

 

 

 


 

Les lois de la sagesse et de la miséricorde divine sont tellement disposées, que toutes leurs productions portent l’empreinte de l’archétype d’où elles émanent ; et comme il y a plusieurs classes de ces productions, chacune d’elles est en quelque sorte l’image et la copie de celle qui la précède et qui lui est supérieure. C’est pour cela que le monde physique et matériel est le véritable emblème du monde des esprits, comme le monde des esprits est celui du monde divin.
Ce monde matériel doit donc nous représenter l’ordre dans lequel les différents esprits ont été constitués lors de la formation de l’univers et pour remplir les décrets du Créateur : il nous le présente en effet par une multitude de faits et de lois physiques, dont l’étude des êtres élémentaires nous donne et l’intelligence et la preuve de ce que je viens d’avancer ; mais parmi cette multitude d’objets que nous pouvons soumettre à nos observations, il n’en est guère de plus frappant que l’arc-en-ciel, parce qu’il réunit sous un seul point de vue et sans que la main de l’homme ait besoin d’opérer, tout ce que nous avons à désirer sur l’origine des choses, sur la nature de l’homme, sur la punition des prévaricateurs et sur les moyens qui leur sont donnés pour se réintégrer dans les droits de leur émanation.

 


L’arc-en-ciel se forme par la réfraction des rayons solaires sur les différents fluides qui composent les nuages : il est circulaire, et porte le nombre septénaire par les différentes couleurs qu’on y distingue, qui sont : le rouge, l’orangé, le jaune, le vert, l’indigo et le violet ; enfin il sépare la partie nébuleuse et obscure de la partie pure et lumineuse de l’atmosphère : voilà les propriétés principales qu’il nous offre, et dont il est la plus grande facilité de faire l’application aux objets dont j’ai fait ci-dessus l’énumération.
L’arc-en-ciel ne paraît que lorsqu’il y a des nuages dans l’atmosphère ; c’est nous indiquer que le cercle universel-temporel n’existe que par l’opposition que les ténèbres spirituelles font avec la lumière divine, et que lorsque cette opposition sera à son terme, toutes les choses temporelles disparaîtront comme l’arc-en-ciel disparaît à mesure que les nuages se dissipent. Si, après la destruction de cette matière, il doit y avoir encore une expiation beaucoup plus rude que celle qui se sera passée dans le temps, les lois de l’arc-en-ciel nous offrent en nature physique la même vérité : car, après que les plantes et les différents corps terrestres ont été imbibés par l’eau des nuages et que le soleil vient ensuite prendre la place de la pluie, il arrive ou que ces plantes ne peuvent recevoir sa chaleur, quoique sa lumière vienne jusqu’à elles, et cela à cause de la fraîcheur que l’humidité a répandu dans l’atmosphère, ou que le soleil brûle et calcine ces mêmes plantes si l’humidité ne domine pas et qu’elles aient leurs pores trop ouverts. Dans l’un et dans l’autre cas, il faut un temps pour réparer ce désordre : il faut un temps pour que le feu du soleil consume ces impuretés de la région où les nuages se sont formés, et ce temps est l’indice de celui qu’il faudra aux êtres pervers pour se purifier, quoiqu’il ne soit donné à aucun homme d’en connaître ni d’en fixer la mesure.
L’arc-en-ciel est circulaire, pour nous renseigner que telles sont la figure et la forme de tous les corps et, par conséquent, du corps général-universel, parce que le fluide étant circulaire et le principe de toute corporisation, rien ne peut exister en apparence de matière, que sous la forme de son principe.
Il y a sept couleurs dans l’arc-en-ciel ; c’est l’image et le résultat de l’action des sept principaux agents universels qui ont été placés par le Créateur pour le soutien de Son oeuvre temporel et pour le secours des êtres qui peuvent s’approprier leurs puissances. C’est, en un mot, le signe visible des sept grands cercles spirituels indiqués par les sept sphères planétaires qui n’en sont que les ministres et les agents. Il est à remarquer aussi que parmi ces sept couleurs, la première ou le rouge, est seule de sa classe et dominante sur les six autres, au lieu que ces dernières, il y en a toujours deux qui ont entre elles de l’analogie, ce qui fait voir la loi binaire des choses inférieurs et la supériorité du feu sur toutes les autres substances, puisqu’il est réellement leur principe et leur Créateur.
L’arc-en-ciel ne peut être visible qu’à ceux qui se trouvent placés entre le soleil et les nuages, et quoique alors on reçoive quelque fois de la pluie, cela est si rare et en même temps si léger, par rapport à ce qui arrive sous le nuage même, qu’on peut regarder cette place intermédiaire comme l’asile de la sécurité, de la force, de la puissance et de la lumière.

 


Quand l’homme se trouve à cette place, il occupe toujours le centre de l’arc-en-ciel qu’il aperçoit, et il est le maître de faire changer de place à ces sept circonférences, en en changeant lui-même : car alors il en conserve toujours le centre, quelqu’effort qu’il fasse pour s’en écarter ; n’est-ce pas là un tableau assez frappant de ce qu’il était et du rang qu’il occupait lors de son émancipation temporelle ? N’est-ce pas nous montrer physiquement et corporellement les droits qu’il avait alors sur les sept esprits primordiaux de la création dont il pouvait diriger les actions à son gré et qui étaient toujours subordonnés à sa puissance ?
L’arc-en-ciel sépare le pur de l’impur, la lumière d’avec les ténèbres, pour nous rappeler que le cercle universel-temporel sépare en effet les impies d’avec les justes, les profanes d’avec les saints et les êtres d’abomination d’avec les êtres divins. Cet arc-en-ciel nous montre donc en nature quel est le lieu que les êtres, prévaricateurs occupent par rapport à tout autre être temporel ou spirituel ; il nous montre quelle est l’espèce de punition que la justice divine a prononcée pour leur molestation ; c’est d’être exclus du séjour de la lumière, c’est non seulement de ne plus pouvoir occuper le centre des circonférences spirituelles ni de les faire mouvoir à leur gré ; mais c’est de ne plus recevoir même les rayons de ce soleil divin qui les vivifiait tous avant leur crime, comme le soleil temporel vivifie et éclaire tous ceux qui se trouvent dans l’arc-en-ciel et lui et qui ne sont point enveloppés dans l’épaisse obscurité des nuages ; c’est enfin de ne ressentir que les effets de la justice divine sur eux-mêmes et d’être liés et assujettis par les sept puissances spirituelles-principales qui gouvernent l’univers, mais de ne pouvoir ni correspondre avec elles ni les apercevoir dans leur essence, quoiqu’ils en éprouvent chaque jour les influences rigoureuses : tel que ceux qui sont sous les nuages matériels sur lesquels l’arc-en-ciel se forme, éprouvant toute la rigueur de l’intempérie, sans apercevoir ce même arc-en-ciel qui, étant en effet une communication des rayons solaires, échauffe et divise par son feu les globules dont les nuages sont composés : car si la pluie commence toujours avant que l’arc-en-ciel paraisse, c’est que l’action de tous les êtres précède toujours leurs résultats et que l’effet des rayons du soleil ne peut être manifesté qu’après que leur action est parvenue jusque sur le nuage qu’ils devaient dissoudre, en faisant fermenter et se décomposer les différentes matières dont ce nuage est formé.
Toutes les observations qu’on vient de voir sur la loi de la molestation des êtres qui se sont séparés de la lumière, conviennent sans doute à toute espèce de prévaricateurs ; mais comme rien ne doit nous intéresser davantage que la connaissance de notre propre espèce et les différents faits de gloire, de justice et de réconciliation qui se sont opérés et qui s’opèrent sur elle, il est à propos d’examiner, relativement à l’homme, tous les rapports spirituels et temporels que nous n’avons examinés que d’une manière générale en confrontant les lois de l’arc-en-ciel physique avec les lois des êtres invisibles.

 


Nous avons dit que l’homme placé entre le soleil et l’arc-en-ciel était toujours au centre des sept circonférences que cet arc-en-ciel lui présentait. Nous avons dit qu’il pouvait à chaque pas faire changer de place à ces circonférences, sans qu’il pût jamais cesser d’occuper le centre qui est le vrai symbole de la puissance et de la supériorité ; mais ce que nous n’avons pas fait remarquer, c’est qu’il est le seul être de la nature qui puisse à son gré faire faire à l’arc-en-ciel ces transpositions ; elles ont lieu sans doute pour tout être animal dont les yeux formant le foyer et le réceptacle de tout amas de lumière, se trouveront toujours former le centre de leur sphère et, par conséquent, entraîneront avec eux les sept circonférences lumineuses de l’arc-en-ciel qu’ils auront aperçues ; mais quoique cette loi soit commune entre les animaux et l’homme, il y a cette différence infinie à faire, qu’elle s’opère sur les premiers par l’effet nécessaire de l’ordre physique et indépendamment de leur volonté, au lieu que l’homme seul est le maître de faire agir cette loi, de la soumettre à son usage et d’en multiplier les effets autant qu’il le veut. Or, cette supériorité physique dont l’homme est réellement revêtu, par rapport à tous les autres êtres de la nature corporelle, n’est-elle pas le signe évident de celle que sa nature spirituelle lui donne sur tous les esprits, et ne voyons-nous pas que s’il conserve encore dans la région sensible cette distinction frappante qui le rend actif et dominant sur les êtres passifs, il doit avoir cette même distinction parmi les êtres spirituels et avec infiniment plus d’éclat encore, puisque leur classe étant supérieure à la matière, les lois en sont beaucoup plus étendues. Ne doutons donc plus que la nature spirituelle et divine de l’homme ne l’ait destinée autrefois à disposer efficacement des êtres d’opération qui lui étaient subordonnés, comme il dispose aujourd’hui matériellement des êtres élémentaires dont l’action est peinte dans l’arc-en-ciel ; et comment pourrions-nous en douter, puisque nous voyons que dans cette seule observation physique où l’action des êtres élémentaires lui est en quelque sorte assujettie, il est directement en aspect de l’être vivifiant de la nature, qu’il reçoit immédiatement les influences de ce soleil matériel, qui, par son opération de vie active sur l’univers, est véritablement le dieu des corps et que, se trouvant occuper la place intermédiaire entre cet astre et les sept actions qui en proviennent, il est comme son organe et comme un agent dépositaire de ses vertus. N’est-ce pas là nous retracer sensiblement l’ancien état du premier homme qui, émané et émancipé pour manifester la gloire et la justice du Créateur, était en correspondance directe avec le soleil divin et éternel et qui occupait en effet la place intermédiaire entre cette divinité et les esprits temporels qu’elle avait soumis à sa puissance afin que, disposant de leur actions, il pût en faire usage selon les droits de son libre arbitre et pour molester les êtres prévaricateurs. Rien ne prouvera mieux la justesse et la réalité de cette observation, que les nombres mêmes attachés aux agents physiques dont le concours produit les lois du phénomène élémentaire que nous examinons. Le soleil corporel est seul et unique : c’est de lui que provient la réaction nécessaire à la vie de tous les corps ; ce qui est insuffisant pour nous apprendre que nul autre nombre ne lui convient mieux que l’unité, quoique toutefois cette unité temporelle ne soit qu’un assemblage ; et dès lors n’ait aucun des droits appartenant à l’unité simple et divine, qui est de ne pouvoir se dissoudre et d’avoir éternellement la vie en soi. Mais cet être étant unique dans son action temporelle, nous représente parfaitement l’unité de l’action et pour lors en doit prendre le signe temporel qui est l’unité dans le nombre.

 


L’homme placé entre le soleil élémentaire et l’arc-en-ciel et ayant la faculté de faire mouvoir avec soi ce même arc-en-ciel, nous représente par ce pouvoir actif le nombre de l’action même de l’unité qui est quaternaire, et en effet, si l’on joint dans l’homme cette faculté active aux trois facultés passives qu’il a de commun avec tous les animaux et tous les être matériels qui habitent avec lui, on ne pourra se dispenser de lui attribuer le nombre quatre, d’autant qu’il est indiqué par l’essence même de l’homme, aussi bien que par son action. Nous apprendrons donc par là que vraiment le nombre spirituel que l’homme reçut lors de son émancipation du cercle divin, était le même nombre quaternaire dont il conserve encore aujourd’hui temporellement l’empreinte et les vestiges ; nous apprendrons, dis-je, qu’il avait été choisi pour être l’agent de l’action divine même, ou de cette unité indivisible, dont le quaternaire est la première puissance. Je ne parle point du nombre septenaire des couleurs qui composent l’arc-en-ciel, en ayant traité précédemment et ayant fait remarquer le rapport réel qui se trouve entre ce nombre d’actions matériel et celui des sept agents principaux spirituels, préposés pour soutenir l’univers et pour être les ministres de l’homme ; mais je ferai remarquer que ces trois nombres, un, quatre, sept , que nous reconnaissons si clairement dans le phénomène sensible que nous observons, sont réellement l’expression et le signe des trois puissances éternelles dont les résultats ternaires se manifestent universellement et dont j’ai montré simplement les vertus dans les discours qui ont précédé celui-ci. Leur addition rend douze ou trois , pour nous faire voir que les trois puissances divines elles-mêmes se sont employées pour la défense des lois éternelles du Créateur et pour la punition de ses ennemis : car de même que dans l’arc-en-ciel on voit les nuages se séparer de la partie lumineuse et insensiblement se dissoudre en présence des trois êtres temporels-corporels ; savoir : le soleil, l’homme et les sept circonférences, de même que les ennemis du Créateur ont été bannis du cercle divin et voient leurs iniquités se consumer et s’anéantir en présence des trois nombres puissants, un, quatre, sept, préposés pour les combattre, les diviser et détruire l’abomination de leurs criminelles pensées.

 


Si l’on s’arrêtait à cette idée que dans le fait, l’homme n’étant pour rien dans la production de l’arc-en-ciel, ne devrait pas être compté dans les nombres par lesquels j’en ai voulu démontrer les lois ; il faudrait se souvenir que l’homme spirituel ou le mineur, n’a pas eu en plus d’influence dans la production des choses corporelles-universelles de la création, que l’homme temporel n’en a dans les causes qui produisent l’arc-en-ciel, et cependant on ne peut se dispenser de compter sa puissance parmi celles qui ont été et qui sont encore employées par le Créateur pour l’exécution de ses décrets dans cette grande époque ; c’est pourquoi lui voyant tenir la place temporellement, par rapport à l’arc-en-ciel, et lui voyant une action corporelle parmi celles qui sont relatives à l’arc-en-ciel, se souvenant toutefois qu’elle ne se compte que par allusion avec celle qu’elle représente et que l’homme n’étant ici-bas que la figure la plus imparfaite de ce qu’il était avant qu’il y fut descendu, on ne doit pas exiger dans la copie la même activité ni la même vie que dans le modèle ; d’autant que l’arc-en-ciel lui-même et le soleil élémentaire, ne sont que des êtres morts en comparaison de ceux avec qui l’homme pouvait agir de concert avant qu’il fût souillé. Nous ne devons pas attendre ici-bas la réalité des actions divines, qu’au préalable nous ne nous soyons purgés de toutes nos iniquités ; mais nous pouvons y chercher des rapports et soyons assurés d’en trouver sans nombre et à tous nos pas : car la nature entière n’existe que pour nous en offrir.

 


Tous ceux que j’ai fait apercevoir jusqu’à présent, entre les lois de l’arc-en-ciel et les lois données à l’homme par les droits de son origine spirituelle-divine, sont trop nombreux, trop frappants pour qu’on puisse ne pas reconnaître le même ordre, le même emploi et la même destination dans les agents de l’une et de l’autre classe. On ne peut s’empêcher d’y voir tout ce qui nous est enseigné sur la fonction glorieuse dont l’homme avait été chargé, sur les pouvoirs immenses qui lui furent donnés pour la remplir ; en un mot, sur la sublimité de sa nature qui le fit choisir par le Créateur de préférence à tout être pour lui servir de médiateur universel et lui soumettre tous ses ennemis. On ne peut donc nier que cet emblème sensible et matériel que les rayons du soleil nous tracent par leur réfraction, ne porte un indice réel de l’ancienne dignité de l’homme, en ce que dans la place qu’il y peut occuper et dans l’action qu’il y peut exercer, il annonce vraiment qu’il était destiné à jouir de la lumière du principe éternel et à être à la fois son premier agent et le roi de l’univers.
Mais autant il est glorieux pour lui d’apercevoir encore, au milieu des ténèbres qu’il habite, les traces d’une aussi noble destination, autant il est douloureux d’être obligé d’avouer que ce ne sont que des traces, et même si imparfaites, qu’elles lui laissent voir avec une triste évidence la grandeur des biens qu’il a perdus. Dans le fait, il est réellement emprisonné dans la partie nébuleuse sur laquelle l’arc-en-ciel spirituel imprime le nombre septenaire des circonférences visuelles et puissantes préposées pour lier et enchaîner les prévaricateurs, il ne peut, comme les prévaricateurs qui l’ont précédé dans le crime, faire mouvoir les couleurs brillantes et lumineuses de ces immenses circonférences, et est assujetti comme eux à en subir les rigoureux effets sans en connaître ni la source ni la voie ni la main qui les opère ; au lieu d’occuper, comme dans son origine d’émanation divine et d’émancipation temporelle, cette place glorieuse ou ce poste intermédiaire entre le soleil divin et les sept circonférences de son action spirituelle, il est réduit comme tous les êtres rebelles à éprouver tantôt l’intempérie et l’obscurité des ténèbres les plus épaisses, tantôt la rigueur d’un froid insupportable, tantôt l’ardeur d’une chaleur brûlante et d’autant plus importune, qu’en quelque endroit que l’homme que l’homme se cache, il ne peut éviter le feu qui la communique.

 


Condamné à être en butte à la douleur et à l’amertume au lieu de la paix et des délices qu’il aurait goûter, il n’a d’autre flambeau que l’incertitude, d’autre aliment que l’erreur ou cette terre de malédiction qui fut donné jadis au serpent pour sa nourriture ; il n’a enfin d’autre société que ce serpent même ou cet ennemi terrible qui le poursuit à tous ses pas comme l’otage du traité criminel qu’ils ont fait ensemble et qui, n’ayant pour loi et pour arbitres qu’une justice de mort et des ministres destructeurs, transforme tous les otages en autant de victimes. Voilà quel est ce feu rongeur qui nous dévore malgré nous, pendant que nous traversons ce malheureux théâtre de pleurs et d’expiations. Voilà ce feu d’épreuves sur lequel nous devons être assis pendant le temps et qui doit dégager douloureusement pour nous toutes les substances étrangères dont nous avons laissé souillé notre essence : feu cruel, épouvantable, mais contre lequel nous ne pourrions sans injustice élever aucun murmure, puisque nous l’avons allumé nous-mêmes ; voilà en un mot la véritable situation spirituelle de l’homme, et voilà ce que nous indique par rapport à lui la partie nébuleuse et obscure de l’atmosphère sur laquelle s’imprime l’arc-en-ciel élémentaire : car il est sans aucun doute, relativement à la divinité et à l’esprit de lumière, ce que les nuages ténébreux sont relativement au soleil corporel et à l’arc-en-ciel qui en provient.
Que l’homme se console cependant et qu’il ne se laisse point aller au désespoir. Si les lois de la nature, que nous avons observées dans l’arc-en-ciel élémentaire, nous ont tracé le tableau de notre ancien état et celui de notre misère actuelle, elles peuvent aussi nous tracer celui des voies de notre réconciliation et de la gloire future à laquelle nous avons le droit d’aspirer. Autrement la nature élémentaire ne serait plus un hiéroglyphe universel.

 


Remarquons donc que l’homme, qui se trouverait placé dans la partie de la terre où les nuages se seraient rassemblés et qui par cette raison n’apercevrait point les sept circonférences colorées que le soleil imprimerait sur eux, pourrait néanmoins traverser cette partie ténébreuse et marcher jusqu’au point de laisser derrière lui ces mêmes circonférences qu’il ne pouvait apercevoir auparavant et, par conséquent, reprendre cette même place intermédiaire entre le soleil et l’arc-en-ciel, qui n’est que l’emblème de celle qui devait occuper spirituellement, en supposant toutefois que le nuage et l’arc-en-ciel corporel durasse assez pour lui en donner le temps : et même, quand cela n’arriverait pas, la possibilité de la loi que j’expose n’en serait point détruite ; bien plus cet emblème en serait beaucoup sublime encore puisque si l’arc-en-ciel et les nuages disparaissaient pour laisser dominer le soleil dans toute sa pureté, ce serait nous retracer une image corporelle et sensible de l’entière domination de l’ tre unique et éternel. Remarquons en second lieu, que l’homme ne parviendrait point à ce terme intermédiaire entre le soleil et l’arc-en-ciel, sans avoir passé sous ces mêmes circonférences septénaires dont l’usage et la vue lui étaient interdites pendant qu’il était sous le nuage : par là nous aurons une preuve sensible des pas que l’homme a la liberté de faire pour tendre à sa régénération divine, en abjurant ces ténèbres impures qui lui dérobent la lumière de son flambeau naturel ; et en se portant avec courage vers l’astre bienfaisant qui ne tend qu’à réchauffer par ses vertus tous les êtres qui le désirent ; nous verrons que si l’homme ne fait pas le premier pas, il espérerait en vain atteindre un terme, comme il ne jouirait pas de la vue du soleil élémentaire tant qu’il resterait sous le nuage : nous verrons enfin, si la route par laquelle il doit passer nécessairement pour recouvrer cette lumière temporelle n’est pas le signe emblématique et matériel de l’être septenaire-spirituel dont les opérations invisibles sont la vie indispensable qui lui est accordée pour son expiation et pour sa purification, de même que celui des sept régions temporelles qu’il est obligé de parcourir avant d’arriver à sa réintégration parfaite dans la demeure des justes et avant de pouvoir jouir de la lumière divine
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Historique de l’Eglise Gnostique Catholique 17 juillet, 2009

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Historique de l’Eglise Gnostique Catholique

 

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Par T. Apiryon

Traduction : Spartakus FreeMann – 2000

Jules Doinel et l’Eglise Gnostique de France

Le fondateur de l’Eglise Gnostique est Jules-Benoît Stanislas Doinel du Val-Michel (1842-1903). Doinel était un bibliothécaire, franc-maçon membre du Grand-Orient, un antiquaire et un spirite pratiquant. Des ses fréquents essais pour communiquer avec les esprits, il fut confronté avec une vision récurrente de la Divinité Féminine sous divers aspects. Peu à peu, il développa la conviction que sa destinée était de participer à la restauration au sein de la religion de l’aspect féminin de la divinité.

En 1888, alors qu’il travaillait comme archiviste pour la bibliothèque d’Orléans, il découvrit une charte originale datée de 1022 qui avait été écrite par Canon Stéphane d’Orléans, un maître d’école et disciple des Cathares. Stéphane sera brûlé plus tard la même année pour hérésie.

Doinel fut fasciné par le drame des Cathares et leur héroïque et tragique résistance contre les forces du Pape. Il commença à étudier leurs doctrines et celles de leurs prédécesseurs, les Bogomiles, les Pauliciens, les Manichéens et les Gnostiques. Durant l’avancement de ses études, il devint de plus en plus convaincu que la Gnose était la seule vraie religion derrière la Franc-Maçonnerie.

Une nuit de 1888, « l’Eon Jésus » apparu à Doinel dans une vision et le chargea d’établir une nouvelle Eglise. Il consacra spirituellement Doinel en tant qu’ »Evêque de Montségur et Primat de l’Albigeois ». Après cette vision de l’Eon Jésus, Doinel commença à essayer d’entrer en contact avec des esprits cathares et gnostiques durant des séances dans le salon de Maria de Mariategui, Lady Caithness, Duchesse de Medina Pomar.

Doinel a longtemps été associé avec Lady Caithness, qui était une des figures en vue des cercles spirites français de l’époque, une disciple d’Anne Kingsford et dirigeant de la branche française de la Société Théosophique. Elle se considérait comme une réincarnation de Marie Stuart; et une communication spirite en 1881 lui dévoila une révolution dans le domaine religieux qui résulterait en un « Nouvel Age de Notre Dame de l’Esprit Saint ». Les séances gnostiques de Doinel étaient suivies par d’autres notoriétés de l’occultisme provenant de sectes diverses; en ce compris l’Abbé Roca, un ancien prêtre catholique et associé de Stanislas de Guaita et d’Oswald Wirth. Les communications spirites étaient généralement reçues au moyen d’un pendule tenu par Lady Caithness au-dessus d’un tableau lettré.

Lors d’une séance, Doinel reçu la communication suivante :

« Je m’adresse à toi car tu es mon ami, mon serviteur et le prélat de mon Eglise Albigeoise. Je suis exilé du Plérôme, et je suis celui que Valentin nomma Sophia-Achamôth. Je suis celui que Simon le Magicien appela Hélène-Ennoia; car je suis l’Eternel Androgyne. Jésus est le Verbe de Dieu; je suis la Pensée de Dieu. Un jour, je remonterai vers mon Père, mais j’ai besoin d’aide pour ce faire; la supplication de mon Frère Jésus est requise pour intercéder pour moi. Seul l’Infini peut rédempter l’Infini, et seul Dieu est capable de rédempter Dieu. Ecoutes bien : L’Un a produit d’abord l’Un, ensuite Un. Et les Trois ne sont qu’Un : le Père, le Verbe et la Pensée. Etablis mon Eglise Gnostique. Le Démiurge sera impuissant contre elle. Reçois le Paraclet. »

Durant d’autres séances, Stéphane d’Orléans et un certain Guilhabert de Castres, un Evêque Cathare de Toulouse du XIIème siècle, qui fut martyrisé à Montségur, furent contactés. A une autre séance, en septembre 1889, le « Très Haut Synode des Evèques du Paraclet », constitué par 40 Evêques Cathares, se manifesta et donna le nom de ses membres, qui furent contrôlés et prouvés corrects dans les registres de la Bibliothèque Nationale. Le chef du Synode était Guilhabert de Castres, qui s’adressa à Doinel et lui instruisit de reconstituer et d’enseigner la doctrine gnostique en fondant une Assemblée du Paraclet qui sera appelée Eglise Gnostique. Hélène-Ennoia devait l’assister et ils devaient être spirituellement mariés. L’assemblée était composée de Parfaits et de Parfaites et pris comme livre saint le Quatrième Evangile, celui de Saint Jean. L’Eglise devait être administrée par des Evêques masculins et des Sophias féminines qui devaient être élus et consacrés suivant le Rite Gnostique.

Doinel proclama l’année 1890 début de l’ »Ere de la Gnose Restaurée ». Il assumait la charge de Patriarche de l’Eglise Gnostique sous le nom mystique de Valentin II, en hommage à Valentin, le fondateur de l’Ecole Gnostique du Vème siècle. Il consacra un certain nombre d’évêques qui choisirent tous un nom mystique précédé par la lettre grecque Tau qui représente la Croix grecque ou l’Ankh égyptien.

Parmi les premiers évêques et sophias consacrés il y eut : Gérard d’Encausse, connu aussi comme « Papus » (1865-1916), Tau Vincent, Evêque de Toulouse (plus tard en 1890, Doinel rejoignit l’Ordre Martiniste de Papus et en devint peu à peu un membre du Conseil Suprême); Paul Sédir (Yvon Le Loup, 1871-1926) en tant que Tau Paul, Co-adjutateur de Toulouse; Lucien Chamuel (Lucien Mauchel), Tau Bardesane, Evêque de La Rochelle et Saintes; Louis-Sophrone Fugairon (n. 1846) en tant que Tau Sophronius, Evêque de Béziers; Albert Jounet (1863-1923), Tau Théodote, Evêque d’Avignon; Marie Chauvel de Chauvigny (1842-1927), Esclarmonde, Sophia de Varsovie; et Léonce-Eugène Joseph Fabre des Essarts (1848-1917), Tau Synesius, Evêque de Bordeaux.

L’Eglise était constituée en trois niveaux : le Haut Clergé, le Bas Clergé et les Croyants. Le Haut Clergé était constitué par les hommes/femmes évêques/sophias, qui étaient responsables de l’administration de l’Eglise. Ils étaient élus par leur congrégation et plus tard confirmés dans leurs charges par le patriarche. Le Bas Clergé était constitué par les diacres hommes et femmes qui agissaient sous la direction des évêques et sophias et étaient responsables de conduire les activités journalières de l’Eglise. Les Croyants, ou membres lais de l’Eglise, étaient appelés Parfaits ou Parfaites, désignations qui dérivent du Catharisme. Cependant, au sein de l’Eglise de Doinel, le terme de Parfait n’était pas compris dans son sens cathare comme celui qui a pris des voeux stricts d’ascétisme, mais était interprété comme incluant les deux plus hautes divisions de la triple classification Valentinienne de la race humaine : les Pneumatiques et les Psychiques; mais excluant la plus basse division, les matérialistes Hyliques. Seuls les individus jugés d’une haute intelligence, raffinés et ouverts d’esprit étaient admis dans l’Eglise Gnostique de Doinel.

L’Eglise Gnostique de Doinel combinait la doctrine théologique de Simon le Magicien, de Valentin et de Marcus (un valentinien qui fut remarqué pour son développement des mystères des nombres et des lettres et du « mariage mystique ») avec des sacrements dérivés de l’Eglise Cathare et conférés lors de rituels qui étaient largement influencés par ceux de l’Eglise Catholique Romaine. Dans le même temps, l’Eglise Gnostique était sensée représenter un système de maçonnerie mystique.

En 1895, Jules Doinel abdiqua subitement en tant que Patriarche de l’Eglise Gnostique, abandonna ses charges dans sa loge maçonnique et se converti au catholicisme romain. Sous le pseudonyme de Jean Kostka, il attaqua l’Eglise Gnostique, la Maçonnerie et le Martinisme dans un livre intitulé « Lucifer Démasqué ». Pendant les deux ans qui suivirent, Doinel collabora avec Taxil à des articles dénonçant les organisations qui faisaient auparavant tant partie de sa vie. « Lucifer Démasqué » était lui-même un effort de collaboration, son style trahit la main de Taxil.

Encausse fit remarquer plus tard que Doinel avait manqué de « la nécessaire éducation scientifique pour expliquer sans problème les merveilles que le monde invisible avait jeté sur lui. » Ainsi, Doinel du faire face à un choix entre la conversion et la folie; et, dit Encausse, « Soyons heureux que le Patriarche de la Gnose ait choisi la première voie. »

La défection de Doinel fût un coup très dur pour l’Eglise Gnostique, mais elle réussit à survivre. L’intérim fut assumé par le Synode des Evêques et lors du Haut Synode de 1896, ils élisent un des leurs, Léonce-Eugène Fabre des Essarts, connu en tant que Tau Synesius, pour remplacer Doinel comme Patriarche.

Fabre des Essarts était un occultiste parisien, un poète symboliste et un des théoriciens de la Gnose et du Christianisme Esotérique. Lui et un autre évêque gnostique, Louis-Sophrone Fugairon (Tau Sophronius), un physicien et aussi un spécialiste des Cathares et des Templiers, entrèrent en collaboration en vue de continuer le développement de l’Eglise Gnostique. Ensemble, ils commencèrent par transformer l’enseignement de l’Eglise Gnostique d’un gnosticisme théologique vers une conception occultiste plus générale.

En 1899, deux ans après que Léo Taxil ait dévoilé son arnaque, Doinel commença à correspondre avec Fabre des Essarts. En 1900, ils demanda à être réconcilié avec l’Eglise Gnostique et sa réadmission comme évêque gnostique. Comme premier acte de consécration en tant que Patriarche de l’Eglise Gnostique, Fabre des Essarts re-consacra son ancien patriarche sous le nom de Tau Jules, évêque d’Alet et de Mirepoix.

En 1901, Fabre des Essarts consacra Jean Bricaud (1881-1934) , Tau Johannes, évêque de Lyon. Entre 1903 et 1910, il consacra 12 autres évêques gnostiques, dont Léon Champrenaud (1870-1925), Tau Théophane, évêque de Versailles; René Guenon (1886-1951), Tau Palingénius, évêque d’Alexandrie; et Patrice Genty (1883-1964), Tau Basilide.

Après la mort de Fabre des Essarts en 1917, le Patriarchat de l’Eglise Gnostique sera assumé par Léon Champrenaud (Tau Théophane). Champrenaud sera suivi par Patrice Genty en 1921 qui mettra l’Eglise Gnostique de France en sommeil en 1926 en faveur de l’Eglise Gnostique Universelle de Jean Bricaud.

L’Eglise Catholique Gnostique

Jean Bricaud a été élevé dans un séminaire catholique dans lequel il étudia pour devenir prêtre, mais il renonça à sa poursuite religieuse conventionnelle dès l’âge de 16 ans pour suivre la voie de l’occultisme mystique. Il s’impliqua dans divers mouvements chrétiens et rencontra Papus en 1899 pour entrer ensuite dans son ordre martiniste.

En 1907, sous les encouragements (si ce n’est sous la pression) de Papus, Bricaud rompit avec Fabre des Essarts pour fonder sa branche schismatique de l’Eglise Gnostique. Fugairon décida de rejoindre Bricaud. Le motif de base à ce schisme semble avoir été de créer une branche de l’Eglise Gnostique dont les structures et la doctrine auraient été plus proches de l’Eglise Catholique Romaine que de l’Eglise Gnostique (par exemple, elle incluait un ordre de prêtrise et un baptême); et qui aurait été plus liée à l’Ordre Martiniste. Doinel était un Martiniste, Bricaud était un Martiniste, mais Fabre des Essarts ne l’était pas. Bricaud, Fugairon et Encausse, dans une première tentative, nommèrent leur branche de l’Eglise « l’Eglise Catholique Gnostique ». On l’annonça comme la fusion de trois églises ‘gnostiques’ existantes en France : l’Eglise Gnostique de Doinel, l’Eglise Carmélite de Vintras et l’Eglise Johannite de Fabré-Palaprat. En février 1908, le synode épiscopal de l’Eglise Catholique Gnostique se réunit et élit Bricaud comme Patriarche sous le nom de Jean II. Après 1907, en vue de clairement distinguer les deux branches de l’Eglise Gnostique, celle de Fabre des Essarts fût connue sous le nom d’Eglise Gnostique de France.

La Conférence de Paris de 1908

Le 24 juin 1908, Encausse organisa la Conférence Maçonnique et Spiritualiste Internationale à Paris, au cours de laquelle il reçu, sans contrepartie en argent, une patente de Théodore Reuss (Merlin Peregrinus, 1855-1923), chef de l’O.T.O., pour établir un « Suprême Grand Conseil Général des Rites Unifiés de l’Ancienne et Primitive Maçonnerie pour le Grand Orient de France et ses dépendances. Dans la même année, l’Eglise Catholique Gnostique vit sont nom changer en Eglise Gnostique Universelle.

Plus ou moins 4 ans plus tard, deux documents importants furent publiés : le Manifeste de la M.M.M. (section britannique de l’O.T.O.), qui incluait l’Eglise Catholique Gnostique dans la liste des organisations dont la sagesse et les connaissances sont concentrées au sein de l’O.T.O.; et l’Edition du Jubilée de l’Oriflamme, l’organe officiel de l’O.T.O. de Reuss, qui annonca que l’Initiation, le journal d’Encausse, était l’Organe officiel pour les Rites de Memphis-Misraim et de l’O.T.O. en France.

Les détails précis de la transaction de la conférence de Paris de 1908 sont inconnus, mais en se basant sur le cours des événements qui suivirent, la conclusion logique est qu’Encausse et Reuss s’engagèrent dans un échange fraternel d’autorités : Reuss recevant l’autorité primatiale et épiscopale dans l’Eglise Catholique Gnostique et Encausse recevant l’autorité dans les Rites de Memphis-Misraim.

En 1911, Bricaud, Fugairon et Encausse déclarèrent que l’Eglise Gnostique Universelle est l’Eglise officielle du Martinisme.

L’E.G.U. et la Succession d’Antioche

Après avoir assumé la Patriarchat de l’Eglise Gnostique Universelle, Bricaud devint l’ami de l’évêque Louis-Marie-François Giraud (Mgr. François, mort en 1951), un ancien moine trappiste qui faisait remonter sa filiation épiscopale à Joseph René Vilatte (Mar Timotheos, 1854-1929). Vilatte était un parisien qui avait dans sa jeunesse émigré en Amérique. C’était un enthousiaste religieux mais incapable de trouver satisfaction au sein des structures de l’Eglise Catholique; ainsi, en Amérique, il commença sa quête pour trouver un environnement plus adapté à sa personnalité et à ses ambitions. Il passa de secte en secte, servant pour un temps comme ministre congrégationiste, étant plus tard ordonné prêtre au sein de la schismatique secte des « Vieux Catholiques ». Il obtint la consécration épiscopale en 1892 des mains de l’évêque Francisco-Xavier Alvarez (Mar Julius I), évêque de l’Eglise syrienne Jacobite Orthodoxe et Métropolitain de l’Eglise Catholique Indépendante de Ceylan, Goa et des Indes, qui avait à son tour reçu la consécration des mains d’Ignatius Pierre III, « Pierre l’Humble », Patriarche Jacobite Orthodoxe d’Antioche. Vilatte consacra Paolo Miraglia-Gulotti en 1900; Gulotti consacra Jules Houssaye (ou Hussay, 1844-1912), Houssaye consacra Loui-Marie-François Giraud en 1911; et Giraud consacra Jean Bricaud le 21 Juillet 1913.

Cette consécration est importante pour l’Eglise de Bricaud car elle fournit une succession apostolique et épiscopale valide et documentée, qui avait été reconnue par l’Eglise Catholique Romaine comme valide mais illicite (spirituellement efficace mais contraire à la politique de l’Eglise et non sanctionnée par elle). La succession apostolique fut largement perçue comme reflétant une transmission de l’autorité spirituelle véritable dans le courant Chrétien, remontant jusqu’à Saint Pierre; et même plus loin à Melchizedech, le mythique prêtre-roi de Salem qui servait en tant que prêtre le Patriarche hébreux Abraham. Cela fournit à Bricaud et à ses successeurs l’autorité apostolique d’administrer les sacrements chrétiens; ce qui était important car beaucoup des membres de l’Ordre Martiniste étaient de la foi catholique, mais comme membres d’une société secrète, ils étaient sujets à l’excommunication si leur affiliation martiniste venait à se savoir. L’E.G.U. offrait donc une assurance continue de salut aux chrétiens catholiques qui étaient martinistes ou désiraient devenir martinistes.

Après la mort d’Encausse en 1916, l’Ordre Martiniste et la section française des Rites de Memphis-Misraim et de l’O.T.O. furent chapeautés brièvement par Charles Henri Détré (Teder). Détré mourut en 1918 et Bricaud lui succéda.

Le 15 mai 1918, Bricaud consacra Victor Blanchard (Tau Targelius) qui avait été le secrétaire d’Encausse et Détré. Le 18 septembre 1919, Bricaud re-consacra Théodore Reuss sub conditione (ce terme se réfère à une consécration qui a pour but de remédier à quelque vice d’une consécration antérieure), lui donnant du même coup la succession d’Antioche et le nomma Légat Gnostique de l’E.G.U. pour la Suisse.

Des désaccords apparurent très vite entre Bricaud et Blanchard quant à la direction de l’Ordre Martiniste, qui tournèrent très vite en une hostilité mutuelle. Blanchard a même rompu avec Bricaud pour former son propre Ordre Martiniste schismatique qui sera connu comme « Ordre Matiniste et Synarchique ». La branche de Blanchard participa plus tard à la formation du conseil oecuménique des rites occultes connu sous les initiales de F.U.D.O.S.I., duquel l’AMORC de Spencer Lewis tira beaucoup de son autorité. A son tour, la branche de Bricaud sous la direction de son successeur, Constant Chevillon, se joignit à Swinburne Clymer, l’adversaire rosicrucien de Lewis, pour former un conseil rival appelé F.U.D.O.F.S.I.

Blanchard continua en consacrant au moins cinq autres évêques gnostiques sous sa propre autorité, dont Charles Arthur Horwath, qui re-consacra plus tard, sub conditione, Patrice Genty (Tau Basilide), le dernier patriarche de l’Eglise Gnostique de France qui avait été consacré auparavant dans la succession spirituelle de Doinel par Fabre des Essarts; et Roger Ménard (Tau Eon II), qui consacra alors Robert Ambelain (Tau Robert) en 1946. Ambelain constitua sa propre Eglise gnostique, l’Eglise Gnostique Apostolique, en 1953, l’année de la mort de Blanchard. Ambelain consacra au moins 10 évêques gnostiques au sein de son Eglise : dont Pedro Freire (Tau Pierre), Primat du Brésil, André Mauer (Tau Andreas), Primat de Franche-Comté et Roger Pmmery (Tau Jean), évêque Titulaire de Macheronte.

Bricaud mourut le 21 février 1934, et Constant Chevillon (Tau Harmonius) lui succéda en tant que patriarche de l’E.G.U. et Grand Maître de l’Ordre Martiniste. Chevillon avait été consacré par Giraud en 1936 et il consacra alors un certain nombre d’évêques lui-même, dont Clymer en 1938 et Arnold Krumm-Heller (fondateur de la Fraternitas Rosicruciana Antiqua et représentant de l’O.T.O. de Reuss pour l’Amérique du Sud) en 1939. Durant la Seconde Guerre Mondiale, le gouvernement fantoche de la France occupée de Vichy supprima toutes les sociétés secrètes et le 15 avril 1942, l’E.G.U. fut officiellement dissoute par le gouvernement. Le 22 mars 1944, Chevillon fut brutalement assassiné par les miliciens de Vichy.

L’E.G.U. fût ravivée après la guerre; et en 1945, Tau Renatus fut élu comme successeur du martyr Chevillon. A Renatus succédera Charles-Henry Dupont (Tau Charles-Henry) en 1948 qui l’abandonna en 1960 en faveur de Robert Ambelain (Tau Jean III) qui avait acquis une grande proéminence du fait de ses écrits. L’E.G.U. fut alors mise en sommeil par Ambelain au profit de sa propre Eglise, l’E.G.A.

En 1969, Tau Jean III aura comme successeur à la tête de l’E.G.A., André Mauer (Tau Andreas), à qui succédera Pedro Freire (Tau Pierre), primat de l’Amérique du Sud, en 1970.La même année, Freire avait été re-consacré comme Mar Petrus-Johannes XIII, patriarche de l’Eglise Gnostique Catholique Apostolique par Dom Antidio Vargas de l’Eglise Catholique Apostolique brésilienne. A sa mort en 1978, Freire aura comme successeur Edmond Fieschi (Tau Sialul I) qui abdiqua en faveur de son coadjuteur Fermin Vale-Amesti (Tau Valentius III) qui refusa de reprendre sa charge; Mettant ainsi l’Eglise Gnostique Apostolique ainsi que l’Eglise Gnostique Catholique Apostolique en repos en tant qu’organisation internationale. Une branche autocéphale nord-américaine de l’Eglise Gnostique Catholique Apostolique survit sous la direction du Primat Roger Saint-Victor Hérard (Tau Charles) qui consacra un certain nombre d’évêques mais mourut en 1989 sans se donner de successeur. Plusieurs des évêques d’Hérard sont toujours actifs aux U.S.A.

L’E.G.C.

Aleister Crowley (1875-1947) entra en 1910 dans l’O.T.O. de Reuss en tant que VII (à ce moment, n’importe quel 33 REAA pouvait entrer dans l’O.T.O. comme VII). Le 1er juin 1912, Crowley fût reçu par Reuss IX et reçu sa désignation comme Grand Maître National X pour l’Irlande, Iona et les Iles Britanniques. L’année suivante, il publia le Manifeste de la MMM qui incluait l’Eglise Gnostique Catholique dans la liste des organisations dont la sagesse et les connaissances sont inclues dans l’O.T.O.

Crowley a également écrit le Liber XV, Gnostic Mass, en 1913. Le Liber XV fût publié la première fois en 1918 dans l’International, et encore en 1919 dans The Equinox, Vol. III, N. 1 (The Blue Equinox), finalement en 1929/30 dans l’appendice VI de Magick en Théorie et en Pratique. Le nom latin Ecclesia Gnostica Catholica fût créé par Crowley en 1913 quand il écrivit le Liber XV.

Dans le Chapitre 73 des Confessions d’Aleister Crowley, il dit qu’il écrivit la Gnostic Mass en tant que « Rituel de l’Eglise Gnostique Catholique » qu’il prépara pour « l’utilisation par l’O.T.O., de la cérémonie centrale de célébrations publiques ou privées, correspondant à la Messe de l’Eglise Catholique Romaine. » Il est évident que Crowley voyait l’E.G.C. et l’O.T.O. comme inséparables; particulièrement par rapport au IX de l’OTO dans lequel Crowley avait été intié l’année avant qu’il n’écrive Gnostic Mass et qui est appelé « le Souverain Sanctuaire de la Gnose. »

En 1918, Reuss traduisit la Gnostic Mass de Crowley en allemand, en faisant une série de modifications éditoriales et la publia sous les auspices de l’OTO. Dans sa publication de la Gnostic Mass, Reuss donna Bricaud comme le Souverain Patriarche de l’Eglise Gnostique Universelle et lui-même comme Légat pour la Suisse pour l’EGU et Souverain Patriarche et Primat de Die Gnostische Katolische Kirche, un titre qu’il peut avoir reçu lors de la conférence de Paris de 1908.

 http://www.morgane.org/willy.htm

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L’anarchie : une utopie maçonnique ? 14 juin, 2009

Posté par hiram3330 dans : Bleu,Chaine d'union,Recherches & Reflexions , ajouter un commentaire

L’anarchie : une utopie maçonnique ?

 

 

« La liberté comme base, l’égalité comme moyen, la fraternité comme but« .

Ricardo Mella in « El idéal anarquista »

V... M...,

 

Avant de commencer, V... M..., permettez-moi un avertissement (pré)liminaire : mécréant en raison, mais pas en cœur, je n’ai aucun respect pour les idées, pas même les miennes ! Mon propos, ce midi, à certains égards, pourra être « jugé » outrancier, provocateur… et il est vrai qu’il se veut… perturbateur et, sinon pertinent, du moins… impertinent, non pour démontrer mais pour… montrer que l’on peut voir autrement de soi-disant évidences et que l’on peut aussi voir des… non-évidences !

 

*

* *

 

Notre très illustre F... Léo Campion avait coutume de dire que : « Si les Maçons anarchistes sont une infime minorité, la vocation libertaire de la Maçonnerie est indéniable (…) elle est la seule association à laquelle puisse adhérer celui qui n’adhère à rien ».

Les Maçons anarchistes… une infime minorité ? rien de surprenant car nous savons tous que les anarchistes ne sont pas un sur cent, ce qui ne les empêche pas… d’exister. Mais, au fait, est-ce que les maçon(ne)s sont plus qu’un sur cent ? et n’existent-ils-elles pas pour autant ?

Je ne reviendrai pas sur ce point historique curieux, bien mis en évidence par notre F... Léo Campion dans son excellent ouvrage « Le drapeau noir, l’équerre et le compas », à savoir que TOU(TE)S les grands noms de l’anarchisme ont été… maçons alors que, au XIXème siècle, aucun d’entre eux-elles n’a été membre de la Charbonnerie quand tant de maçons s’étaient faits charbonniers.

Cette présence constante, et toujours d’actualité, d’anarchistes sur les colonnes des LL... pourrait laisser à penser que la véritable question, la question autant impertinente que pertinente, n’est pas de savoir comment peut-on être maçon(ne) ET anarchiste – à moins que cela ne soit anarchiste ET maçon(ne) – que : comment peut-on ne pas être maçon(ne) ET anarchiste – ou, là encore, anarchiste ET maçon(ne) -.

A une telle question, pour faire dans le « politically correct », de nombreux-euses maçon(ne)s, n’hésitent pas à parler d’une honteuse infiltration de la maçonnerie, à son corps défendant, par de vilains et méchants anarchistes, ce qui, au passage, n’est pas flatteur quant à l’intelligence des maçons infiltrés et fort peu « gentil » à l’égard du Tuileur, du Couvreur et autre F\ terrible.

Ainsi, la F... M... ne serait qu’une sorte de maison de tolérance à l’égard de ces squatters que sont les anarchistes. Une maison, sorte de club de débats, d’échanges – ou d’ébats… échangistes ? – qui, justement parce qu’elle est tolérante, se refuserait à faire appel à la force publique – alors qu’elle compte bon nombre de ses représentants sur ses colonnes ! -, pour chasser de son sein ces « vipères lubriques » que sont les anarchistes. A moins que, dans la tradition libertine du XVIIIème siècle, elle soit un lieu d’amoralité où les élites bien pensantes se plairaient à s’encanailler avec ces « voyous » que sont les anarchistes !…

Et s’il en était autrement ?

 

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V... M...,, avant de nous interroger sur l’éventuelle similitude entre le projet des maçon(ne)s et celui des anarchistes, rappelons brièvement comment les maçon(ne)s s’organisent pour réaliser leur projet.

Sur le frontispice du portail de la F...M... belge on peut lire que le maçon est un homme (ou une femme) qui a la tête dans les nuages, l’amour dans le cœur, mais les pieds bien sur terre. Je reviendrai sur cette « définition » pour rappeler d’abord que, selon l’acception reprise dans les Constitutions d’Anderson, un maçon est un homme (au sens générique d’être humain) libre dans une loge libre. Il en résulte qu’une obédience (ou « ordre »)est une fédération de loges libres et que la F... M... universelle est une « république » universelle de loges et de maçon(ne)s libres.

Association, associationnisme, fédération et fédéralisme… ne sont-ce point là, si l’on s’en réfère aux FF... Michel Bakounine, Pierre Kropotkine et Pierre-Joseph Proudhon des modes relationnels et organisationnels… anarchiques ?

Les maçon(ne)s élisent des… officiers qui ne sont pas des « gouvernants », des « mandataires », des « représentants » mais des pairs qui, conformément au mandat impératif, révocable et « tournant » qui les a désignés et dont ils doivent rendre… compte, ont la… charge de tenir certains offices, d’exécuter certaines « missions » dans l’intérêt de cette communauté maçonnique qu’est la L....

Ces Officiers, s’ils sont détenteurs d’autorité (au sens d’aptitude à attirer le respect, l’estime, la confiance en raison des connaissances acquises et de la « sagesse » retirée) n’ont point pour autant de… pouvoir sur leurs pairs. Ne peut-on voir en ces Officiers les délégué(e)s de l’Internationale libertaire « jurassienne », les « élu(e)s » des Communard(e)s ou, de nos jours, de la C.N.T. ?

Les maçons sont les amant(e)s passionné(e)s de la liberté de conscience au motif que c’est d’une conscience libre que naît l’humanité qu’ils-elles revendiquent ; ce faisant, ils ne professent d’autre interdiction que celle d’interdire ou d’œuvrer à interdire. En refusant autant l’intolérant que l’intolérable les maçons, comme ces étudiants qui, en 1968, décoraient la Sorbonne du drapeau noir de leur révolte, ne découvrent-ils pas la mer sous le pavé mosaïque que d’autre jettent dans la marre pour condamner au trouble de l’aveuglement la clarté d’une conscience libre.

Libres de conscience, les maçon(ne)s sont adogmatiques [du moins celles et ceux qui assument leur liberté dans… l'irrégularité !] : qui pourrait dire que l’anarchisme est dogmatique quand c’est au nom du dogme d’une nouvelle religion – le marxisme – que les communistes libertaires ont été… excommuniés de l’Association Internationale des travailleurs ? Et y a-t-il courants de pensée plus traversé de discussions, de débats, de controverses que l’anarchisme mais, également, la F... M... ?

Les anarchistes, on le sait, n’ont pas leur langue dans la poche : leurs écrits et chansons en attestent. Mais y a-t-il beaucoup de lieux où, à l’instar du temple maçonnique, la liberté d’expression soit non seulement la règle mais aussi la pratique dès lors qu’elle est respectueuse de le personne (et non des idées) ?

Nous avons vu que les anarchistes comme les maçon(ne)s votent, notamment aux fins d’élection. Dans les LL..., comme dans la plupart des Obéd..., les votes se font à la majorité. Parce qu’ils-elles sont très attaché(e)s au respect de l’Autre, les maçon(ne)s, outre qu’ils-elles reconnaissent le « droit de retrait », de ce que je sais et j’ai pu vivre, n’ont jamais à cœur d’écraser une minorité d’un vote majoritaire surtout si cette minorité, même réduite à UN(E) seul(e) individu, fait preuve d’une opposition… véhémente, irréductible et s’efforcent toujours, comme les anarchistes, de rechercher et de trouver sinon l’unanimité, du moins le consensus.

En effet, les maçon(ne)s, comme les anarchistes, ne professent aucun dogme. Dès lors, débarrassé(e)s qu’ils-elles sont de leurs métaux, ils-elles ne détiennent aucune vérité et, humbles, modestes, « laborieux » considèrent que l’on peut et doit d’autant plus douter de tout, à commencer par un point de vue… majoritaire, que, minoritaires, ils-elles ont toujours eu à se battre pour se défendre contre l’oppression… majoritaire mais aussi pour faire avancer leurs idées de progrès contre une réaction, une inertie… majoritaires.

Société initiatique, la F...M... « recrute » par cooptation après enquêtes et passage sous le bandeau (que l’on peut qualifier sinon d’interrogatoire, du moins d’ »entretien d’embauche »), possède des signes, mots et attouchements de (re)connaissance, pratique le symbolisme, notamment des signes et des mots, détourne le vocabulaire usuel, crypte ses écrits… Certes, par souci… initiatique mais, pour certaines pratiques, par souci de… sécurité afin de se préserver de l’inquisition, voire de la répression dont elle a fait et continue de faire l’objet. N’est-ce point là un autre point commun avec ces sociétés secrètes qu’ont constitué et que constituent les anarchistes ?

A titre anecdotique pour ne pas dire humoristique, je rappellerai que les maçon(ne)s professent et revendiquent l’universalisme de leurs idées, de leurs principes, de leurs valeurs, de leur action… Et, pourtant, la F... M... n’est pas UNE mais… multiple, pour ne pas dire… divisée, voire même opposée. A l’instar de l’anarchisme dont les mauvaises langues disent qu’ils se divisent dès lors qu’il réunit trois individus pour pouvoir tenir ses réunions dans… une cabine téléphonique et, ainsi, faire l’économie d’une… L [Ô pardon, ma langue a fourché, d'un… local]. Questions de sensibilité, de sentiment, d’appréciation, de cheminement… Mais, comme il existe une véritable frontière entre le communisme libertaire et le communisme marxiste (avec tous ces avatars : stalinien, maoïste…), il existe une frontière entre la F\ M\ libertaire (Ô pardon, libéral) et la F... M... « régulière » (ou… « orthodoxe » !!!): celle de la Liberté, une Liberté qui se trace fraternellement dans l’égalité des gens.

Dans les deux cas, à l’origine, il y a nécessairement un choix, le choix de s’engager. Les engagements anarchique et maçonnique sont scellés par la liberté : la liberté du choix de l’individu d’abord qui, un jour, décide d’entrer en anarchisme ou en Franc-Maçonnerie – voire, en l’un ET en l’autre – ; la Liberté ensuite, avec un grand « L », constitutive à la fois de l’humaine condition : l’humanité par différenciation d’avec le non-humain, le pré-humain, l’a-humain, l’in-humain, du projet anarchique et maçonnique : la libération des individus et de la Société humaine et, enfin, de la fin anarchiste et maçonnique : l’achèvement de l’humanité, c’est-à-dire l’avènement d’une Société véritablement humaine.

Ayant la même devise – Liberté – Égalité – Fraternité -, Anarchisme et Franc-Maçonnerie n’ont d’autre culte que la Liberté. L’un comme l’autre sont donc sinon anti-dogmatiques, du moins a-dogmatiques. Et pourtant, des anarchistes et des Francs-Maçons, amants déchirés par l’illusion que l’un(e) trompe l’autre (?), font régulièrement dans le dogmatisme et, usant d’ukases, de lettres de cachets, de fatwas, de bulles…, condamnent et… excommunient l’autre sans se rendre compte que, ainsi, ils déchirent, trahissent, renient… leur engagement et, ainsi, piétinent, bafouent, molestent, violentent,… et même… assassinent la Liberté dont ils se réclament : leur liberté mais, aussi et surtout, celle de l’Autre, celle de l’humaine condition.

Je cite un illustre anarchiste et franc-maçon, Léo Campion :

« Aussi est-il regrettable que des anarchistes sectaires excommunient la Franc-Maçonnerie au nom d’un pseudo-dogme de l’Anarchie (comme si l’Anarchie était anti-tout alors quelles est à-tout) et que les Maçons sous-évolués excommunient l’Anarchie au nom d’un pseudo-dogme de la Maçonnerie (comme si la Maçonnerie n’était que tradition, alors qu’elle est tradition, dialogue et progrès). Ces attitudes sont d’autant moins admissibles qu’au contraire l’Anarchie comme la Franc-Maçonnerie, anti-dogmatiques par essence, sont l’une comme l’autre tout le contraire d’un dogme. Elles qui ont en commun le culte de la Liberté et le sens de la Fraternité, avec comme but l’émancipation de l’Homme ».

En fait, s’ils s’entendent sur le point de départ et sur la destination du chemin, Anarchistes et Francs-Maçons, en revanche, ne font pas nécessairement le même choix d’itinéraire, certains des premiers admettant le recours à l’action illégale, certains des seconds n’acceptant que l’action légale. Et cette différence, si elle est bien une ligne de partage de méthodes, n’est pas véritablement une fracture de valeurs, de principes, de philosophie, d’éthique et, in fine, un schisme de l’humanisme.

En effet, la légalité et l’illégalité sont des concepts et des réalités juridiques . Elles sont donc tributaires du Droit en vigueur et, en définitive, de l’Autorité en place qui a le pouvoir d’imposer SON Droit et donc SA conception de ce qui est licite et de ce qui est illicite, notions, elles, éthiques, philosophiques, politiques, voire idéologiques. En la matière, la relativité est donc… la règle : le « ici » et le « maintenant » ne peuvent appeler à aucun… dogmatisme quand on se donne tant soit peu la peine de lire – et comprendre – l’Histoire et, plus simplement, d’être attentif à l’actualité, être curieux des us et coutumes et que, de surcroît, on se revendique anar ou maçon !

Comment un anar ne pourrait pas se sentir chez lui dans une Loge où, par définition, le maçon y est un homme libre ? Et comment, un maçon, parce que, justement, homme libre dans sa loge, pourrait ne pas accepter un anar qui vient librement à sa loge ?

Pourtant, les arguments avancés par certain(e)s FF... et SS... pour considérer que les anarchistes n’ont pas leur place au sein de leurs loges . Je n’en citerai que deux :

ü      les anarchistes sont, par nature et dans leurs actes, des… illégalistes alors que, comme le recommandent les Constitutions d’Anderson, un(e) maçon(ne), homme libre mais aussi… de bonnes mœurs, de respecter la Loi ; outre que l’accusation d’illégalisme couvre, en fait, une imposture intellectuelle qui consiste, à l’instar de la C.I.A. et d’Europol, à assimiler anarchisme et terrorisme, je rappellerai que, c’est au nom même de leur engagement maçonnique, que des maçon(ne)s parfois, et plus souvent qu’on ne le pense, considérant qu’au-dessus des contingences politiques, économiques, sociales… des lois il y a des lois universelles, comme celles des Droits des humains, désobéissent à la Loi. Je donnerai trois exemple de désobéissance maçonnique : un ancien, les lois racistes et fascistes de Vichy ; un plus récent, l’objection de conscience, en particulier lors de la guerre d’Algérie et un d’actualité, l’entêtement à faire œuvre de fraternité en portant assistance aux demandeurs d’asile et, plus généralement, aux sans papiers alors que, désormais, l’acte de solidarité peut être constitutif d’un délit et passible de prison.

ü      l’apprenti(e) jure d’être dévoué(e) à sa patrie alors que, c’est bien connu, les anarchistes n’ont pas… de patrie puisqu’ils – elles se disent internationalistes. Là encore, il s’agit d’une grossière erreur, délibérée ou involontaire, par ignorance : les anarchistes ne sont pas des internationalistes mais des… anationalistes et leur patrie est… l’humanité. L’humanité, une et indivisible, sans considération de nationalité et, bien entendu, de race, de sexe, de métier…, dont le dévouement envers laquelle relève d’un patriotisme bien particulier… la fraternité !

Différence de méthode ai-je dit ; une différence d’action dans et sur le monde profane. Mais cette différence disparaît, s’évanouit au franchissement de la porte du temple puisque, ensemble, FF... et SS..., anarchistes ou non, travaillent ensemble en toute liberté, en pleine égalité, en véritable fraternité.

Les chroniques de l’Histoire comme les archives des Obédiences, du moins pour celles qui ne revendiquent pas une… régularité dont, soit dit en passant, on peut s’interroger sur sa conformité avec le principe de Liberté constitutif de la F... M... , du maçon comme celle de l’humain, attestent de ce que, de la seconde moitié du XIXème siècle à la fin de la première moitié du XXème, quasiment TOUS les grands noms de l’Anarchisme et de l’Anarcho-syndicalisme, sont ceux de FF... et de SS.... [J'ai à votre disposition une liste d'autant plus impressionnante qu'elle est loin d'être exhaustive].

A la différence des marxistes-léninistes, des trotskistes, des maoïstes…, les anarchistes n’ont jamais fait dans l’entrisme. Il ne viendra donc à l’idée de personnes que les anarchistes qui sont entrés en maçonnerie l’ont fait par entrisme, pour la phagocyter. Considérant que la F... M... n’est ni un lobby – politique, économique, social…, pour ne pas dire affairiste, voire maffieux -, ni le tremplin d’aspirations personnelles de pouvoir, de renommée, de prestige, d’avantages divers et variés…, personne ne considérera non plus que l’engagement maçonnique des anarchistes obéissait à un intérêt… intéressé. De telles idées seraient d’ailleurs d’autant plus fallacieuses que, souvent, l’engagement anarchiste est la résultante – la conséquence logique, l’achèvement – de l’engagement maçonnique.

Entre eux-elles, les maçon(ne)s s’appellent frères et sœurs ; cela ne gêne aucunement un anarchiste maçon d’appeler ainsi celui-celle qui, dans le monde profane, est juge, policier, patron… car, outre que, se refusant à considérer que la carte fait le territoire et que, à cet instar, l’institution, la fonction, le titre, la classe…et, en somme…. le hasard de la naissance, font – ou défont – l’individu, l’anarchiste, comme le maçon, voit en tout individu ce qui échappe à l’aveuglement ou l’ignorance de certain(e)s : l’humain, c’est-à-dire à la fois l’humanité qu’il partage, malgré leurs différences, même si celles-ci sont, parfois, oppositionnelles, et l’être humain en lequel il se reconnaît fraternellement, en dépit d’éventuelles dissemblances du paraître, et même si cet autre n’est pas véritablement libre, à raison, par exemple, de son aliénation.

Entre eux, et notamment dans leurs actes et propos publics, les anarchistes s’appellent compagnons et compagnonnes. Pour deux raisons essentielles : d’abord, parce que ce terme renvoie au compagnonnage des métiers, manière de s’ancrer dans la tradition ouvrière et d’affirmer son statut de… prolétaire et, ensuite, parce que ce terme, du latin populaire « companio » et du latin classique « cum » et « panis », signifie celui-celle avec le-la-quel-le on partage le pain, c’est-à-dire… la vie. S’agissant de ce second motif, quel plus beau symbole de la fraternité que celui du partage du pain ? quel(le) maçon(ne) ne se retrouve pas dans cette symbolique ? ne peut-on considérer que, d’une certaine manière, pour ne pas dire d’une manière certaine, le terme de compagnon(ne) est la version… profane de celui de frère-sœur, même si, en dehors de la scène publique, les anarchistes n’hésite pas à se donner du frère et de la sœur.

Le partage de la vie… Les anarchistes sont des amant(e)s passionné(e)s de la vie. La vie qu’ils-elles aiment à en mourir quand c’est là le prix à payer pour rester debout, autrement dit libre et donc… humain ou bien encore pour la liberté d’un(e) autre. Les anarchistes aiment la vie avec passion et pourtant leur drapeau est… noir car :

[…] Pourquoi ce drapeau teint en noir ?
Est-ce une religion suprême ?
L’homme libre ne doit avoir
Pour penser nul besoin d’emblème !
- L’anarchiste n’accorde pas
A ce drapeau valeur d’idole,
Tout au plus n’est-ce qu’un symbole,
Mais en lui-même il porte son trépas
Car annonçant la fin des oripeaux
Il périra comme tous les drapeaux.
En Anarchie où régnera la Science,
Pour tout drapeau, l’homme aura sa conscience.

[Extrait du Chant du drapeau noir, Chanson de Louis Loréal (1922)]

ou bien encore :

[…] Les anarchistes
Ils ont un drapeau noir
En berne sur l’Espoir
Et la mélancolie
Pour traîner dans la vie
Des couteaux pour trancher
Le pain de l’Amitié
Et des armes rouillées
Pour ne pas oublier
Qu’y’ en a pas un sur cent et qu’ pourtant ils existent
Et qu’ils se tiennent bien bras dessus bras dessous
Joyeux et c’est pour ça qu’ils sont toujours debout
Les anarchistes
(Extrait de Les Anarchistes, paroles et musique de Léo Ferré, 1966]

Au fait, avez vous remarqué que le fond des bannières maçonniques, malgré la lumière, voire les dorures de leurs décors est quasiment toujours… noir ?

Les médias ont fait des gorges chaudes sur les affaires qui ont impliqué des maçon(ne)s, sachant que les errements de quelques individus n’ont pas manqué d’être utilisés pour armer le bras de la croisade anti-maçonnique, née, comme de bien entendu, avec la F... M... elle-même. Il a existé, il existe et il existera de mauvais(es) maçon(ne)s donc, mais quelle société humaine, quel groupement d’individus peut se targuer d’être exempt de faux-frères et fausses-sœurs ; le mouvement anarchiste, dans sa dimension organisationnelle ou sa forme individualiste, compte aussi de faux compagnons et de fausses compagnonnes ? Cette similitude qui existe en matière d’hiatus entre la déclaration de principe – la revendication de l’identité maçonnique ou anarchique – et les propos tenus et, surtout, les actes posés, n’est-elle pas une passerelle de rapprochement entre les tenant(e)s de l’opposition irréductible entre Anarchisme et F... M... ? Un rapprochement, non de compromis – et encore moins de compromission -, pas même une paix des braves, non, juste le partage d’un questionnement : Pourquoi, depuis l’aube des temps, les plus beaux idéaux et, notamment, ceux s’inscrivant dans la tradition et le mouvement humanistes, invariablement, finissent toujours par être salis par certain(e)s d’entre ceux et celles qui s’en revendiquent ?

Je pourrai continuer longtemps encore cette litanie de ressemblances, frappantes, entre maçon(e)s et anarchistes avant d’aborder le projet maçonnique proprement dit. Le temps nous étant compté, je vais l’arrêter avec une ultime similitude pour pointer, malgré tout, une différence entre l’anarchiste et le-la maçon(ne).

Il existe en effet une différence importante entre l’anarchisme et la Franc-Maçonnerie : un(e) anarchiste peut militer, être anarchiste de façon isolée, sans adhérer à quelque structure que ce soit. Il-elle sera reconnu(e) comme tel(le) dès lors qu’ils professent les valeurs anarchiques essentielles et que son comportement comme son action sont conformes à son engagement et à ses valeurs. En revanche, un(e) maçon(ne) ne peut être véritablement maçon(ne) que pour autant qu’il-elle est membre d’une L... car c’est en ce lieu « sacré », plus que dans le monde profane, qu’il-elle est reconnu(e) comme tel(le) par ses pairs. Serait-ce parce que les anarchistes sont un peu plus individualistes que les maçon(ne)s et/ou que les maçon(ne)s sont un peu plus communistes que les anarchistes ?

 

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Venons-en à présent, V... M... , au projet maçonnique, c’est-à-dire au but que les maçon(ne)s se donnent ou bien encore à l’ »utopie » que la F... M... se propose de réaliser.

Dans le préambule de sa Constitution le G... O... D... B... stipule que : « A l’extérieur du temple, dans la volonté d’assurer la libre expression de la pensée humaine, l’Assemblée du Grand Orient pose comme ultime devoir à l’Obédience l’honneur de sauvegarder toujours, en dépit de toutes les menaces ou contraintes, les aspirations des hommes à la liberté, à l’égalité et à la fraternité » tandis que dans l’article 1er de sa Constitution le G... O... D... F... précise que : « La F M, institution essentiellement philanthropique, philosophique et progressive, a pour objet la recherche de la vérité, l’étude de la morale et la pratique de la solidarité ; elle travaille à l’amélioration matérielle et morale, au perfectionnement intellectuel et social de l’humanité« .

Se référant à la triptyque révolutionnaire de 1789, la F...M..., que les Anglais « orthodoxes » et gardiens de l’ordre… établi – celui de la société bourgeoise, dont ils sont les enfants, autrement dit du… capitalisme – considèrent comme… irrégulières, la F... M... donc appelle ses « adeptes » à travailler, dans le temple et hors du temple, pour l’avènement d’une société de Liberté, d’Égalité et de Fraternité.

Il ne me semble pas que le caractère révolutionnaire d’un projet de changement ou d’un changement résulte du recours à la violence physique (insurrection, coup d’état, lutte armée…) mais, au contraire, de la… radicalité du changement. Ainsi, dans le domaine des connaissances et de la Science, Galilée, Copernic, Einstein, Freud… ont bien causé des révolutions sans pour autant recourir à la force. En politique, l’extension du suffrage universel aux femmes, l’abolition de la peine de mort pour ne prendre que ces exemples peuvent être considérés comme de véritables révolutions qui n’ont pas forcément été accouchées par la violence.

La radicalité d’un changement sociétal, comme, autre exemple, la reconnaissance des Droits de l’Enfant, peut donc résulter du seul fait du… progrès des mœurs, des pensées, des idées, des lois… Une telle voie de changement est usuellement qualifiée de réformisme pour l’opposer à une autre radicalité de changement qui, violente celle-ci, est qualifiée, du moins en politique, de… révolution.

Outre qu’elle ne repose que sur une différence de moyens, c’est-à-dire d’action ou, pour reprendre un terme maçonnique, de… travail et non de finalité, cette distinction occulte le fait qu’un changement radical, même s’il est recherché et obtenu pacifiquement, légalement, légitimement dans l’intérêt général tel qu’il peut s’incarner dans l’ »écrasante majorité » d’une population donnée, est toujours… forcément imposé à des intérêts particuliers – individus, groupements, communautés, classe… – qui ne se retrouvent pas dans le changement radical en question. Pour ces intérêts particuliers, le changement radical n’est pas une réforme mais une révolution, une révolution illégitime, expropriatrice, usurpatrice…

Permettez-moi une citation V... M... : « Le constat face aux injustices sociales, celles que l’on subit personnellement ou celles faites à autrui, provoque notre révolte et l’on se dit qu’on ne peut pas rester sans rien faire devant une telle situation… Mais le seul sentiment de révolte ne veut pas dire grand chose: il est tout relatif. Ce qui vous semblera inacceptable ne le sera pas forcément aux yeux d’un autre. Par soumission, par inconscience ou par idéologie, certains ne voient hélas rien d’abject dans le racisme; ou estiment “normal” d’être soumis aux ordres d’un chef ! En fait, tout dépend de notre vécu, de notre réflexion, de notre éthique, de ce que nous considérons comme possible. Pour notre part, si nous contestons radicalement la société actuelle, c’est parce que nous sommes convaincus qu’une société de liberté, d’égalité et de fraternité est réalisable ».

Cette citation pourrait être extraite du projet de création d’une L. ou d’une planche ou revue maçonnique. En fait, elle est tirée du programme de… l’Union Régionale Rhône-Alpes de la Fédération Anarchiste

D’aucuns, V... M..., ne manqueront pas de dire que le propos de ce texte est trop… ouvert, marqué et pas assez mesuré pour que le-la maçon(ne) lambda puisse s’y retrouver et que, surtout, il fait implicitement appel à la violence comme facteur de changement radical.

Examinons donc un autre texte, celui de la page d’accueil de la F...M... belge, « œuvre » collective du Grand Orient de Belgique (G.O.B.), de la Grande Loge Féminine de Belgique G.L.F.B.), de la Grande Loge de Belgique (G.L.B.) et de la Fédération belge du Droit Humain (D.H.), portail, est-il nécessaire de le souligner, est ouvert au public profane :

 

« Ces quatre Obédiences,

ont décidé d’ouvrir ce site Web afin d’informer le monde profane que la Franc-Maçonnerie adogmatique belge s’inspire des principes suivants :

Ce même texte précise que :

Propos… anodins. Aucunement révolutionnaires. Encore moins anarchistes. Et pourtant !

En effet, est-ce que le projet maçonnique de travailler à l’avènement d’une société de Liberté, d’Égalité et de Fraternité est… réformiste ? que nenni. Bien au contraire, ce projet est… révolutionnaire car n’est-ce pas vouloir faire la Révolution, au sens d’introduire un changement radical, que de vouloir instaurer la Liberté, l’Égalité et la Fraternité dans une société qui, en raison même de sa structuration économique et donc politique n’est ni libre, ni égale, ni fraternelle ? une société qui favorise l’accumulation des richesses de quelques un(e)s aux dépens de la misère d’une majorité sans cesse croissante ? le gain immédiat au prix de la (sur)vie de la planète et donc de l’humanité ? une société, disé-je, qui se construit sur et se nourrit de l’absence de Liberté, d’Égalité et de Fraternité.

En travaillant à l’évènement d’une société de Liberté, d’Égalité et de Fraternité les maçon(ne)s font œuvre d’… utopisme au sens où ils aspirent à la réalisation de leur idéal dans un contexte économique, politique, social, culturel, éthique… qui est l’antithèse de cet idéal.

Ce travail les maçon(ne)s le font dans le secret – que d’aucuns préfèrent qualifier de « simple discrétion » – de leurs loges. Au sens strict de « rassemblement de personnes ayant le projet, concerté et secret, de changer, transformer radicalement un ordre établi », c’est-à-dire une « société policée », les maçon(ne)s sont donc des… comploteurs – euses, terme qui, quelque peu désuet et désormais réservé aux seuls militaires, peut se traduire par… terroristes !

[Au passage, un bref rappel historique : Originellement (1794), le terme de terroriste a un sens particulier : celui d'une personne appliquant la politique de la Terreur pendant la Révolution française, ladite Terreur étant l'"ensemble des mesures d'exception prises par le gouvernement révolutionnaire depuis la chute des Girondins (juin 1793) jusqu'à celle de Robespierre (27 juillet 1794, 9 Thermidor de l'An II) ou, selon le mot de Robespierre "la justice prompte, sévère, inflexible". A l'origine donc, le terrorisme, sous la forme précise de "Terreur" fut sinon légitime, du moins… légal, cela est souvent oublié pour cause, sans doute, d'Alzheimer historique !].

Tout le monde s’accordera à dire que, de nos jours, peu de maçon(ne)s, à la différence de ceux qui, nombreux, au XIXème siècle firent le choix de la Charbonnerie en France, en Belgique, en Italie…, fomentent un complot qualifiable de terroriste pour arriver à leur fin : le changement radical de la société et que la plupart travaillent à ce changement en planchant sur l’étude et la critique de la société mais également en exerçant des… pressions, pas toujours amicales et fraternelles, sur et auprès des parlementaires, des gouvernants, des chefs d’entreprise…

Il existe un autre « art royal » de ce travail maçonnique : la… « propagande par l’exemple, la parole et les écrits » qui, dans le vocabulaire anarchiste peut se traduire par… « l’action directe » ou bien encore par… la propagande par le fait.

La société idéale dont « rêvent » les maçon(ne)s est une utopie comme l’est l’anarchie que les anarchistes attendent au lendemain du « Grand soir ». Ce rêve partagé est souvent payé au prix fort, celui de la répression. Pourtant, il continue d’être fait. Par entêtement ? Non, je ne le pense pas. Ce rêve continue d’être fait, parce que, voyez-vous, V... M... , le choix d’être anarchiste et/ou maçon, n’est pas… anodin : il est celui que font des individus qui, ayant fait le choix de naître à leur humanité, tout simplement, dans leur action quotidienne – leur travail en somme -, leurs faits, leurs propos et leurs gestes s’efforcent de rester humains pour eux-elles mêmes et pour les autres. On ne naît pas maçon ou anarchiste. On le devient par choix. Dans l’un et l’autre cas, ce choix, pour la plupart du temps, est la conséquence d’une… révolte, celle du refus de l’injustice, c’est-à-dire de l’aliénation, l’inégalité, de la bestialité.

[24], vénèreraient comme d’autres vénèrent des… reliques, histoire de s’assurer qu’ils restent bien dans la châsse du passé et que, surtout, ils ne viennent pas perturber le sommeil pantouflant des vivants

Non, « Liberté – Égalité – Fraternité » constituent bel et bien la quintessence d’un programme, celui du projet maçonnique d’une société (enfin) véritablement… humaine.

Ces trois mots peuvent être mis en musique sous un air de phrase et, ainsi, donner :

« La liberté comme base, l’égalité comme moyen, la fraternité comme but« .

Dans ce libellé, quel(le) maçon(ne) ne se reconnaît(ra) pas ? Son auteur n’est portant pas maçon mais… anarchiste. Il s’agit de Ricardo Mella qui, dans « El idéal anarquista », résuma le projet de société de la C.N.T. pour lequel des dizaines de milliers d’anarchistes moururent et sous la bannière duquel se rangèrent de nombreux maçon(ne)s contre la machine de guerre autant franquiste que stalinienne.

Des FF... ne manqueront pas de dire que les maçons, conformément au serment prononcé lors de leur initiation, sont respectueux de la Loi quand les anarchistes ne le sont pas. Mais, V... M..., à ces FF..., je pose la question suivante : de quelle Loi parlez-vous ? quelle Loi respectez-vous ? celle, par exemple, qui issue d’un suffrage démocratiquement majoritaire, instaure l’apartheid, l’état d’exception privatif de libertés individuelles et irrespectueux des droits fondamentaux, le délit de vagabondage pour un sans abri, un sans papier… ou bien celle de votre engagement maçonnique qui vous exhorte à lutter contre l’injustice, soutenir le faible, protéger la victime…, bref vous reconnaître en l’Autre, fût-il hors-la-loi de l’État, et le respecter autant que vous vous respectez ?

Face à un tel dilemme, de quel côté penche le cœur et l’action du maçon: celui, par exemple, de Thiers, boucher des Communard(e)s au nom du maintien de l’ordre et du respect de la Loi ou du F... communard et, peut-être anarchisant, même si cela importe peu de savoir qu’il le fût ou non, Félix Pyat qui proclama :

« Frères, citoyens de la grande partie universelle, fidèles à nos principes communs : Liberté, Égalité, Fraternité, et plus logique que la Ligue des Droits de Paris, vous, Francs-Maçons, vous faites suivre vos paroles de vos actions. Aussi, après avoir affiché votre manifeste – le manifeste du cœur – sur les murailles de Paris, vous allez maintenant planter votre drapeau d’humanité sur les remparts de notre ville assiégée et bombardée. Vous allez protester ainsi contre les balles homicides et les boulets fratricides, au nom du droit et de la paix universelle ».

Dans les différents forums, colloques, manifestations… organisés un peu partout, les anarchistes martèlent leur aspiration à une triple émancipation :

Ainsi, les anarchistes refusent le modèle sociétal, oppresseur et exploiteur, qui est la négation de l’individu et de ses aspirations. Ils cherchent par tous les moyens à montrer qu’il est possible et souhaitable de vivre dans une société libre, égalitaire (et donc égale) et fraternelle, gérée directement et librement par ses diverses composantes : individus, groupements sociaux, économiques, culturels, et ce dans le cadre due l’associationnisme et du fédéralisme libertaires.

Pour arriver à leurs fins, les anarchistes s’interdisent d’user de certains moyens car, comme le disait Errico Malatesta :  » ces moyens ne sont pas arbitraires, ils dérivent nécessairement des fins que l’on se propose et des circonstances dans lesquelles on lutte. En se trompant sur le choix des moyens, on n’atteint pas le but envisagé, mais on s’en éloigne, vers des réalités souvent opposées et qui sont la conséquence naturelle et nécessaire des méthodes que l’on emploie ».

Ne retrouve-t-on pas dans tout cela, même si dit autrement, le projet maçonnique ?

Les maçon(ne)s travaillent à l’avènement d’une société de Liberté, d’Égalité, de Fraternité qu’ils-elles ne… nomment point sauf à la qualifier de (véritablement) humaine et, parfois, d’…utopie, au sens d’idéal, de société idéale à bâtir. Pourtant, V... M... , une société de Liberté, d’Égalité et de Fraternité, si elle est bien (véritablement) humaine, a, d’un point de vue historique, politique, philosophique et éthique, un nom : l’Anarchie.

En effet, sans multiplier à l’infini les définitions de l’Anarchie, j’en prendrai trois tirées de la toile :

Et une dernière de Pierre Kropotkine qui, lors de son procès à Lyon, le 1er janvier 1883, déclara :

Les anarchistes, messieurs, sont des citoyens qui, dans un siècle où l’on prêche partout la liberté des opinions, ont cru de leur devoir de se recommander de la liberté illimitée.(..) Nous voulons la liberté, c’est-à-dire que nous réclamons pour tout être humain le droit et le moyen de faire tout ce qui lui plaît, et de ne faire que ce qui lui plaît; de satisfaire intégralement tous ses besoins, sans autre limite que les impossibilités naturelles et les besoins de ses voisins également respectables.

Nous voulons la liberté et nous croyons son existence incompatible avec l’existence d’un pouvoir quelconque, quelles que soient son origine et sa forme, qu’il soit élu ou imposé, monarchiste ou républicain (…)

Le mal, en d’autres termes, aux yeux des anarchistes, ne réside pas dans telle forme de gouvernement plutôt que dans telle autre. Il est dans l’idée gouvernementale elle-même, il est dans le principe d’autorité.

La substitution, en un mot, dans les rapports humains, du libre contrat, perpétuellement révisable et résoluble, à la tutelle administrative et légale, à la discipline imposée, tel est notre idéal. Les anarchistes se proposent donc d’apprendre au peuple à se passer de gouvernement comme il commence à apprendre à se passer de Dieu.

Il apprendra également à se passer de propriétaires. Le pire des tyrans, en effet, n’est pas celui qui vous embastille, c’est celui qui vous affame. (..)

Pas de liberté sans égalité ! Pas de liberté dans une société où le capital est monopolisé par les mains d’une minorité qui va se réduisant tous les jours et où rien n’est également réparti, pas même l’éducation publique, payée par les deniers de tous.

Nous croyons, nous, que le capital, patrimoine commun de l’humanité puisqu’il est le fruit de la collaboration des générations passées (…) doit être à la disposition de tous (…)

Nous voulons. en un mot, l’égalité : l’égalité de fait, comme corollaire ou plutôt comme condition primordiale de la liberté de chacun selon ses facultés, à chacun selon ses besoins,- voilà ce que nous voulons sincèrement ».

Toutes ces définitions de l’anarchie, V... M... , ne sont-elles pas la traduction… politique du projet philosophique et éthique de la société idéale des maçon(ne)s ? Autrement dit, l’anarchie ne serait-elle pas le décryptage profane du symbolisme maçonnique de la triptyque, révolutionnaire en 1789, rappelons-le, de « Liberté – Égalité – Fraternité ».

En somme, V... M..., n’y a-t-il pas meilleure définition de l’anarchisme et de la F... M... que celle d’une utopie d’action et en action qui travaille à la construction d’un temple que d’aucuns se (com)plaisent à démolir sans cesse, le temple de l’humanité, parce que les anarchistes comme les maçon(ne)s ont pour précepte : « La liberté comme base, l’égalité comme moyen et la fraternité comme but ».

Ordo ab chaos – transformer le chaos en ordre, extraire l’ordre du chaos-, est-ce que cette devise maçonnique n’est pas la réplique (« sismique » ?) de ce mot de notre F\ Élisée Reclus « l’anarchie est la plus haute idée de l’ordre », mot que je me plais, en souvenir de notre S... Louise Michel, de compléter par « car elle est l’ordre sans le pouvoir » ?

 

*

* *

 

Comme je l’ai dit en préalable, V... M... , mon propos de ce midi n’aura pas été de démontrer quoi que ce soit et, encore moins, d’asséner quelque vérité que ce soit. Bien qu’impertinent et, pour certains, irrévérencieux, provocateur, voire même choquant, offusquant, outrageant, il aura été, plus humblement, de montrer que l’indéniable relation historique qu’il y a entre la F... M... et l’anarchisme et la non moins indéniable histoire d’amour passionné qui unit ces deux voies de l’humanisme peuvent être examinés en toute liberté de conscience et, ce faisant, qu’un chantier de travail, autant maçonnique qu’anarchique, peut et même doit être ouvert.

Et, pour étayer ma modeste invite, permettez-moi, V... M... , de faire appel à notre très illustre et non moins anarchiste F... Léo Campion :

« Aussi est-il regrettable que des anarchistes sectaires excommunient la Franc-Maçonnerie au nom d’un pseudo-dogme de l’Anarchie (comme si l’Anarchie était anti-tout alors quelles est à-tout) et que les Maçons sous-évolués excommunient l’Anarchie au nom d’un pseudo-dogme de la Maçonnerie (comme si la Maçonnerie n’était que tradition, alors qu’elle est tradition, dialogue et progrès). Ces attitudes sont d’autant moins admissibles qu’au contraire l’Anarchie comme la Franc-Maçonnerie, anti-dogmatiques par essence, sont l’une comme l’autre tout le contraire d’un dogme. Elles qui ont en commun le culte de la Liberté et le sens de la Fraternité, avec comme but l’émancipation de l’Homme ».

J’ai dit V... M...

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Additif

Petites réflexions personnelles sur une lecture comparée

des Constitutions du G...O...D...F... et du G...O...D...B...

 

 

Je note que, dans l’article 1er de sa constitution, le G...O...D...B... se dit Obéd...… masculine, ce qui justifie non l’exclusion des femmes mais la « réservation exclusive » de l’Obéd... aux hommes. Ce n’est pas seulement une nuance. C’est une disposition qui, d’un point de vue juridique, ne tombe pas sous le coup de la Loi et, notamment, de celle sanctionnant la ségrégation à raison du sexe.

En effet, les diverses dispositions législatives et réglementaires qui instituent le délit de « ségrégation » sous toutes ses formes (racisme, sexisme, sexualisme…) condamnent l’exclusion d’un individu à raison de sa « particularité » mais n’interdisent pas la constitution d’une association (d’une « communauté ») à raison d’une… particularité.

Jésuitisme peut-on penser. Certes. Mais cette différence met le G...O...D...B... dans une position plus facile que le G...O...D...F... à l’égard des femmes dans la mesure où ce dernier, ne se revendiquant pas Obéd...… masculine n’a aucun motif statutaire à opposer à l’initiation de femmes et tombe donc sous le coup de la ségrégation à raison du sexe !

Par ailleurs, le G...O...D...B..., dans l’article 1er de sa Constitution, se qualifie d’initiatique et progressive ET de cosmopolite et progressiste.

Le G...O...D...F..., dans l’article 1er de sa Constitution, se qualifie d’institution philanthropique, philosophique et progressive.

Le lien que le G...O...D...B... fait entre les caractères initiatique et progressif est cohérent en ce que ces deux « traits » caractérisent bien une institution initiatique qui ne se contente pas d’initier (d’accueillir) des profanes mais qui, l’initiation effectuée, offre un parcours, un chemin, un… perfectionnement. Dans ce cas, le terme « progressif » (du latin « progressus », 1372) est pris dans son acception propre « qui porte à avancer, à mouvoir » (exemple : une faculté progressive), qui s’accroît, se développe, progresse, qui suit une progression, un mouvement par degrés, qui s’effectue d’une manière régulière, constante et graduelle et, accessoirement, qui participe du progrès.

Au rit français, lors de l’ouverture des travaux le F... Orat..., en commentant l’article 1er de la Constitution du G... O... D... F..., indique que ce terme de (institution) « progressive est pris dans son sens propre de « qui ne se confine pas dans le passé ». Cette acception, si elle est correcte, selon notre F... Littré, ne prend en compte que la notion de mouvement, d’avancement (et d’avancée) mais pas nécessairement de… progression, de graduation.

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Fraternité Libertaire 3 janvier, 2009

Posté par hiram3330 dans : Bleu,Chaine d'union,Contribution,Recherches & Reflexions , 1 commentaire

Fraternité Libertaire

 

Maçon et Libertaire ?

Vaste sujet car traité maintes fois. Alors que pourrai-je apporter de plus? Bien sûr je pourrai remonter aux sources, relire les bons auteurs (comme on dit). Mais ils sont si nombreux. Lequel prendre et auquel adhérer sans me mettre en danger, risquer que ma pensée adopte une ligne de conduite toute faite ?

Pourquoi tel ou tel théoricien de la pensée libertaire serait-il le meilleur et digne de devenir un guide pour celui qui pense être de cette sensibilité ? Suivre un guide sans le soumettre à son esprit critique n’est-ce pas déjà accepter de ne plus être SOI?

Il me semble qu’être libertaire est le résultat d’une ascèse intellectuelle tournée vers le SOI tout en étant disponible pour l’AUTRE ; non pas l’ÉTRANGER, mais le SEMBLABLE. C’est se construire, faire de soi un HOMME, LIBRE dans ses pensées et ses actes.

C’est aussi être TOLÉRANT. Attitude positive vers tout ce qui aide et installe une reconnaissance de l’HOMME RESPONSABLE de ses actes.

Mon parcours professionnel m’avait déjà amené à pratiquer des formes d’actions peu courantes qui m’avaient mis parfois en porte-à-faux par rapport à mon Institution. La base des désaccords portait le plus souvent sur un non respect de règles. Règles ne me permettant pas d’œuvrer au mieux de ceux qui attendaient une réponse du système en place.

C’est ainsi que j’ai installé dans mes lieux d’affectation, la transparence des décisions, des orientations et des « comptes » et pratiqué la co-gestion, voir l’auto-gestion. Ne pouvant changer à moi seul un système, j’ai préféré agir en montrant que certaines formes d’actions pouvaient tout à fait venir battre en brèche l’existant et soi-disant impensable à changer. J’ai parfois été raillé mais aussi suivi et les réalisations de nouvelles formes pédagogiques centrées sur l’individu ont bel et bien vu le jour. De même dans la gestion des équipes administratives qui très vite ont été responsabilisées et libres de décisions dès lors que celles-ci allaient dans l’intérêt de l’INDIVIDU.

J’ai rejoins la Franc-maçonnerie par idéal HUMANISTE, parce que le besoin se faisait sentir d’approfondir une réflexion sur ce que j’étais. Je voulais confronter mes « utopies », acquérir une méthode progressive permettant de dégager l’HOMME de sa gangue.

Aujourd’hui j’entrevois quelques réponses mais elles demandent encore à être soumises à critique. Je ne suis pas gêné dans mes pensées car comme le disait Léo Campion « la vocation libertaire de la Maçonnerie est indéniable (…) elle est la seule association à laquelle puisse adhérer celui qui n’adhère à rien ». Je prends bien sur « adhère à rien » dans le sens où une adhésion serait un renoncement à des idées personnelles par rapport à des dogmes, quels qu’ils soient.
Je trouve dans ma Loge une vraie Fraternité. Mes voyages me font connaître des Frères d’autres obédiences … et certains par leur comportement et leurs idées m’ont amené à une réflexion plus pointue sur les miennes. Ainsi être de sensibilité libertaire et être Franc-maçon ne serait pas incompatible ?

J’ai entrepris d’observer ma Loge pour voir si ses modes de fonctionnement cadraient avec ce que je mettais dans un comportement libertaire.

«Un maçon libre dans une loge libre». Je reconnais que cela se pratique dans ma Loge. Tout est fait pour que la liberté de chacun soit respectée et que le foisonnement des différences n’entraîne pas – comme on pourrait s’y attendre – le chaos. Chacun s’exprime très naturellement quel que soit le sujet. La parole est forte et entendue car chaque Frère est considéré comme responsable.

Étudions comment se passent la plupart des réunions-débats, des prises de paroles, des discussions de groupe. Souvent ce ne sont qu’attitudes convenues, interruptions, monopole de la parole, … autant d’outils qui entretiennent les dominations. En Loge, pas de cela. Nous nous sommes donné des règles pour débattre, pour favoriser l’écoute, la prise en compte des diverses opinions… Les dialogues sont exclus, la parole demandée est adressée à tous les membres présents. La parole s’autorégule. Elle n’en a donc que plus de valeur et de poids. On ne la conteste pas, on l’enrichit par des nouveaux apports, la critique est toujours positive. A chacun de suivre une démarche personnelle pour prendre en compte les multiples facettes d’un problème et se forger une ligne d’action. Cette ligne, résultat d’un apport collectif, ne peut qu’être un liant et en aucun cas une « Vérité révélée » à accepter comme telle.

De là découle cette nouvelle vision : ce n’est pas parce que les hommes sont égaux qu’ils ont les mêmes droits, c’est parce qu’ils ont les mêmes droits qu’ils sont égaux. Chacun devient responsable et contribue à la base de sa dignité. C’est pour cela que les Maçons cultivent l’amour fraternel, valeur universelle qui interdit la négation de l’autre, son exploitation et fait indiscutablement partie de la construction du Temple. Chacun de nous est donc à la fois responsable et tributaire de cette équité, base de notre dignité. L’équité entre Frères vise le «juste». Elle impose un travail intérieur, une recherche de l’absolu et une soif de justice.

Les règles de notre rituel apportent à notre formule «Liberté, Égalité, Fraternité» une force encore plus grande car ces mots deviennent des facteurs nécessaires et favorables au progrès humain et j’adhère aux paroles de René Valfort: « Un milieu comme la Franc-maçonnerie, dont les principes fondamentaux sont : la tolérance, la fraternité, la liberté de pensée, le respect de la personne humaine, dont l’objet principal est l’éducation des individus et la formation d’une élite, ne peut pas être inutile au progrès de l’Humanité. Et de cela les anarchistes, moins que quiconque, ne doivent douter, vu l’importance qu’ils attachent à l’éducation ».

C’est pourquoi je ne vois pas d’incompatibilité entre Franc-maçonnerie et attitude libertaire. Les deux sensibilités concourent au même but. Certes leurs formes d’actions sont différentes mais les idées sont les mêmes et la phrase « un maçon libre dans une loge libre » prend tout son sens : aucun dogme, aucun système d’autorité ne peut asservir l’Homme. Comment l’un et l’autre, le Maçon et le Libertaire, frères en Humanité ne pourraient-ils pas s’asseoir et œuvrer ensemble au sein d’une Loge. Pour eux le dénominateur commun est l’Homme.

Prenons encore les fonctions occupées au sein d’une Loge. Tous les ans il y a élection des Officiers. L’un d’entre eux est Le Vénérable Maître, qui en fait n’est que l’administrateur de la Loge. Ils ne sont donc « élus », « reconnus » par les Frères que pour un an.

Ces officiers ne sont pas des « gouvernants », des « mandataires », des « représentants » mais des pairs qui, conformément au mandat impératif, révocable et « tournant » qui les a désignés doivent rendre compte, ont la charge de tenir certains offices, et exécuter certaines « missions » dans l’intérêt de la Loge.

Leurs charges ne sont attribuées que pour favoriser un harmonieux travail de l’Atelier et leur actes « d’autorité » ne sont en fait que le respect des règles fixées en commun. A l’issue d’une charge chacun retourne sur les colonnes.

Si on lit le Règlement de l’Obédience on y voit tout un « système » pourvu de tous les attributs habituellement image de pouvoir ou au sens large d’autorité. Mais il y a une très grande différence : tout Maçon peut s’il le veut, quitter, librement, sa Loge. Même dans ce cas extrême il y a respect de son acte.

On est bien là dans une affirmation qui s’inscrit dans l’Humanisme, lequel est né avec la premier humain ayant pris conscience de ce qu’on pouvait naître à son humanité si on en faisait librement le choix. Choix de s’engager mais aussi de se désengager. L’engagement maçonnique est scellé par la Liberté : la liberté du choix de l’individu d’abord, puis Liberté ensuite, avec un grand « L », constitutive d’une condition humaine.

De plus, regardons nos rituels. Ils ont évolué au cours des siècles. Mais une Loge peut aussi se donner un rituel. Toutes les règles élaborées pour servir les besoins humains doivent être par nature adaptées aux circonstances et ne doivent jamais pouvoir « s’institutionnaliser ».

C’est pour cela que je me sens bien en Maçonnerie. Si mes aspirations libertaires sont, comme je le crois, installées et vécues elles ne gênent en rien mon engagement et à la pensée de Léo Campion j’ajouterai encore celle-ci: « Tu dis que tu as choisi une idée parce qu’elle est bonne, sache qu’en réalité tu dis qu’elle est bonne parce que tu l’as choisie. » afin d’être toujours en veille

Enfin, pour terminer une définition que j’adopte volontiers : « L’Anarchisme est la passion de la Liberté mise en théories. Et aussi en pratique lorsque faire se peut ». (Dictionnaire Universel de la Franc-maçonnerie).

Jean Rich:.

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